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doit le préparer à l'étude de toutes les autres, c'est la métaphysique. Elle est aujourd'hi si négligée en France que ceci paroîtra sans doute un paradoxe à bien des lecteurs. Il faut distinguer deux sortes de métaphysique. L'une ambitieuse veut percer tous les mystères;.... l'autre plus retenue proportionne ses recherches à la foiblesse de l'esprit humain et.... sait se contenir dans les bornes qui lui sont marquées. La première fait de toute la nature une espèce d'enchantement qui se dissipe comme elle, la seconde ne cherchant à voir les choses que comme elles sont en effet, est aussi simple que la vérité même. Les philosophes se sont particulièrement exercés sur la première. .... Locke est le seul que je crois devoir excepter.... Essai sur l'origine des conn, hum. p. 1. 2. 3. On peut remarquer dans les ouvrages des philosophes trois sortes de principes, d'où se forment trois sortes de systêmes. Les principes que je mets dans la première classe, comme les plus à la mode, sont des maximes générales ou abstraites. Les notions abstraites sont absolument nécessaires pour mettre de l'ordre dans nos noissances, parce qu'elles marquent à chaque idée sa classe. Voilà uniquement quel en doit être l'usage. Les principes abstraits, même lorsqu'ils sont vrais et bien déterminés, ne sont pas proprement des principes, puisque ce ne sont pas des connoissances premières: la seule dénomination d'abstraits fait juger que ce sont des connoissances qui en supposent d'autres. Ce sont des maximes qui ne renferment que ce que nous savons, et comme le peuple a des proverbes, ces prétendus principes sont les proverbes des philosophes, ils ne sont que cela. Traité des systêmes p. 1. 6. 327. Les principes de la seconde espèce sont des suppositions qu'on imagine pour expliquer les choses dont on ne saurait d'ailleurs rendre raison. On ne doit pas interdire l'usage des hypothèses aux esprits assez vifs pour devancer quelquefois l'expérience. Mais on

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doit les inviter à apporter toutes les précautions nécessaires, et à ne jamais se prévenir pour les suppositions qu'ils ont faites. Si les suppositions ne paroissent pas impossibles, et si elles fournissent quelque explication des phénomènes connus, les philosophes ne doutent pas qu'ils n'aient découvert les vrais ressorts de la nature. On ne doute pas que des suppositions d'abord arbitraires, ne deviennent incontestables par l'adresse avec laquelle on les a employées. Ibid. p. 3. 357. 4. Des faits constatés, voilà Ce proprement les seuls principes des sciences. fait sera le principe du systême, parce qu'il en sera le commencement. Ibid. p. 8. p. 371. Mon dessein est de rappeler à un seul principe tout ce qui concerne l'entendement humain,... ce principe ne sera ni une proposition vague, ni une maxime abstraite, ni une supposition gratuite, mais une expérience constante, dont toutes les conséquences seront confirmées par des nouvelles expériences. Essai sur l'or. etc. p. 9.

2. Le principal objet de cet ouvrage est de faire voir comment toutes nos connoissances et toutes nos facultés viennent des sens, ou pour parler plus exactement des sensations, car dans le vrai les sens ne sont que cause occasionelle. Ils ne sentent pas, c'est l'ame seule qui sent à l'occasion des organes. Traité des sens. Extrait raisonné p. 3. Je ne sais pas comment Locke a pu avancer qu'il nous sera peut-être éternellement possible de connaître si Dieu n'a point donné à quelque amas de matière.... la puissance de penser. Il ne faut pas s'imaginer que pour résoudre cette question il faille connoître l'essence et la nature de la matière. Essai s. l'or. etc. p. 22. Si je vous demande pourquoi le corps est étendue, et pourquoi l'ame sent? plus y vous réfléchiriez et plus vous verrez que vous n'avez rien à répondre. Vous ignorez donc l'essence véritable de ces deux substances. Cependant vous considerez que toutes les qualités que vous voyez dans le corps

supposent l'étendue, et que toutes celles, que vous appercevez dans l'ame supposent la faculté de sentir. Vous pouvez donc regarder l'étendue comme l'essence seconde du corps et la faculté de sentir comme l'essence seconde de l'ame. De l'art de raisonner p. 40. Il suffit de remarquer que le sujet de la pensée doit être un. Or un amas de matière n'est pas un, c'est une multitude. (L'étendue et la sensation sont deux propriétés incompatibles. Grammaire. Précis des leçons prélim. CXIII.) - L'ame étant distincte et différente du corps, celui-ci ne peut être que cause occasionelle. L'ame peut donc absolument sans le secours des sens acquérir des connoissances. Avant le péché.... elle avoit des idées antérieures à l'usage des sens. Mais les choses ont bien changé par sa désobéissance. Dieu lui a ôté tout cet empire. C'est cet état de l'ame què je me propose d'étudier, le seul qui puisse être l'objet de la philosophie, puisque c'est le seul que l'expérience fait connoître. Essai etc. p. 22. 23. 24.Locke distingue deux sources de nos idées, les sens et la réflexion. Il seroit plus exact de n'en reconnoître qu'une, soit parce que la réflexion n'est dans son principe que la sensation même, soit parce qu'elle est moins la source des idées, que le canal par lequel elles découlent des sens. Cette inexactitude, quelque légère qu'elle paroisse, répand beaucoup d'obscurité dans son systême. Aussi ce philosophe se contente-t-il de reconnoître que l'ame aperçoit, pense, doute etc.,.... que nous sommes convaincus de l'existence de ces opérations....; il paroît les avoir regardées comme quelque chose d'inné, et il dit seulement qu'elles se perfectionnent par l'exercice. Tr. des sens. Extr. rais. p. 13. 14.

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3. Le mot idée exprime une chose que personne, j'ose le dire, n'a encore bien expliquée. C'est pourquoi on dispute sur leur origine. Une sensation n'est point encore une idée tant qu'on ne la considère que comme un sentiment, qui se borne à modifier Beilagen.

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l'ame. Si j'éprouve actuellement de la douleur, je ne dirai pas que j'ai l'idée de la douleur, je dirai que je la sens. Mais si je me rapelle une douleur que j'ai eue, le souvenir et l'idée sont alors une même chose, et si je dis que je me fais l'idée d'une douleur dont on me parle, et que je n'ai jamais ressentie, c'est que j'en juge d'après une douleur que j'ai éprouvée ou d'après une douleur que je souffre actuellement. Ibid. p. 40. 41. Les sensations considérées comme représentant les corps, se nomment idées, mot qui dans son original n'a signifié que ce que nous entendons par image. Grammaire p. LXVIII. Le seul moyen d'acquérir des connoissances, c'est de remonter à l'origine de nos idées, d'en suivre la génération et de les comparer_sous tous les rapports possibles, ce que j'appelle analyser. Essai etc. p. 111.

4. Nous imaginâmes une statue organisée intérieurement comme nous, et animée d'un esprit privé de toute espèce d'idée. Nous supposâmes encore que l'éxtérieur tout de marbre ne lui permettoit l'usage d'aucun de ses sens, et nous nous réservâmes la liberté de les ouvrir à notre choix aux différentes impressions dont ils sont susceptibles. Nous crûmes devoir commencer par l'odorat, parce que c'est de tous les sens celui qui paroît contribuer le moins aux connoissances de l'esprit humain. Avec les sensations de l'odorat, de l'ouïe, du goût et de la vue, l'homme se croiroit odeur, son, saveur, couleur, et ne prendroit aucune connoissance des ob

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jets extérieurs. Les odeurs ne sont que ses propres modifications ou manières d'être. Tr. d. sens. p. 50. 29. 57. La perception ou l'impression occasionnée dans l'ame par l'action des sens est la première opération de l'entendement. Ce sentiment... qui l'avertit du moins d'une partie de ce qui se passe en elle, je l'appelerai conscience. Ainsi la perception et la conscience ne sont qu une même opération sous deux noms. Entre plusieurs per

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ceptions dont nous avons en même temps conscience, il nous arrive souvent d'avoir plus conscience des unes que des autres.... cette opération s'appelle attention. Essai de l'or. etc. p. 38, 50. 42. A la première odeur la capacité de notre statue est tout entière à l'impression qui se fait sur son organe. Voilà ce que j'appelle attention. L'attention qu'elle a donnée à l'odeur la retient, et il en reste une impression, plus ou moins forte, suivant que l'attention a été elle-même plus ou moins vive. Voilà la mémoire. Les sensations actuelles de l'ouïe, du goût, de la vue et de l'odorat ne sont que des sentimens.... parce que l'ame ne peut les prendre que pour des modifications d'elle-même. Mais si ces sentimens n'existent que dans la mémoire qui les rappelle, ils deviennent des idées. Tr. des sens. p. 58. 61. 40. Lorsque notre statue est une nouvelle odeur, elle a donc encore présente celle qu'elle a été le moment précédent. Sa capacité de sentir se partage entre la mémoire et l'odorat. Or les ma nières d'être ne peuvent se partager la capacité de sentir qu'elles ne se comparent, car comparer n'est autre chose que donner en même temps son attention à deux idées. Dès qu'il y a comparaison, il y a jugement. Un jugement n'est que la perception d'un rapport entre deux idées que l'on compare. Ibid. 61. 65, 66. La mémoire est une suite d'idées, qui forment une espèce de chaîne. C'est cette liaison qui fournit les moyens de passer d'une idée à une A la seconde sensation la mémoire de notre statue n'a pas de choix à faire, elle ne peut rappeler que la première. Mais lorsqu'il y a eu une suite de modifications, la statue conservant le souvenir d'un grand nombre, sera portée à se retracer préférablement celles qui peuvent davantage contribuer à son bonheur, elle passera rapidement sur les autres, ou ne s'y arrêtera que malgré elle. Ibid. 68. 69. Il y a dans l'action de cette faculté Elle con deux degrés que nous pouvons fixer.

autre.

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