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et, les autres, des Beni-Ifren et des Maghraoua, frères des BeniOuargla 1. Leur chef porte le titre de sultan, sans encourir, pour cela, l'animadversion publique. La maison régnante est celle des Beni-Abi-Ghaboul, « branche, disent-ils, d'une illustre fa» mille des Ouargla nommée les Beni Quaguîn3. » Le sultan actuel s'appelle Abou-Bekr-Ibn-Mouça-Ibn-Soleiman; il descend d'Abou-Ghaboul, personnage dont la postérité, en ligne directe, y a toujours exercé la souveraineté.

A vingt journées au Sud de Ouargla, en tirant vers l'Ouest, on trouve la ville de Takedda, capitale du territoire occupé par les peuples qui portent litham. C'est là où se donnent rendezvous les gens du Soudan qui vont faire le pèlerinage de la Mecque. Fondé par les Sanhadja porteurs de litham, Takedda est encore habité par ce peuple. Le chef qui y gouverne, avec le titre de sultan, appartient à une bonne famille sanhadjienne. Il est en correspondance avec l'émir du Zab, auquel il envoit, et dont il reçoit des lettres et des cadeaux.

En l'an 754 (1353), sous le règne du sultan Abou-Einan, me rendis à Biskera, chargé d'une mission politique, et j'y rencontrai, chez l'émir Youçof-Ibn-Mozni, un ambassadeur venu de la part du seigneur de Takedda. Ce fut de cet envoyé que j'eus mes renseignements sur l'importance de cette ville et sur les caravanes qui y passent. « Cette année-ci, me dit-il, » une caravane de marchands venant de l'Orient [l'Egypte] >> traversa notre ville pour se rendre à Melli, et on y compta

↑ Liscz ikhouanihim, à la place de d'ikhounihim dans le texte arabe. 2 Voy. les réflexions de notre auteur, pp. 91 et 30 de ce volume. 3 Le texte imprimé porte Ouaguir. Cette leçon est mauvaise; la famille de Ouaguîn se trouve encore à Ouargla.

4 Ci-devant, t. II, p. 116, notre auteur place Takedda à soixante-dix journées au Sud-Ouest de Ouargla. Cette indication est, sans doute, la meilleure puisqu'elle s'accorde avec celle d'Ibn-Batouta : ce voyageur compte vingt journées de Takedda à Bornou dans le pays des Nègres et soixante-dix journées de Takedda à Touat. Or, nous savons que Bornou est aussi éloigné de Ouargla que de Touat.

>> douze mille chameaux chargés1.» Une autre personne m'a informé que le même fait se reproduit tous les ans. Takedda reconnaît la souveraineté du sultan de Melli, ville nègre, ainsi que le font toutes les autres villes du Sahara auxquelles on donne le nom collectif d'El-Melestin 2.

NOTICE DES BENI-DEMMER, PEUPLE ZENATIEN, ET DES MEMBRES DE CETTE TRIBU QUI EXERCÈRENT DES COMMANDEMENTS EN ESPAGNE.

Les Beni-Demmer, tribu zenatienne descendue d'Ourcik, fils d'Addîdet, fils de Djana, fournirent un grand nombre de branches qui habitaient les montagnes et les environs de Tripoli. Une de leurs fractions s'adonne encore à la vie nomade et fréquente les plaines situées dans l'Ifrîkïa occidentale. Les BeniOurghma, autre branche des Aiddemmer, habitent les montagnes de Tripoli avec le reste de leur peuple. Les Beni-Ournîd, dont l'aïeul, Ournîd, fut fils de Ouanten, fils d'Ouardîren, fils de Demmer, formaient une branche très-considérable de la tribu des Demmer et poussèrent de nombreuses ramifications dont nous pouvons citer les Beni-Ourtantîn, les BeniGharzoul et les Beni-Tofourt. Il se trouve, cependant, des personnes qui regardent ces trois familles comme se rattachant à Demmer par un autre aïeul qu'Ournîd ♦.

◄ Selon une autre leçon, qui, du reste, nous paraît inadmissible, la dime de cette caravane fut de douze mille chameaux.

2 Ce mot est altéré dans tous les manuscrits. On le retrouve encore dans notre texte arabe, t. 1, p. 394. Il faut probablement lire Macin, pays situé sur la rive gauche du Djoliba, au Sud-Ouest de Tenbocton. Lé géographe Abou-Obeid- el-Bekri en fait mention; c'est le Massina de nos cartes.

3 Aiddemmer est une contraction des mots berbères aïth Dimmer (gens ou tribu de Demmer).

4 Voy., ci-devant, pp. 186, 187.

De nos jours, les derniers restes des Beni-Ournid habitent la montagne qui domine Tlemcen et qui porte leur nom. Ils avaient précédemment occupé les plaines au Midi de cette montagne, mais, en ayant été repoussés par les Beni-Rached, qui venaient de quitter le Désert pour habiter le Tell, ils se réfugièrent dans le lieu qu'ils occupent maintenant.

Plusieurs chefs et guerriers appartenant à la tribu des Aiddemmer passèrent en Espagne avec les Zenata et autres Berbères qui allèrent se mettre au service d'El-Hakem-el-Mostancer. Incorporés dans l'armée de ce souverain oméïade, ils aidèrent le chambellan El-Mansour-Ibn-Abi-Amer dans l'accomplissement de ses projets ambitieux et, plus tard, ils parcoururent toutes les parties de l'empire sous la conduite du sultan El-Mostaïn. Ralliées au parti de ce monarque, et ensuite au parti des Hammoudites, ces troupes africaines vainquirent les troupes espagnoles de race arabe, à la suite d'une longue guerre civile qui amena la ruine du khalifat. Quand ils eurent démembré l'empire, ils usurpèrent les fonctions de la souveraineté et le gouvernement des provinces.

Nouh-ed-Demmeri, un de leurs chefs, tint le premier rang parmi les partisans d'El-Mansour et reçut d'El-Mostaïn le gouvernement de Mourour (Moron) et d'Arkos. En l'an 404 (1013-4), il profita de l'anarchie dans laquelle l'Espagne musulmane était tombée pour se déclarer souverain indépendant et pour prendre le titre de sultan. Il mourut en 433 (1041-2) et transmit le pouvoir à son fils, Abou-Menad-Mohammed-Ibn-Nouh. Celui-ci prit le double titre d'El-Hadjeb (chambellan du khalife) et d'Ezz-ed-Dola (majesté de l'empire), se conformant ainsi à l'exemple donné par [ses voisins] les chefs qui s'étaient rendus indépendants. El-Motaded-Ibn-Abbad, sei

1 Moron est situé à 14 lieues E.-S.-E de Séville. La leçon proposée dans la note 5, p. 74 du texte arabe, est fausse. M. de Gayaugos, dans sa traduction d El- Maccari, avait déjà reconnu que le Mourour des historiens arabes est le Moror des chroniques chrétiennes et le Moron de nos jours.

T. HI.

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gneur de l'Andalousie occidentale, eut avec lui plusieur démêlés, et s'étant mis, dans une de ses campagnes, à parcourir déguisé les environs du château d'Arcos, il se vit arrêter par les gens de son adversaire. Amené devant ce chef, il trouva l'accueil le plus honorable et reçut la permission de s'en aller. Ceci se passa en l'an 443 (1051-2).

Rentré dans sa capitale [Séville], il n'oublia pas ce trait de générosité, et, s'étant ensuite attaché à gagner l'amitié des chefs berbères qui régnaient en souverains sur les pays voisins, il confirma Ibn-Nouh dans le gouvernement de Mourour et d'Arkos. Tous ces princes finirent par se faire les compagnons et courtisans du sultan de Séville.

En l'an 445 (4053-4), El-Motaded fit les préparatifs d'un grand festin auquel il invita tous ces gouverneurs de villes et de provinces, et, pour leur donner un témoignagne de l'extrême considération qu'il leur portait, il les fit entrer dans une salle de bain que l'on avait chauffée pour les recevoir. Ibn-Nouh fut le seul qu'El-Motaded garda auprès de lui. On ferma alors la porte et les soupiraux de la salle et on y retint ces malheureux jusqu'à ce qu'ils moururent. Après avoir épargné par un sentiment de reconnaissance les jours d'Ibn-Nouh, ce prince s'empressa d'incorporer dans ses états les places fortes qui avaient appartenu à ses victimes, et obtint ainsi la possession de Ronda, de Xérès et des pays qui en dépendaient. Le chambellan Abou-MenadIbn-Nouh mourut quelque temps après et eut pour successeur son fils Abou-Abd-Allah-Mohammed. Celui-ci, se voyant resserré tous les jours davantage par les troupes d'El-Motaded, lui céda ses états en l'an 458 (1066) et passa le reste de sa vie auprès de ce monarque.

Il mourut en 468 (1075-6) et, avec lui, finit la dynastie des Beni-Nouh.

4 La correction proposée dans la note de l'édition arabe cst fausse; la leçon du texte est bonne.

'HISTOIRE DES BENI-BERZAL, BRANCHE DES DEMMER QUI FONDA UN ROYAUME A CARMONA EN ESPAGNE.

Nous avons mentionné que les Beni-Berzal descendent d'Ournîd, fils de Ouanten, fils d'Ourdîren, fils de Demmer, ainsi que l'a dit Ibn-Hazm', et nous avons ajouté qu'ils sont frères des Beni-Isdourîn, des Beni-Saghmar et des Beni-Itouweft. Ils habitaient l'Ifrikïa, dans le Salat et dans la partie du territoire d'El-Mecila qui touche à cette montagne.

Nombreux et puissants autrefois, ils soutinrent les doctrines kharedjites de l'hérésie nekkarite. Abou-Yezid, voulant se soustraire à la poursuite d'Ismaïl-el-Mansour et éviter la rencontre de Mohammed-Ibn-Khazer qui le guettait au passage, alla se réfugier chez eux. Serré de près par les troupes d'El-Mansour, il quitta le Salat et passa dans le Kîana 2, montagne où il lui arriva ce que nous avons déjà raconté. Les Berzal firent alors leur soumission au gouvernement fatemide et prirent pour patron Djafer-Ibn-Ali-Ibn-Hamdoun, seigneur d'El-Mecîla et du Zab. En l'an 360 (970-1), Djâfer se révolta contre El-MoëzzMådd et trouva dans les Beni-Berzal des partisans très-dévoués. Pendant qu'El-Hakem-el-Mostancer l'oméïade régnait sur l'Espagne, ils accompagnèrent Djâfer en ce pays et se firent incorporer dans les milices du khalife, avec plusieurs autres fractions de tribus zenatiennes et berbères. Ceci eut lieu à l'époque où ces peuples s'étaient rangés du côté des Oméïades pour combattre les Idricides. Les Beni-Berzal se distinguèrent en Espagne par leur bravoure et les bons services qu'ils rendirent à l'empire.

Le chambellan El-Mansour- Ibn-Abi-Amer, s'étant proposé d'enlever toute espèce d'autorité au khalife Hicham, parvint,

1 Ibn-Hazm fait descendre les Beni-Berzal de Demmer, mais sans indiquer le nom d'Ournîd parmi leurs ancêtres. V. p. 186 de ce volume. 2 C'est à tort que les manuscrits et le texte imprimé portent Ketama. 3 Voy. t. 1, p. 538 et tm, p. 211.

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