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tion de [l'historien] Ibn-el-Cattan, Mohammed [le Mehdi] était fils d'Abd-Allah-Ibn-Ouguellid - Ibn-Iamsal-Ibn-Hamza-IbnEïça; mais quelques historiens maghrebins le disent fils de Mohammed-Ibn-Toumert-Ibn-Tittaouîn-Ibn-Safla-Ibn-Mecîghoun

Eiga

Ibn-Aigueldis-Ibn-Khaled.

La plupart des historiens prétendent qu'il était de la famille de Mahomet et lui donnent la généalogie suivante : MohammedIbn-Abd-Allah-Ibn-Abd-er-Rahman-Ibn-Houd-Ibn-Khaled-Ibn Temmam-Ibn-Adnan-Ibn-Sofyan-Ibn-Safouan-Ibn-Djaber-Ibn

Ata-lbn-Rebah-Ibn-Mohammed-Ibn-Soleiman - Ibn-Abd-AllahIbn-Hacen-Ibn-el-Hacen-Ibn-Ali-Ibn-Abi-Taleb. Le Soleiman de cette liste est le frère d'Idris l'aîné. « La généalogie d'une grande » partie des descendants de Soleiman rentre dans celles de cer>> taines tribus masmoudiennes et de quelques familles du Sous. » Soleiman vint en Maghreb après son frère et s'établit à Tlem» cen. Sa postérité se dissémina dans le Maghreb, et tous les » descendants d'Ali-Ibn-Abi-Taleb que l'on rencontre dans le » Sous comptent ce Soleiman au nombre de leurs ancêtres. ». Telles sont les paroles d'Ibn-Nakhil 3. D'autres historiens repoussent cette opinion et considèrent le Soleiman dont il est question comme un parent d'Idrîs qui était venu le rejoindre en Maghreb; ils ajoutent que le Rebah de la généalogie précédente était fils de Yeçar, fils d'El-Abbas, fils de Mohammed, fils d'El-Hacen.

En adoptant soit l'une, soit l'autre, de ces deux opinions, l'on admet nécessairement que Mohammed-Ibn-Toumert tira son origine d'Ali-Ibn-Abi-Taleb [gendre de Mahomet]; que sa généalogie se confondit avec celle des Hergha, tribu masmoudienne, et que sa famille se greffa sur cette souche. Voilà pourquoi il

1. On ne possède aucun renseignement sur cet auteur.

Ou-Aguellid signifie en berbère, fils de roi.

3 Dans un des chapitres suivants, il sera question d'Ibn-Nakhil. Ibn-Khaldoun anrait pu facilement démontrer la fausseté de cette généalogie; mais il dut éviter d'examiner trop scrupuleusement l'origine. et la conduite d'un aventurier que les Hafsides respectaient comme le fondateur de leur religion. Le sultan hafside, Abou-'l-Abbas, auquel notre auteur communiqua son ouvrage, aurait pu s'offenser d'une telle hardiesse.

participait au même esprit de corps qui animait les Masmouda et qu'il se donna pour membre de cette grande famille dont' il avait, du reste, adopté tous les caractères distinctifs.

Né d'une famille qui brillait par sa piété, Mohammed-IbnToumert se montra avide d'instruction et passa ses premières années à lire [le Coran]. Il se plaisait à fréquenter les mosquées et, dans sa jeunesse, il reçut le surnom d'Açafou, c'est-à-dire clarté, à cause du grand nombre de bougies qu'il avait l'habitude d'y allumer. Vers la fin du cinquième siècle, il entreprit le voyage de l'Orient dans le but d'y continuer ses études, et, en passant par l'Espagne, il visita Cordoue, centre des lumières à cette époque. Ayant traversé la mer, il débarqua au port d'Alexandrie et, après avoir fait le pèlerinage de la Mecque, il se rendit [à Baghdad] en Irac, où il puisa un vaste fonds de connaissances, auprès des plus savants docteurs et des controversistes les plus habiles de ce pays.

Comme les devins et les augures avaient prédit l'avènement d'une nouvelle dynastie en Magheb, il se flatta que l'honneur d'y fonder la souveraineté des Masmouda lui était réservé. L'on assure qu'il consulta Abou-Hamed-el-Ghazzali 2 à ce sujet, en lui découvrant le secret de son cœur; et que ce docteur, voyant l'affaiblissement de l'empire musulman en Occident, et sachant que les colonnes du pouvoir qui devait réunir les peuples et sou

↑ Açafou signifie l'éclaireur en berbère. La coutume de brûler des bougies en l'honneur des saints est encore très-répandue dans l'Afrique septentrionale.

• Avide d'instruction, Abou-Abd-Allah-Ibn-Toumert entreprit, dans sa jeunesse, le voyage de l'Orient, bien qu'il fut déjà profondément versé dans la connaissance de la loi, des traditions prophétiques et de la théologie. A ces sciences, il réunissait celles de la grammaire et de la philologie arabes, et il s'était, de plus, distingué par une dévotion vive et ardente. A Baghdad, il fréquenta El-Kiya(-el-Herraci, célèbre docteur chafite dont on trouvera la notice biographique dans le deuxième volume de ma traduction d'Ibn-Khallikan). A Alexandrie, il fit la rencontre d'Et-Tortouchi. (Voy. ci-devant, p. 80, note.) C'est à tort que certains historiens maghrebins lui prêtent des entretiens avec ElGhazzali. — (Ibn-el-Athir.)

tenir la religion y étaient profondément ébranlées, l'encouragea dans cet espoir,. après l'avoir interrogé sur les amis qu'il avait dans ce pays et sur les tribus qui seraient assez puissantes pour faire triompher la bonne cause en accomplissant la volonté de Dieu. L'imam Mohammed, devenu enfin un océan de science, un flambeau de la foi, reprit la route du Maghreb.

Comme il avait étudié sous les docteurs sonnites du rit d'ElAchari pendant son séjour en Orient, il adopta le système de controverse qu'ils avaient dressé pour le soutien des doctrines primitives de l'islamisme et pour la réfutation des novateurs que l'on ne pouvait confondre sans le secours de preuves fournies par la raison. Il admit aussi leur principe d'interpréter allégoriquement certains versets du Coran dont le sens était équivoque, ainsi que certaines traditions concernant les dits et gestes du Prophète. Jusqu'alors, lé peuple du Maghreb avait évité d'accueillir ce système d'interprétation et s'était tenu invariablement à l'usage des premiers musulmans, lesquels ne s'en permettaient jamais l'emploi et prenaient les versets équivoques du Coran dans leur sens littéral. Ibn-Toumert leur en fit de vifs reproches; il leur ordonna même d'employer l'interprétation allégorique pour se rendre raison de ces passages et d'admettre les doctrines théologiques enseignées par El-Achâri. Ayant alors déclaré publiquement que les chefs de la secte achârite étaient de véritables imams [docteurs de l'église] et que leur parole devait nécessairement faire autorité, il rédigea plusieurs traités religieux d'après leurs principes, et nomma un de ces écrits la Morchida (directrice) et un autre le Tauhid (profession de l'unité). Il enseigna aussi l'impeccabilité de l'imam [chef spirituel et temporel des musulmans], opinion conforme à celle des Chiîtes imamiens. Sur cette question, il composa le traité de l'imamat que l'on désigna plus tard par le titre d'Aazzo ma yotlab (la chose la plus précieuse que l'on puisse rechercher), mots par lesquels cet écrit commence.

↑ Voy. t. 1, p. 252, note.

Voy. le premier chapitre de l'Appendice, no n.

Arrivé à Tripoli, la ville du Maghreb la plus rapprochée de l'Egypte, il commença à donner son avis sur des points de droit, en prenant pour bases de ses décisions les principes des Achârites et en reprochant aux docteurs maghrebins leur éloignement pour les opinions de cette école. Ne se contentant pas d'enseigner la loi, il s'occupa aussi de la réformation des mœurs; et, emporté par son zèle, il recommanda le bien et défendit le mal avec tant d'ardeur qu'il s'attira quelquefois de mauvais traitements. Ces désagréments, au lieu d'abattre son courage, lui paraissaient comme autant de titres à la faveur de Dieu. Parvenu à Bougie, il en vit le souverain, El-Aziz-Ibn-el-Mansour*, entouré de tous les délices de la vie, et ne put s'empêcher d'adresser à cet émir hammado-sanhadjien et à ses officiers les réprimandes les plus

Faire la police des mœurs s'exprime en arabe par la tournure suivante: ordonner le reconnu et défendre le méconnu; c'est-à-dire, ce que la loi approuve et ce qu'elle condamne.→ Ou ne pourrait entreprendre celte tâche sans l'autorisation du sultan; aussi, Ibn-Toumert se mettait lui-même en contravention à la loi. A la place de la formule défendre le méconnu, on dit aussi changer le méconnu (taghaiyer el-monker). expression qui, par suite du zèle excessif des gens dévols, a fini par signifier ennuyer les gens, leur jouer un mauvais tour. Ibn-el-Athir raconte de cette manière, dans ses Annales, l'arrivée d'Ibn-Toumert en Ifrikïa : « Quand il eut accompli le devoir du pèlerinage, il s'embarqua » au port d'Alexandrie pour rentrer en Maghreb, et, pendant toute la ⚫ traversée, il travailla sans cesse à réformer les mœurs de ses com>pagnons de voyage, les obligeant à dire leurs prières et à lire le Coran.

Débarqué, l'an 505 (4444-2), à El-Mehdia, ville qui eut alors pour > sultan Yahya-Ibn-Temim (v. p. 24 de ce vol.), il alla se loger dans » une mosquée, n'ayant pour tout bagage qu'une outre à eau et un » bâton. Bientôt les habitants de la ville entendirent parler de lui, et, » vinrent, en foule, étudier plusieurs, sciences sous sa direction. Le » zèle qu'il déploya pour réformer les mœurs et pour mettre un terme » aux scandales dont il était journellement témoin, porta l'émir, Yahya, » à le faire comparaître devant une assemblée de docteurs; mais, aussi» tôt que ce prince eut jeté les yeux sur lui et entendu sa justification, » il lui témoigna de grands égards et demanda sa bénédiction. D'El» Mehdia, Ibn-Toumert alla passer quelque temps à Monestir, au » milieu d'une communauté d'hommes religieux, et, de là, il se rendit » à Bougie. »

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sévères. Ayant un jour essayé d'empêcher certaines irrégularités dont il fut scandalisé en parcourant les rues de la ville, il excita une grande émeute parmi la populace. Le sultan en éprouva un tel mécontentement qu'il tint conseil avec ses ministres au sujet du réformateur. Celui-ci devina le danger et courut se réfugier à Mellala, endroit situé à un paransage de Bougie. Les Beni-Ourîagol, puissante tribu sanhadjienne qui occupait cette localité, le prirent sous leur protection et préférèrent encourir la colère du sultan que de lui livrer leur hôte. Ibn-Toumert passa quelques jours chez eux, s'occupant à leur enseigner la loi divine, et, à la fin de chaque leçon, il allait s'asseoir sur une pierre que l'on montre encore aujourd'hui et qui se trouve au bord de la route, à peu de distance du village de Mellala.

Il y était encore, quand il rencontra, pour la première fois, Abd-el-Moumen, [le même qu'il devait nommer, plus tard,] chef des Almohades. Ce jeune homme allait en pèlerinage avec son oncle; mais il plut tant à Ibn-Toumert par son savoir, que ce docteur le garda auprès de lui et en fit son élève. Dès lors Abdel-Moumen recueillit avec empressement les enseignements que lui adressa ce savant imam 2.

Plus tard, le Mehdi [-Ibn-Toumert] prit la route du Maghreb avec son compagnon, et, entré dans le Ouancherîch, il rencontra et emmena avec lui un homme nommé Bechîr-el-Ouancherîchi, [lequel devint, dans la suite,] un de ses principaux disciples. Arrivé à Tlemcen, où sa réputation l'avait devancé, il se vit conduire devant le cadi, Ibn-Saheb-es-Selat. Ce fonctionnaire lui reprocha les doctrines dont il faisait profession et le réprimanda de s'être mis en opposition avec les gens de son pays. Il croyait le détourner ainsi de la voie où il s'était engagé; mais le réformateur ne tint aucun compte de ses paroles et poursuivit son chemin. Arrivé à Meknaça (Mequinez), après avoir traversé

+ Il brisa partout les amphores de vin et les instruments de musique. Dans le t. I, pp. 252 et 253, les circonstances qui amenèrent la rencontre d'Ibn-Toumert et d'Abd-el-Moumen sont racontées d'une autre manière.

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