Images de page
PDF
ePub

Zékérïa une position honorable et se fixa dans cette capitale. Il y mourut propriétaire de plusieurs terres et villages et d'un grand nombre de belles maisons qu'il y avait fait construire.

IBN-EL-AHMER RECONNAIT LA SOUVERAINETÉ D'ABOU-
ZÉKÉRÏA.

Mohammed-Ibn-el-Abmer se révolta dans Arjona, sa ville natale, contre l'autorité d'Ibn-Houd et parvint ensuite à s'emparer de Jaen, de Cordoue, de Séville et de l'Espagne [musulmane] occidentale. Après une longue guerre, un raccomodement s'effectua entre ces deux princes et Ibn-el-Ahmer reconnut la souveraineté de son rival. Plus tard, il se révolta de nouveau et, en l'an 636 (1238-9), à l'époque où Séville et Ceuta se déclarèrent pour Er-Rechid [l'almohade], il envoya aussi à ce prince un acte de foi et hommage. Tant qu'Er-Rechîd vécut, Ibn-el-Ahmer lui demeura fidèle; mais, ensuite, voyant qu'Abou-Zékérïa [le hafside] était parvenu à fonder un empire en Ifrîkïa et espérait remporter de grands avantages [sur les Almohades], il fit célébrer la prière publique au nom de cet émir dans toutes les mosquées de ses états, et choisit AbouBekr-Ibn-Aïach, membre du corps des cheikhs à Malaga, pour porter cette nouvelle à Tunis. Abou-Zékéria reçut cette députation avec un grand plaisir; en la congédiant, il lui remit une forte somme d'argent pour subvenir aux frais de la guerre sainte, et, jusqu'à sa mort, événement qui eut lieu en 647 (1249), il ne cessa d'expédier des subsides à ses sujets espagnols. Ibn-el-Ahmer brisa ensuite les liens qui le retenaient dans la dépendance et parvint à fonder un royaume.

SIDJILMESSA RECONNAIT L'AUTORITÉ D'ABOU-ZÉKÉRÏA ET LA RÉPUDIE

ENSUITE.

En l'an 640 (1242), lors de la mort d'Er-Rechîd et l'avènement de son frère, Es-Said, un cheikh almohade, nommé AbdAllah - Ibn - Zékérïa - el-- Hezerdji, gouvernait Sidjilmessa au

nom de la dynastie d'Abd-el-Moumen. Es-Saîd, ayant été vivement offensé de certains propos injurieux qu'El-Hezerdji avait tenus à son égard, repoussa les excuses que cet officier lui fit parvenir et en déchira la lettre. Effrayé du danger qui le menaçait, El-Hezerdji fit porter un acte de soumission à l'émir Abou-Zékérïa, qui venait d'occuper Tlemcen, et, en récompense de cette trahison, il reçut sa confirmation comme gouverneur de la ville et province de Sidjilmessa, avec la promesse d'obtenir bientôt un envoi d'armes et de troupes, afin de pouvoir se défendre. Il venait d'y faire proclamer l'autorité d'Abou-Zékérïa, quand il vit arriver chez lui Abou-Zeid-Ibn-Ouagag 2-el-Guedmîouï et Abou-Saîd-el-Aoud-er-Reteb, qui s'étaient enfuis de Maroc. Celui-ci continua sa route jusqu'à Tunis; mais AbouZeid resta avec El-Hezerdji à Sidjilmessa.

En l'an 641 (1243-4), ou en 640, selon un autre récit, le sultan Es-Said, dont ces deux fonctionnaires avaient abandonné le camp, marcha contre leur protecteur. Arrivé sous les murs de Sidjilmessa, il adressa une proclamation aux habitants pendant qu'Abou-Zeid-el-Guedmiouï les travaillait de son côté. Il en résulta un soulèvement du peuple qui expulsa El-Hezerdji et donna le commandement de la ville à Abou-Zeid. Le sultan reçut alors une dépêche dans laquelle cet officier lui annonça qu'il était prêt à lui remettre la ville, et il y répondit par une lettre de remercîments et l'assurance que le passé serait oublié. Quelques Arabes ayant rencontré El-Hezerdji, le conduisirent à Es-Saîd qui reprit la route de Maroc, après avoir fait mourir le traître et donné l'ordre d'en porter la tête à Sidjilmessa pour y être exposée aux regards du public. Cette ville rentra ainsi dans l'obéissance, et demeura soumise au gouvernement almohade jusqu'à l'arrivée de certains événements dont nous aurons, ailleurs, l'occasion de parler.

' Voyez, ci-devant, p. 244.

Variante de la page 214 : Zékéria.

LES BENI-MERÎN RECONNAISSENT LA SOUVERAINETÉ D'ABOU-ZÉKÉRÏA. LA VILLE DE MEQUINEZ SUIT LEUR EXEMPLE.

A l'époque où les Beni-Merîn et les Beni-Abd-el-Ouad adoptèrent la vie nomade, une guerre éclata entre ces deux peuples, et, pendant la longue suite d'hostilités auxquelles ils continuèrent à se livrer, chaque parti se faisait soutenir par ses alliés et confédérés. Quand la désorganisation se fut déclarée dans l'empire fondé par Abd-el-Moumen, chacune de ces tribus s'empara de la partie du Tell où elle avait l'habitude de séjourner [pendant l'été]. Les Beni-Abd-el-Ouad furent les premiers à établir leur indépendance, grâce à la distance qui les séparait de Maroc, siége du gouvernement almohade et lieu de rendez-vous pour les troupes de cet empire et pour les contingents fournis. par les tribus.

Quand Abou-Zékérïa soumit la ville de Tlemcen, après avoir usurpé le trône de l'Ifrikïa et subjugué le Maghreb central, les Beni-Abd-el-Ouad reconnurent son autorité; mais les BeniMerîn ne montrèrent pas un semblable empressement, tant ils craignaient que ce prince ne favorisât les trahisons que ses nouveaux alliés pourraient tramer contre eux. Ils se bornèrent à prendre un ton soumis, et, tout en se tenant hors de son atteinte, ils lui firent des belles promesses d'obéissance et l'encouragèrent dans ses projets ambitieux: ils le reconnurent pour khalife légitime, lui promirent de soutenir sa cause et s'engagèrent à former l'avant-garde de son armée, quand il marcherait contre Maroc. Ils décidèrent même les tribus et villes du Maghreb qu'ils tenaient sous leurs ordres à embrasser le parti des Hafsides et à se mettre sous la protection de cette nouvelle dynastie. Leur émir, Othman-Ibn-Abd-el-Hack, et Mohammed, son frère et successeur, maintinrent, à ce sujet, une correspondance suivie avec Abou-Zékérïa et lui envoyèrent des agents politiques, à plusieurs reprises.

Pendant ces entrefaites, le khalife Er-Rechid mourut; Tlemcen tomba au pouvoir d'Abou-Zékérïa; les tribus zenatiennes du

Maghreb central se rallièrent à la cause de ce prince, et les villes de ce pays, ainsi que celles de l'Espagne, recherchèrent l'honneur de faire partie de l'empire hafside.

Les habitants de Miknaça [Mequinez] qui, depuis quelque temps, s'étaient mis sous la protection de l'émir [mérinide], Abou-Yahya, fils d'Abd-el-Hack, assassinèrent le gouverneur que la cour de Maroc avait établi chez eux et dont la conduite tyrannique leur était devenue insupportable. Ils firent alors avertir Abou-Yahya de ce qui venait d'arriver, et, d'après le conseil de cet émir, ils proclamèrent la souveraineté d'AbouZékérïa. Ce fut en l'an 643 (1245-6) qu'ils envoyèrent à ce prince la déclaration de leur soumission, acte qu'ils avaient fait dresser par leur cadi, Abou-'l-Motarref-Ibn-Omeira. Ils obtinrent alors d'Abou-Yahya la promesse de sa protection, en attendant l'arrivée des secours que le sultan de Tunis devait leur envoyer.

Quand cette nouvelle parvint à Es-Safd [le souverain almohade], il en fut outré de colère et voulut marcher tout de suite contre Miknaça. La crainte de sa vengeance empêcha les révoltés de donner suite à leur projet, et une députation, composée de leurs docteurs les plus saints et les plus savants, obtint pour eux de ce monarque une amnistie entière. Depuis lors, cette ville ne fit plus aucun mouvement jusqu'à l'époque où Es-Saîd entreprit l'expédition qui lui coûta la vie.

L'ÉMIR ABOU - YAHYA – ZÉKÉRÏA, SUCCESSEUR DÉSIGNÉ AU TRÔNE DES
HAFSIDES, MEURT A BOUGIE, SIEGE DE SON COMMANDEMENT.
SON FRÈRE MOHAMMED EST DÉCLARÉ HÉRITIER DE L'EMPIRE.

Nous avons dit qu'en l'an 633, l'émir Abou-Zékérïa-Yahya donna à son fils, Abou-Yahya-Zékérïa, le commandement de Bougie, forteresse qui avait été autrefois le siége de l'empire hammadite. Il lui accorda, en même temps, le gouvernement de

+ Voy. p. 302.

toutes les localités qui dépendaient de cette ville, telles qu'Alger, Constantine, Bône et le Zab. Sous le poids d'une si vaste administration, le jeune prince déploya tant d'habilité, tant de savoir, de piété et de justice que, par son mérite seul, il aurait paru digne du khalifat.

Aussi, en l'an 638 (1240-1), son père le désigna comme successeur du trône, et, ayant fait appuyer l'acte de cette nomination par les signatures de tous les grands du royaume, convoqués en assemblée générale, il ordonna que le nom d'AbouYahya fût prononcé dans la prière publique après le sien. A cette occasion, il dicta, pour l'instruction de son fils, la lettre de conseils qui circule encore dans le public. Voici le texte de cet écrit : « Que Dieu te dirige et te conduise! qu'il te mène dans » une voie où tu puisse mériter sa faveur et trouver le bonheur » éternel! Dieu veuille que tes actions soient toujours dignes » d'éloges et que tes pensées restent toujours pures et ver>> tueuses. Sache que le premier devoir de celui auquel Dieu a >> confié la garde de ses créatures et à qui il fera rendre compte » même des moindres choses qui leur arriveront, est de ne » rien entreprendre avant d'être assuré que son projet sera agré >>able au Tout-Puissant. Après avoir placé sa cause, sa force et » ses moyens sous la protection de Dieu, qu'il agisse, qu'il tra» vaille, qu'il combatte pour la défense des musulmans et qu'il >> soutienne une guerre sainte pour l'avantage des vrais croyants. » Mais, d'abord, qu'il mette sa confiance en Dieu et qu'il re» nonce à tout pouvoir qui ne viendrait pas du Seigneur.

>> Quand il te surviendra une affaire grave, une nouvelle fà>>cheuse, dompte l'emportement de ton cœur, retiens ton >> ardeur, pèse bien les conséquences de ce que tu veux faire et » réfléchis avant d'agir. Evite la précipitation qui dénote un >> esprit faible et l'hésitation qui caractérise l'homme insouciant >> et maladroit. Sache que les difficultés qui feraient reculer

même les plus habiles, peuvent être surmontées par la pa» tience et la prudence, jointes aux conseils des militaires sages » et expérimentés; alors il est permis de les aborder en invo» quant l'appui et le concours de Dieu.

« PrécédentContinuer »