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clume portative, destinée à être enfoncée dans le sol (1); un marteau et une tenaille de forgeron; une ou deux limes, un ou deux burins, une gouge, un polissoir de pierre, un tamis à tamiser le sable et l'argile (2), etc.

« Les procédés opératoires consistent: 1° en moulage, et 2° en fondage du métal et coulage.

<< Dans le moulage, la première chose est le modèle à mouler. C'est tantôt un objet déjà fait, comme clochette, bague, croix, etc., de bronze, de laiton, etc., sur lequel le moule est fait directement, tantôt un modèle que le Zlotar doit préalablement préparer lui-même d'après sa fantaisie ou sur la commande. Ce sont des croix, des bagues, des plaques, des agrafes, etc. Le Zlotar prépare les modèles de ces objets, tantôt en bois de tilleul, tantôt en cire (3). Pour le premier cas, à ce qu'on m'a expliqué, il se sert de son couteau de poche et d'un burin; dans le dernier cas, ses doigts, son canif et quelquefois un burin ou une aiguille font toute la besogne.

« Préparation du moule. Vasil Zlotar en a exécuté deux en notre présence: l'un pour couler une clochette, l'autre pour de menus objets d'ornement trois bagues, une agrafe, une

croix.

« a. Moulage de la clochette. Le modèle était une contrefaçon tsigane d'une clochette russe, coulée à Valdaï : hauteur, 7 centimètres; largeur à la base, 8 centimètres et demi. (Vasil nous a montré aussi une autre clochette qui leur sert de mo

(1) Dans une lettre ultérieure (du 15 mars 1878), qui est accompagnée du dessin de l'objet, M. Kopernicki me dit : « L'enclume a la forme ordinaire, et elle est toute en fer. Elle se compose d'un corps massif, dont la surface supérieure se termine carrément par un bout et en pointe obtuse par l'autre bout. Ce corps repose sur un montant également massif (relativement assez court), qui se rétrécit par en bas pour être fiché en terre. » L'enclume des Caldarari, que je décrirai ailleurs, également toute en fer, est beaucoup moins massive, et la barre de fer pointue qui lui sert de montant est plus longue. M. Kopernicki ajoute : « Faute d'une véritable enclume, le dos d'une hache enfoncée dans le sol peut en tenir lieu, comme on le voit sur une photographie de Tsiganes de Transylvanie, que vous trouverez parmi celles que je vous envoie. D

(2) J'avais d'abord peine à comprendre que l'on tamisát l'argile; mais M. Kopernicki me fait remarquer avec raison que sans doute on commence par la faire sécher et par la pulvériser; ce qui est en effet le meilleur moyen de la mêler intimement au sable; mélange que l'on humecte ensuite, si le sable n'était pas d'avance suffisamment humide.

(3) Comme je l'ai déjà noté p. 505, ce détail intéressant est contredit dans le Postscriptum, § 12. Mais je ne puis m'empêcher de remarquer qu'il est ici bien précis. 2o SÉRIE. -T. I. 34

dèle. C'était une sonnette type tsigane (1), haute de 7 centimètres et latéralement aplatie; diamètres de la base, 7 et 3 centimètres. Il nous a paru très-curieux de voir sur la surface externe de cette singulière clochette le mot PARJS, coulé en relief (2).)

« Le Zlotar, de même que les forgerons et les Caldarari, travaille toujours accroupi. Dans cette posture, il met devant lui une petite planche de bois sur laquelle il pose le modèle, la base en bas (on n'a pas oublié qu'il s'agit d'une clochette), et le recouvre de la partie supérieure (fig. III, A, et fig. IV) de la forme en fer. - Un garçon lui apporte, de la cour, la quantité nécessaire de sable ordinaire, légèrement humide, et de l'argile. Pour épargner le temps, notre Zlotar ne les tamise pas, comme c'est la règle, mais les broie et les pétrit soigneusement dans ses mains, en écartant les petits cailloux et les grains de sable trop gros, A l'ordinaire, un mélange de sable avec un cinquième ou un sixième d'argile, tamisé et bien pétri, compose une matière assez plastique pour faire des moules bons à couler même les menus objets. Le mélange plastique, préparé devant nous, est versé peu à peu dans l'intérieur de la forme; et, à mesure qu'il la remplissait, le Zlotar bourrait fortement le mélange autour du modèle à l'aide du manche d'un marteau; enfin, après que la forme est remplie par-dessus bords, le superflu est rasé d'un seul trait au moyen d'une petite règle de bois (fig. IV).

Ayant fait tout cela en quelques minutes, l'ouvrier prend une poignée de braise, la met dans un torchon de toile, et la broie à coups de marteau, pour produire une certaine quantité de poussière charbonneuse. Il retourne la forme, le fond en haut, avec son contenu, sable et clochette, qui s'y tiennent solidement; il prend une mèche d'étoupe, qu'il trempe dans la poussière de charbon, et en saupoudre très-soigneusement l'intérieur de la clochette et toute la surface libre du mélange de sable et d'argile à la base de la forme. Ce premier acte

(1) Ces deux mots en italique sont à supprimer, comme on le verra plus loin (note de la page 529). Si j'en laisse subsister la trace, c'est qu'ils ont été le point de départ de quelques remarques ultérieures, qui peuvent avoir leur intérêt.

(2) Il ne faudrait pas en induire que le modèle soit venu de Paris. Comme M. Kopernicki me le fait remarquer dans des éclaircissements ultérieurs, le mot Paris est, en Galicie comme ailleurs, un mot magique dont la réclame abuse, et qui sert assez souvent d'estampille à de misérables produits de fabrication locale.

de moulage achevé, il ajuste l'autre partie de la forme, plaque d sur plaque b, les tringles latérales e étant passées dans les fentes c. Ensuite, il remplit bien doucement, avec du sable bien préparé, d'abord l'intérieur de la clochette et puis celui du cadre B; il les en bourre de plus en plus fortement, et il rase le contenu juste au niveau des bords du cadre (fig. V).

<< Le moulage étant ainsi achevé, l'ouvrier se met à dégager le modèle. Pour cela, il renverse la forme avec son contenu, base en bas, et la pose sur la planchette. Il perce de dehors, dans le moule, un petit trou, en entonnoir, pénétrant jusqu'à la surface de l'orillon de la clochette. Il saisit ensuite la forme A autour de son bord supérieur, avec tous les doigts. écartés de la main gauche; et, en frappant très-doucement, avec une règle de bois qu'il tient de la main droite, de petits coups secs autour de cette partie de la forme, il l'enlève, avec le mélange de sable et d'argile qui y adhère (fig. VI), la renverse doucement et la pose à côté avec sa base en haut. Reste à enlever la clochette, qui couvre l'autre moitié du moule. C'est ce qu'il fait bientôt, en la saisissant de la main gauche par son orillon, et en lui donnant de petits coups de règle avec sa main droite (fig. VII), ce qui laisse le noyau à découvert (fig. VIII).

<< Le moule étant ainsi préparé, en un quart d'heure tout au plus, on le laisse sécher à l'air libre et sec pendant tout le temps qui est nécessaire pour préparer et pour fondre l'alliage dans le creuset. >>

Il ne restera plus ensuite qu'à replacer les deux parties du moule l'une sur l'autre, la base en bas, en ménageant exactement entre elles le vide qui représente l'espace de la clochette (fig. IX), puis à couler le métal par l'ouverture qui a été pratiquée au-dessus de l'orillon o. On a eu soin, d'ailleurs, d'engager dans le sable, au-dessous du vide que remplira l'orillon, un petit anneau de fer, dont l'appendice supérieur, faisant saillie dans ce vide, sera pris dans le métal, et cet anneau servira à suspendre le battant de la clochette. M. Kopernicki, qui représente ce détail dans la figure IX, a omis d'en parler dans sa description. Le placement de ce crochet dans le sable du noyau (moule inférieur) doit se faire sans doute au moment même où l'on vient de dégager celui-ci, et avant de le

recouvrir de la chape (moule supérieur) déjà percée en entonnoir (1).

«b. Moulage des petits objets massifs. Le Zlotar prend la forme plate (fig. X), il en démonte les deux cadres et les met sur une planche l'un à côté de l'autre, leurs bords congruents et les creux de leurs demi-goulots (bb) étant tournés en dessus (fig. XI). Il commence par remplir le cadre inférieur (A) avec de la matière à mouler, il le bourre fortement à coups de marteau, et rase nettement le superflu au niveau des bords du cadre. Ayant obtenu ainsi une surface parfaitement égale et unie, il y dispose ses objets, en allant du sommet vers la base du cadre, de la manière la plus avantageuse pour que le métal versé dans le goulot y arrive partout d'un seul coup. Puis, il se met à enfoncer doucement chaque pièce à mouler juste jusqu'à la moitié de son épaisseur; il saupoudre la partie saillante des objets et toute la surface libre du moule avec une couche mince et très-égale de la fine poussière de charbon. Ensuite, pour mouler l'autre partie des objets qui fait saillie, il ajuste le cadre supérieur (B) sur celui qui vient d'être rempli, et les fixe l'un sur l'autre, en faisant passer les tringles latérales du cadre inférieur dans les boucles du supérieur. Puis, il verse peu à peu le mélange plastique, il en remplit l'intérieur du second cadre, et finit par le bourrer avec force et par raser le superflu.

<«< Cet acte de moulage étant achevé, l'ouvrier s'occupe de creuser les sillons dans l'intérieur du moule et de dégager les objets. Dans ce but, il enlève d'abord très-doucement le cadre supérieur et le place à côté, les empreintes creuses des objets tournées en dessus. On voit ces empreintes, ainsi que toute la surface libre du moule, couvertes d'une couche isolante très

(1) Lorsque j'ai ajouté cet alinéa, je n'avais pas encore va de clochettes; depuis, j'en ai reçu cinq, deux rondes et trois aplaties. La plus grande des deux premières n'avait pas de battant, ni de boucle pour attacher ce battant; il y avait, à la place de celle-ci, deux petites cavités intérieures, évidemment destinées à recevoir les deux bouts de l'attache, qui doivent alors être fixés par une soudure; et au fond des quatre autres clochettes, dont trois contiennent leur battant et l'autre la boucle à laquelle le battant doit pendre, on voit en effet comme une couche de soudure. Je remarque la même chose dans une sonnette française qui me tombe sous la main. Il paralt donc que très-souvent, en moulant la clochette, on se borne à ajouter au noyau deux petits corps en saillie qui forment deux petites cavités au fond de la clochette elle-même (et ce détail appellerait quelques explications complémentaires). Mais la manière de procéder que j'ai indiquée ci-dessus n'en est pas moins la plus régulière.

mince de la poussière de charbon qui s'y est attachée par emprunt à la surface sous-jacente. Ayant de nouveau devant lui la partie inférieure du moule avec les pièces qui y font saillie, le Zlotar se met à creuser les sillons pour le métal à couler (fig. XI, A). Il se sert pour cela de son couteau de poche: d'abord, à partir du bord intérieur du goulot, il fait des sillons divergents vers chacun des objets placés dans le premier rang; ensuite, un autre sillon entre chacun de ceux-ci et la pièce qui se trouve au deuxième rang, enfin un dernier entre cette dernière pièce et celle qui se trouve la plus éloignée (1). Le creusement de ces petits canaux, d'un demi-centimètre environ de largeur et de profondeur, est une manœuvre des plus délicates dans l'opération du moulage; car il s'agit de ne pas ébrécher les petits creux des objets et d'éloigner soigneusement le sable des sillons qu'on vient de creuser. Notre Tsigane accomplit tout cela au moyen de son gros canif, avec une adresse, une patience et un soin admirables. Puis, il enlève les objets modèles, ce qui n'est pas moins délicat. Toute cette préparation du moule, depuis le commencement jusqu'à la fin, ne dura qu'une demi-heure à peine.

<< Les deux demi-moules étant achevés, on les laisse, comme les moules de clochettes, sécher à l'air libre et sec, en attendant le moment d'y verser le métal fondu. Ce moment venu, on réunit les deux cadres contenant les demi-moules, on les pose verticalement, le goulot en haut, et on applique transversalement à chaque face un gros bâton de bois (fig. XII); on lie fortement ces bâtons par leurs bouts afin de serrer encore davantage les deux cadres l'un contre l'autre. En même temps, un bout de ces bâtons liés ensemble devient un manche solide, que le fondeur tient dans sa main gauche au moment où, avec sa main droite, il verse dans le goulot le métal fondu.

« Faute de charbon et d'autres matériaux indispensables, (1) Ces sillons ou rigoles sont ce qu'on appelle en langage du métier les jets. Mais, dans cette opération comme dans la précédente, on a omis de parler d'un autre genre de petits conduits qu'on appelle les évents, et qui sont destinés à laisser sortir l'air du moule lorsque le métal en fusion s'y précipitera. On larde même en outre, avec une longue aiguille, la masse du sable, pour faciliter le dégagement de l'air contenu dans ses pores et qui sera dilaté par la chaleur (Delon, le Cuivre, p. 140). Eu supposant que la composition du mélange plastique qui sert à faire les moules dispense les Zlotars de ce dernier soin, les évents paraissent nécessaires dans tous les cas.

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