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ces personnages étaient distincts. Telle est aussi l'opinion de Cohen (v, page 369). Adde de Vit, Onomasticon, 1, 617. — On n'a aucune monnaie de l'un, ni de l'autre. Celles qu'on leur a quelquefois attribuées appartiennent à M. Aurelius Julianus, usurpateur sous Carin. (1)

Tissot Fastes, page 183, place en 289-290 un proconsul du nom de Julianus qu'ou est immédiatement tenté d'identifier avec l'usurpateur africain. Mais rien n'est moins acceptable. On peut d'abord contester la concordance des dates, car le seul document qui nous fasse connaître ce proconsul est une constitution contre les Manichéens datée d'Alexandrie (Mosaicarum et Romanarum legum collatio, tit. xv, chap 3), et l'on sait que le voyage de Dioclétien en Egypte eut lieu seulement en 296. Si Julianus était alors sous l'obéissance de Dioclétien et Maximien, il ne peut être le même que celui dont nous nous occupons et dont la révolte paraît bien antérieure. (2)

Au surplus, il serait possible que ce proconsul ait été un Ani. cius Julianus qui fut consul en 322, comme l'enseigne de Vit (Onomasticon, III, page 631). Mais il faudrait engager une nouvelle discussion dont la place véritable est dans les fastes de la Proconsulaire.

(1) Il est à noter que l'épitome d'Aurelius Victor (XXXVIII) nomme ce dernier Julianus Sabinus! Cette erreur justifierait presque le correcteur hardi qui voudrait, dans le texte ci-dessus, lire: in Africa, au lieu de in Italia.

(2) Tillemont, de qui Tissot doit s'inspirer, s'appuie sur ce que la suscription de ce te constitution porte seulement les noms de Dioclétien et Maximien, ce qui impliquerait une date antérieure à 292, mais ce qui l'oblige à supposer un premier voyage de Dioclétien à Alexandrie, dont il n'est fait mention nulle pari (Tillemont, Dioclétien, art XIV). Est-il besoin de faire observer que nous avons beaucoup de monuments épigraphiques et autres qui ne donnent que les noms de deux ou mème d'un seul Auguste, bien qu'ils soient postérieurs à l'organisation de la tétrarchie? On peut, à titre d'exemple, voir celui cité plus bas, sous la notice d'Aurelius Diogenes. Bien plus, ajouterai-je, il serait fort possible que le texte original de la loi sus-visée ait contenu quelque chose de plus que les noms des deux Augustes. On trouve, en effet, dans certaines éditions de la Collatio legum Mos. et Rom., une formule évidemment incorrecte, mais qui permet de supposer une rubrique plus complète. Voici cette formule: Impp Maximianus, Diocletianus et Maximinus nobilissimi AAA Juliano proconsuli Africae. Pourquoi ne mentionne-t-on plus deux, mais trois Augustes ? Pourquoi cette épithète de nobilissimi, qui ne convient guère qu'aux Caesares?

En somme, il vaut peut-être mieux s'en tenir, sur ce problème, à une troisième explication et ne voir dans le Julianus d'Aurelius Victor que le chef de l'insurrection des Quinquégentiens, comme, plus tard, Firmus et Gildon. On remarquera, en effet, que l'histoire ne dit pas de Julianus qu'il prit la pourpre. En outre, la révolte paraît exclusivement indigène. La suite des gouverneurs de la Proconsulaire est ininterrompue durant toute cette période; rien ne permet de supposer que la Numidie ait cessé un instant d'obéir aux empereurs. Il en eût été autrement si, indépendaniment des Quinquégentiens, il y avait eu un usurpateur redoutable et, surtout, si cet usurpateur avait été le proconsul d'Afrique révolté.

Les nouvelles divisions territoriales de l'Afrique romaine paraissent aussi dater de cette époque. M. Mommsen a établi que la liste de Vérone, qui les mentionne pour la première fois, a été rédigée entre 292 et 297. Malheureusement, le passage de cette liste qui regarde l'Afriqne est très difficile à expliquer :

Diocensis Africae habet provincias numero VII: Proconsularis, Bizacina, Zeugitana, Numidia Cirtensis, Numidia Miliciana, Mauritania Caesariensis, Mauritania Tabia Insidiana.

Il n'est pas question de la Maurétanie Tingitane, qui est rattachée au diocèse d'Espagne.

Quant aux sept provinces annoncées, elles se réduisent à 6: 1. Proconsularis Zeugitana. Tout le monde est d'accord pour corriger sur ce point le texte, qui contient une interversion évidente;

20 Bizacina: la Byzacène ;

3. Mauritania Caesariensis ;

4° Mauritania Tabia Insidiana, dans laquelle on est également unanime pour reconnaître la Sitifienne. Cette province nouvelle est mentionnée pour la première fois dans une des inscriptions de T. Aurelius Litua, à laquelle il a été fait allusion plus haut. (C. I. L., 8,924; adde, mes Fustes des Maurélanies);

5o et 6° Numidia Cirtensis, Numidia Miliciana. C'est sur ces deux dernières que porte la controverse dont je vais esquisser l'histoire.

M. Mommsen, en 1862, dans son Mémoire sur les provinces romaines (1) commença par identifier la Numidia Miliciana avec la Tripolitaine. Le nom que lui donne la liste de Vérone viendrait de ce qu'en formant la province nouvelle, on aurait détaché des districts voisins de la Cyrénaïque qui avaient jusque-là appartenu à la Numidie proprement dite. Quant à l'épithète de Miliciana, le copiste l'aurait, par inadvertance, substituée à celle de Tripolitana.

Suivant Desjardins (Remarq. géog. à propos de la carrière d'un legat de la Pannonie inférieure, dans la Revue archéol., nouvelle série, xxvi, p. 79 et 186) et M. Poulle (Rec. de Const, XVIII, 1876-77, page 494), le dédoublement de la Maurétanie Césarienne vers 292 coïnciderait avec un dédoublement analogue de la Numidie. Il y aurait eu alors une Numidia Ciriensis, avec Cirta pour capitale, et une Numidia Miliciana ou militaire, avec Lambèse pour chef-lieu. Ces auteurs reconnaissaient, du reste, que la distinction des deux provinces avait dû ne durer que quelques années.

A l'appui de cette thèse, M. Poulle apportait deux documents inédits d'un grand poids.

L'un était l'inscription de l'usurpateur L. Domitius Alexander (vers 310, C I. L., 7,004), qu'on trouvera reproduite plus loin dans la notice consacrée à Scironius Pasicrates et dont voici la partie finale, telle que M. Poulle la lisait :

SCIRONIVS PA

SICRATES V.P.P
NumiDIARum .

R.

L'autre était un petit fragment gravé sur un des côtés du mo

(1) Verzeichniss der Rom. Provinzen um 297. Ce mémoire a été traduit en français par E. Picot, 1867.

nument précédent et qu'on avait effacé en partie pour utiliser de nouveau la pierre. M. Poulle le lut d'abord ainsi :

AELius Aelia

NVS VP p numi

DIARUM

RET

Il y avait donc à cette date deux Numidies, quoique, en fait, toutes deux fussent réunies accidentellement dans la main d'un seul gouverneur. L'existence de la Numidie Cirtéenne ne pouvait faire doute; quant à la Numidie militaire on croyait rencontrer sa mention dans trois textes de Thimgad (Ren., 1513, 1514, 1515. C. I. L., 2315, 2346, 2347) ainsi lus:

....VALERIVS FLORVS VPPPNM.....

Cependant les savants qui, depuis, se sont occupés de la question, ont contesté ces conclusions. D'une part, M. Mommsen, dans l'introduction au tome VIII du Corpus (p. XVII-XVIII), a persisté à identifier la Numidia Miliciana et la Tripolitaine. M. Camille Jullian (Lorrection à la liste de Vérone, dans les Mélanges d'archéol. et d'histoire de l'Ecole française de Rome, 1], p. 84), a adopté l'opinion de M. Mommsen, mais en proposant de corriger le mot Miliciana dans lequel il voit une mauvaise transcription de Limitanea. Dans le même sens, cf. Boissière, Algérie Rom., p. 537.- Tissot, Géog. comparée de la province rom. d'Afrique, II., p. 37 et suiv.

Quant aux deux inscriptions ci-dessus, leur importance était trop grande pour qu'on n'en discutât pas la force probante. Dans celle de Domitius Alexander, M. de Rossi s'est refusé à voir les lettres DIAR, mais seulement quelque chose comme AMID. (Bull. de corr. de l'Instit. archéol. de Rome, 1876, p. 89). Le Corpus restitue seulement NumiDIAe (VIII, 7,004).

M. Poulle a donné de la seconde, une nouvelle lecture (Rec. de Const., XIX, p. 332) que le C. 1. L. a reproduite sous le no 7,067 :

VALERius Antoni

NVS V P p provinciar) numi
DIARVM!!!!!]

RET

Mais, ajoutait-il, cette version n'infirme pas les conclusions que j'ai présentées au sujet de l'époque de la réunion des deux nouvelles provinces en une seule. (1). A fortiori elle n'infirmait pas non plus son opinion touchant le fait même de l'existence des deux provinces distinctes.

Si l'on a rejeté l'autorité de ces deux textes, c'est, me semblet-il, pour deux raisons. En premier lieu, on a d'autres textes épigraphiques se rapportant à Valerius Antoninus et tous lui donnent le titre de praeses Numidiae Cirtensis. Ce premier argument n'est pas très probant, car le même personnage peut, pour des raisons accidentelles, avoir eu sous ses ordres, d'abord une seule, puis deux provinces contigues; le cas est fréquent dans les Maurétanies. On a dit encore le pluriel Numidiae désignerait plus naturellement les deux Numidies proconsulaire et présidiale; c'est avec cette signification qu'il est employé dans la lettre de Constantin à Ablavius (1) et que nous le retrouverons en 397. lorsque Crescentianus est qualifié de primae sedis Numidiarum episcopus (Tissot, géog. Comparée, 11, p. 41). Cette seconde raison est meilleure. Mais est-elle décisive? Est-elle suffisante pour justifier les corrections très hardies de MM. Mommsen et Jullian et pour faire écarter purement et simplement l'inscription de Valerius Antoninus?

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Quant aux inscriptions de Thimgad, il paraîtrait, après examen attentif de Wilmanns, qu'elles portent :

(1) Valerius Antoninus est en effet connu. On trouvera plus loin sa notice.

(2) Sed et de Byzacenae, Tripolitanac Numidiarum et Mauritaniarum provinciis singulos quosque cum aliquibus ex suis quos putaverint eligendos Arelatem mittat. Cette lettre se trouve ordinairement à la suite des œuvres de St-Optat de Mileu. Adde Ephem. epig. VII 736 une inscription des années 364-367, trouvée à Khenchela et qui mentionne l'Altera Numidia.

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