Images de page
PDF
ePub

déclaré indépendant. Ayant ensuite appris que les habitants de Sfax avaient déposé son fils Abou-'l-Fotouh [Ali], il parvint à se-mer la division parmi eux [et les ramena ainsi à l'obéissance]. İl reconnut la souveraineté des Fatemides et reçut de leur khalife des lettres de félicitation et un riche cadeau.

Depuis quelque temps il s'était occupé de la construction d'une flotte afin de pouvoir attaquer les chrétiens; et ayant enfin réuni un grand nombre de navires, il envoya plusieurs expéditions contre les pays de l'ennemi et força les Français, les Génois, et les Sardes, populations chrétiennes d'outre-mer, à lui payer tribut. Par ses courses maritimes Yahya s'acquit une grande renommée. Il mourut suhitement dans son palais, l'an 509 [dans le mois de Dou-'l-Hiddja; avril, 1416].

Règne d'Ali, fils de Yahya. A la mort de Yahya on rappela de Sfax son fils Ali pour lui succéder. Ce prince partit pour la capitale sous l'escorte d'Abou-Bekr-Ibn-Djaber-Ibn-Asker et d'autres émirs arabes. Arrivé à El-Edjem, il rallia autour de lui la plus grande partie de l'armée sanhadjite qui faisait le siége de cette forteresse. Son inauguration accomplie, il alla [l'an 540] investir la ville de Tunis et contraiguit ainsi le gouverneur, Ahmed - Ibn-Khoraçan, à rentrer dans l'obéissance. Un corps de troupes qu'il plaça sous les ordres de l'émir arabe, Meimoun-IbnZiad- es-Sakhri-el-Moadi, pénétra dans le mont Oucelat, et massacra les habitants de cette région qui jusqu'alors avaient toujours résisté à l'autorité de l'empire.

En l'an 514 (1147-8), après avoir reçu l'envoyé du gouvernement égyptien qui lui apporta, de la part du khalife fatemide, les lettres de compliment et les cadeaux d'usage, il prépara une expédition contre Rafé-Ibn-Megguen [-Ibn-Kamel] qui se tenait

L'auteur du Baïan raconte que Yahya fut assassiné par deux ou trois de ses frères qu'il avait bannis et qui s'étaient ensuite présentés chez lui déguisés en alchimistes. Comme il désirait beaucoup voir faire la projection et apprendre le mystère du grand-œuvre, il entra avec son vizir dans le cabinet où ces hommes travaillaient et leur donna ainsi l'occasion de le tuer à coups de poignard.

dans la ville de Cabes. Il avait déjà enrôlé pour cet objet les Beni-Fadegh, fraction des Beni-Ali, tribu rìahide, quand une mésintelligence éclata entre lui et Roger, seigneur de la Sicile. Celui-ci avait encouragé Rafê dans sa révolte et lui avait mème fourni des navires afin d'opérer des descentes sur le territoire d'Ali-Ibn-Yahya et de lui enlever ses vaisseaux. Ali fut donc obligé à en louer d'autres, et il se préparait activement à soute nir la guerre quand la mort vint le surprendre. Il mourut [dans le mois de Rebiâ second de] l'an 545 (juillet 1121).

Règne d'El-Hacen, fils d'Ali. - El-Hacen, fils et successeur d'Ali, n'avait que douze ans quand il perdit son père. Sandal l'[eunuque et] affranchi, se chargea du poids des affaires, et transmit, en mourant, la régence à l'affranchi Mouwaffac.

Ali, le père d'El-Hacen, s'était engagé dans une correspondance avec Roger, et, à l'époque de leur mésintelligence, il l'avait menacé de la colère des Almoravides, souverains du Maghreb, avec lesquels il entretenait aussi une correspondance régulière. Il arriva ensuite qu'en l'an 516, une escadre almoravide, commandée par l'amiral Mohammed-Ibn-Meimoun, opéra une descente sur la côte de la Sicile, et pilla un village dont elle massacra une partie des habitants et emmena le reste en esclavage. Roger fut tellement persuadé que cet acte d'hostilité avait été commis à l'instigation d'El-Hacen qu'il fit partir une flotte pour El-Mehdïa sous les ordres d'Abd-er-Rahman-Ibn-Abd-el-Azîz et de George d'Antioche, fils de Michel. George était un chrétien de l'Orient qui avait émigré [en Afrique] après avoir fait de bonnes etudes et acquis, à Antioche et dans quelques autres villes de la Syrie, une connaissance parfaite de l'arithmétique et de la langue arabe. Accueilli avec une grande bienveillance par Temim, il gagna toute sa confiance; mais, à la mort de ce prince, il trouva un prétexte

1 En-Noweiri rapporte qu'Ali-Ibn-Yahya fut surpris par la mort au moment où il venait équiper une flotte pour combattre le roi Roger. Cet armement se composa de dix vaisseaux de guerre (merakeb harbia) et trente galères (ghorab) abondamment pourvus d'hommes, de vivres et de naphte (feu grégeois).

pour se rendre à la cour de Roger et éviter ainsi les suites de la haine que Yahya [fils de Temîm] lui avait toujours témoignée. Roger lui fit l'accueil le plus cordial et le nomma commandant de la flotte sicilienne. Ayant alors formé le projet d'attaquer ElMehdia, il l'envoya contre cette ville avec une flotte de trois cents bâtiments chargés de troupes chrétiennes, dont mille cavaliers.

El-Hacen avait tout disposé pour la résistance quand George vint débarquer près d'El-Mehdïa après avoir occupé l'île de Cossura. L'ennemi ayant assis son camp, s'empara du château d'EdDîmas et de l'île d'El-Ahas; mais, à la suite de plusieurs combats qui lui coutèrent beaucoup de monde, il se rembarqua pour la Sicile. Mohammed-Ibn-Meimoun, l'amiral almoravide, se jeta alors sur les côtes de cette île et y répandit la dévastation. Roger prit aussitôt la résolution d'envoyer une nouvelle expédition contre El-Mehdïa. La flotte de Yahya-Ibn-el-Azîz, souverain de Bougie, étant alors venue menacer cette capitale, pendant que son armée de terre, commandée par le légiste Motarref-Ibn-Ali-Ibn-Hamdoun, avançait pour l'attaquer du côté de la campagne, El-Hacen s'empressa de conclure une paix avec le seigneur de la Sicile, et ayant obtenu le secours de sa flotte, il obligea Motarref à rebrousser chemin et à rentrer à Bougie. Resté maître d'El-Mehdïa, il résista aux attaques que Roger, après avoir rompu le traité de paix, continuait à diriger contre lui; mais, à la fin, en l'an 543 (4448-9), il se vit enlever sa capitale par George, fils de Michel, amiral de la flotte sicilienne.

Cet officier parut devant El-Mehdïa avec une flotte de trois cents voiles et donna pour motif de son arrivée l'intention qu'il avait de soutenir El-Hacen contre ses ennemis. Ce monarque, qui avait envoyé son armée au secours de Mohrez-Ibn-Zîad-el-Fadeghi, seigneur d'El-Moallaca, auquel Ibn-Khoraçan, seigneur de Tunis, faisait la guerre, se trouva sans moyens de résistance au moment de reconnaître que George avait des intentions hostiles.

1 Au rapport d'En-Noweiri, cette flotte se composa d'environ cent cinquante galères. La famine terrible qui sévit en Ifrikïa cette année avait forcé beaucoup de monde à quitter le pays, et Roger profita de cette circonstance pour faire son expédition.

Il se décida donc à quitter la ville, et comme la plupart des habitants l'accompagna, l'ennemi put y entrer sans coup férir. George trouva le palais dans son état ordinaire, El-Hacen n'en ayant enlevé que les objets les plus faciles à emporter; aussi, les trésors que tant de rois y avaient amassés étaient demeurés intacts. Le premier soin de l'amiral chrétien fut de rassurer les habitants et de les prendre sous sa protection spéciale. Par cette conduite habile il ramena les fuyards, et les ayant réinstallés dans leurs maisons, il envoya une escadre contre Sfax. Cette ville ainsi que Souça, tomba au pouvoir des chrétiens, et Tripoli subit ensuite le même sort. Roger ayant établi son autorité dans toutes les provinces maritimes de l'lfrîkïa, en soumit les habitants à la capitation et les retint sous sa domination jusqu'à l'époque où Abd-el-Moumen, chef des Almohades et khalife [successeur] de l'imam El-Mehdi, vint les tirer de la servitude.

[ocr errors]

Quand les chrétiens se furent emparés d'El-Mehdïa, le prince détrôné, El-Hacen-Ibn-Ali, passa chez Mohrez-Ibn-Ziad-el-Fadeghi,, seigneur de la Moallaca et chef des Arabes rîahides; mais, ne pouvant obtenir de lui aucun secours, il forma le projet d'aller en Egypte et d'implorer l'appui d'El-Hafed-Abd-el-Hamîd [le khalife fatemide]. Averti ensuite que George avait pris des mesures pour l'arrêter en route, il se tourna vers l'Occident et courut à Bône, ville qui obéissait alors à El-Hareth-Ibn-el-Mansour, frère d'El-Azîz [le souverain hammadite]. De là il se dirigea vers Constantine où se tenait Sebâ-Ibn-el-Azîz, frère de Yahya, prince de Bougie. Ayant obtenu de ce dernier l'envoi d'une escorte, il se rendit à Alger où [El-Caïd] fils d'El-Azîz lui fit un accueil plein de bienveillance. Il continua à vivre sous la protection de ce chef jusqu'à l'an 547 (1152-3), quand les Almohades occupèrent Alger après avoir soumis le Maghreb et l'Espagne. Étant allé au-devant d'Abd-el-Moumen, il fut reçu avec de grandes marques d'honneur, et il accompagna ce monarque dans sa première expédition en Ifrîkïa. En l'an 554 (4159) Abd-el-Moumen

1 Le même impôt que les musulmans imposaient sur les chrétiens, habitants des pays conquis.

entreprit une seconde expédition contre ce pays et y amena ElHacen-Ibn-Ali. Arrivé à El-Mehdïa, il emporta cette ville d'assaut, l'an [555:4460 de J.-C.], à la suite d'un siège qui dura plusieurs mois. Ayant alors établi El-Hacen dans son ancienne capitale, il lui donna en apanage le territoire de Rohhîch 1. El-Hacen passa encore huit ans à El-Mehdïa, mais, ayant été appelé à Maroc par Youçof, fils d'Abd-el-Moumen, il se mit en route avec sa famille pour cette destination, et mourut à AbarZellou, dans la province de Temsna, en l'an 563 (1167-8).

HISTOIRE DES BENI-KHORAÇAN, FAMILLE SANHADJIENNE QUI ENLEVA TUNIS AUX DESCENDANTS DE BADÎS, LORS DU BOULEVERSEMENT DE L'IFRIKÏA PAR LES ARABES.

La retraite d'El-Moëzz, qui alla s'enfermer dans El-Mehdïa après avoir abandonné Cairouan aux Arabes, alluma un incendie qui embrasa toute l'Ifrîkïa. Les vainqueurs se partagèrent les villes de ce pays en y établissant des gouverneurs de leur choix, et ils en distribuèrent les campagnes à leurs nomades pour en faire des lieux de parcours. Pendant ce bouleversement, plusieurs autres villes, telles que Souça, Sfax et Cabes, répudièrent l'autorité de la maison de Badîs, et, comme les peuples de l'Ifrîkïa avaient un grand penchant pour la dynastie hammadite [branche collatérale de la même famille] qui régnait à El-Calâ, les habitants de Tunis abandonnérent le parti d'El-Moëzz et envoyèrent leurs principaux cheikhs en députation auprès d'EnNacer-Ibn-Alennas. Ce prince leur donna pour gouverneur un nommé Abd-el-Hack-Ibn-Abd-el-Azîz-Ibn-Khoraçan, personnage que l'on a représenté comme un natif de Tunis, mais qui appartenait, en toute probabilité, à une tribu sanhadjienne. Cet officier, ayant pris la direction des affaires, s'associa les habitants de la ville dans l'exercice du pouvoir et réussit à gagner

La position de cette localité nous est inconnue.

? Les manuscrits et le texte imprimé portent en toutes lettres trentesix, c'est-à-dire 536, date d'une fausseté évidente.

« PrécédentContinuer »