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réussit à s'en emparer. S'étant alors adressé aux chefs rîahides, Yacoub-Ibn-Ali-Ibn-Ahmed et Othman-Ibn-Youçof, émirs douaouidiens qui, à cette époque, reconnaissaient son autorité parce qu'ils étaient mal disposés pour Abou-'l-Abbas, seigneur de Bougie, il obtint la promesse que tous leurs nomades seraient à ses ordres, pourvu qu'il consentît à marcher contre ce prince après avoir vaincu Abou-Zian. Ils rédigèrent même un écrit à cet effet, mais le sultan le renvoya en déclarant qu'il se contenterait de leur parole. Ayant alors rassemblé sous ses drapeaux une grande partie des Zoghba, il quitta Tlemcen et marcha contre Khaled-Ibn-Amer et les fils d'Arif-Ibn-Yahya qui se tenaient dans le Désert avec leurs tribus.

Voyant que ces gens insoumis prenaient la fuite à son approche, il tourna ses armes contre les Hosein qui se tenaient avec AbouZian dans la montagne de Titeri. Ce fut alors que Yacoub-IbnAli et Othman-Ibn-Youçof se hâtèrent de venir à son secours et prirent position avec leurs troupes rîahides vis-à-vis des Hocein, à l'endroit appelé El-Guetfa1. Khaled-Ibn-Amer et les fils d'Arîf se portèrent rapidement à leur rencontre afin de les repousser et d'empêcher ainsi leur jonction avec le sultan. Dans la matinée du dernier jeudi du mois de Dou-'l-Câda 769 (milieu de juillet 1368), ils attaquèrent les Douaouida à l'improviste et les forcèrent à lâcher pied après un combat très-vif; bientôt, cependant, ils perdirent leurs avantages et, désespérant de pouvoir résister aux progrès de leurs adversaires, ils se retirèrent auprès des Hosein et laissèrent un champ de bataille où beaucoup de leurs guerriers venaient de succomber. Arrivés chez les Hocein avec le reste de leurs nomades, ils les aidèrent à combattre l'armée d'Abou-Hammou en bataille rangée et à la mettre en pleine déroute. Le sultan s'enfuit vers Tlemcen, en passant par le Désert; les Douaouida rentrèrent dans leur territoire au plus vite, et le reste des Arabes zoghba passa du côté

1 Cet endroit est situé à 12 lieues au S. E. de Tîteri. 2 Pour djefel, il faut lire adjfel dans le texte arabe.

d'Abou-Zian, lequel se mit à la poursuite des fuyards abd-elouadites et ne s'arrêta qu'à Cirat.

Quelque temps après, le sultan se remit en campagne avec les Abd-el-Ouad et les fractions des Beni-Amer qui lui restaient encore fidèles; puis, ayant culbuté et poursuivi les troupes de Khaled-Ibn-Amer, il écrivit à leur chef une lettre très-flatteuse; et, par ce moyen, joint à l'offre d'une forte somme d'argent et d'autres avantages, il réussit à s'en faire un allié et un serviteur. L'émir Abou-Zian s'en retourna alors auprès de ses amis, les Hosein; comptant sur l'appui de cette tribu et sur la coopération des fils d'Arif. Son espoir fut trompé : Mohammed, fils d'Arif, passa sous le drapeau du sultan et prit l'engagement de ramener son frère [Abou-Bekr-Ibn-Arif] dans la bonne voie en le détachant du parti de l'insurrection.

Le sultan remarqua, toutefois, avec une certaine méfiance, que les démarches de Mohammed-Ibn-Arîf consumaient beaucoup de temps, sans produire aucun résultat, et, d'après l'avis de Khaled-Ibn-Amer, ennemi de ce chef, il le fit arrêter. Cet acte confirma Abou-Bekr, frère du prisonnier, dans son éloignement pour le sultan.

En l'an 770 (4368-9), Abou-Hammou se mit en campagne avec ses Abd-el-Ouad et tous les Beni-Amer, afin d'aller combattre Abou-Bekr-Ibn-Arîf, et, sachant que son adversaire avait fait occuper la montagne de Titeri et celle de Derrag par les Hosein et par les Hareth-Ibn-Malek, tribu qui était venu au secours des insurgés, il alla camper à Laoud, dans le territoire des Dïalem, branche de la tribu des Hareth. Après y avoir détruit les moissons, ruiné les villages et tout saccagé, il reprit sa marche pour châtier Abou-Bekr; mais, voyant que ce chef était trop bien soutenu par les Hareth, par les Hosein et par l'émir Abou-Zian pour être attaqué avec avantage, il se jeta sur les terres des Soueid et sur celles de leurs chefs, les fils d'Arîf. Après avoir dévasté toutes ces conrées et ruiné le Cala-t-IbnSelama, la plus belle résidence de cette famille, il repartit pour Tlemcen, heureux d'avoir châtié les fils d'Arif, soumis leur pays et contribué à l'élévation de leurs ennemis.

LE SULTAN ABD-EL-AZÎZ S'EMPARE DE TLEMCEN.

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ET LES BENI - AMER ESSUIENT UNE DÉFAITE A ED
ABOU-ZIAN SORT DE TÎTERI ET PASSE CHEZ LES RÎAH.

DOUCEN.

L'emprisonnement de Mohammed-Ibn-Arîf, la dispersion de sa tribu, les Soueid, et la dévastation de tout leur pays par Abou-Hammou décidèrent Abou-Bekr-Ibn-Arif, frère aîné de ce Mohammed, à solliciter l'appui du souverain mérinide. Ayant, en conséquence, rassemblé les Soueid, les Dialem, les Attaf et toutes les autres peuplades nomades qui composaient la tribu des Beni-Malek, il les conduisit dans les plaines du Molouïa, sur la frontière du Maghreb. De là, il se rendit auprès de son frère aîné, Ouenzemmar, qui habitait le Casr-Morada, château qu'il s'était fait bâtir près des barrages du Molouïa. Dans cette retraite, Ouenzemmar vivait sous la protection du gouvernement mérinide dont il réglait la conduite par sa volonté et par ses conseils. Cette position de conseiller-directeur était, pour ainsi dire, héréditaire; car il la tenait de son père, Arîf-Ibn-Yahya, qui avait rempli les mêmes fonctions auprès du sultan AbouSaid, du sultan Abou-'l-Hacen et du sultan Abou-Einan; de l'aïeul, du père et du fils. Les princes qui régnèrent en Maghreb après Abou - Einan adoptèrent, à l'égard de Ouenzemmar, l'exemple de leurs prédécesseurs; et, se croyant heureux de séder un tel guide, ils suivirent ses avis avec une confiance aveugle.

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Abou-Bekr alla donc trouver Ouenzemmar dans l'espoir d'ohtenir, par son entremise, l'appui des Mérinides; et, lui ayant fait connaître l'emprisonnement de leur frère cadet Mohammed, il lui inspira la résolution de se venger. Il partit alors avec les cheikhs de sa tribu, les Beni-Malek, et se rendit, au nom de Ouenzemmar, auprès du sultan Abd-el-Azîz qui venait de soumettre la montagne des Hintata et de faire prisonnier AmerIbn-Mohammed-Ibn-Ali', chef insurgé qui s'y était retranché.

Voy. t. u, p. 266.

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Les membres de cette députation rencontrèrent le vainqueur pendant qu'il revenait à sa capitale et leur demande de secours obtint une réponse favorable. Alors, ils lui représentèrent que la conquête de Tlemcen et des contrées qui s'étendent au-delà de cette ville pourrait s'effectuer avec une grande facilité et qu'il devait l'entreprendre. Cette recommandation s'accordait parfaitement avec les sentiments du sultan qui ne pardonnait pas à Abou-Hammou d'avoir accueilli dans ses états les nomades arabes-makiliens, peuple naguère soumis à l'autorité de l'empire mérinide. Il se rappela aussi qu'AbouHammou ne s'était aucunement soucié des remontrances qu'il lui avait fait parvenir à ce sujet. Par ces motifs, il résolut d'envahir le royaume de Tlemcen et de confier à Ouenzemmar la direction de cette entreprise.

Quand il eut rassemblé, aux environs de Fez, les troupes que ses agents étaient allés chercher dans ses provinces et places frontières, il célébra la fête du sacrifice, l'an 771 (10 Dou-'lHiddja — 12 juillet 4370), et se mit en marche. Abou-Hammou apprit cette nouvelle à El-Bat'ha, où il était campé et rentra surle-champ à Tlemcen afin de rallier ses alliés arabes, les ObeidAllah et les Ahlaf, peuplades makiliennes. Averti ensuite que ces tribus, au lieu de répondre à son appel, étaient allées se ranger du côté des Mérinides, il prit la résolution de passer chez les Beni-Amer; et, dans le commencement de Moharrem (août), il abandonna sa capitale. Le 10 du même mois, le sultan Abd-el-Azîz y fit son entrée et, d'après les conseils de Ouenzemmar, il envoya le vizir Abou-Bekr-Ibn-Ghazi-Ibn-el-Kas à la poursuite de l'ennemi. Cet officier se porta vers El-Bať’ha,`où il opéra sa jonction avec Ouenzemmar qui lui amenait une forte troupe d'Arabes. De là, il se dirigea contre Abou-Hammou et le força, ainsi que les Beni-Amer, à se retirer sur le territoire des Douaouida.

Le sultan Abd-el-Azîz m'envoya alors chez cette dernière tribu afin de la décider à faire sa soumission et à repousser l'allliance des Beni-Amer et d'Abou-Hammou. Il chargea aussi Feredj, fils d'Eïça-Ibn-Arif, de se rendre au milieu des Hosein

pour les sommer de reconnaître l'autorité de l'empire mérinide, rompre les engagements qu'ils avaient contractés envers AbouZian et renvoyer ce prince auprès du sultan. Nous arrivâmes ensemble chez les partisans d'Abou-Zîan et nous parvinmes à leur faire entendre raison. Leur protégé, se voyant tout-à-fait abandonné, passa chez les Aulad-Yahya-Ibn Ali-Ibn-Sebà, tribu douaouidienne. Je m'y rendis aussi, un peu plus tard, et, me conformant aux instructions que j'avais reçues, j'évitai de faire la moindre allusion à la protection qu'ils venaient d'accorder à Abou-Zîan et je m'attachai à leur démontrer les dangers auxquels ils s'exposeraient en formant une alliance avee le sultan Abou-Hammou et les Beni-Amer. D'après mes conseils, leurs cheikhs allèrent trouver Ouenzemmar et lui firent connaître, ainsi qu'au vizir Ibn-Ghazi, la route que les fuyards avaient suivie. Ces deux chefs se mirent aussitôt à la poursuite du sultan abd-el-ouadite et l'atteignirent à Ed-Doucen, ville située dans la partie occidentale du Zab. Ayant surpris son camp dans une attaque de nuit, ils dispersèrent ses troupes, s'emparèrent de ses effets, de ses trésors et de ses bêtes de somme et contraignirent les débris de son armée à se jeter dans le pays des Mozab. Retournant alors sur leurs pas, ils marchèrent vers les bourgades des Beni-Amer, cosour situés dans le Désert, au Midi du Mont Rached, et dont les principaux se nommaient Rebâ et Bou-Semghoun. Après avoir pillé et dévasté ces établissements, ils se dirigèrent vers Tlemcen.

Le sultan Abd-el-Azîz établit alors des agents dans Oran, Miliana, Alger, Médéa, le Quancherich et toutes les autres localités du Maghreb central. Devenu maître du royaume de son adversaire, il ne lui resta plus qu'à éteindre les étincelles d'une insurrection qu'un fils d'Ali-Ibn-Rached avait allumées dans le pays des Maghraoua.

Ce jeune homme, mécontent de la position' qu'il occupait dans l'armée du sultan, se jeta dans la montagne des Beni-[Bou-]Saîd

1 Dans le texte arabe, il faut lire halohou à la place de Khaled.

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