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jour. Le chef auquel ils obéissent maintenant s'appelle HamîdIbn-Senan-Ibn-Othman-Ibn-Ghalboun. Les Alaouna sont voisins des Azza, Arabes du territoire de Barca, et des Methaïna, fraction des Hoouara, laquelle est établie à demeure fixe.

Au midi du pays occupé par les Debbab, on trouve les Nacera, tribu dont l'aïeul, du même nom, était fils de Khafaf-Ibn-Imr'l-Caïs-Ibn-Bohtha-Ibn-Soleim. Maintenant, si nous admettons l'opinion d'Et-Tidjani qui regarde la tribu de Zoghb, père de Debbab, comme issue de Malek, fils de Khafaf, les Zoghb seraient frères des Nacera. Or, il est peu vraisemblable qu'une tribu [comme les Zoghb] soit appelée [tribu nacerienne] du nom d'une autre tribu [les Nacera], provenant de la même souche. Si, au contraire, nous admettons l'opinion d'Ibn-el-Kelbi, qui regarde les Zoghb comme descendants de Nacera 1, la chose serait bien plus probable. En ce dernier cas, la tribu dont il s'agit [c'est-àdire, les Zoghb] aurait porté le nom de son père Nacera, à l'exclusion des Debbab et des autres branches de la même grande famille; fait dont on trouve, du reste, plusieurs exemples dans la filiation de tribus.

Les Nacera habitent les pays de Fezzan et Queddan.

Ayant fini notre notice des Debbab, nous allons parler de leurs voisins, les Azza, tribu qui habite plus à l'est et occupe le pays de Barca. Ce territoire est maintenant changé en désert par la ruine de ses villes et de ses villages. Autrefois, la dynastie des Sanhadja y avait fait prospérer l'agriculture, mais les Arabes nomades-pasteurs y portèrent la dévastation et parvinrent à rétrécir graduellement, par leurs envahissements et leurs brigandages, les limites du pays cultivé. Tous les arts qui fournissent à la subsistance de l'homme cessèrent d'y être exercés; la civilisation y fut ruinée et le pays changé en désert.

La plupart des Arabes qui occupent ces lieux s'adonnent à l'agriculture comme moyen d'existence; ils labourent la terre à l'aide des chameaux et des ânes; quelquefois même, quand ils sont très-pauvres et que les autres moyens leur manquent, ils

1 Voyez ci-dessus, pages 434, 436.

font traîner la charrue par leurs femmes. Dans les courses que la disette les oblige quelquefois à entreprendre, ils conduisent leurs troupeaux aux régions dactylifères du midi: à Audjela, à Santeria, aux oasis, aux déserts, aux sables au-delà des oasis et même au pays des Kanem, peuple nègre le plus proche d'eux. La ville qu'habitent ces Arabes s'appelle Bernîc [Berenice]. Leur chef se tient à Barca. Celui qui les gouverne aujourd'hui appartient à la famille des Beni-Djâfer et s'appelle Abou-Dib. Les pèlerins dont les caravanes traversent ce territoire, se louent beaucoup de leur conduite paisible et des bons sentiments qui les empêchent d'attaquer ceux qui vont visiter la maison de Dieu. Ils parlent aussi avec approbation de l'empressement que ces tribus montrent à apporter des vivres au marché tenu par la caravane; et quiconque aura fait un atome de bien en retrouvera la récompense 1.

Quant à l'origine de cette peuplade, je l'ignore, mais, j'ai entendu dire à des gens dignes de foi et membres de la tribu de Debbab, qu'ils avaient appris de Kharîs, fils d'Abou-Dîb, cheikh des Arabes dont nous parlons, qu'ils sont la postérité d'une fraction des Kaoub qui resta sur le territoire de Barca. D'un autre côté, les généalogistes de la tribu de Hilal les disent enfants de Rebiâ-Ibn-Amer, frère de Hilal-Ibn-Amer; d'autres généalogistes encore pensent qu'ils doivent appartenir, ainsi que les Kaoub, à la branche des Azza, peuple, disent-ils, qui descend de Héïb. Ils ajoutent que le commandement des Azza appartient aux Aulad-Ahmed, que leur chef se nomme Abou-Dib, et que leurs voisins, les Methaïna, font partie de la tribu de Hoouara. SalemIbn-el-Torkïa, chef des Aulad-Mocaddem, tribu qui avoisine les Azza du côté de l'Acaba 3, m'a dit qu'ils sont une branche de la tribu de Mesrata, dernier reste de celle de Hoouara. Telle est

1 Coran, sourate 99, verset 7.

2 Dans un des manuscrits, ce nom est écrit Methania, variante due à la transposition des points diacritiques.

3 C'est l'Acaba-t-el-Kebîra, sur la route de Cyrénaïque à Alexandrie, que l'auteur veut désigner ici.

aussi l'opinion sur laquelle j'ai trouvé, en Égypte, tous les meilleurs généalogistes d'accord. J'ai rencontré dans ce pays plusieurs habitants de Barca qui ont l'habitude de s'y rendre de temps en temps.

FIN DE L'HISTOIRE DES ARABES DE LA QUATRIÈME RACE,
AINSI QUE DE LA SECONDE PARTIE DE L'HISTOIRE GÉNÉRALE
DE. CE PEUPLE. SUIT LA TROISIÈME PARTIE,

RENFERMANT L'HISTOIRE DES BERBÈRES.

TRIBUS ET DYNASTIES BERBERES

DE L'AFRIQUE SEPTENTRIONALE.

HISTOIRE

NOTICE SUR LES TRIBUS ET LES DYNASTIES DES BERBÈRES, L'UN DES
DEUX GRANDS PEUPLES QUI HABITENT LE MAGHREB.
DE CETTE RACE DEPUIS LES TEMPS LES PLUS ANCIENS JUSQU'A NOS
JOURS ET EXPOSÉ DES DIVERSES OPINIONS QU'ON A ÉNONCÉES AU

SUJET DE SON ORIGINE.

Depuis les temps les plus anciens cette race d'hommes habite le Maghreb dont elle a peuplé les plaines, les montagnes, les plateaux, les régions maritimes, les campagnes et les villes. Ils construisent leurs demeures soit de pierres et d'argile, soit de roseaux et broussailles, ou bien encore de toiles faites avec du crin ou du poil de chameau. Ceux d'entre les Berbères qui jouissent de la puissance et qui dominent les autres s'adonnent à la vie nomade et parcourent, avec leurs troupeaux, les pâturages auxquels un court voyage peut les amener; jamais ils ne quittent l'intérieur du Tell pour entrer dans les vastes plaines du Désert. Ils gagnent leur vie à élever des moutons et des bœufs; se réservant ordinairement les chevaux pour la selle et pour la propagation de l'espèce. Une partie des Berbères nomades fait aussi métier d'élever des chameaux; se donnant ainsi une occupation qui est plutôt celle des Arabes. Les Berbères de la classe pauvre tirent leur subsistance du produit de leurs champs et des bestiaux qu'ils élèvent chez eux; mais la haute classe, celle qui vit en nomade, parcourt le pays avec ses chameaux, et toujours la lance en main, elle s'occupe également à multiplier ses troupeaux et à dévaliser les voyageurs.

Leurs habillements et presque tous leurs autres effets sont en

laine. Ils s'enveloppent de vêtements rayés dont ils rejettent un des bouts sur l'épaule gauche, et par dessus tout, ils laissent flotter des burnous noirs. Ils vont, en général, la tête nue, et de temps à autre ils se la font raser.

Leur langage est un idiôme étranger, différent de tout autre : circonstance qui leur a valu le nom de Berbères. Voici comment on raconte la chose: Ifrîcos, fils de Caïs-Ibn-Saïfi, l'un des rois [du Yémen appelés] Tobba1, envahit le Maghreb et l'Ifrîkïa, et y bâtit des bourgs et des villes après en avoir tué le roi, El-Djerdjîs. Ce fut même d'après lui, à ce que l'on prétend, que ce pays fut nommé l'Ifrîkïa. Lorsqu'il eut vu ce peuple de race étrangère et qu'il l'eut entendu parler un langage dont les variétés et les dialectes frappèrent son attention, il céda à l'étonnement et s'écria « Quelle berbera est la vôtre ! » On les nomma Berbères pour cette raison. Le mot berbera signifie, en arabe, un mélange de cris inintelligibles; de là on dit, en parlant du lion, qu'il berbère, quand il pousse des rugissements confus.

Les hommes versés dans la science des généalogies s'accordent à rattacher toutes les branches de ce peuple à deux grandes souches celle de Bernès et celle de Madghis 2. Comme ce dernier était surnommé El-Abter, on appelle ses descendants El-Botr3, de même que l'on désigne par le nom de Beranès les familles qui tirent leur origine de Bernès. Madghis et Bernès s'appelaient chacun fils de Berr; cependant, les généalogistes ne s'accordent pas tous à les regarder comme issus d'un même père : Ibn-Hazm,

1 Voyez l'Essai de M. C. de Perceval, tome 1, p 61 et suiv. 2 Ce nom s'écrit tantôt Madyhis et tantôt Madghès; quelquefois même il se présente sous la forme de Madaghs. Quant au mot Bernès, arabe brns, on peut aussi le prononcer Bornos ou Bornès.

en.

3 Botr est le pluriel d'Abter, adjectif arabe qui signifie sans queue, sans postérité. L'emploi systématique d'un terme arabe, d'abord au singulier, comme surnom de Madghis, et ensuite au pluriel, pour désigner sa postérité, prouve que la langue arabe était très-répandue dans la Mauritanie à l'époque où les savants berbères entreprirent la tàche de confectionner, ou fabriquer, l'arbre généalogique de leur nation. D'autres circonstances portent à croire que ces listes furent dressées dans le quatrième siècle de l'hégire, et rédigées alors en arabe.

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