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aux Almohades la ville de Ouarglan et les bourgades du Righ. Ayant fait disparaître, pour toujours, l'autorité que le gouvernement hafside exerçait dans ces contrées, ils se partagèrent les fruits de leurs conquêtes et tournèrent ensuite leurs armes contre le Zab. Cette province avait alors pour gouverneur un grand officier de l'empire almohade, nommé Abou-Saîd-Othman-IbnMohammed-Ibn-Othman, surnommé Ibn-Ottou. A la nouvelle de leur approche, ce chef réunit un corps d'armée à Maggara, ville où il faisait sa résidence, et marcha vers le Zab, afin de leur livrer bataille; mais en arrivant à Cataoua, il fut attaqué et tué par l'ennemi. Les Douaouida prirent alors possession du Zab entier, et ils le gardent jusqu'à ce jour. Ayant ensuite subjugué les tribus de l'Auras, ils entrèrent dans le Tell. Tous les membres de la tribu d'Açaker qui se trouvaient dans cette région, accoururent sous le drapeau de leur chef, Mouça-Ibn-Madi-Ibn-Mehdi-Ibn-Açaker, et soutenus par leurs confédérés de la tribu d'Eïad et par leurs autres alliés, ils marchèrent à la rencontre des envahisseurs. Dans le combat qui s'ensuivit, leur chef Mouça-Ibn-Madi reçut un coup mortel, et les Aulad-Masoud [Douaouida] remportèrent une victoire qui les rendit maîtres de ce territoire et de tout ce qu'il renfermait.

Le gouvernement [hafside] essaya de réparer cet échec en s'attachant les vainqueurs par des bienfaits; aussi, il leur concéda non-seulement fa jouissance de toutes leurs conquêtes dans le Zab et le Mont-Auras, mais aussi la possession de Nigaous, de Maggara et d'El-Mecîla, villes situées dans la plaine qui s'étend à l'occident de l'Auras, et que l'on nomme chez eux le Hodna. La ville de Mecîla devint le domaine particulier de Sebà-Ibn-Chibl, et ayant passé ensuite entre les mains d'Ali-Ibn-Seba-Ibn-Yahya, elle constitue encore l'apanage de ses descendants. Ahmed-IbnOmar-Ibn-Mohammed, oncle de Chibl-Ibn-Mouça, père de Sebâ, occupa Maggara à titre de concession, et les Aulad-Açaker reçurent pour leur part la ville de Nigaous.

Quelques temps après ces événements, Chibl étant venu à mourir, son fils Othman, surnommé El-Aker, prit le commandement de la tribu; mais ses cousins, Ali-Ibn-Ahmed-Ibn-Omar

Ibn-Mohammed-Ibn-Masoud et Soleiman-Ibn-Ali-Ibn-Sebà-IbnYahya-Ibn-Doreid-Ibn-Masoud, cherchèrent à le lui enlever. A cette occasion, la famille Masoud, si bien unie jusqu'alors, se partagea en deux partis dont l'un se composa des Aulad-Mohammed-Ibn-Masoud, et l'autre des Aulad-Sebâ-Ibn-Yahya; et elle est resté divisée jusqu'à nos jours.

Ce peuple domine à présent sur les plaines de Bougie et de Constantine, et traite en maître les Sedouîkich, les Eïad et les autres tribus qui habitent ces contrées.

Le commandement des Aulad-Mohammed appartient aujourd'hui à Yacoub-Ibn-Ali-Ibn-Ahmed. Par sa naissance et par son âge, cet homme occupe, chez les Douaouida, le rang de chef suprême, et depuis longtemps il jouit d'une haute considération, tant à cause de son mérite personnel que de la faveur toute particulière dont le sultan se plaît à l'honorer.

Chez les Aulad-Sebâ, deux familles se partagent le commandement les Aulad-Ali-Ibn-Sebâ et les Aulad-Othman-Ibn-Sebâ. L'autorité des premiers est toutefois plus grande que celle de leurs collatéraux, les Aulad-Othman, parce qu'ils ont le double avantage du nombre et du droit d'aînesse. Ce sont les fils de Youçof-Ibn-Soleiman-Ibn-Ali-Ibn-Sebâ qui commandent actuellement; ils ont pour lieutenants les fils de Yahya-Ibn-Ali-Ibn-Sebâ.

Les Aulad-Mohammed occupent à eux seuls les territoires qui forment la province de Constantine; ayanť obtenu du gouvernement hafside une grande partie de la région qui sépare cette ville de la mer.

Les Aulad-Sebâ possèdent les alentours de Bougie, mais cet apanage n'a pour eux qu'une légère importance. En effet, ils n'ont rien à y gagner; la ville et les campagnes environnantes étant parfaitement garanties contre l'envahissement et les vexations des Arabes, tant par les montagnes dont elles sont entourées que par des chemins tellement difficiles que les chameaux des nomades ne sauraient y passer.

Les pays du Righ et de Ouarghla sont restés en la possession de diverses branches de cette tribu depuis que leurs aïeux sc l'étaient partagé.

Le Zab occidental, dont la capitale est Tolga, appartient aux Aulad-Mohammed et aux Aulad-Seba-Ibn Yahya. Abou-BekrIbn-Masoud avait d'abord possédé ce pays, mais sa famille étant tombée dans un grand affaiblissement, fut réduite à le vendre. Ce furent Ali-Ibn-Ahmed, chef des Aulad-Mohammed, et Soleiman-Ibn-Ali, chef des Aulad-Sebâ, qui s'en rendirent les acquéreurs. Dès lors les Aulad-Mohammed et les Aulad-Seba se livraient à des hostilités incessantes jusqu'à ce que ceux-ci, ayant obtenu possession des pâturages de cette région, y firent respecter l'autorité de Soleiman et de ses fils.

Le Zab central, dont la capitale est Biskera, échut aux AuladMohammed et devint un de leurs lieux de parcours. Pour cette raison, Yacoub-Ibn-Ali exerçait un grand ascendant sur le gouverneur de cette province, et celui-ci recherchait l'appui du chef arabe toutes les fois qu'il voulait résister aux ordres du gouvernement hafside, ou se rendre indépendant, ou protéger ses campagnes contre les brigandages des Arabes nomades.

Le Zab oriental, dont les métropoles sont Badis et Tennouma, appartient aux Aulad-Nabet, chefs de la tribu de Kerfa; c'est un de leurs terrains de parcours où les Rîah n'entrent jamais, excepté quand le gouverneur du Zab veut se faire payer les impôts arriérés; alors il prend avec lui un corps de nomades rîahides, qui marche avec l'autorisation et sous la conduite de leur chef Yacoub [Ibn-Ali-Ibn-Ahmed].

Toutes les branches de la grande tribu de Riah reconnaissent l'autorité des Douaouida: c'est d'eux qu'elles tiennent leurs terres, et c'est à eux qu'elles s'adressent quand il s'agit d'en obtenir davantage; car elles ne possèdent en propre aucune partie du pays. De toutes ces tribus, les plus puissantes et les plus nombreuses sont les Said, les Moslem et les Akhder. Elles visitent régulièrement les pâturages situés au fond du Désert, et quand les Douaouida se livrent à des querelles intestines, elles ne manquent jamais d'y prendre part. En ces occasions, les Said font presque toujours cause commune avec leurs confédérés, les Aulad-Mohammed, pendant que les Moşlem et les Akhder se rangent ordinairement du côté des Aulad-Sebâ.

Le droit de commander aux Said appartient à une de leurs familles appelée les Aulad -Youçof-Ibn-Zeid. Le chef qui l'exerce actuellement est fils de Meimoun-Ibn-Yacoub - Ibn - Arîf – IbnYacoub-Ibn-Youçof. La famille qui tient chez eux le commandement en second, s'appelle les Aulad-Eïça-Ibn-Rahab-Ibn-Youçof: elle prétend descendre des Aulad-el-Cos, branche des Halim, une des subdivisions des Beni-Soleim; mais ses rapports de voisinage et d'amitié avec les Riah prouvent d'une manière certaine qu'elle appartient à cette dernière tribu.

On rencontre parmi les Aulad-Youçof un mélange d'autres peuplades arabes que l'on désigne par les noms des Mekhadma, des Ghoïouth et des Bohour. Les deux premières descendent de Makhdem, fils de Mochrec-Ibn-el-Athbedj. Les Bohour comptent parmi eux quelques Berbères de la tribu de Zenara et d'autres branches de la tribu de Louata, ainsi qu'une fraction des Nefath, tribu djodamienne. De ceux-ci et des Zenara nous parlerons dans un autre chapitre de cet ouvrage. Disons seulement qu'il se trouve un nombre considérable de Zenara parmi les BeniDjaber de Tedla, et qu'un membre de cette tribu, le nommé Soltan-ez-Zenari, passa en Espagne après l'avènement des Benil'Ahmer [souverains de Grenade], et s'y distingua par sa bravoure dans la guerre sainte. On en rencontre encore beaucoup dans l'Egypte et dans le Saïd (la Haute-Égypte).

Au nombre des confédérés des Aulad-Mohammed, branche des Douaouida, on compte les Rîah-Ibn-Souat-Ibn-Amer-Ibn-Sâsâ; tribu qui était venue se fondre dans celle de Riah. S'étant attachée à ce peuple comme confédérée et alliée, elle l'accompagne dans toutes les courses que le besoin de nouveaux pâturages rend nécessaires.

Les Aulad-Sebâ ont pour confédérés les Moslem et les Akhder. Nous avons déjà dit que Moslem était fils d'Ocaïl-Ibn-Mirdas-IbnRiah. Ce Mirdas était frère de Haouaz-Ibn-Riah. Quelques-uns d'entre les Moslem prétendent que leur ancêtre tirait son origine d'Ez-Zobeir-Ibn-el-Auwam. Cette opinion est fausse, et les

1 Er-Zobeir-Ibn-el-Auwam, membre de la tribu de Coreich, fut un

personnes qui la repoussent déclarent que Moslem descendait d'ez-Zobeir de la tribu de Mehaïa, laquelle, comme nous l'avons déjà dit, est une branche de celle des Eïad. Les Moslem reconnaissent pour chefs les Aulad-Djemaa, famille dont l'aïeul, Djemâa, était fils de Salem-Ibn-Hammad-Ibn-Moslem. Le commandement est maintenant exercé chez eux, soit par les Chokr-Ibn-HamedIbn-Keslan-Ibn-Ghaïth-Ibn-Rahhal-Ibn-Djemâa, soit par les Zorara-Ibn-Mouça-Ibn-Kitran-Ibn-Djemâa.

Les Akhder (ou Khodr) se donnent pour aïeul Khodr-Ibn-Amer. Cet Amer ne saurait être Amer-Ibn-Såsà, dont les généalogistes nous ont fait connaître les noms de tous les fils [et qui n'a pas eu un fils nommé Khodr]. Je le suppose donc être un descendant de Riah, ou bien l'Amer, fils de Yezid-Ibn-Mirdas, dont le lecteur a déjà rencontré le nom dans la filiation des familles riahides. On pourrait aussi admettre que ces Khodr sont la même tribu dont l'auteur du Kitab-el-Aghani1 désigne l'ancêtre sous le nom de Malek-Ibn-Tarif-Ibn-Malek-Ibn-Hafça-Ibn-Caïs-Ibn-Ghailan : « On » leur a donné, dit-il, le nom de Khodr (verts), parce qu'ils >> avaient le teint très-foncé; on sait que les Arabes [du Désert]

des premiers qui embrassèrent l'Islamisme. dans l'Essai de M. C. de Perceval.)

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(Voyez son histoire

Le Kitab-el-Aghani (livre des chansons) est un ouvrage très-volumineux dans lequel l'auteur, Abou-'l-Feredj-el-Ispahani, raconte, àpropos des chansons les plus à la mode, l'histoire de presque tous les poètes arabes qui vécurent avant Mahommet et dans les premiers temps de l'islamisme. Le Journal Asiatique de 4835 et 1838, renferme une notice de cet ouvrage par M. Quatremère. « Ce livre, dit Ibn-Khaldoun, » est vraiment le livre des Arabes, et le recueil de leurs anciens monu»ments de littérature: on y trouve leur langue, leurs aventures, leurs » journées célèbres, leur ancienne religion nationale, la vie de leur prophête, les monuments et les poésies de leurs khalifes et leurs rois, » leurs chansons, enfin tout ce qui les concerne; dans aucun autre >> ouvrage on ne trouve un tableau aussi complet des Arabes. » ( De Sacy; Anthologie grammaticale arabe, p. 430) Abou-l-Feredj mourut. en 356 (967 de J.-C.). (Voyez sa vie dans ma traduction anglaise d'IbnKhallikan, vol. 1, pp. 249 et suiv.) M. le professeur Kosegarten a entrepris une édition du Kitab-el-Aghani, en arabe et en latin.

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