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du billet. Les gens prudents émigrèrent; les sots demeurèrent jusqu'à l'invasion des hommes montés sur les meharis, qui eut lieu le soir même de ce jour.

Voici comment les envahisseurs pénétrèrent dans la Kalaâ.

Des soldats furent mis dans des sacs, quatre par sac, plus celui qui conduisait le mehari et qui était déguisé en chamelier. Les chameliers prétextèrent qu'ils transportaient de l'huile et entrèrent dans la ville, ensuite ils se dispersèrent et s'arrangèrent de manière à être cinq par maison. Leur maître avait dit aux chameliers de délivrer leurs compagnons à minuit. Ils se couchèrent et attendirent minuit. Mais une négresse qui était occupée à moudre du grain cette nuit-là, se décida à voler de l'huile pour s'en mettre sur la tête: elle piqua le sac avec une aiguille et l'homme remua dans le sac. La négresse continua à moudre en chantant: « Ces sacs n'ont pas de pieds, mais ils marchent.» Personne n'y fit attention, jusqu'au moment où les habitants de la Kalaâ furent égorgés. Les envahisseurs emportèrent un butin considérable.

Depuis sa destruction, la Kalaâ est dépeuplée. Cependant, à une certaine époque, un sultan nommé Lâlam Medkour, a construit une ville au-dessous de la Kalaà, à l'endroit nommé Gribissa. Ce sultan acheva de détruire la Kalaâ, par crainte qu'un autre souverain ne s'en emparât; il habita Gribissa, jusqu'à l'arrivée du sultan M'hammed Amokrani (aïeul des Mokranis) avec son armée. Ce Mokrani établit des batteries au-dessus de Gribissa, à Drâ-el-Meksem et fit canonner inutilement la place. Il revint ensuite à la Kalaâ, en face du Minaret, au lieu nommé El-Graïr. De là, il vit que Gribissa était élevée et qu'il ne pouvait la prendre.

M'hammed Amokrani leva le siège et se retira à Djebine, au sud de Gribissa, où il se mit à réfléchir sur les moyens de prendre la ville, objet de ses convoitises.

Il avait vainement demandé au souverein de Gribissa une entrevue. Celui-ci demeurait inébranlable dans sa résolution de ne pas quitter ses remparts. Alors M'hammed Amokrani pensa à se servir de la reine de Gribissa, pour avoir une entrevue avec son mari, grâce à son entremise. Il lui expédia un exprès chargé de lui parler ainsi : « Si vous m'envoyez le roi, qu'il m'accorde une entrevue, je vous donnerai tout ce que vous voudrez, parce que je désire avoir un entretien avec lui et signer un traité de paix, afin que nos relations diplomatiques soient fraternelles. » La reine prévint le roi du message en lui disant de se rendre sans crainte au rendez-vous. Le sultan de Gribissa se rendit donc auprès d'Amokrani accompagné de 50 cavaliers. Or, Amokrani avait recommandé à ses serviteurs d'attacher les chevaux de leurs adversaires isolément et de désarmer les cavaliers. Ensuite, après le festin qu'il allait leur donner, lorsqu'il leur dirait << apportez les fruits » de les égorger sans pitié.

Amokrani se rendit donc à la rencontre du sultan de Gribissa, qu'il reçut avec toute l'apparence d'une grande joie et avec une munificence royale. Les chevaux furent isolément attachés, et les armes des cavaliers enlevées en cachette. Le repas fut apporté, et, lorsqu'il approchait de sa fin, Amokrani fit le signal convenu, et les convives furent égorgés jusqu'au dernier. Ensuite, les bourreaux se revêtirent des effets des victimes, montèrent leurs chevaux et se dirigèrent vers Gribissa, où ils entrèrent sans obstacles, grâce à leurs déguisements.

Amokrani se rendit chez la reine et lui dit:

Je vais vous épouser.

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Soyez le bienvenu, répondit-elle à ce prince.

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Les habitants furent en partie passés au fil de l'épée ; les soldats firent un butin considérable des biens des vaincus.

Quant à la reine, son nouvel époux la conserva pendant un certain temps et lui dit un jour: « Vous ne me plaisez pas, ô femme, parce que je crains que vous ne fassiez pour moi ce que vous avez fait pour votre premier époux ! » Et il la tua !

Description des ruines de la Kalaâ des Beni-Hammad

Les ruines de la Kalaâ sont situées au pied méridional des Mâadids, sur la route de Msila aux Ouled-Hannech et Sétif. Elles occupent un emplacement qui a l'aspect d'un amphithéâtre, d'où l'on découvre un vaste horizon. Ces ruines ont été fort maltraitées par le temps. Elles n'offrent plus guère qu'une série de terrasses superposées, faisant face au Sud, qui laissent à supposer que la poussée des terres a renversé ou recouvert tout ce qui pouvait encore rester debout. A l'Ouest de la partie recouverte de ruines, on voit encore debout une tour carrée assez bien conservée. Elle a 5 mètres de côté sur 20 mètres d'élévation. Au milieu, un pilier carré, de 2 mètres de côté, environ; entre les parois et ce pilier tourne un escalier, qui conduit jusque sur le sommet, en formant un palier, chaque fois qu'il longe la façade sud. Sur tout le parcours de l'escalier, des créneaux donnent vue dans toutes les directions.

La voûte de l'escalier est faite d'une couche épaisse d'un beau plâtre. Le dessus de chaque pilier affecte la forme d'un carré composé de quatre triangles concaves réunis par le sommet et ayant deux côtés adjacents; le troisième côté de chaque triangle formant côté du carré.

La tour est construite en gros moëllons.

Devant cette tour, on trouve encore les bases d'un monument de forte construction, et plusieurs rangées de colonnes. Aucune inscription n'a pu être trouvée, et, le temps nous ayant manqué pour effectuer des fouilles, nous n'avons pu compléter nos investigations.

On trouve aussi, près des ruines, les restes de tombeaux immenses, recouverts de larges dalles. Ces tombeaux étaient construits en torchis, comme celui des Arabes, mais avec cette différence qu'alors à la paille se joignaient des roseaux, et même du bois. Ces débris sont pétrifiés et parfaitement conservés.

Les portions de murs de la ville restées debout sont construites de pierre en bout, d'au moins un mètre, taillées et superposées.

Comme nous l'avons dit plus haut, aucune inscription, aucune médaille n'a pu encore être trouvée.

MÉQUESSE.

Quelques notes sur les entreprises des Espagnols, pendant

la première occupation d'Oran

Xe siècle de l'Hégire

Les Espagnols, on le sait, ont occupé Oran deux fois. Durant leur première occupation de 915 (1509) à 1119 (1708), ils firent de ce coin de terre, battu par le flot et dominé par de hautes falaises, une place de premier ordre, tandis que leurs soldats parcouraient le pays. arabe pour y asseoir leur autorité au loin. L'Espagne, qui alors était une nation puissante, aurait voulu, peuton croire, asservir le monde entier. Ne voyait-on point, en effet, ses vaisseaux sillonner toutes les mers et ses armées combattre sur tous les continents! C'est à cette époque que, se sentant grande et forte, elle songea à prendre pied dans cette partie du Maghreb, et, pendant des années ensuite, rien ne sembla lui coûter pour affermir la possession du peu qu'elle avait arraché aux musulmans.

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Des murs de cette place, commandée par des citadelles, sortaient des troupes qui traversaient sans crainte des régions d'un accès difficile, où elles ne comptaient cependant que des ennemis. Chaque soldat était plein de confiance, et, en foulant la terre de l'Islam, il avait en vue

le doute n'est point possible, - les récompenses infinies de la vie future; son âme, soutenue par cette vision, ne faisait cas ni des souffrances, ni des dangers. Dans chaque rencontre, il cherchait des adversaires dignes de lui; c'était alors un assaut de vaillance; il savait faire face à son ennemi et il savait mourir. Le

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