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Ceux-ci, voulant l'arrêter, se battirent en désespérés et finirent par culbuter ses troupes. Dans cette affaire, Cochtémir et son fils perdirent la vie; le premier ayant reçu la mort de la main de Nair [fils de Kheiar]. Kheiar, s'étant ainsi mis en révolte ouverte, passa dans le Désert, et El-Achref confia le commandement des tribus arabes à Moaïkel, fils de Fadl-Ibn-Eiça et cousin paternel du chef insurgé. En 774 (4369-70) Moaïkel envoya son chambellan auprès du sultan pour solliciter la grâce de Kheiar. Le sultan consentit à oublier ce qui s'était passé, et en l'an 775, quand Kheiar se présenta à la cour, il lui pardonna tout et le réintégra dans le commandement. Kheiar mourut en 777 et eut pour successeur son frère Cara. Celui-ei mourut en 781 (1379). Sa place fut remplie par deux chefs à pouvoirs égaux : Moaïkel, fils de Fadl, fils d'Eiça, et Zamel, fils de Mouça, fils d'Eiça, fils de Mohenna; mais l'année même de leur nomination, ils furent remplacés par Nair, fils de Kheiar, fils de Mohenna.

Le véritable nom de Nâir était Mohammed; il exerce encore aujourd'hui le suprême commandement chez les Al-Fadl et chez toutes les tribus taïennes de la Syrie.

Le sultan El-Mélek-ed-Daher-Bercouc avait pour habitude, chaque fois que Nâir le mécontentait, de lui susciter un rival dans la personne de Mohammed, fils de Cara et cousin de Nâir. L'insubordination et la désobéissance de Nâir se prolongèrent encore, et le sultan, ayant reconnu que Mohammed, fils de Cara, connivait à cet état de choses, lui retira sa faveur et le remplaça dans le commandement des Arabes par Mouça, fils d'Assaf, fils de Mohenna. Nair, ayant été rejeté dans le Désert, sans avoir les moyens de nourrir ses partisans, vit leur nombre diminuer en même temps que ses propres ressources. Tel est encore l'état où il se trouve aujourd'hui.

Revenons maintenant aux autres tribus de cette catégorie.

Toute la tribu d'Amer-Ibn-Sâsâ demeurait dans le Nedjd; celle de Kilab occupait El-Hamaserïa et Er-Rébeda, localités des environs de Médine; la tribu de Kâb-Ibn-Rebiâ se tenait entre le Tihama de Médine et la Syrie; celle de Hilal-Ibn-Amer, ha

Tihama est un nom générique employé pour désigner les régions

bitait la plaine qui sépare Taïf du mont Ghazouan', et, la tribu de Nomaïr-Ibn-Amer demeurait avec celle de Hilal. On compte dans la même catégorie la tribu de Djochem qui habitait le Nedjd.

Lors de la promulgation de l'Islamisme, toutes ces tribus passèrent en Mésopotamie : les Nomaïr prirent possession de Harran et de la contrée voisine; les Hilal se fixèrent en Syrie et continuèrent à y demeurer jusqu'au moment où ils émigrèrent dans le Maghreb 2; événement dont nous aurons bientôt l'occasion de parler. Toutefois, une fraction de la tribu de Hilal resta dans la montagne où se trouve le château de Sarkhad 3 et qui porte encore le nom de Montagne des Beni-Hilal. Elle s'y adonna principalement à la culture de la terre. La tribu de Kilab-Ibn-Rebiâ s'empara du territoire et de la ville d'Alep, comme nous venons de le dire. Quatre branches de la tribu de Kâb-Ibn-Rebiâ entrèrent en Syrie, savoir: Ocaïl, Cochaïr, el-Harîch et Djâda. Trois d'entre elles s'éteignirent dans les temps islamiques; IbnHazm, en parlant de celle d'Ocaïl, la quatrième, dit qu'elle égalait en nombre toutes les tribus moderites prises ensemble. Les BeniMocalled, une famille de cette tribu, prirent possession de Mosul, ville où la famille de Hamdan et celle de Taghleb avaient déjà régné. Elle demeura maîtresse de Mosul et de ses environs, ainsi que d'Alep, jusqu'à l'époque où elle perdit sa puissance et reprit la vie nomade. Alors elle s'empara de plusieurs territoires situés de tous côtés, se faisant l'héritière des Arabes bédouins, les anciens propriétaires. C'est de la tribu d'Ocaïl que la famille d'El-Montafic tire son origine. Amer, le père d'El-Montafic, était

situées entre la Mer-Rouge et la chaîne de montagnes et hauts plateaux qui s'étendent depuis le Yémen jusqu'à Yenbô.

1 La ville de Taïf est située à trois journées est de la Mecque. La petite plaine sablonneuse dans laquelle elle s'éleve est entourée par une chaîne de collines nommée Ghazouan.

2 L'auteur aurait dû écrire: jusqu'au moment où ils commencèrent l'émigration qui les conduisit dans le Maghreb.

3 Sarkhad, ville du Hauran, territoire de la province de Damas, est située à dix journées de Baghdad (Aboulfeda.)

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fils d'Ocaïl. Ses descendants habitent le pays de Teima, dans le Nedjd. Encore aujourd'hui la tribu d'El-Montafic occupe la portion du territoire de Basra que forment les marais boisés situés entre cette ville et Koufa et que l'on appelle les Bas-fonds (ElBataih).

Les Montafic sont gouvernés par la famille d'El-Mârouf. On trouve dans le Maghreb quelques tribus sorties de celle d'El-Monta fic et qui entrèrent dans ce pays avec la tribu de Hilal-Ibn-Amer. Elles occupent cette partie du Maghreb-el -Acsa qui est située entre les villes de Fez et de Maroc. On les appelle El-Kholt, nom, dit El-Djordjani qui est commun à tous les descendants d'ElMontafic. A côté des Beni-'l-Montafic, au midi de Basra, trouve une tribu sœur de celle-ci; on la nomme Beni-Amer. Son aïeul, Amer, était fils d'Auf, fils de Malek, fils d'Auf, fils d'Amer, père d'El-Montafic. Les Beni-Amer enlevèrent les provinces de Bahrein et d'Oman à Abou-l'-Hocein-el-Asghar, de la tribu de Taghleb. Ces localités avaient appartenu aux tribus d'El-Azd, Temîm et Abd-Caïs, avant de devenir l'héritage des Beni-Amer. Nous apprenons d'Ibn-Said que cette même tribu enleva la province de Yémama aux Beni-Kilab, et qu'en l'an 650 (1252-3) elle reconnaissait pour chefs les Beni-Asfour [famille sortie de la même souche qu'elle-même]. Parmi les descendants d'Ocaïl on remarqua les Beni-Khafadja, dont l'aïeul Khafadja était fils d'Amr et petit-fils d'Ocaïl. Les Beni-Khafadja allèrent s'emparer des plaines de l'Izac et s'y établirent. Dans les nombreuses guerres qu'ils eurent à soutenir, ils parvinrent à se faire une certaine renommée. De nos jours, cette tribu habite les pays situés entre le Tigre et l'Euphrate, et se distingue autant par sa puissance que par son nombre. Une autre branche de la tribu

1 Les Montafic se trouvent encore dans cette localité.

Le cadi Abou-'l-Hacen-Ali-el-Djordjani, docteur du rite chaféite, fut profondément versé dans toutes les sciences cultivées chez les Musulmans. Il mourut à Neiçapour, en 366 (967 de J. C.). Entre autres ouvrages, il laissa un traité sur les généalogies, intitulé El-Mouethac (l'authentique). Sa vie se trouve dans Ibn-Khallikan, vol. u, page 221 de la traduction.

d'Ocaïl est celle d'Abbada-Ibn-Ocaïl. On l'appelle aussi El-Akhaïl parce que Abbada lui-même portait le sobriquet d'El-Akhial 1. Cette tribu demeure maintenant en Irac, au milieu des Beni-'lMontafic, et dans cette portion d'El-Bataïh qui est située entre Basra, Koufa et Ouacet. D'après ce que nous avons entendu dire, le chef qui exerce le commandement chez elle est soutenu par de nombreux guerriers : il s'appelle Kian-Ibn-Saleh, mais nous ne savons s'il appartient, par la naissance, à la famille des Mârouf, émirs d'El-Bataïh, ou à celle des Abbada-el-Akhaïl.

Telles sont les notions que nous pouvons fournir relativement aux descendants d'Amer-Ibn-Sâsâ et à la manière dont ils obtinrent possession des territoires occupés précédemment par les Arabes sortis des souches de Kehlan, de Rebiâ et de Moder. En ce qui touche Kehlan, il ne s'y trouve plus aujourd'hui, à notre connaissance, aucune tribu qui tire son origine de lui. Quant aux descendants de Rebiâ, ils ont traversé les provinces de Fars et de Kirman et font paître maintenant leurs troupeaux entre ce dernier pays et Khoraçan. Un très-petit nombre d'entre eux est resté dans l'Irac et s'est établi à El-Bataïh. Les Beni-Meïah, une de leurs familles, se regardent comme parents des Kerfa 2. Avec eux habite un mélange de familles sorties des grandes tribus d'Aous et de Khazredj. L'émir actuel de la tribu de Rebià s'intitule le Cheikh Ouéli, et celui des Aous et Khazredj porte le nom de Taher-Ibn-Khidr.

3

Voilà les renseignements qu'après les recherches les plus diligentes, nous sommes parvenus à réunir sur l'état actuel des tri.. bus arabes de la troisième catégorie qui habitent l'Orient. Nous allons maintenant indiquer les branches de ces tribus qui sont passées dans le Maghreb. [Avant cette émigration] les Arabes [nomades] ne s'étaient jamais établis en Maghreb, ni antérieurement ni postérieurement à l'Islamisme. La raison en était que la race berbère occupait ce pays et empêchait les autres peuples

1 Akhial, au pluriel Akhaïl, signific marqué de taches de rousseur. 2 Plus loin il sera question de cette famille.

3 Voyez l'Introduction.

de s'y fixer. Il est vrai qu'Ifricos-Ibn-Saïfi, ce prince de la dynastie des Tobba [rois du Yémen], qui donna son nom à l'Ifrîkia, y avait conduit une expédition et s'en était rendu maître ; mais, après y avoir laissé les tribus himyerites de Ketama et de Sanhadja, il s'en alla. Ces deux peuples devinrent graduellement Berbères et se confondirent avec cette race, de sorte que l'autorité des Arabes en Ifrîkïa disparut tout-à-fait.

Lors de la promulgation de l'Islamisme, le progrès de cette religion mit les Arabes en état de vaincre les autres nations. Leurs armées pénétrèrent dans le Maghreb et prirent toutes les villes de ce pays. Ils eurent alors beaucoup à souffrir dans leurs guerres contre les Berbères, qui, comme nous l'avons rapporté ailleurs, sur l'autorité d'Ibn-Abi-Yezîd', apostasièrent jusqu'à douze fois avant que la vraie religion eût pris racine chez eux. Aussi, les Arabes ne s'y établirent point comme habitans de tentes et comme tribus nomades : le besoin d'assurer leur domination dans ce pays les ayant obligés à se tenir dans les villes.

Ainsi, comme nous venons de le dire, les Arabes n'avaient pas habité les plaines du Maghreb; ce ne fut qu'au milieu du cinquième siècle qu'ils vinrent y faire leur demeure et se disperser par tribus, pour aller camper dans toutes les parties de cette vaste région.

Nous allons maintenant exposer en détail les causes de cette migration.

les tribus de hilal et de sOLEIM, ARABES DE LA QUATRIÈME RACE, ENTRENT EN AFRIQUE. SUITES DE CET ÉVÉNEMENT.

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Depuis l'avènement de la dynastie abbacide, les tribus formant les deux grandes familles moderites de Hilal et de Soleim avaient continué à vivre en nomades et à parcourir avec leurs troupeaux, les déserts du Hidjaz qui touchent à la province du

4 Abou-Mohammed-Aïoub, fils de l'Abou-Yezîd qui fit une guerre si acharnée à la dynastie des Fatemides, était très-versé dans la connaissance des généalogies berbères. Il demeura pendant quelque temps à la cour de Cordoue, auprès du célèbre ministre El-Mansour. L'histoire d'Abou-Yezid se trouve dans cet ouvrage.

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