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pes gravirent rapidement les contre-forts escarpés et boisés qu'occupaient les Kabiles. Ces derniers furent refoulés successivement, et, bientôt après, arrivant à la crète, on aperçut les beaux villages de la vallée des R'eboula. L'infanterie mit le feu à ceux qui étaient les plus rapprochés, et, entre autres, à celui qui, pendant plus d'une année, avait été le quartier-général du cherif Mouley-Mohammed.

Les Kabiles, effrayés par la vivacité de l'attaque, purent se réunir pendant que la troupe incendiait les villages. Un engagement assez acharné eut lieu d'abord, sur la gauche, avec le bataillon de tirailleurs indigènes, et, presque aussitôt, sur la droite, où se trouvait le 38. Les contingents s'augmentaient à vue d'oeil. Un retour offensif devint nécessaire. Les escadrons de chasseurs sabrèrent, malgré les difficultés du terrain, les Kabiles les plus avancés, et le feu cessa immédiatement.

Le lendemain, 17, le bivouac était placé sur un col situć entre les R'eboula et les Beni-Brahim, au point nommé Aïn-Graïch. Deux mille Kabiles environ étaient réunis à une demi-lieue de la colonne.

La position du bivouac de nos troupes produisit un immédiat effet sur les R'eboula et les Beni-Brahim; leurs chefs vinrent au camp dans la matinée et demandèrent l'aman; mais ils ne furent pas maîtres d'empêcher les contingents des tribus voisines qu'ils avaient, la veille, appelés à leurs secours, de tirailler avec nos grand'gardes.

Le jour suivant, au point du jour, les contingents avaient disparu et la colonne se mit en marche pour aller occuper le bivouae des Beni-Chebana. Quand ce mouvement fut indiqué, quelques coups de fusil de signal annoncé.

rent le combat. Les Beni-Ourtilan et les Beni-lala, dissidents, se présentaient sur le territoire des Beni-Brahim, soumis de la veille, et qui, ainsi qu'ils l'avaient promis, prévenaient de leur arrivée et tentaient de s'opposer à leur passage. Les crètes de droite se garnirent des contingents. des Beni-Afif, des Beni-Oudjan et autres tribus du nord. Quelques minutes après, la fusillade était activement engagée. La route, située en corniche, pouvait difficilement être flanquée à gauche et les Kabiles s'étaient embusqués en grand nombre dans les ravins qui l'avoisinaient. L'avant-garde fut lancée au pas de course sur la route pour culbuter les rassemblements qui l'occupaient. Ce mouvement s'exécuta avec un grand élan; la route fut bientôt dégagée; plusieurs Kabiles, tournés dans les ravins, restêrent entre nos mains tués ou prisonniers. A dix heures, le feu avait cessé partout; les Beni-Ourtilan demandaient l'aman, craignant que l'incendie, commencé à quelquesups de leurs villages, ne s'étendit à tous les autres. Le soir, la colonne campait sur l'Oued-bou-Sellam, sans qu'aucun coup de fusil ait été tiré sur elle. Toutes les tribus situées au sud du Drà-el-Arbâ avaient envoyées des députations pour traiter de la soumission.

Le général Bedeau se proposait, dans la journée du 19, de monter sur les crètes qui dominent le territoire. des Beni-Afif et des Guifsar, qui, excités par Mouley-Mohammed, avaient fourni des rassemblements; mais, dès le point du jour, des députations de toutes ces tribus venaient solliciter leur pardon. Le même jour, le marabout Si-el-Mihoub, d'El-Arrach, et les Ou-Rabah, chefs des Djebabra, se présentaient au camp, assurant qu'il n'y aurait plus aucune hostilité jusqu'à l'arrivée de la colonne.

dans la plaine de Bougie. Heureux de ce résultat, qui confirmait d'une manière avantageuse les espérances conçues, le général Bedeau se décida à se faire suivre jusqu'au camp du maréchal par tous les principaux des tribus qui avaient demandé et obtenu l'aman. Cette réunion avait l'avantage de préparer, sous notre influence, l'oubli des haines réciproques qui existaient, depuis long temps, entre les différentes tribus kabiles, et qui causaient l'anarchie de la montagne.

Dans la journée du 20, quelques hommes isolés tentèrent de tirailler avec l'arrière-garde. Si-el-Mihoub reçut l'ordre de les faire chasser par les habitants des villages voisins de la route, ce qui fut aussitôt exécuté. Depuis lors, les populations, qui voyaient pour la première fois cependant des troupes françaises, restèrent confiantes dans les villages les plus rapprochés de la route que suivait la colonne, laquelle arriva en pleine paix jusqu'à la vallée de la Soumam.

Les deux colonnes du maréchal et du général Bedeau firent jonction à une journée de marche de Bougie. Le 23 mai, l'armée entière, formant un effectif d'environ quinze mille hommes, campa, en face de Bougie, sur le revers du col de Tizi.

Le 24 juin, eut lieu l'investiture solennelle d'environ soixante chefs Kabiles réunis devant la tente du maréchal, qui leur parla à peu près en ces termes :

« Je suis venu, rempli d'intentions pacifiques, vous offrir l'ordre et la prospérité. Quelques-uns d'entre vous m'ont accueilli de suite, d'autres ont voulu me repousser. A ceux-là, j'ai rendu guerre pour guerre; vous savez ce qui en est arrivé. Je serais en droit de les punir; mais

le roi des Français, que je représente, est grand et miséricordieux. Voici quelle est sa volonté Vous ouvrirez librement au commerce, aux chrétiens comme aux musulmans, le parcours de toutes vos routes, notamment celle de Bougie à Senf. Il vous est interdit de faire la guerre entre vous. Écartez avec soin Abd-el-Kader et les cherifs qui vous prêchent la guerre, car ils empêcheraient l'effet de nos bonnes intentions envers vous.....

Le 25 mai, le maréchal Bugeaud s'embarquait pour Alger, et, le lendemain, les colonnes d'Alger et de Constantine quittaient la plaine de Bougie pour remonter la vallée. Le 28, les deux colonnes se séparaient; pendant que le général Gentil faisait séjour chez les Beni-Our❜lis; la division Bedeau allait établir son bivouac chez les BeniDjelil, et ensuite au Drâ-el-Arbà des Guifsar. Dans la journée du 30, on annonça que quelques chefs des BeniJala, dont l'ambition n'avait pas été satisfaite par l'organisation nouvelle du pays, avaient profité de l'excitation encore entretenue, dans leur tribu, par la présence du cherif Si-Moussa, pour former un rassemblement. Leur réunion s'était grossie du contingent des Beni-Aïdel.

Le 31, une heure après avoir quitté son bivouac, le général Bedeau aperçut, à trois kilomètres environ sur sa droite, des groupes de Kabiles armés. La colonne devait s'engager dans des chemins difficiles, où ce rassemblement avait l'intention d'attaquer. Le général se porta rapidement sur les positions occupées par l'ennemi. Trois autres positions successives furent prises avec le même élan; mais il fallut donner une heure de repos à la tête de colonne avant d'attaquer le contre-fort principal, où la masse des fantassins était réunie.

Dès que notre mouvement commença, les Kabiles évacuèrent leur position, et se précipitèrent sur les pentes escarpées qui conduisent au Bou-Sellam. La cavalerie seule put arriver au galop sur la crète du contre-fort, au moment où les derniers groupes l'abandonnaient. Le colonel de Mirbeck fit mettre pied à terre à ses cavaliers, qui fusillèrent les fuyards, à petite distance. Bientôt après, les tirailleurs et le 38e purent les suivre dans les sentiers difficiles où ils étaient engagés. Quarante cadavres furent abandonnés dans les broussailles et dans la rivière. Les cavaliers du goum de Ben-Abid, connaissant le pays, purent gravir les premières pentes de la rive opposée et enlevèrent une soixantaine de fusils à des hommes isolés. Nos troupes, exténuées de fatigue, durent s'arrêter à la rivière. Quelques coups de canon furent alors dirigés sur les derniers groupes qui gravissaient, avec une grande peine, des sentiers de la montagne. A neuf heures, il ne restait pas vingt hommes réunis du rassemblement général, et peu d'instants après, des demandes d'aman étaient apportées dans le camp et témoignaient de la crainte et du repentir des auteurs de cette tentative si facilement déjouée.

Le 1er juin, la colonne bivouaqua au point nommé Tanourba, au centre des quatre tribus des Beni-Afif, R'eboula, Beni-Djemati et Beni-Ourtilan. Les populations étaient toutes rentrées dans les villages. Le camp fut établi, le lendemain, chez les Beni-lala. Cette grande tribu avait, depuis longtemps, donné l'hospitalité au cherif Si-Moussa.

Les Boni-Iaia, dont le territoire n'avait jamais été foulé par les Tures, étaient les réels dominateurs de la monta

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