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manqué auparavant, c'est-à-dire, la connaissance de l'histoire des souverains étrangers qui ont dominé sur cette région, ainsi que des dynasties turques et des pays qui leur ont été soumis. J'ajoutai ces faits à ceux que j'avais précédemment inscrits sur ces pages, les intercalant dans l'histoire des nations (musulmanes) qui étaient contemporaines de ces peuples, et dans mes notices des princes qui ont régné sur diverses parties du monde. M'étant astreint à suivre toujours un même système, celui de condenser et d'abréger, j'ai pu éviter bien des difficultés et atteindre facilement le but que j'avais en vue. M'introduisant, par la porte des causes générales, dans l'étude des faits particuliers, j'embrassai, dans un récit compréhensif, l'histoire du genre humain ; aussi ce livre peut être regardé comme le véritable dompteur de tout ce qu'il y a de plus rebelle parmi les principes philosophiques qui se dérobent à l'intelligence; il assigne aux événements politiques leurs causes et leurs origines, et forme un recueil philosophique, un répertoire historique.

Comme il renferme l'histoire des Arabes et des Berbers, peuples dont les uns habitent des maisons et les autres des tentes; qu'il traite des grands empires contemporains de ces races; qu'il fournit des leçons et des exemples instructifs touchant les causes primaires des événements et les faits qui en sont résultés, je lui ai donné pour titre1: Kitab el-îber, oua díouan el-mobteda oua'l-khaber; fi aiyam il-Arab oua'l-Adjem oua'l-Berber, oua men aasarahom min dhoui's-soltan il-akber (le Livre des exemples instructifs et le Recueil du sujet et de l'attribut [ou bien des Origines et de l'histoire des peuples], contenant l'histoire des Arabes, des peuples étrangers, des Berbers et des grandes dynasties qui leur ont été contemporaines).

:

Pour ce qui concerne l'origine des peuples et des empires, les synchronismes des nations anciennes, les causes qui ont entretenu l'activité ou amené des changements chez les générations passées et chez les diverses nations; pour tout ce qui tient à la civilisation, comme la souveraineté, la religion, la cité, le domicile, la puissance,

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l'abaissement, l'accroissement de la population, sa diminution, les sciences, les arts, le gain', la perte, les événements amenés par des P. 8. révolutions et retentissant au loin, la vie nomade, celle des villes, les faits accomplis et ceux auxquels on doit s'attendre, j'ai tout embrassé et j'en ai exposé clairement les preuves et les causes. De cette manière, l'ouvrage est devenu un recueil unique, attendu que j'y ai consigné une foule de notions importantes et de doctrines naguère cachées et maintenant faciles à entendre.

J'avoue toutefois que, parmi les hommes des différents siècles, nul n'a été plus incapable que moi de parcourir un champ si vaste2; aussi je prie les hommes habiles3 et instruits d'examiner mon ouvrage avec attention, sinon avec bienveillance, et, lorsqu'ils rencontreront des fautes, de vouloir bien les corriger, en me traitant toutefois avec indulgence. La marchandise que j'offre au public aura peu de valeur aux yeux des savants; mais, par un aveu franc, on peut détourner le blâme, et l'on doit toujours compter sur l'obligeance de ses confrères. Je prie Dieu de rendre mes actions pures devant lui; je compte sur lui, et c'est un excellent protecteur. (Goran, sour. III, vers. 167.)

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INTRODUCTION.

De l'excellence de la science historique; établissement des principes qui doivent lui servir de règles; aperçu des erreurs et des méprises auxquelles les historiens sont exposés; indication de quelques-unes des causes qui produisent des erreurs'.

L'histoire est une science qui se distingue par la noblesse de son objet, sa grande utilité et l'importance de ses résultats. C'est elle qui nous fait connaître les mœurs des peuples anciens, les actes des prophètes et l'administration des rois. Aussi2 ceux qui cherchent à s'instruire dans le maniement des affaires spirituelles et temporelles trouvent dans l'histoire des leçons de conduite; mais, pour y parvenir, ils doivent mettre en œuvre des secours de diverse nature et des connaissances très-variées. Ce n'est que par un examen attentif et une application soutenue qu'ils pourront découvrir la vérité et se garder contre les erreurs et les méprises. En effet, si l'on se contente de reproduire les récits transmis par la voie de la tradition, sans consulter les règles fournies par l'expérience, les principes fondamentaux de l'art de gouverner, la nature même de la civilisation et les circonstances qui caractérisent la société humaine; si l'on ne juge pas de ce qui est loin par ce qu'on a sous les si l'on P. 9. ne compare pas le passé avec le présent, l'on ne pourra guère éviter de s'égarer, de tomber dans des erreurs et de s'écarter de la voie de la vérité. Il est souvent arrivé que les historiens, les commentateurs et les hommes les plus versés dans la connaissance des traditions historiques, ont commis de graves méprises en racontant les événements du passé; et cela parce qu'ils se sont bornés à rapporter indistinctement toute espèce de récits, sans les contrôler par les prin

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yeux,

.حتى lisez حی

اعتمد La bonne leçon est 3

Littéral. des récits gras et maigres, c'est-à-dire, qui valent beaucoup ou peu.

cipes généraux qui s'y appliquent, sans les comparer avec des récits analogues, ou leur faire subir l'épreuve des règles que fournissent la philosophie et la connaissance de la nature des êtres, sans enfin les soumettre à un examen attentif et à une critique intelligente; aussi se sont-ils écartés de la vérité pour s'égarer dans le champ de l'erreur et de l'imagination. Cela a eu lieu surtout1 en matière de nombres, quand, dans le cours d'un récit, il s'est agi de sommes d'argent ou de la force d'une armée. C'est toujours là que l'on doit s'attendre à des mensonges et à des indications extravagantes; aussi faut-il absolument contrôler ces récits au moyen de principes généraux et de règles établis par le bon sens.

C'est ainsi que Masoudi et plusieurs autres historiens ont dit, en parlant des armées des Israélites, que Moïse, en ayant fait le dénombrement dans le désert, après avoir passé en revue les hommes en état de porter les armes et âgés de vingt ans ou plus, trouva qu'il y avait plus de six cent mille guerriers 2. Dans cette circonstance, l'écrivain ne s'est pas demandé si l'étendue de l'Égypte et de la Syrie était assez vaste pour fournir un tel nombre de troupes. Chaque empire du monde entretient pour sa défense autant de soldats que ses moyens le permettent; il en supporte les frais; mais il ne saurait y pourvoir s'il en augmentait le nombre. C'est ce qu'attestent les usages auxquels nous sommes habitués et les faits qui passent sous nos yeux. Ajoutons que des armées dont le nombre s'élèverait à un pareil chiffre ne sauraient manoeuvrer ou combattre, attendu que le terrain se trouverait trop étroit: chaque armée, étant rangée en bataille, s'étendrait à deux ou trois fois la portée de la vue, sinon davantage. Comment alors ces deux grands corps pourraient-ils livrer bataille? Comment un des partis pourrait-il remporter la victoire, lorsque dans une de ses ailes on ne saurait pas ce qui se passe dans l'autre3 ? Les

L'auteur a écrit la sans faire précé

der ce mot par la particule négative Y. La plupart des Maghrébins commettent la même faute.

2

Selon la Bible, six cent trois mille cinq cent cinquante. (Nomb. I, 46.)

3

Il faut lire et dans le texte arabe.

faits dont nous sommes journellement témoins suffisent pour confir- P. 10. mer nos observations; le passé et l'avenir se ressemblent comme deux gouttes d'eau.

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D'ailleurs l'empire des Perses l'emportait de beaucoup sur celui des Israélites: c'est ce que prouvent les victoires de Bakht-nasar (Nabuchodonosor), qui s'empara de leur pays, leur enleva toute autorité, détruisit Jérusalem, siége de leur religion et de leur puissance. Or ce prince n'était qu'un simple gouverneur d'une des provinces de la Perse, un satrape (merzeban), dit-on, qui commandait la frontière occidentale de cet empire. Ajoutons à cela que les deux Iracs, le Khoraçan, le Ma-ouera-'n-neher (la Transoxiane) et El-Abouab (les portes Caspiennes, Derbend), provinces de cet empire1, présentaient une étendue bien supérieure à celle du pays des Israélites; et cependant jamais les armées de la Perse n'atteignirent à beaucoup près un pareil nombre2. Le corps le plus considérable que les Persans aient jamais réuni, celui qui combattit à Cadecîya3, se composait de cent vingt mille hommes d'armes, dont chacun avait sa suite. C'est ce qu'atteste Seif (Ibn Omar el-Acedi), qui ajoute : « Avec les hommes de leur suite ils dépassaient le nombre de deux cent mille. » Selon Aïcha et Zohri, l'armée avec laquelle Rostem (le général persan) combattit Sâd (le général arabe) aux environs de Cadecîya se composait de soixante mille hommes, dont chacun avait sa suites.

De plus, si le nombre des Israélites avait atteint ce chiffre, leur territoire aurait pris une grande extension et leur domination se serait étendue au loin. Les gouvernements et les royaumes sont grands

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