Images de page
PDF
ePub

n'avait plus le danger de la voir se rompre. Je dirai plus : dans certaines haches qui n'avaient pas d'anneau, qu'on pouvait employer comme ciseaux, peut-être, mais qu'on pouvait également monter, il fallait remplacer par des liens allant de la cheville au manche l'anneau qui manquait, et non-seulement j'ai dû mettre ce moyen en pratique pour le bronze, mais encore pour tous les silex sans exception que j'ai montés dans des branches coudées. Je ne saurais trop le dire, cette åttache est extrêmement importante, et double la solidité de

l'arme.

Voilà à peu près tout ce que j'ai à dire sur les haches proprement dites; pour les autres engins, tels que scies, gratioirs, lances, poignards, je vais en parler sommairement. Chacun sait d'avance ce que j'en ai pu faire.

Les scies se mettent dans un morceau de bois, de n'importe quelle forme, rond ou muni d'un manche qui se tient à la main. Le grattoir que j'avais introduit dans un andouiller de cerf m'a permis de préparer, en la nettoyant, une peau de blaireau fraîche, et pour les poignards, je les ai enchâssés jusqu'au tiers dans des racines de chêne, qui en faisaient une arme à la fois commode et dangereuse. Chacun sait que les flèches étaient liées dans un bois fendu, et que les pays qui connaissaient le bitume consolidaient encore leur point d'attache avec cette substance; il en était de même des lances.

J'ajouterai, en terminant, qu'en me servant du remarquable opuscule de notre collègue M. de Mortillet sur la pêche et la navigation préhistoriques, j'ai pu faire revivre différents mo dèles de pirogues en les creusant au feu et en achevant ce pénible ouvrage soit avec la hache en silex, soit avec la hache en bronze; mes embarcations sont bonnes, tiennent bien sur l'eau, portent un poids relativement considérable, et sont remarquables par la facilité avec laquelle elles se meuvent. Elles sont déposées au musée de Saint-Germain (1).

(1) Voyez dans les Bulletins de la Société d'anthropologie, 2e série, t. V, p. 146, 147, la courte discussion qui a suivi la communication qu'on vient de lire, et dans le même volume, p. 163, le récit des expériences faites dans un des ateliers du musée du Louvre par plusieurs membres de la Société sur les instruments en silex et en bronze reconstitués par M. Lepic.

EXPLICATION DES PLANCHES.

PLANCHE I, FIgure A. Hache d'Abbeville enchâssée de force dans un défaut d'une racine de chêne. 23 centimètres de haut et 17 de long à l'emmanchement.

FIGURE B. Hache d'Abbeville introduite dans une fente pratiquée au bas d'un jeune chêne sur pied; la pièce est maintenue par le retrait du bois et l'action de la séve. 36 centimètres de haut.

FIGURE C. - Hache d'Abbeville perçant au travers d'un andouiller de cerf et pouvant servir de pic. La pièce a 12 centimètres et le. manche 35.

FIGURE D. Hache polie et très-plate du Danemark, enchâssée dans le bec formé par une branche coudée, entaillée suivant la figure E; des liens en boyau consolident la pièce et le manche, et une attache empêche l'arme de se déplacer ou de se détériorer par l'action du coup. 56 centimètres de haut et 37 centimètres au bec. FIGURE F. Hache d'Abbeville emmanchée suivant la coupe G dans une branche courbée par une corde, et où la pièce est maintenue par une ligature en boyau. 56 centimètres de haut.

FIGURE H. Hache polie, de France, sans provenance certaine ; une cheville fendue qui serre la pierre au moyen d'une ligature est introduite dans un manche de chêne suivant la coupe I. 55 centimètres de hauteur, 17 centimètres à la cheville.

FIGURE J. Hache du Danemark traversant un manche en chêne et maintenue en arrière par une ligature croisée qui amortit le coup et empêche l'outil de chasser au travers du bois et de le fendre. Cette arme est une de celles qui ont été le plus essayées, et les ligatures nombreuses qui la consolident ont été mises par l'ouvrier même, qui donne ainsi à son outil plus de force, plus de résistance, et surtout plus de commodité pour la main. 64 centimètres de hauteur et 13 centimètres de silex.

A droite de cette figure est une des plus grandes haches danoises introduite dans un pied de chêne, là où naissent les racines; le bois ayant été employé frais, le retrait a suffi, aidé de la scie, pour fixer le silex de façon à ce qu'il ne puisse plus être

arraché. 80 centimètres de hauteur au manche et 25 centimètres d'outil.

A gauche est une autre hache en silex de Danemark traversant aussi une monture en chêne et consolidée par un nerf faisant l'X, comme dans la figure J. 36 centimètres de hauteur, 20 centimètres de silex.

PLANCHE II, FIGURE A. Une grande hache du Danemark perçant un manche de chêne à la naissance même des racines; un fort nerf de bœuf appuie en croisant sur la partie postérieure en faisant un tour au-dessus et un autre au-dessous du silex de façon à supporter le coup et à consolider le bois; les bouts du nerf sont introduits dans la fente même, où les retient la pression de l'arme introduite à force, et le nerf en se séchant acquiert une rigidité extraordinaire qui empêche le silex de fendre le bois ou de le forcer par suite des coups. La figure B indique le détail du croisement sur le silex.

FIGURE C. Hache en bronze avec anneau maintenue dans une cheville rapportée, consolidée par des liens; l'anneau vient empêcher le bronze de s'échapper et permet à la monture de supporter des ouvrages pénibles et considérables. 55 centimètres de haut, 27 centimètres à la cheville.

FIGURE D. Une hache de bronze semblable à la précédente, n'ayant pas d'anneau, et pouvant servir à la fois de ciseau et de hache. Dans ce dernier cas, il faut suppléer à l'anneau par un lien supplémentaire qu'une cheville de bois mise au dos du manche empêche de remonter. 45 centimètres de hauteur au manche et 32 centimètres de cheville.

FIGURE E. - Hache de bronze à oreillettes rabattues sur une trèsforte cheville, munie d'un talon dans la partie qui touche le manche; ce genre de monture étant d'une solidité extrême, les liens sont inutiles, et l'anneau seul doit être utilisé, comme je l'ai indiqué plus haut. 55 centimètres de haut à la tige et 30 centimètres de long à la cheville.

FIGURE E. Petite hache des terramares, perçant de part en part un manche de bois, où elle est maintenue par des coins qui entrent dans les entailles du bronze, et qui maintiennent les oreillettes; à l'arrière, j'ai croisé un lien dans la partie légèrement creuse de l'outil, que je crois pouvoir indiquer comme ménagée à cet effet; la figure G donne le détail du croisement à la partie antérieure. Manche, 45 centimètres de haut; cheville, 31 centimètres de long. FIGURE H. La seule pierre que j'aie montée en herminette

avec tranchant perpendiculaire au manche; la cheville est en deux morceaux, l'un creusé qui reçoit la pièce, et l'autre servant à la maintenir; le tout a été réuni par de forts liens superposés; nos outils européens, je le répète, semblent mal se prêter à ce genre de monture; mes résultats ne m'ont pas satisfait, et j'indique ce modèle sous toutes réserves, bien qu'il soit connu en Océanie et en Afrique. Le manche, très-courbé, a 65 centimètres de long et la cheville 28 centimètres.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

FIGURE J.Harpon fait de bois de cerf, appliqué à un manche taillé en biseau; la corne et le bois sont percés et traversés par une cheville en bois qui les fixe l'une à l'autre, et le tout est consolidé par une corde.

FIGURE K.

Poignard du Danemark introduit dans une racine de chêne et fixé par deux coins de bois,

Tels sont les principaux modèles que j'ai déposés au musée de Saint-Germain; je suis loin d'avoir la prétention d'avoir dit le dernier mot dans cette question des armes ou outils préhistoriques, mais je m'estimerai assez récompensé de mes efforts si ces essais incomplets peuvent, par la discussion, amener des résultats positifs et des découvertes réelles.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small]

(Mémoire communiqué à la Société d'anthropologie dans la séance du 16 mai 1872.)

[merged small][ocr errors]

Les auteurs qui ont écrit sur la craniométrie n'ont pas tous attaché la même importance à la détermination de la capacité du crâne. Plusieurs ont négligé ou dédaigné ce caractère, dont il est difficile cependant de méconnaître la valeur anthropologique. La capacité du crâne ne donne pas rigoureusement le volume de l'encéphale, puisque la boîte crânienne contient, outre la substance nerveuse, des membranes dont l'épaisseur est variable et une quantité plus variable encore de sérosité; mais, abstraction faite de quelques cas pathologiques, ces parties accessoires n'occupent dans le crâne qu'un espace relativement très-petit. On peut donc dire d'une manière générale que la capacité du crâne croît ou décroît avec le volume de l'encéphale et que, par conséquent, la comparaison des capacités équivaut à peu près à celle des cerveaux eux-mêmes. Si cette comparaison ne portait que sur un très-petit nombre de crânes, elle pourrait conduire quelquefois à des appréciations erronées. Etant donnés, par exemple, deux crânes dont les capacités sont un peu inégales, il peut se faire que leurs cerveaux respectifs présentent des inégalités inverses; mais ces discordances ne s'observent à l'état normal que lorsque les capacités sont voisines de l'égalité, et elles disparaissent toujours lorsque, au lieu de comparer ainsi des crânes individuels, on met en parallèle, par la méthode des moyennes, des séries d'une certaine étendue.

Dans ces dernières conditions, l'étude comparative des capacités crâniennes donne même à quelques égards plus de sécurité que n'en donneraient les pesées cérébrales. On sait, en effet, que l'encéphale n'échappe pas plus que les autres organes

« PrécédentContinuer »