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oméïade, une mésintelligence éclata entre les frères Hamdoun, et Yahya s'établit, avec presque tous les partisans de sa famille dans la ville de Basra dont il s'était emparé. Quelque temps après, son frère Djâfer entreprit contre les Berghouata une expédition qui fut assez malheureuse, et ensuite il reçut de Mohammed-[el-Mansour]-Ibn-Abi-Amer, qui venait d'obtenir la régence du royaume, l'invitation de passer en Espagne afin de lui prêter appui, tant il comptait sur ses bons et fidèles services. Djâfer, qui se rappela le traitement qu'El-Hakem-el-Mostancer lui avait fait subir, eut d'abord quelque hésitation avant de se conformer aux vœux d'El-Mansour; mais enfin, il remit à son frère Yahya le gouvernement du Maghreb et partit pour l'Espagne. El-Mansour l'accueillit avec une haute distinction et, en l'an 369 (979-80], lors de l'envahissement du Maghreb par Bologguîn, il l'envoya à Ceuta en le chargeant de défendre les provinces africaines. Lui-même, se rendit de Cordoue à Algesiras, afin d'être plus près du théâtre de la guerre. Djâfer traversa le Détroit et, grâce à une centaine de charges d'or que le vizir avait mises à sa disposition, il réunit sous ses ordres les principaux chefs zenatiens et mit Bologguîn dans la nécessité de s'éloigner. Plus tard, El-Mansour devint jaloux de son lieutenant, et une nuit, à la suite d'une partie de débauche, il le congédia après avoir aposté des assassins pour le tuer. Djâfer se rendait du palais à sa maison quand il succomba sous leurs coups.

Yahya, frère de Djâfer, passa en Egypte et trouva auprès d'El-Azîz-Nizar[le khalife fatemide] un accueil plein de bienveillance. Il y demeura un temps considérable, rendit de grands services au gouvernement égyptien dans plusieurs circonstances graves, et lorsque Felfoul-Ibn-Khazroun sollicita le secours d'El-Hakem [le fatemide] afin d'enlever Tripoli aux [Zîrides] sanhadjiens, il partit à la tête d'un corps d'armée pour appuyer les opérations de ce chef. Arrivé à Barca, il eut avec les BeniCorra, tribu hilalienne, une rencontre dans laquelle ses troupes furent mises en pleine déroute. Alors il rentra en Egypte où il continua jusqu'à sa mort.

IV.

ORIGINE ET CHUTE DE LA DYNASTIE DES IDRICIDES. RÉTABLISSEMENT DE LEUR AUTORITÉ DANS PLUSIEURS ENDROITS DU MAGHREB.

Dans le mois de Dou-'l-Câda, 169 (mai, 786), Hocein, fils d'Ali, fils de Hacen III, fils de Hacen II, fils de Hacen-es-Sibt, se révolta contre le khalife El-Hadi. Il prit les armes à la Mecque et réunit autour de lui plusieurs membres de sa famille, parmi lesquels se trouvèrent ses oncles Idris et Yahya. Il fut tué à Fekhh, endroit situé à trois milles de la Mecque, dans un conflit avec les troupes du khalife, commandées par Mohammed-IbnSoleiman-Ibn-Ali. Un grand nombre de ses parents resta sur le champ de bataille; ses partisans prirent la fuite et beaucoup d'entre eux furent faits prisonniers. Yahya, fils d'Idrîs, se sauva dans la province de Deilem, où il se révolta plus tard, et son père réussit à atteindre l'Egypte. La direction de la poste aux chevaux établie en ce pays appartenait alors à Ouahed-elMeskin, affranchi de Saleh, fils du feu [khalife] El-Mansour. Ce fonctionnaire, partisan secret de la famille d'Ali, ne vit rien de plus méritoire que de fournir des chevaux à Idris et de l'aider ainsi à s'enfuir vers le Maghreb. En l'an 172 (788-9), Idrîs, accompagné de son affranchi Rached, atteignit Oulili, dans le Maghreb-el-Acsa, et se mit sous la protection d'Ishac-Ibn-Mohammed- Ibn-Homeid, grand émir de la tribu Auréba. Bientôt après, il annonça onvertement ses prétentions au khalifat et rallia à sa cause les Zouagha, les Louata, les Sedrata, les Ghaïatha, les Nefza, les Miknaça, les Ghomara et toutes les autres peuplades

Le mot sibt signifie petit-fils, né de la fille. Le petit-fils né du fils s'appelle hafid. Le Hacen dont il s'agit ici était fils de Fatema, fille de Mahomet et femme d'Ali.

berbères qui habitaient le Maghreb. Le jour où ses nouveaux partisans furent réunis autour de ses drapeaux pour le soutenir et lui prêter le serment de fidélité, il leur tint le discours suivant : «<Louange à Dieu ! que sa bénédiction soit sur son Prophète! >> O hommes, n'abaissez pas la tête devant un autre que nous; car >> vous ne trouverez chez personne des droits plus clairs que les » nôtres. >> Son frère Soleiman, dont nous parlerons plus tard, vint ensuite se fixer dans le pays des Zenata, tantôt à Tlemcen et tantôt aux environs de cette ville.

Quand Idris eut établi sa domination dans le Maghreb, il marcha contre les Berbères de ce pays qui professaient soit le magisme [idolâtrie], soit le judaïsme, soit la religion chrétienne. Telles étaient les tribus de Fendelaoua, de Behloula, de Medîouna et les peuplades du territoire de Fazaz. S'étant alors emparé de Temsna, de la ville de Chella et de Tedla, il obligea les habitants, dont la majeure partie était juive ou chrétienne, d'embrasser l'islamisme bon gré mal gré. Après avoir ruiné leurs places fortes, il marcha sur Tlemcen l'an 173 (789-90). Mohammed-Ibn-Khazer-Ibn-Soulat, chef de cette ville dont la population se composait d'Ifrénides et de Maghraouiens, vint au devant de lui et obtint, par une prompte soumission, la sécurité pour lui-même et pour les Zenata. Devenu maître de Tlemcen, Idris y posa les fondations de la grande mosquée et fit construire une chaire sur laquelle on inscrivit son nom. De nos jours, cette inscription se voit encore sur la face de la chaire.

Idris était de retour à Oulili, quand [le khalife Haroun-] Er-Rechîd envoya en Afrique Soleiman-Ibn-Horeiz, surnommé Es-Chemmakh. Cet émissaire, affranchi d'El-Mehdi, père d'ErRechîd, avait reçu de celui-ci la commission d'assassiner Idris, et il arriva porteur d'une lettre adressée par le khalife à Ibn-elAghleb. Ayant obtenu de ce gouverneur les moyens de continuer sa route, il alla voir Idrîs et se présenta comme déserteur de la cause des Abbacides et comme pratiquant la médecine. L'imam Idris l'admit dans son intimité, et s'étant un jour plaint d'un mal de dents, il reçut de son protégé une brosse à dents dont

l'emploi, dit-on, lui fut fatal. Il fut enterré à Oulili en l'an 175 (794-2). Es-Chemmakh prit la fuite, et Rached se mit sur ses traces, à ce que l'on raconte, et l'atteignit sur le bord du Molouïa. Chaeun d'eux porta à son adversaire un coup de sabre, et Es-Chemmakh, bien qu'il en eut la main tranchée, parvint à s'échapper en traversant le fleuve.

Après la mort d'Idris, les Auréba et les autres tribus berbères reconnurent pour souverain l'enfant qui devait bientôt naître de sa concubine Kenza. Ils l'elevèrent avec le plus grand soin et, en l'an 188 (804), ils lui jurèrent fidélité dans la mosquée d'Oulili. Ce prince, que l'on appela Idris-el-Asgher (Idris le Jeune ou Idris II), avait alors onze ans et se trouvait sous la tutelle d'Abou-Khaled-Yezîd-Ibn-el-Yas-el-Abdi; car Ibn-elAghleb était parvenu, deux années auparavant, à faire assassiner Rached. Quand Idris eut atteint l'âge de la majorité, on lui renouvella le serment de fidélité, et, ayant ainsi établi de nouveau l'autorité de la dynastie, on lui soumit toutes les villes du Maghreb. Idris avait pour vizir un membre de la tribu [arabe] d'Azd appelé Mosab-Ibn-Omeir et surnommé El-Meldjoum (le bride) à cause d'une cicatrice qu'un coup de sabre lui avait laissée sur le nez. Plus de cinq cents guerriers appartenant à divers tribus arabes établies en Maghreb et en Espagne se mirent aux ordres d'Idris II, lui formèrent un corps de serviteurs dévoués et méritèrent toute sa confiance à l'exclusion des Berbères. L'appui de cette troupe contribua beaucoup à l'agrandissement de son autorité.

En l'an 192 (807-8), Idris fit mourir Ishac-Ibn-Mahmoud, chef des Auréba, ayant découvert qu'il entretenait des intelligences avec Ibrahim-Ibn-el-Aghleb.

La ville d'Oulili ne pouvant plus suffire au nombre toujours croissant des troupes et d'autres serviteurs de l'empire, Idris chercha un emplacement pour y fonder une nouvelle capitale.

Idris fut empoisonné par Es-Chemmakh; mais de quelle manière, on l'ignore.

T. II.

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