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un de ses officiers de confiance, nommé Ali-Ibn-Abd-er-RahmanIbn-el-Koleib, de porter à ce prince plusieurs charges d'or. « Cette » somme, disait-il, doit rester entre les mains de mon fils jus» qu'à ce que je trouve le moyen de sortir de l'embarras où je

» me trouve maintenant. »

Il expédia, en même temps, à El-Montecer un diplôme qui l'autorisait à exercer le gouvernement d'Alger jusqu'à ce qu'il pât aller le rejoindre.

Abou-Tachefîn ayant appris de Mouça-Ibn-Yakhlof ce qui se passait, envoya une troupe de ses gens à la poursuite d'Ibnel-Koleib avec l'ordre de saisir l'argent et les lettres que le sultan lui avait confiés. S'étant ainsi procuré des pièces qui démontraient évidemment que l'on cherchait une occasion de le perdre, il se rendit au palais, le cœur plein d'indignation, et plaça ces écrits sous les yeux de son père, en l'accablant de repro

ches.

A cette occasion, Mouça-Ibn-Yakhlof quitta le service d'AbouHammou pour celui d'Abou-Tachefîn; et, dès lors, il ne cessa de travailler l'esprit de ce prince' afin de l'indisposer tout-à-fait contre le sultan. Aussi, au bout de quelques jours, Abou-Tachefîn entra au palais, déposa son père et l'enferma dans une chambre sous bonne garde.

L'ayant ensuite dépouillé de ses richesses, il l'envoya prisonnier à la citadelle d'Oran, et fit arrêter en même temps ceux de ses frères qui se trouvaient à Tlemcen. Ceci se passa vers la fin de l'an 788 (janvier 1387).

A la nouvelle de ces événements, El-Montecer s'enfuit de Milîana, avec ses frères Abou-Zîan et Omaïr, et alla chercher un asile chez les Hosein. Ce peuple accorda sa protection aux fugitifs et les accueillit dans la montagne de Tîteri. Abou-Tachefîn s'empressa de rassembler les troupes de l'empire; et, s'étant fait accompagner par les Arabes Soueid et Beni-Amer, il marcha

contre ses frères.

Après avoir occupé Milîana, qui se trouvait sur sa ligne de marche, il alla bloquer la montagne où ces princes et leurs protecteurs s'étaient retranchés.

LE SULTAN ABOU

HAMMOU EFFECTUE SON ÉVASION ET SE LAISSE REPRENDRE. ON L'EMBARQUE POUR L'ORIEnt.

Abou-Tachefin avait déjà passé un temps considérable à bloquer ses frères dans la montagne de Tîteri, quand il commença à craindre, par une absence prolongée, de fournir à son père l'occasion de ressaisir le pouvoir. Après avoir consulté ses officiers et leur avoir entendu déclarer, d'une voix unanime, qu'il faudrait ôter la vie au prisonnier, il ordonna à son fils, AbouZîan, de partir pour Tlemcen et d'y emmener Abd-Allah-elKhoracani, ainsi que le fils du vizir Amran-Ibn-Mouça, et quelques autres serviteurs.

Ces envoyés, étant parvenus à leur destination, firent mourir les fils du sultan qui s'y trouvaient détenus; et, de là, ils se rendirent à Oran. Abou-Hammou eut connaissance de leur arrivée ; et, rempli d'effroi, il monta sur la muraille de la citadelle et cria au secours. Les habitants vinrent de tous les côtés et reçurent dans leurs bras le sultan qui s'était servi de la corde de son turban pour effectuer sa descente. Les assassins se présentèrent à la porte de la tour, mais le prisonnier avait eu la précaution de la fermer au verrou; et, sur le bruit qui se faisait entendre au dehors, ils devinèrent ce qui venait de se passer et cherchèrent leur salut dans la fuite.

Les habitants d'Oran se réunirent alors sous les auspices de leur prédicateur (Khatib) et prêtèrent de nouveau le serment de fidélité au sultan Abou-Hammou qui repartit tout de suite et fit son entrée à Tlemcen, au commencement de l'an 789 (janvierfévrier 1387). Cette ville était alors sans moyen de défense; les Mérinides en ayant abattu les murailles et rasé la citadelle, mais les chefs de cette partie des Beni-Amer qui restaient encore dans

1 Dans le texte arabe, il faut mettre un point sur le dal de bidemaïhim.

le pays répondirent à l'appel du sultan et lui amenèrent des se

cours.

Quand Abou-Tachefîn reçut cette nouvelle, il leva le siége de Tîteri et courut à Tlemcen avec ses troupes et celles de ses alliés arabes. Le sultan, pris au dépourvu et traqué de toutes parts, se cacha dans le minaret de la grande mosquée, pendant qu'Abou-Tachefin s'installait dans le palais. Celui-ci, ayant enfin appris où son père s'était réfugié, y alla lui-même et l'invita à descendre. En voyant l'auteur de ses jours, il céda à un mouvement d'affection et versa des larmes en lui baisant la main. L'emmenant ensuite au palais, il l'enferma dans une chambre et finit par lui donner la permission d'aller faire le pèlerinage. Un bâtiment appartenant à des marchands catalans qui avaient l'habitude de commercer avec Tlemcen, fut nolisé pour Alexandrie, et l'on conduisit le sultan à Oran afin de l'y embarquer avec sa famille. Ce malheureux prince partit pour la Mecque sous la surveillance de plusieurs gardiens, et Abou-Tachefîn put alors s'occuper du gouvernement de l'empire.

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HAMMOU DÉBARQUE A BOUGIE ET S'EMPARE DE
ABOU-TACHEFIN SE RETIRE EN MAGHREB.

Quand le navire qui transportait Abou - Hammou d'Oran à Alexandrie se trouva à la hauteur de Bougie, ce prince réussit à gagner les gens qui le surveillaient; et, s'étant fait retirer de la cabine où on le tenait enfermé, il obtint du capitaine la permission d'aller à terre. Alors son premier soin fut d'annoncer son arrivée à Mohammed-Ibn-Abi-Mehdi, commandant de la marine. Cet officier, qui jouissait d'une grande faveur auprès du gouverneur, fils du sultan hafside Abou-'l-Abbas, s'empressa d'informer le voyageur qu'il pouvait débarquer sans obstacle. La personne chargée de ce message était un ami intime d'El-Montecer, fils d'Abou-Hammou; il se nommait Mohammed-IbnOuareth et avait appartenu au corps de jeunes gens que l'on élevait à la cour de Tlemcen. Quand Abou-Tachefin leva le siége

de Tîteri, il s'était empressé de quitter cette localité pour se réfugier dans Bougie..

Vers la fin de l'an 789 (déc.-janv. 1387-8), Abou-Hammou descendit à terre et se rendit au jardin royal, le Refiâ1 (la superbe) où l'on avait disposé un logement pour sa réception. Le sultan de Tunis apprit cet événement par un courrier extraordinaire et répondit au gouverneur de Bougie en le louant, d'abord, de la manière dont il avait agi et en lui recommandant de traiter son hôte avec les plus grands égards et de mettre à sa disposition les troupes de Bougie afin qu'il pût se rendre jusqu'à la frontière des états abd-el-ouadites.

Abou-Hammou se mit alors en marche; et, arrivé à Metîdja, il s'y arrêta pour rallier les bandes arabes qui, de toutes parts, accouraient à son secours; puis, il se dirigea vers Tlemcen. Ayant alors appris que les Beni-Abd-el-Ouad, gagnés par les libéralités d'Abou-Tachefin, ne voulaient plus le reconnaître, il laissa son fils Abou-Zian dans les montagnes du Chelif pour y soutenir sa cause et il passa lui-même dans le Désert afin de se rendre à Mama, sur la frontière du Maghreb.

Un corps de troupes qu'Abou-Tachefin avait placé sous les ordres de son fils Abou-Zian et du vizir Mohammed-Ibn-AbdAllah-Ibn-Moslem, marcha aussitôt contre Abou-Zîan, fils d'Abou-Hammou. Un combat s'ensuivit qui amena la défaite des troupes sorties de Tlemcen, après avoir coûté la vie à l'émir Abou-Zian, fils d'Abou-Tachefin, au vizir Ibn-Moslem et à un grand nombre d'Abd-el-Ouadites.

Abou-Tachefîn, ayant appris que son père était arrivé à Mama, sortit pour l'attaquer et le força à reculer jusqu'au Za. Les Ahlaf, arabes makiliens, vinrent au secours d'AbouHammou et l'aidèrent à rentrer dans cette place. Abou-Tachefîn se mit alors en observation vis-à-vis de l'armée de son père, et il s'y tenait encore quand il apprit la mort de son fils et la déroute des Beni - Abd - el – Ouad. Voulant rentrer à Tlemcen,

Voy. t. 1, p. 392.

il dût opérer sa retraite avec une précipitation extrême, afin d'échapper à ses adversaires. Alors, d'après ses instructions, l'effranchi Séâda se mit en campagne avec une partie de l'armée afin d'offrir la bataille aux Arabes et les entraîner ainsi dans une poursuite qui les aurait éloignés d'Abou-Hammou. Autant sa confiance fut grande dans le bonheur de Séâda, autant son désappointement fut amer quand il apprit qu'Abou-Hammou avait réussi à surprendre ce détachement, le mettre en déroute et faire prisonnier celui qui le commandait. Abandonné enfin par les Beni-Abd el-Ouad et par ses alliés arabes, il s'empressa de quitter Tlemcen pour accompagner les Soueid jusqu'au Désert où il prenaient leurs quartiers d'hiver.

Dans le mois de Redjeb 790 (juillet-août 1388), Abou-Hammou rentra dans sa capitale et appela ses autres fils auprès de lui. El-Montecer y mourut de maladie, quelques jours après son arrivée.

ABOU-TA CHEFÎN ARRIVE A LA TÊTE D'UNE ARMÉE MÈRINIDE.

MORT DU SULTAN ABOU-HAMMOU.

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------ EET- -

Abou-Tachefîn quitta donc Tlemcen à l'approche de son père et se réfugia au milieu des tribus soueidiennes ; puis, sur l'avis unanime de ses protecteurs, il partit avec leur cheikh, MohammedIbn-Arîf, afin de solliciter l'appui d'Abou-'l-Abbas, sultan des Beni-Merîn. Ils obtinrent de ce prince l'assurance d'être secourus contre leur ennemi commun, et Abou-Tachefîn se fixa dans Fez en attendant l'accomplissement de ses souhaits.

A cette époque, Ibn-el-Ahmer, seigneur de l'Espagne musulmane, s'était attaché au sultan Abou-Hammou par les liens d'une: étroite amitié et il s'était aussi acquis le droit de dicter ses volontés au sultan Abou-'l-Abbas, seigneur du Maghreb, par le service qu'il venait de lui rendre, en l'aidant à reconquérir le trône. Sur la prière d'Abou-Hammou, le monarque espagnol exigea d'Abou-'l-Abbas la déportation d'Abou-Tachefin en Espagne; et, voyant que le sultan mérinide hésitait à obéir pour

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