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hammed-Ibn-el-Hakim ',Dafer-es-Sinan et Akhoua, affranchis de l'émir Abou-Zékérïa II, Mohammed-el-Mediouni, Mohammedel-Medjerci et Mohammed-el-Botouï 2. Il lui envoya aussi un des plus brillants guerriers de la race zenatienne, Abd-el-Hack-IbnOthman le mérinide. Ce chef avait quitté l'Espagne pour se rendre auprès d'Ibn-Ghamr, ainsi que nous le raconterons [dans un des derniers chapitres du quatrième volume]. Un autre chef que le gouverneur de Bougie envoya au sultan fut Abou-RechidIbn-Mohammed-Ibn-Youçof, de la famille des Abd-el-Ouad. Tous ces officiers se mirent en marche avec leurs gens et serviteurs et joignirent le sultan à Constantine.

Abou-Yahya-Abou-Bekr, ayant obtenu des renseignements très exacts sur la position des affaires en Ifrîkïa, résolut d'entreprendre une nouvelle expédition contre Tunis, et, après avoir pris pour chambellan Abou-Abd-Allah-Ibn-el-Caloun et pour vice-chambellan Abou-'l-Hacen-Ibn-Omar, il quitta le camp près de Constantine et se mit en marche dans le mois de Safer 718 (avril 1318). A Laribus, il opéra sa jonction avec les troupes fournies par les Hoouara et commandées par Soleiman-IbnDjamê. Elles lui apprirent qu'Abou-Darba s'était enfui de Bédja où il avait eu l'intention d'attendre et de livrer bataille. Le sultan leva son camp à l'instant même et poussa rapidement en avant. Moulahem-Ibn-Omarle rencontra en route et lui fit encore agréer sa soumission. L'armée continua toujours la poursuite d'Abou-Darba et arriva bientôt sous les murs de Cairouan dont le gouverneur et les cheikhs vinrent jurer fidélité au sultan. Alors on cessa de courir après l'ennemi et l'on prit le chemin de Tunis.

Mohammed-Ibn-el-Fallac, l'officier auquel Abou-Darba avait confié la défense de la capitale, fit sortir ses archers dans la plaine et y livra un combat qui dura une heure ; la ville fut alors emportée d'assaut, les faubourgs mis au pillage et il y perdit la vie. Dans le mois de Rebiâ [premier ?] de cette année (mai

1. Les manuscrits portent, à tort; El-Hakem. 2. Dans le texte arabe, on lit El-Botouni.

juin 1318), le sultan entra à Tunis où il resta assez de temps pour recevoir de toute la population [le serment de fidélité]. Il donna le commandement de la chorta (cavalerie de police) à Meimoun-Ibn-Abi-Zeid et le chargea de gouverner la ville durant son absence. S'étant alors mis à la poursuite d'Abou-Darba, il l'atteignit à Messouh, dans le pays des Hoouara, et lui tua beaucoup de monde. Dans cette journée on compta parmi les morts Abou-Abd-Allah-Ibn-es-Chehîd, cheikh almohade et membre de la famille royale, Abou-Abd-Allah-Ibn-Yacîn, autre cheikh almohade, et Abou-'l-Fadl-el- Bédjaï 1, l'un des secrétaires d'état. Abou-Mohammed-Abd-Allah-Ibn-Yaghmor, premier ministre de l'empire, fut fait prisonnier et conduit devant le sultan qui lui accorda non seulement la vie mais de grandes marques de considération. Quelque temps après, il fut rétabli dans son ministère. Dans le mois de Redjeb (septembre), le sultan rentra à Tunis. Revenons au sultan Abou-Yahya 2-el-Lihyani. En 717(1317), quand ce prince fut averti que le sultan [Abou-Yahya-AbouBekr] marchait sur Tunis pour la seconde fois et que les Almohades et les Arabes avaient proclamé Abou-Darba, il quitta Cabes et se rendit dans la province de Tripoli. Ensuite il reçut la nouvelle de la retraite du sultan, ce qui le décida à se fixer dans cette ville. Il établit le siège de son gouvernement dans le Tarma, édifice qu'il avait fait bàtir contre la muraille de la ville, du côté de la mer, et il envoya ses percepteurs dans les pays voisins pour y recueillir l'impôt. Abou-Abd-Allah-Ibn-Yacoub, parent de son chambellan, et Hedjrès-Ibn-Morghem, chef des Djouari debbabiens, furent chargés de soumettre les montagnes de Tripoli. Ils réduisirent les forts de cette région et se firent payer l'impôt dans toutes les contrées qui s'étendent de là jusqu'à Barca, et Ibn-Yacoub prit au service du sultan les Al-Soleiman et les Al-Salem, Arabes de la tribu de Debbab. Il revint ensuite auprès de son maître. Ce prince, ayant alors appris que

1. Variantes: Et-Tidjani, Et-Tidjami.

2. Les manuscrits portent, à tort, Abou-Eïça.

l'armée de son fils Abou-Darba avait essuyé une déroute totale, fournit des sommes considérables à son chambellan Abou-Zékéria-Ibn-Yacoub et à son vizir Abou-Abd-Allah-Ibn-Yacîn, en les chargeant d'aller lever des troupes chez les Arabes. Tout cet argent fut distribué aux Allac et aux Debbab.

Abou-Darba s'était encore mis en marche pour atteindre Cairouan, quand le sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr quitta Tunis, le 29 Châban 718 (fin d'octobre 1318) et se mit à sa poursuite. Ses troupes évacuèrent à la hâte la ville qu'elles venaient d'occuper; puis, s'étant encouragées à combattre, elles mirent leurs chameaux aux entraves, bien résolues, disaient-elles, à mourir plutôt que de fuir; mais, quand l'armée du sultan commença à déboucher par le col de Feddj-en-Naam, toute cette cohue se dispersa et prit la fuite en abandonnant ses chameaux. Pendant la déroute, les troupes du sultan tuèrent un grand nombre de fuyards et firent un butin immense. Abou-Darba et les débris de son armée coururent s'enfermer dans El-Mehdia, ville qui reconnaissait l'autorité de son père, lbn-el-Lihyani. Quand la nouvelle de cette défaite fut portée à Tripoli, de graves désordres éclatèrent dans le campet mirent Abou-YahyaIbn-el-Lihyani dans la nécessité de demander aux Chrétiens! l'envoi d'un navire pour le transporter à Alexandrie. Ils lui en expédièrent six dans lesquels il s'embarqua avec sa famille, ses enfants et son chambellan Abou-Zékérïa-Ibn-Yacoub. Son parent et gendre, Abou-Abd-Allah-Ibn-Abi-Amran, resta à Tripoli pour lui servir de lieutenant. Quelque temps après, cet officier passa chez les Kaoub, sur leur invitation, et fit avec eux plusieurs incursions sur le territoire du sultan, ainsi que nous aurons à le raconter plus loin.

Débarqué à Alexandrie, Ibn-el-Lihyani fut accueilli avec de grands égards par Mohammed-Ibn-Calaoun, sultan de race turque qui régnait alors sur l'Égypte et la Syrie. Il mourut dans

1. Probablement aux chrétiens qui tenaient garnison dans l'île de Djerba.

ce pays, l'an 728 (1327-8), comblé de faveurs, d'honneurs et de fiefs.

Après la défaite d'Abou-Darba à Feddj-en-Naam, le sultan Abou-Yahya-Abou-Bekr s'en retourna à Tunis où il fit son entrée dans le mois de Choual de cette année (nov.-déc. 1318). Toutes les provinces de l'Ifrîkïa, ses villes et ses places fortes, à l'exception d'El-Mehdïa et de Tripoli, reconnurent l'autorité du vainqueur.

MORT D'IBN-GHAMR A BOUgie 1.

devint

Le chambellan Abou-Abd-er-Rahman-Ibn-Ghamr maître absolu de Bougie, en l'an 715 (1315-6), lorsque le sultan, après avoir quitté cette ville pour ne plus y rentrer, transporta sa cour à Constantine. Deux années plus tard, ce prince, étant de retour de sa seconde expédition contre Tunis, envoya MansourIbn-Fadl[-Ibn-Mozni] auprès d'Ibn-Ghamr et le fit accompagner par le caïd Abou-Abd-Allah-Mohammed, fils de l'ancien chambellan Abou-'l-Hocein-Ibn-Séïd-en-Nas. Ils eurent pour mission de disposer les palais de Bougie pour la prochaine arrivée de leur maître. Ibn-Ghamr les renvoya sans vouloir les recevoir, mais il sut conserver les bonnes grâces du souverain en lui expédiant, avec le plus grand empressement, tous les secours qu'il avait demandés. Ce fut à cette occasion que le sultan le nomma gouverneur de Bougie et de Constantine. Ibn-Ghamr se trouva ainsi seigneur de la ville et de la province de Bougie, ne rendant aucun autre hommage au sultan que celui de conserver son noin dans la prière publique et sur les monnaies.

Quand le sultan eut établi son autorité à Tunis, [Ali-Ibn-] Mohammed-Ibn-Ghamr se rendit, par son ordre, auprès d'AbouAbd-er-Rahman-Ibn-Ghamr, et celui-ci donna à l'envoyé 2, qui était son cousin, le commandement de Constantine. Mo

1. Dans le texte arabe, Ibn-Khaldoun fait suivre ce titre par un autre qui appartient, en réalité, au second chapitre qui vient après celui-ci. 2. Dans le texte arabe, il faut insérer le mot lého après el-hadjeb,

hammed alla s'y établir et Abd-er-Rahman continua à défendre Bougie contre les attaques des Zenata. Retraçons l'histoire de ces expéditions.

Abou-Hammou[-Mouça], seigneur de Tlemcen, ayant vaincu Mohammed-Ibn-Youçof et repris sur lui les pays des Maghraoua et des Toudjîn, envoya une armée contre Bougie et fit bâtir sur la rivière, à deux journées de la ville, le fort de Tegger 1 pour servir de station à son armée pendant le blocus de la place. En l'an 718, après la mort de ce prince, son fils et successeur, Abou-Tachefin, donna quelque répit à Bougie, et le sultan put en profiter pour s'emparer de Tunis. Quelque temps après, Abou-Tachefin quitta Tlemcen pour rétablir l'ordre dans ses états, et il réussit à tuer Mohammed-Ibn-Youçof qui s'était réfugié dans le Ouancherich. On verra les détails de cet événement dans l'histoire des Beni-Abd-el-Ouad. A la suite de cette victoire, il marcha sur Bougie et arriva en vue de la place l'an 719; mais, après avoir reconnu qu'elle était beaucoup plus forte qu'il ne l'avait pensé et qu'elle renfermait une garnison nombreusé, il reprit le chemin de Tlemcen.

La même année, dans le mois de Choual, Ibn-Ghamr tomba malade et fit appeler son cousin, Ali-Ibn-Mohammed-Ibn-Ghamr, qui commandait à Constantine, afin de lui remettre le gouvernement de Bougie en attendant les ordres du sultan. Quelques jours plus tard (novembre-décembre 1319), il mourut dans son lit.

Le sultan conçut alors de vives inquiétudes au sujet de cette forteresse, et y envoya en toute hâte Ibn-Séïd-en-Nas accompagné de l'intendant du palais. Celui-ci eut pour mission de s'emparer de l'héritage et des trésors laissés par Ibn-Ghamr. Il réussit à tout découvrir et à rapporter au sultan une quantité énorme d'effets et d'argent. Ali-Ibn-Ghamr l'accompagna à Tunis et reçut de la bienveillance du sultan un emploi qui comblait

1. En arabe, Calât-Tegger; ailleurs, le nom de ce fort est écrit Hisn-Bekr. Tegger paraît être une des nombreuses formes du mot Tagrarert (station). Bekr est le mot Tegger ponctué d'une autre

manière.

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