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HISTOIRE DES BENI-GOMMI, TRIBU ABD-EL-OUADITE.

Au commencement de notre histoire des Beni-Abd-el-Ouad, nous avons dit que les Beni-Gommi étaient une des familles qui eurent El-Cacem pour ancêtre, qu'ils descendaient d'Ali-IbnYemel-Ibn-Izguen-Ibn-el-Cacem et qu'ils avaient pour collatéraux les Beni-Tâ-Allah, les Beni-Deloul et les Beni-Moti-Ibn-Djouher. Nous avons parlé des hostilités qui éclatèrent entre les Beni-Tâ-Allah' et les Beni-Gommi, et nous avons mentionné que Kendouz-Ibn-Abd-Allah, chef de ceux-ci, tua Zian-Ibn-ThabetIbn-Mohammed, chef des Tâ-Allah. La mort de Zîan, avonsnous ajouté, fut vengée par son successeur, Djaber-Ibn-YouçofIbn-Mohammed, qui tua Kendouz, soit en guet-àpens, soit dans une bataille. Djaber envoya la tête de sa victime à Yaghmoracen, fils de Zîan, et les gens de la famille de Yaghmoracen la mirent à la place d'une des pierres qui servaient à soutenir leurs marmites sur le feu, tant leur soif de vengeance était violente.

Les Beni-Gommi essuyèrent alors une série de revers; et, s'étant rendus à Tunis avec leur chef, Abd-Allah, fils de Kendouz, ils s'établirent auprès de l'émir Abou-Zékérïa. Lors de la conquête de Tlemcen par ce prince, Abd-Allah chercha à en obtenir le gouvernement, mais ses démarches n'eurent aucun succès. Quand El-Mostancer, fils d'Abou-Zékérïa, monta sur le trône, Abd-Allah exerça le commandement de sa tribu au nom de l'empire hafside; mais, quelque temps après, il passa dans le Maghreb avec tout son monde et campa dans le voisinage de Yacoub-Ibn-Abd-el-Hack, qui était alors sur le point de prendre la ville de Maroc. Ce fut avec un vif plaisir que le prince mérinide s'empressa d'assigner à son nouvel hôte une position élevée dans l'empire et de l'établir, avec les Beni-Gommi, aux environs de Maroc. Il leur concéda des terres pour leur entretien et confia à leurs nomades le soin de ses chameaux et de ses bêtes

1 Voy. p. 329 de ce volume.

de somme. Hassan et Mouça, fils d'Abou-Saîd-es-Sobeihi, furent désignés par lui comme gardiens en chef de ses troupeaux. Ces deux hommes étaient très-habiles dans l'art d'élever des chameaux et avaient quitté l'Orient, avec une petite troupe de serviteurs, pour se rendre en Maghreb. Dès lors, les BeniGommi s'habituèrent à parcourir les environs de Maroc avec leurs troupeaux et à les conduire dans les pâturages du Sous.

En l'an 665 (1266-7), Yacoub-Ibn-Abd-el-Hack envoya son neveu Amer-Ibn-Idris et Abd-Allah-Ibn-Kendouz en mission à la cour d'El-Mostancer, seigneur du Maghreb. Les Beni-Gommi s'incorporèrent alors dans la nation mérinide et devinrent une de ses tribus. A la mort d'Abd-Allah, fils de Kendouz, le commandement des Beni-Gommi passa à son fils Omar.

Quand Youçof-Ibn-Vacoub tenait la ville de Tlemcen étroitement bloquée et que tout le camp se réjouissait des maux qui affligeaient les Beni - Abd-el-Ouad, les Beni - Gommi se fàchèrent d'entendre insulter leurs parents; et, d'un mouvement unanime, ils répudièrent l'autorité du sultan. Passant alors, l'an 703, dans la province de Haha, ils se rendirent maîtres du Sous et mirent en déroute, à Tadert, les troupes de YaïchIbn-Yacoub, frère du sultan et gouverneur de Maroc, qui était sorti pour les combattre. Comme ils persistèrent dans leur rebellion, le même émir marcha contre eux, l'année suivante, et leur fit essuyer à Tamatrît une défaite qui brisa leur puissance. Omar - Ibn - Abd - Allah et plusieurs autres notables de la tribu y perdirent la vie. Les fuyards se jetèrent dans le Désert et parvinrent à atteindre Tlemcen. Dans cette campagne, Yaïch détruisit Taroudant, capitale du Sous.

Les Beni-Kendouz avaient passé environ six mois à Tlemcen quand ils découvrirent que les princes de la famille Yaghmoracen complotaient leur mort. Ils repartirent alors pour Maroc; et, pendant leur retraite, Mohammed-Ibn-Abi-Bekr-Ibn-HammamaIbn-Kendouz, un de leurs chefs, repoussa vigoureusement les troupes que le sultan abd-el-ouadite avait envoyées à leur poursuite. Arrivés dans le désert qui touche au Sous, ils y restèrent jusqu'à la mort du sultan Youçof-Ibn-Yacoub; et, s'étant alors

fait donner une amnistie par le gouvernement mérinide, ils reprirent leur ancienne position dans l'empire et continuèrent à le servir avec fidélité.

Omar-Ibn-Abd-Allah eut pour successeur son fils Mohammed. Celui-ci exerça le commandement pendant deux ans et fut remplacé par son fils Mouça. Lors de la guerre que les émirs Abou'l-Hacen et Abou-Ali se firent du vivant même de leur père, le sultan Abou-Said, et qui dura encore après sa mort, le premier de ces princes trouva dans Mouça-Ibn-Mohammed un serviteur actif et dévoué dont la bravoure empêcha l'ennemi de violer le territoire de Maroc. Quand Mouça eut cessé de vivre, son fils Yacoub - Ibn-Mouça prit le commandement avec l'autorisation d'Abou-'l-Hacen, qui était devenu chef de l'empire.

Après avoir effectué la conquête de Tlemcen, ce sultan contraignit les Beni-Abd-el-Ouad à servir sous ses drapeaux. Les chefs de ce peuple et ceux des Beni-Gommi se communiquèrent alors les griefs qu'ils avaient contre lui; et quand le monarque mérinide se rendit à Cairouan pour livrer aux Beni-Soleim la bataille dont les suites lui furent si funestes, YacoubIbn-Mouça avertit ces Arabes, par une voie secrète, qu'il abandonnerait le parti du sultan et passerait de leur côté avec les Beni-Abd-el-Ouad, les Maghraoua et les Toudjîn. Ayant fait agréer ce projet aux gens de sa tribu et aux Beni-Abd-el-Ouad, il alla se joindre aux Beni-Soleim; et. par cette défection, il attira au sultan la disgrâce d'une déroute complète. Ce fut là ce qu'on appelle le désastre de Cairouan. Les Beni-Abd-el-Ouad s'en retournèrent alors chez eux et prirent pour chef un descendant de Yaghmoracen. Yacoub-Ibn--Mouça mourut en Ifrìkïa, mais son frère Rahhou rentra en Maghreb.

Le sultan Abou-Einan donna le commandement des BeniGommi et de leur territoire à Obbou, fils de Youçof-Ibn-Mohammed et cousin germain des précédents. Après la mort d'Obbou, son fils Mohammed lui succéda.

Jusqu'à nos jours, les Beni-Gommi ont continué à faire le service militaire sous les ordres du gouverneur de Maroc, et ils exécutent fidèlement toutes les commissions que le sultan confie

à leur zèle et à leur intelligence. On peut même les regarder comme tout-à-fait étrangers aux Beni-Abd-el-Ouad, tant s'est enracinée la haine qui s'éleva entre les deux tribus lors de l'assassinat de Zian-Ibn-Thabet.

FIN DU TOME TROISIÈME.

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