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Tunis et y passa sa jeunesse. Il étudia les principes de l'administration publique et de la comptabilité sous deux frères d'une grande habileté dans cette partie, Abou-'l-Hakem-Ibn-Modjahed et Abou-'l-Hacen-Ibn-Modjahed. Ayant épousé la fille de ce dernier, il fut nommé amin du bureau des provinces (receveur général des impôts). Plus tard, il devint secrétaire d'Abou-AbdAllah-el-Fazazi, et, voyant ce ministre ambitieux traiter le sultan avec peu de considération', il chargea le chambellan Ibn-esCheikh de lui faire connaître régulièrement les volontés du prince afin d'influencer d'avance l'esprit d'El-Fazazi et de le faire agir en conformité avec la volonté royale. Par cette conduite habile, il gagna la faveur d'Abou-Hafs. Comme il avait déjà rendu plusieurs services à Abou-Acîda, ce prince, devenu sultan, le prit pour secrétaire et cela avec d'autant plus d'empressement que son chambellan Es-Chakhchi ne lui paraissait pas avoir les talents qu'exige un tel emploi. Plus tard, en 695 (4295-6), il fut nommé par le sultan écrivain du paraphe impérial; ensuite, il devint lieutenant d'Es-Chakhchi; puis, en 697, lors de la mort de ce fonctionnaire, il fut nommé à la place de chambellan, position la plus élevée à laquelle il pouvait aspirer. En effet, l'administration de l'état et de la guerre était réservée au cheikh des Almohades.

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Abou-Mohammed-Abd-el-Hack-Ibn-Soleiman, chef des Almohades sous le règne d'Abou-Hafs, appartenait à une famille tinmelélienne qui, lors de l'établissement de l'empire hafside, s'était fixée à Toborsok. De même que ses aïeux, il avait tenu le rang de chef de tribu, et, quand ce sultan monta sur le trône, il devint chef de tous les Almohades de la capitale. Serviteur dévoué de son souverain, il le conseilla, avec instance, de choisir pour successeur le prince Abd - Allah, et combattit avec

Dans le texte arabe, lisez mostasában.

force les préventions que les Almohades témoignèrent contre cette nomination. Abou-Acîda lui en sut mauvais gré et, en 695 (1295-6), quand il eut pris le haut commandement et fait mourir son concurrent, Abd-Allah, fils du sultan Abou-Hafs, il donna l'ordre de faire arrêter Abd-el-Hack. Ce ministre passa le reste de ses jours en prison et y mourut assassiné vers la fin du septième siècle.

Lors de sa chute, ses fils, Mohammed et Abd-Allah, prirent la fuite. Celui-ci alla se mettre au service de l'émir Abou-Zékérïa et, plus tard, il accompagna à Tunis le sultan Abou-l-BacaKhaled, fils de ce prince. Mohammed, l'autre frère, se réfugia auprès de Youçof-Ibn-Yacoub, chef des Beni-Merîn, qui faisait alors le siége de Tlemcen. Accueilli d'une manière fort honorable par ce monarque, il resta quelque temps avec lui avant de reprendre le chemin de son pays. Il était encore en route, quand il renonça à ce projet pour s'adonner aux pratiques de la haute piété et, ayant alors pris le froc des soufis, il se lia avec les dévots et fit le pèlerinage de la Mecque. Jusqu'à un âge fort avancé, il continua à jouir de la considération générale, et, comme on s'était persuadé que toutes ses prières seraient agréées par la divinité, une foule de monde s'attachait toujours à ses pas dans l'espoir d'obtenir, par sa médiation, la faveur de Dieu. Les khalifes hafsides lui accordèrent une autre marque de distinction en le chargeant de plusieurs missions d'amitié auprès des princes zenatiens. Dans un de ces voyages, il prit part à la guerre sainte en assistant au siége de Gibraltar par le sultan [mérinide] Abou-'l-Hacen. Ce fut ainsi qu'il passa sa vie. Il mourut de la peste vers le milieu du huitième siècle.

ABOU-ACIDA ENVOIE UNE AMBASSADE A YOUÇOF-IBN-YACOUB, SULTAN DES BENI-MERÏN.

Le sultan Abou-Acîda étant ainsi parvenu à raffermir sa puissance, conçut le projet d'une expédition contre les provinces. occidentales de l'empire, afin d'enlever à Abou-Zékérïa la partie

du royaume dont ce prince s'était rendu maître. [Les circonstances lui étaient favorables:] l'officier aimohade de la famille Akmazîr, qui gouvernait Alger au nom de l'émir Abou-Zékérïa, venait de mourir; les habitants s'étaient mis en révolte et IbnAllan, un de leurs cheikhs, y avait pris le commandement. D'un autre côté, Othman-Ibn-Yaghmoracen, à la tête des Beni-Abdel-Ouad, venait de soumettre les Toudjîn, les Maghraoua et les Melikich; or, ce prince, à l'instar de son père, s'était montré partisan très-dévoué du souverain de Tunis. Abou-Acîda prit donc la résolution d'exécuter son projet, et ayant quitté la capitale, l'an 695 (1295-6), il pénétra dans la province de Constantine dont les populations agricoles et nomades s'enfuirent à son approche. Parvenu à Mila, il reprit le chemin de Tunis où il arriva dans le mois de Ramadan (juillet 1296) de la même

année.

L'émir Abou-Zékérïa, se voyant menacé dans son royaume de Bougie, chercha d'abord à rétablir la tranquillité sur la frontière occidentale de ses états, afin de n'avoir plus d'embarras de ce côté-là quand il aurait à repousser les tentatives hostiles du sultan de Tunis. Cette considération le porta à renouer les liens d'amitié qui l'avaient attaché à son parent Othman-Ibn-Yaghmoracen. Aussi, comme ce prince lui avait fait demander des secours contre le sultan mérinide, Youçof- Ibn-Yacoub, qui le tenait étroitement bloqué dans Tlemcen, il lui envoya un corps de troupes almohades. Cette armée eut une rencontre avec les Mérinides aux environs de Tedellis et perdit tant de monde qu'elle dut reculer en désordre et rentrer à Bougie. Youçof-IbnYacoub mit alors son frère, Abou-Yahya, à la tête d'une armée mérinide et l'envoya avec Othman-Ibn-Sebâ contre cette ville. Ce chef arabe venait d'abandonner Abou-Zékérïa et, après avoir obtenu des Mérinides l'accueil le plus flatteur, il avait poussé leur sultan à diriger une expédition contre le royaume de celui qu'il avait trahi. On commença par bloquer la ville, ensuite on décampa pour aller dévaster et subjuguer le territoire de Tagrart 1

1 Voy. l'index géographique du t. 1, au mot Taourirt no n.

et le pays des Sedouîkich. Après cette course, la colonne mérinide alla rejoindre le sultan sous les murs de Tlemcen.

Quand Abou-Acida eut appris qu'Abou-Zékérïa avait envoyé des secours à Othman-Ibn-Yaghmoracen, il dépêcha un ambassadeur à Youçof-Ibn-Yacoub pour le décider à entreprendre une campagne contre la ville et la province de Bougie. Ce fut AbouAbd-Allah-Ibn-Akmazîr, chef des Almohades, qui se chargea de cette tâche et commença ainsi sa carrière diplomatique. Dans une seconde mission qui lui fut confiée en l'an 703 (4303-4), il eut pour collègue le vizir de l'empire, Abou-Abd-Allah-IbnIrzîguen. Ils présentèrent au sultan un cadeau magnifique, dans lequel on remarqua particulièrement une selle, une épée et des éperons, le tout en or et garni de ce qu'il y avait de plus beau en fait de rubis et de perles. Ils rapportèrent en retour une riche offrande, dont un des articles consistait en trois cents mulets. Dès lors, ce ne fut qu'une suite d'ambassades, de lettres, d'envois de cadeaux et de témoignages d'amitié entre les deux cours. Dans toute cette correspondance, Youçof-Ibn-Yacoub ne parlait d'affaires qu'incidemment, quand il écrivait au sultan de Tunis, mais, dans ses lettres au chef des Almohades, Abou-Yahya-Ibnel-Lihyani, il abordait chaque question politique et la traitait à fond. Les Mérinides continuèrent leurs expéditions contre Bougie jusqu'à la mort de Youçof-Ibn-Yacoub.

MORT DE HEDDADJ, CHEF DES KAOUB.

ET PROCLAME [IBN-]ABI-DEBBOUS.

CETTE TRIBU SE RÉVOLTE
RÉVOLTE A TUNIS.

Les Kaoub avaient joui de la faveur et des bienfaits de l'empire depuis l'époque où ils s'étaient ralliés à la cause de l'émir Abou-Hafs. Devenus riches, nombreux et puissants, ils se livraient aux plus grands excès et, par une longue suite de brigandages sur les grandes routes et de vols dans les jardins et les champs cultivés, ils s'étaient attiré l'exécration générale. En l'an 705 (1305-6), leur chef, Heddadj-Ibn-Abîd, se montra dans Tunis où sa présence excita une vive agitation, et la populace était déjà disposée à lui faire un mauvais parti quand il entra dans la

mosquée pour assister à la prière. Aussitôt, on lui chercha querelle sous le prétexte qu'il avait pénétré dans l'édifice sacré sans se déchausser. A ce reproche, il se borna à répondre : « Je porte mes bottes même à la cour du sultan. » Quand la prière fut terminée, le peuple indigné le massacra et traîna son cadavre dans les rues de la ville.

Cet événement ne servit qu'à exciter davantage les Kaoub dans leur carrière de rapine et de brigandage. Leur cheikh, AhmedIbn-Abi-'l-Leil, fit chercher Othman-Ibn-Abi-Debbous dans la province de Tripoli et, l'ayant proclamé sultan, il marcha avec lui contre la capitale. Ils en avaient commencé le siége, quand le vizir, Abou-Abd-Allah-Ibn-Irzîguen, sortit à la tête de l'armée et les mit en déroute. Ce ministre parcourut ensuite les campagnes avec ses troupes afin d'étouffer la révolte des Arabes. Ibn-Abi- 'l-Leil offrit alors de faire sa soumission et, ayant renvoyé le fils d'Abou-Debbous à l'endroit où il l'avait pris, il alla trouver le vizir et amena avec lui Soleiman-Ibn-Djamê, personnage éminent de la tribu des Hoouara. On les arrêta sur-le-champ pour les envoyer à Tunis, et ils restèrent dans la prison de cette ville jusqu'à l'an 708, quand Ahmed-Ibn-Abi-'l-Leil y mourut. Mohammed-Ibn-Abi-'l-Leil prit le commandement de la tribu lors de l'arrestation de son frère Ahmed, et il choisit pour lieutenants ses neveux, Hamza et Moulahem, tous les deux fils d'Omar. En l'an 707, le vizir se mit en campagne une seconde fois et, après avoir attiré Moulahem dans une conférence, il le fit arrêter et conduire à Tunis pour y être détenu avec son oncle, Ahmed. Hamza se mit alors en révolte et y entraîna toute la tribu. Leurs brigandages devinrent alors si intolérables que le peuple s'en plaignit hautement des cris de vengeance retentirent dans les rues de la capitale et un attroupement, qui marchait sur la citadelle, en ayant trouvé la porte fermée, se mit à y lancer des pierres. La mort du chambellan, Ibn-ed-Debbagh, auquel les révoltés attribuèrent tous leurs maux, fut réclamée comme le seul moyen de calmer leur indignation. L'officier auquel cette demande fut adressée [demanda l'autorisation de] les passer au fil de l'épée; mais le sultan s'y opposa et voulut

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