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rent que d'un certain nombre de fonctionnaires ecclésiastiques, évêques surtout, chargés d'examiner quelques questions de détail applicables à des circonscriptions plus ou moins étendues; d'autres fois, ils représentaient des provinces entières et comptaient leurs membres par centaines. Et comme on recueillait avec soin le nom de tous les membres présents, ainsi que leurs titres, il est facile de voir que les actes des Conciles, récits authentiques de leurs faits et gestes, contiennent dans d'infinis détails, ce que nous a laissé ignorer l'administration romaine, ce que nous cherchons à cette heure, c'est-à-dire l'énumération complète de toutes les localités des différentes provinces soumises au pouvoir de Rome. L'Afrique y tient une place considérable, car dans leur sollicitude les chefs de l'Église y avaient multiplié les évèchés à un tel point que ce n'était plus que de grandes cures. Mais félicitons-nous en; car c'est à cette sollicitude que nous devons de pouvoir à l'heure qu'il est reconstituer l'Afrique romaine dans ce qu'elle a de réellement essentiel.`

Malgré l'importance capitale des actes des Conciles, ce n'est que fort tard que l'on commença à les réunir et à les imprimer. Et j'éprouve un certain sentiment d'orgueil en constatant que dans cette occasion l'érudition française joua, comme on va le voir, le rôle le plus brillant. C'est à elle, en effet, qu'est presqu'entièrement dù, comme on va le voir, ce grand travail.

La première collection des Conciles dite Édition royale, parce qu'elle sortit des presses installées dans le palais du Louvre, parut en 1644 et formait 37 volumes in-4°. Vingt-sept ans après, en 1671-1672, les PP. Labbe et Cossart, en donnèrent une réimpression, plus ample et enrichie de notes, en 18 volumes in-folio. Et pendant que s'achevaient ces puissants travaux, Baluze, le savant bibliothécaire de Colbert, en fit une sorte de résumé qu'il publia en 1683, sous le titre de Nouvelle collection des Conciles, en un volume in-folio, Paris, 1683. Enfin, en

1715, on vit paraître la grande Collection des Conciles, dont l'assemblée générale du clergé de France avait chargé le Père Hardouin (12 volumes in-folio). Malheureusement, cette collection dite Maxima, qui embrasse les actes des Conciles tenus depuis l'an 34 de notre ère, jusqu'en 1714, n'a pu faire oublier complètement celle des PP. Labbe et Cossart, bien qu'elle désigne vingt conciles que ceux-ci n'avaient pu donner. Je n'ajouterai rien à cette bibliographie des Conciles parce que cela m'entraînerait trop loin, sans nécessité.

En dehors des actes des Conciles, il est quelques documents qui apportent leur contingent à nos recherches. Le plus important est l'Histoire de la Persécution des Vandales, écrite par Victor de Vite, un des évèques qui assistèrent au Concile de 484 et qui en fut victime ainsi que bien d'autres. Il nous a donné, à ce sujet, une liste précieuse des sièges épiscopaux de l'ancienne Afrique. Dom Ruinart, de Reims, la publia en 1689, et en fit, grâce à l'ampleur de son inépuisable savoir, une œuvre de premier ordre.

Dom Ruinart n'eut pas d'imitateurs; on eût dit qu'il avait épuisé la matière. Depuis plus de cent ans l'Afrique ancienne paraissait presque oubliée, lorsqu'au commencement de ce siècle, un savant antiquaire italien, Morcelli, en fit l'objet spécial de longues et profondes études. Entraîné par l'intérêt puissant que présentait l'histoire de l'Église d'Afrique, il s'y consacra entièrement et après plusieurs années de recherches publia son Africa Christiana, l'Afrique chrétienne, 3 vol. in-4°, Brescia, 1816-1818, dans lesquels se trouve rapporté, analysé, critiqué, tout ce qu'il a pu trouver de textes et de débris de textes sur tous les faits relatifs aux annales de l'Église dans le Nord de l'Afrique, ceuvre considérable, sans prix, comme ont su tant en faire nos infatigables Bénédictins, et qu'on est surpris d'avoir vu échapper à leur attention, eux qui l'eussent si bien parachevée. L'Africa Christiana contient dans ses 400 pages, indépendamment de l'Introduc

tion qui en compte 47, l'énumération, par ordre alphabétique, de tous les sièges épiscopaux de la Tripolitaine, de la Byzacene, de la Proconsulaire ou Afrique proprement dite, de la Numidie, des trois Mauritanies, Sitifenne, Césarienne et Tingitane, avec quelques notes plus ou moins sommaires sur leurs titulaires. C'est un véritable dictionnaire géographique et un peu historique, dont nous n'avons fait qu'extraire celui que nous offrons aujourd'hui au public algérien sous un titre modeste, celui de Lexique; il n'en mérite réellement pas d'autre, puisque son but est de donner seulement une partie des éléments de la géographie ancienne, les synonymies positives reconnues jusqu'à ce jour, les noms de ceux auxquels on les doit, quelques notes sur l'état des monuments antiques encore existants au milieu des ruines. Je me suis d'ailleurs proposé surtout de signaler à l'attention des chercheurs et des explorateurs tout ce qu'il y a à faire dans ce champ si vaste continuellement ouvert à leurs entreprises: les synonymies encore inconnues et à découvrir. Et, afin de leur éviter trop de recherches, j'ai marqué d'un grand point d'interrogation tous les sujets sur lesquels doivent porter plus particulièrement leurs investigations.

Ce lexique, qui embrassera toutes les contrées de l'extrème Nord africain, aura par cela même pour titre général les mots Africa Antiqua; il sera divisé en deux parties distinctes: l'Algeria Antiqua, l'ancienne Algérie, avec la Mauritanie Tingitane ou le Marok, et la Tunisia Antiqua, l'antique Tunisie avec la Tripolitaine telle que l'entendaient les Anciens, c'est-à-dire limitée aux parties centrales et occidentales de la Tripolitaine actuelle. C'est par l'Algeria Antiqua que nous commencerons cette publication.

Il est bien entendu, qu'en empruntant à Morcelli tout ce qui fait la base de notre travail, nous y avons ajouté tout ce qu'il a cru devoir laisser de côté dans les écrivains anciens, grecs et latins, tous les résultats définiti

vement acquis depuis soixante ans par les sciences géographiques et historiques, en ne sortant pas toutefois des limites que nous nous sommes imposées. Mais, ce qu'il faut que je m'empresse d'ajouter, c'est que sans l'œuvre du savant italien je n'eusse peut-être jamais songé à l'entreprendre, vu l'impossibilité où nous sommes de réunir tous les ouvrages dans lesquels il a puisé les éléments de son livre. Le lecteur trouvera donc tout simple, je l'espère, ce que j'ai fait, en dédiant le lexique à sa mémoire.

Alger, le 5 novembre 1885.

O. MAC CARTHY.

ALGERIA ANTIQUA

Numidie, Maurétanie Sitifienne, Césarienne
et Maurétanie Tingitane

Abigas. - Rivière de la Numidje, dont Procope fait la description dans le Livre 11° de sa Guerre vandalique, § 19. Elle sortait de l'Aurasius, l'Aourès de nos jours, passait non loin d'une ville déserte appelée Bagaï, audessous de laquelle elle jetait ses eaux fécondantes dans les mille canaux de la plaine. L'emplacement de Bagaï se voit encore au lieu nommé par les Arabes K's'ar-Bar'r'aï ou Château-fort de Bar'raï, lequel est à 12 kilomètres au nord-ouest de Krenchela, près de l'Ouéd Bar'r'aï ou Oued

El-Hamma, qui est ainsi l'Abigas. Ce nom ne saurait s'appliquer à l'Oued Chemorra, ainsi que l'avait pensé M. de Champlouis, parce que l'Oued Chemorra est à 50 kilomètres de là, dans l'Ouest, du côté de Bâtna. Le Dr Shaw s'était douté de ces deux synonymies de Bar'r'aï, avec Bagaï et de l'Abigas avec l'Ouêd Bar'r'aï (Voyages, ch. VIII).

Abora ou Aborum, est mise par Pline (Liv. V, 4), au nombre des vingt-six villes jouissant du droit romain, situées à l'intérieur de l'Afrique proprement dite, lorsqu'il la prend dans son sens le plus large. Mais l'indication est d'un autre côté tellement vague qu'on ne peut savoir si Abora appartenait à la Numidie, à la Zeugitanie ou à la Byzacène. Les noms au milieu desquels celui-ci est placé ne peuvent être d'aucun secours, parce que la plupart sont ceux des localités aussi complètement inconnues. — ?

Abutuca ou Abutucum.

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D'après Pline (Liv. V, 4), une ville de l'Afrique proprement dite prise dans son sens le plus large et à laquelle s'applique intégralement tout ce que j'ai dit d'Abora. - ?

Abyla. Le navigateur qui s'apprête à passer de la Méditerranée dans l'Atlantique par ce détroit célèbre séparant deux mondes a, sur la droite, les hautes roches de Gibraltar (429 mètres), tandis qu'à gauche il voit sortir des eaux le massif escarpé sur lequel s'élève Ceuta (194 mètres). Pour les anciens, Gibraltar s'appelait Calpé, Ceuta était Abyla. Et, afin d'immortaliser le nom d'Hercule, ils firent de celui-ci l'auteur du phénomène grandiose qui ouvrit une nouvelle route aux eaux de l'Océan en les jetant dans l'immense bassin que représente aujourd'hui la Méditerranée. Enfin, ils supposèrent que pour en consacrer le souvenir, le héros posa Calpé et Abyla comme deux énormes colonnes destinées à le rap

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