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et généralement connu sous le nom d'Ibn-Methala, s'empressa de faire sa soumission et d'expédier une ambassade à En-Nacer, Son fils Mohammed, qu'il envoya ensuite à la cour des Oméïades pour renouveler ses assurances de dévouement, reçut d'EnNacer un accueil fort honorable et la promesse que tous les ar→ ticles de l'amnistie accordée à son père seraient fidèlement ob→ servés. Les Beni-Mohammed suivirent l'exemple de leur parent et obtinrent les mêmes avantages que lui, en faisant leur sou→ mission. Deux de ces princes se rendirent en personne à la cour d'En-Nacer le premier, qui se nommait Mohammed, était fils d'Eïça-Ibn-Ahmed-Ibn-Mohammed; l'autre, appelé El-Hacen, avait pour père El-Cacem, fils d'Ibrahim-Ibn-Mohammed.

Depuis le temps où El-Hacen-Ibn-Mohammed-El-Haddjam s'était emparé du commandement, à la suite de son insurrection contre Ibn-Abi-l-Afia, les Idricides avaient toujours reconnu pour chefs leurs parents de la famille Mohammed. C'est ainsi qu'après la fuíte de Mouça-Ibn-Abi-l-Afïa, ils mirent à leur tête El-Cacem-Ibn-Mohammed, surnommé Kennoun. Ce prince éten- / dit son autorité sur tout le Maghreb, à l'exception de Fez, et se montra partisan zélé des Fatemides. Il mourut, l'an 337 (948-9), dans la forteresse de Hadjer-en-Nesr. Son fils et successeur, Abou-'l-Aïch-Ahmed, se distingua par sa connaissance de la loi et des traditions historiques; sa générosité et sa bravoure égalaient son savoir; aussi le désignait-on ordinairement par l'appellation d'Ahmed-el-Fadel (Ahmed rempli de mérite). Emporté par sa prédilection pour la dynastie oméïade, Ahmed rompit avec les Fatemides pour embrasser le parti d'En-Nacer, et fit célébrer la prière au nom de ce souverain dans toutes les mosquées de ses états. Quand les peuples du Maghreb entier, jusqu'à Sidjilmessa, lui eurent prêté le serment de fidélité, les

1 Deux princes idricides portaient le surnom d'Abou-'l-Aïch; l'un descendait d'El-Cacem-Ibu-Idris, et l'autre d'Omar-Ibn-Idris. Selon la table généalogique que l'on trouve dans les manuscrits de l'Histoire des Berbères, le premier se pommait Ahmed et était fils d'El-Cacem, fils de Mohammed, fils d'El-Cacem, fils d'Idrîs. Le second était fils d'Idrîs, fils d'Omar, fils d'Idris.

habitants de Fez suivirent leur exemple et reçurent de lui pour gouverneur le nommé Mohammed-Ibn-el-Hacen.

En l'an 338 (949-50), Mohammed, fils d'Abou-'l-Aïch-IbnMethala et petit-fils d'Idris-Ibn-Omar, se rendit en Espagne comme envoyé de son père auprès d'En-Nacer, et il se trouvait encore dans la capitale du royaume oméïade, quand il apprit la mort de l'auteur de ses jours. Nommé par En-Nacer au commandement qui venait de vaquer, il obtint de lui un escorte et partit pour le siége de son gouvernement; mais déjà son cousin Eïça, fils d'Abou-'l-Aïch et petit-fils de Kennoun, avait profité de son absence pour s'emparer de Tikîças et des trésors amassés par Ibn-Methala. A l'approche de leur nouveau gouverneur, les Berbères ghomarites marchèrent contre l'usurpateur et, lui ayant coupé le chemin, ils le criblèrent de blessures et massacrèrent tous ses compagnons. Cet événement eut lieu dans le pays des Ghomara.

En cette même année, En-Nacer fit passer en Maghreb quelques-uns de ses généraux. Ahmed-Ibn-Yala y arriva le premier avec un corps de troupes destiné à agir contre les Beni-Mohammed. Invités par lui à démanteler la forteresse de Tétouan, ces princes y donnèrent leur consentement avec beaucoup de répugnance, et s'excusèrent de la résistance qu'ils avaient montrée d'abord à cette sommation. Après le départ de cet officier, ils refusèrent de remplir leurs engagements; aussi, en l'an 339, EnNacer envoya contre eux une armée sous les ordres de HamîdIbn-Yezel-el-Miknaçi. Comme les Idrîcides s'étaient avancés jusqu'à la rivière Laou pour s'opposer au progrès de l'ennemi, Hamid leur infligea un châtiment si rude qu'il ne leur resta plus qu'à faire une prompte soumission. La ville de Tanger sortit alors des mains d'Abou-'l-Aïch, émir des Beni-Mohammed, et passa dans celles d'En-Nacer. Les vainqueurs laissèrent Abou-'lAïch en possession d'Asîla, sous la condition d'y faire reconnaître la suzeraineté des Oméïades. Les armées d'En-Nacer s'avancérent alors graduellement à travers les plaines du Maghreb, en soumettant les populations qui y faisaient leur séjour. Les émirs zenato-maghraouiens se rallièrent aux Oméïades; les Beni-Ifren

et les Miknaça en firent de même, de sorte que l'empire des BeniMohammed fut gravement ébranlé.

Leur émir, Abou-'l-Aïch, ayant confié le commandement à son frère, El-Hacen-Ibn-Kennoun, obtint d'En-Nacer l'autorisation de passer en Espagne, afin de prendre part à la guerre sainte, et à chacune des trente stations qui séparaient Algésiras de la frontière chrétienne, il trouva un palais disposé pour sa réception. Après avoir reçu d'En-Nacer un accueil très-gracieux et un traitement de mille pièces d'or par jour, il alla combattre les infidèles, et trouva le martyre en l'an 343 (954-5).

Djouher-el-Kateb, général d'El-Moezz le fatemide, fit alors une expédition en Maghreb, d'après les ordres de son souverain, et détrôna les princes qui régnaient dans cette contrée. El-HacenIbn-Kennoun s'enferma dans le château d'En-Nesr, boulevard de la dynastie idrîcide, et, de là, envoya à Djouher une déclaration d'obéissance. Par cette démarche, il conjura le danger dont il se voyait menacé; mais, à peine eut-il appris l'évacuation du Maghreb par le général fatemide, qu'il y rétablit de nouveau l'autorité d'En-Nacer. Depuis lors, il resta toujours fidèle à ce souverain qui mourut en l'an 350 (961).

El-Hakem [successeur d'En-Nacer] prit alors la résolution de mettre les frontières du Maghreb à l'abri d'insultes, afin de consolider l'influence des Oméïades dans tout ce pays, et il trouva chez ses alliés, les princes zenatiens, le plus vif empressement à le seconder dans son projet. Il en résulta une guerre entre ces chefs et les princes sanhadjiens, Bologguîn et Zîri, guerre dont nous avons déjà parlé.

En 362 (972-3), El-Moëzz-Mâdd envoya une première expédition en Maghreb sous la conduite de Bologguin, fils de Zîri. Cet officier défit les Zenata, et s'étant porté en avant, mit ElHacen-Ibn-Kennoun dans la nécessité de répudier l'autorité des Oméïades et de faire sa soumission au gouvernement fatemide.

La même année, aussitôt après la retraite de Bologguîn, ElHakem fit passer en Maghreb un corps de troupes sous la conduite de son vizir, Mohammed-Ibn-Cacem-Ibn-Tamlès, auquel il avait donné l'ordre d'attaquer El-Hacen-Ibn-Kennoun et les

Beni-Mohammed. La victoire se déclara pour le prince idricide, à la suite d'une bataille dans laquelle Ibn-Tamlès et la majeure partie de ses troupes, tant espagnoles qu'africaines, trouvèrent la mort. Les débris de cette armée parvinrent à regagner Ceuta d'où ils adressèrent à El-Hakem une demande de secours. Le souverain oméïade y répondit en faisant partir pour l'Afrique un de ses clients, le célèbre Ghaleb, général dont la grande habileté était universellement reconnue. Ayant mis à sa disposition autant d'argent et de troupes que les circonstances avaient rendus nécessaires, il lui ordonna de détrôner les Idrîcides et de les envoyer en Espagne. « Pars, lui dit-il; pars, Ghaleb, comme » un homme qui ne devra revenir vivant à moins d'être victo>> rieux, et qui ne pourra se faire pardonner une défaite à moins » de mourir sur le champ de bataille1. »

El-Hacen, ayant entendu la nouvelle de ces préparatifs, évacua la ville de Basra et envoya son harem et ses trésors à Hadjeren-Nesr, forteresse idricienne qui s'élevait auprès de Ceuta. Ghaleb l'assiégea alors dans Casr-Masmouda; puis, à la suite de plusieurs journées de combats, il réussit à corrompre, avec de l'argent, les chefs des Berbères ghomarides et des milices qui servaient sous le drapeau de son adversaire. El-Hacen fut aban-donné par ses troupes et dut se jeter dans le Hadjer-en-Nesr et y soutenir un siége. Pendant ce temps, El-Hakem organisa un corps de renforts, composé d'Arabes attachés au service du gouvernement oméïade et de troupes tirées des garnisons qui couvraient les frontières de l'empire. En 363 (973-4), cette armée passa le Détroit sous la conduite de Yahya-Ibn-Mohammed-IbnHachem-et-Todjîbi, vizir commandant de la Frontière supérieure (Aragon). Ce général, accompagné de sa famille et des gens de sa maison, opéra sa jonction avec Ghaleb sous les murs de la forteresse assiégée. Ils attaquèrent alors la place si vigoureusement qu'El-Hacen consentit à la livrer pour avoir la vie sauve.

Le texte arabe dit, avec une grande concision: « Pars, Ghaleb ! » comme un homme qui ne doit revenir que vivant et victorieux, ou » bien, mort et excusé.>>

Ghaleb tourna ensuite ses armes contre les princes idricides établis dans le Rif, et tout en les dépossédant de leurs châteaux, il leur fit grâce comme à leur cousin. De là, il alla prendre posses¬ sion de Fez, et il donna à Mohammed-Ibn-Ali-Ibn-Caschouch le commandement du quartier des Cairouanides, pendant qu'Abdel-Kerîm-Ibn-Thâleba-el-Djodami s'installait, par ses ordres, dans celui des Andalous. Ayant ainsi pacifié le Maghreb, établi des gouverneurs dans toutes les provinces et enlevé ce pays à la domination des Fatemides, il partit pour Cordoue, emmenant avec lui El-Hacen-Ibn-Kennoun et les autres princes de la famille d'Idrîs. Ces événements se passèrent en l'an 364 (974-5).

El-Hakem et tous les notables de Cordoue montèrent à cheval pour aller au-devant du vainqueur, et l'entrée triomphale de ce chef fut une des plus belles dont la capitale de la dynastie oméïade eut jamais été témoin. Ne se bornant pas à pardonner au prince idricide et à exécuter toutes les clauses de la capitulation, le souverain oméïade prodigua des cadeaux, des pelisses d'honneur, des bêtes de somme, des pensions et des gratifications à lui et à tous ses compagnons; il inscrivit même sept cents guerriers maghrebins de leur suite sur les contrôles de l'ar

mée.

Trois années plus tard, El-Hakem chercha querelle à El-Hacen au sujet d'une masse d'ambre que celui-ci, étant encore sur le trône, avait reçue d'un des ports maghrebins et dont il avait fait faire un tabouret pour s'y appuyer, tantôt le coude, tantôt la tête. Il demanda la remise de ce meuble en déclarant que ses bonnes grâces seraient assurées pour toujours au prince idrîcide s'il voulait le lui livrer. El-Hacen repoussa cette proposition, et bien qu'il fût au courant des intrigues que ses cousins ourdissaient contre lui, il céda à son mauvais naturel et persista dans son refus. Une prompte disgrâce et la confiscation, non seulement du morceau d'ambre, mais aussi de toutes ses richesses, furent le résultat de son obstination.

L'autorité des Oméïades s'étant raffermie dans le Maghreb, tous les émirs nommés par El-Hakem réunirent leurs forces, afin de repousser Bologguîn. Le vizir El-Mashafi donna alors le gou

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