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pense de ce service, leurs chefs jouissent de plusieurs fiefs et tiennent, à la cour, un rang très honorable à côté des autres commandants de populations nomades.

Dans la province de Tripoli, ancienne demeure des Hoouara, se trouvent encore quelques fractions de cette tribu, les unes établies à demeure fixe, les autres vivant en nomades. Les Arabes de la tribu de Debbab se les sont partagées comme sujets, ainsi qu'ils ont fait à l'égard de plusieurs autres peuplades. Depuis que l'autorité de l'empire [hafside] a cessé de se faire sentir dans ces contrées, ils tiennent les Berbères sous leur domination, les traitant en esclaves corvéables à merci, et se servant d'eux comme auxiliaires dans leurs courses nomades et dans leurs expéditions militaires. Telle est la position des Terhouna et des Ourfla, tribus nomades, ainsi que des Medrîs, tribu-branche des Ounîfen qui demeure à Zenzour, village situé dans les dépendances de Tripoli.

Sur la frontière de cette province, du côté de Sort et de Barca, se tient une tribu hoouaride appelée les Mesrata. Nombreuse encore et très puissante, elle ne paie qu'une faible redevance aux Arabes, tribut qu'elle a l'air d'acquitter par condescendance. Comme elle s'occupa principalement du commerce, elle fait de fréquentes expéditions en Egypte et à Alexandrie. Ses marchands visitent aussi le Djerîd de l'Ifrîkïa et le pays des Noirs, voyage qu'ils ont encore aujourd'hui l'habitude d'entreprendre.

Il faut maintenant savoir qu'au midi de Tripoli et de Cabes on voit une chaîne de montagnes qui s'étend de l'ouest à l'est, et dont l'extrémité occidentale s'appelle le Djebel-Demmer. Cette partie de la chaîne est habitée par des peuplades louatiennes ainsi que la plaine qui se prolonge de là vers l'orient jusqu'à Cabes et Sfax. De l'autre côté, vers l'est, on trouve des peuplades nefouciennes. Le [Djebel-Demmer] a sept journées de longueur. A son extrémité orientale s'élève le Djebel-Nefouça, montagne située à trois journées au midi de Tripoli et portant aussi une longueur de sept journées. On y trouve une nombreuse population composée de Nefouça, de Maghraoua et de quelques familles sedratiennes. A l'est du Djebel-Nefouça, on rencontre le Djebel

Meslata, qui s'étend jusqu'à la ville de Sort et de là à Barca. Plusieurs tribus hoouarides y font leur séjour ainsi que dans la région qui sépare cette montagne de la ville de Mesrata. La chaîne tripolitaine traverse les territoires occupés par les Hoouara, les Nefouça et les Louata et se termine par le MontMeslata. C'est là où fleurissait, avant la conquête musulmane, la ville de Sabra, chef-lieu des Nefouça.

Barca fait aussi partie du territoire habité par les Hoouara. Zouîla, ville de la province de Barca, fut gouvernée par des rois appartenant à la famille hoouaride des Beni-Khattab. C'était la capitale de leurs états, et on la désignait par le nom du Zouîla des Beni-Khattab. Après la ruine de leur ville, cette famille passa dans le Fezzan, pays du Désert, où elle fonda un empire qui dura jusqu'au sixième siècle de l'hégire, quand Caracoch le Ghozz, surnommé En-Naceri, et mamlouk de Téki-ed-Dîn, neveu de Saladin, vint de l'Egypte et se rendit maître du Fezzan après s'être emparé de Zella et d'Audjela. Dans notre chapitre sur Ibn-Ghanîa de Maïorque, membre de la tribu almoravide des Messoufa, nous aurons l'occasion de parler de Caracoch. Mohammed-IbnKhattab-Ibn-Isliten-Ibn-Abd-Allah-Ibn-Sanfel-Ibn-Khattab, le dernier roi de cette dynastie, tomba entre les mains du vainqueur et mourut dans les tortures. On l'avait mis à la question. afin de le forcer à livrer ses trésors. Telle fut la fin de cette dynastie hoouaride.

Plusieurs endroits du Maghreb portent le nom de Hoouara parce qu'ils sont habités par des fractions de cette tribu. Elles y font paître des troupeaux de moutons, mais étant accablées d'impôts, elles ne montrent plus cette fierté et cette indépendance qui les distinguaient autrefois quand leurs nombreux guerriers s'illustraient par des victoires. Dispersées maintenant et affaiblies, elles sont tombées dans l'avilissement et subissent ainsi les décrets du Tout-Puissant. Parmi ces peuplades, une des mieux connues est celle du Maghreb central qui habite le Djebel-Hoouara, montagne qui domine la ville d'El-Bat'ha. On y rencontre aussi des Mesrata et d'autres familles de la même souche. Ils reconnaissent tous les Beni-Ishac pour chefs. On raconte que cette

montagne avait appartenu aux Beni-Iloumi, et qu'après la chute de leur puissance, les Hoouara vinrent s'y établir. Ils choisirent d'abord leurs chefs parmi les Beni-Abd-el-Azîz, une de leurs familles; mais dans la suite, les princes de la Calâ [-Beni-Hammad] les placèrent sous le commandement d'Ishac, cousin des Abd-el-Azîz. L'autorité passa d'Ishac à ses descendants, et son fils aîné, Mohammed, bâtit la forteresse appelée Calâ-t-Hoouara. Haïoun, frère de ce Mohammed, hérita du pouvoir et le transmit à ses enfants. Quand les Beni-Abd-el-Ouad eurent établi leur domination dans le Maghreb central, la famille de Haïoun s'attacha à leur fortune, et Yacoub, fils de Youçof et petit-fils de Haïoun, reçut du sultan Abou-Tachefîn le commandement des Beni-Toudjîn, peuple que ce prince venait de soumettre et rendre tributaire. Yacoub remplit sa tâche avec une grande habileté, ayant réussi à soumettre le pays et à dompter la fierté de cette tribu orgueilleuse. Quand les Mérinides enlevèrent le Maghreb central à la dynastie abd-el-ouadite, leur sultan, Abou-'l-Hacen, fit choix d'Abd-er-Rahman, fils de ce Yacoub, pour commander à la tribu [des Toudjîn]. Plus tard, il confia cette charge à Abder-Rahman-Ibn-Youçof, oncle du précédent, puis à Mohammed, fils d'Abd-er-Rahman. Dans la suite, la prospérité de cette branche des Hoouara s'évanouit, et la population de la montagne diminua rapidement par suite des attaques que les Beni-Abd-el-· Quad dirigèrent contre eux et des impôts oppressifs dont cette famille les accabla. Les Beni-Ishac perdirent alors toute leur influence, et ils sont restés dans la dégradation jusqu'à nos jours. Histoire des AzDADJA, DES MESTAÇA ET DES ADJÎÇA, TRIBUS SORTIES DE LA GRANDE BRANCHE DE BERNÈS.

Les Azdadja, appelés aussi les Ouzdadja, descendent aussi de Bernès. Plusieurs généalogistes berbères les ont cependant comptés au nombre des tribus zenatiennes ; ona même avancé que les Azdadja sont zenatiens et les Ouzdadja hoouarides, faisant ainsi d'une seule et même tribu deux peuples distincts.

Les Azdadja, tribu autrefois très nombreuse, habitaient le Maghreb central, aux environs d'Oran. Ils furent alors redou

tables par leur puissance et se signalèrent plus d'une fois dans les révoltes et guerres qui désolèrent ce pays.

Les Mestaça, peuple qui vit confondu avec eux, sont regardés tantôt comme des Azdadja et tantôt comme une branche collatérale de la même souche; leur ancêtre, Mecettas, ayant été, dit-on, frère d'Ouzdadj.

Parmi les membres de cette tribu qui se firent une certaine réputation, on remarque Chedjra-Ibn-Abd-el-Kerîm-el-Mestaci et Abou-Doleim-Ibn-Khattab. Celui-ci passa de Tlemcen en Espagne, et ses descendants tinrent un rang élevé parmi les légistes de Cordoue.

Les Beni-Mesguen, branche des Azdadja, demeuraient aux environs d'Oran quand Mohammed-Ibn-Abi-Aoun et Mohammed Ibn-Abdoun, généraux au service des Oméïades espagnols, vinrent se concerter avec eux afin d'obtenir possession de cette ville, Pendant sept ans ces chefs gardèrent leur conquête au nom du sultanoméïade. Obeid-Allah-el-Mehdi, fondateur de la dynastie fatemide, s'empara alors de Tèhert, ville dont il donna le commandement à Doouas-Ibn-Soulat-el-Lehîci de la tribu de Ketama, et sur les instances de celui-ci, les Berbères embrassèrent le parti des Fatemides et allèrent mettre le siège devant Oran. Ce fut en l'an 297 (909-10) que les troupes fatemides se mirent en marche, et, soutenues par les Beni-Mesguen, elles prirent la ville d'assaut et la livrèrent aux flammes. Mohammed-Ibn-Abi-Aoun se mit sous la protection de Doouas qui, ayant ensuite fait rebâtir Oran, y installa le chef auquel il venait donner refuge. Cette ville devint alors plus belle que jamais.

A cette époque Tlemcen eut pour émirs une famille de princes idrîcides descendus d'Ahmed, fils de Mohammed, fils de Soleiman, frère d'Idrîs l'ancien ; et on y reconnaissait la souveraineté des Oméïades. Sous le règne d'Abou-'l-Cacem, fils d'Obeid-Allah-el-Mehdi, le commandement de Tèhert fut exercé par AbouMalek-Yaghmoracen-Ibn-Abi-Chahma1. Les Berbères se révol

1. A la place d'Abou-Malek, au nominatif, les manuscrits et le texte imprimé portent Aba-Malek, à l'accusatif.

tèrent contre cet officier et le bloquèrent dans sa ville à l'époque
où Ibn-Abi-'l-Afia passa dans le Maghreb central afin d'y faire
reconnaître l'autorité des Oméïades. Parmi les chefs qui se ral-
lièrent en cette occasion à la cause des khalifes espagnols on
remarqua Mohammed-Ibn-Abi-Aoun, seigneur d'Oran. Abou-
'l-Cacem ayant alors envoyé son client, Meiçour, en Maghreb, à
la tête d'une armée, Ibn-Abi-Aoun fit sa soumission à cet officier
et obtint sa confirmation dans le commandement de la ville;
mais, après le départ du vainqueur, il embrassa de nouveau la
cause des Oméïades. Peu de temps après, survint la révolte
d'Abou-Yezîd. Tous les peuples berbères se soulevèrent alors
contre les Fatemides, et les Zenata, qui étaient devenus très
puissants, se rallièrent au parti des Oméïades. Yala-Ibn-Moham-
med-el-Ifreni [chef zenatien], qui avait été nommé gouverneur
du Maghreb par En-Nacer, le souverain oméïade, fit savoir à
ce prince que la soumission d'Ibn-Abi-Aoun n'était qu'apparente
et que la haine des Azdadja pour les Zenata, haine entretenue
par le proche voisinage des deux peuples, les empêchait d'être
fidèles à l'empire oméïade. Par suite de ces représentations il
obtint la permission de leur faire la guerre. Les Azdadja, cer-
nés dans la montagne de Guedéra, en l'an 343 (954-5), furent
écrasés et dispersés par Yala qui, aussitôt après cet exploit, mit
le siège devant Oran et l'emporta d'assaut. La ville fut incendiée
par son ordre ; une grande partie des Azdadja fut massacrée et
les personnages les plus considérables de cette tribu émigrèrent
en Espagne. Khazroun-Ibn-Mohammed, un de ces chefs, devint
officier supérieur des troupes entretenues par le vizir El-
Mansour-Ibn-Abi-Amer. Il servit ensuite sous El-Modaffer, fils
d'El-Mansour, et, lors de la guerre des Oméïades contre Ziri-
Ibn-Atïa, il accompagna le général Ouadeh en Maghreb. Ayant
alors relevé la ville d'Oran qui n'était qu'un monceau de ruines,
il s'y fixa avec sa famille et ses enfants qu'il envoya chercher à
Ifgan où ils habitaient alors. Depuis cette époque les Azdadja

1. Dans les manuscrits, ce nom est quelquefois écrit Mohammed-Ib::Aoun; ce qui paraît être une erreur de copiste.

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