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passage, cette assertion nous paraît un moyen de défense inadmissible.

En somme, depuis la maison de David, le temple et le palais de Salomon, jusqu'aux tombeaux des Asmonéens et aux travaux d'Hérode, tout révèle l'industrie étrangère, autant du moins qu'on peut affirmer dans une semblable pénurie de renseignements exacts. Les Hébreux constituaient un peuple essentiellement. agricole, pasteur même, arrêté par conséquent aux limites de la moyenne civilisation; tous leurs monuments écrits, et les éléments même de leur langue, portent le cachet de ce mode d'existence. Au milieu d'eux vivait (sans doute à l'état de colonie distincte, les mœurs de l'époque n'autorisant pas de relations plus intimes) un nombre considérable d'étrangers, auxquels le pouvoir avait recours pour l'exécution de ses travaux, même par voie de réquisition, comme au temps de Salomon. A toutes les époques et chez tous les peuples, on a vu ainsi certaines spécialités accaparées par l'immigration étrangère; ce fait qui se produit de nos jours devait être bien plus sensible lorsque les idées de castes et les difficultés de transmission des lumières perpétuaient dans certaines mains les mêmes professions et le même ordre de connaissances. Malgré ces secours, les juifs se trouvent un jour sans armes, et lorsqu'ils veulent bâtir un temple, ils font appel à tous leurs voisins: les Athéniens n'éprouvèrent pas cet embarras après la bataille de Salamine. Enfin, jusqu'à la découverte d'un style particulier et de notions plus précises, nous persisterons à refuser aux Hébreux l'honneur d'avoir possédé un art qui leur ait été propre.

En cela, d'ailleurs, les Hébreux ne se sont distingués en

rien de leurs voisins parlant le cananéen même, le syriaque ou l'arabe. Les Phéniciens, par exemple, avaient une civilisation bien plus avancée, bien plus complète, bien plus ancienne que celle des Israélites, et cependant il serait impossible de citer chez eux un monument qui ne relevât pas des procédés artistiques employés soit par les Assyriens, soit par les Égyptiens, suivant les époques et le courant de leurs relations déterminé tantôt par le commerce, et tantôt par la conquête étrangère. Le tombeau d'Eschmounazar, apporté de Sidon au Louvre, démontre surabondamment la justesse de cette appréciation.

La science de l'homme nous apprend que, de tout temps, les esprits se sont divisés en trois classes:

Les premiers, ne relevant que de leurs besoins et de leurs passions, procèdent par intuition et sentiment: la tradition, l'autorité, le merveilleux, les intérêts matériels ont sur eux la plus grande influence.

Les seconds, préoccupés surtout de la connaissance exacte du monde extérieur, cherchent à en saisir et à en reproduire les beautés : l'art plastique, la science pratique, les procédés ingénieux ou parfaits attirent surtout leur attention.

Les troisièmes, enfin, apportent partout l'analyse, la synthèse, en un mot le raisonnement, et aspirent à la conviction: c'est à ceux-là seulement qu'il est donné d'élever le niveau de nos connaissances en y introduisant l'esprit philosophique.

Ces trois genres de caractères peuvent se fondre en des combinaisons d'un nombre infini, en raison des proportions diverses pour lesquelles chacun d'eux participe à la formation de l'homme intellectuel et moral; mais les combinai

II.

1859.

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sons les plus favorables sont celles qui admettent l'égalité approximative des trois éléments avec prédominance de l'un des deux derniers.

Les Hébreux appartenaient généralement à la première classe, c'est-à-dire que l'élément passionné et d'intuition absorbait sensiblement les deux autres. Respectueux pour la tradition, parfois fanatiques pour l'autorité, disposés à accepter le merveilleux sans examen, mais en même temps tellement dominés par la préoccupation de leurs intérêts matériels et de leurs passions, que ceux-ci étaient pour eux l'aiguillon de leurs croyances et le motif de leurs défections, les Israélites n'ont pas su étudier le monde extérieur avec des vues artistiques ou scientifiques, et le flambeau d'une critique exempte d'idées préconçues n'éclaira jamais les tendances que quelques-uns d'entre eux purent posséder pour se rapprocher des types du beau et de la perfection.

Il en est résulté cette sorte de stagnation ou de lenteur dans le progrès qui caractérise l'évolution morale et intellectuelle de ce peuple. A part quelques amélioriations, matérielles surtout, dues aux relations imposées ou acceptées des nations étrangères, et qui se rattachent au mouvement général de l'humanité, on voit de longs siècles s'écouler sans leur apporter de sensibles modifications, et il serait difficile d'y suivre les indices de la marche d'un civilisation régulière. Combien est différent le spectacle que présente l'histoire de peuples autrement organisés, des Grecs, par exemple, des Romains et de plusieurs nations appartenant aux temps modernes !

Certes, notre intention n'est pas de nous faire illusion sur la valeur de raisonnements théoriques avant tout; nous

reconnaissons que des faits bien constatés auraient le pouvoir de condamner irrévocablement notre opinion; mais ces faits n'ont pas encore été présentés, même dans le travail dû aux louables efforts de M. de Saulcy. Nos collections ne contiennent rien, absolument rien qui porte un cachet original ou authentique, et cette absence de preuves matérielles, argument extrêmement puissant, justifie, dans l'état actuel de la science, la négation du courant d'idées sur lequel s'appuierait l'existence de l'art judaïque.

A. CASTAING.

NOTICE

SUR UN ANCIEN MANUSCRIT MEXICAIN
DIT Codex Telleriano-Remensis.

La collection de lord Kingsborough 1 comprend des facsimile de quatorze manuscrits ou peintures aztèques, réparties en trois volumes grand in-folio, accompagnés de quatre

1 Antiquities of Mexico, comprising fac-simile of ancient Mexican paintings and hieroglyphics, preserved in the royal libraries of Paris, Berlin, Dresden; in the imperial library of Vienna; the Vatican and the Borgian Museum, at Rome; the Institute, at Bologna; the Bodleian library, at Oxford; together with the Monuments of New-Spain, by M. Dupaix, with their respective scales of measurement and accompanying descriptions; the whole illustrated by many valuable inedited mss. by lord Kingsborough; the drawings on stone by A. Aglio. London, 1831; 7 vol. in-fol.

Contestable

volumes de texte et de deux tomes supplémentaires publiés par la librairie Bohne 1.

Ces quatorze manuscrits sont les suivants :

4° Codex Telleriano-Remensis. rentan Vaticanus

2° Collection Mendoza.

3° Manuscrit du Vatican.

4° Collection Botturini.

eventig

93 planches. 73 planches. 449 planches. 24 planches.

5° Manuscrit de Dresde. Calcaliforn

74 planches.

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Les manuscrits Le Tellier, celui de Mendoza et le codex Vaticanus sont postérieurs à la conquête espagnole. Excepté le manuscrit de Humboldt, dont l'origine est contestable, et celui de Dresde, écrit en caractères dits calculiformes 2 et vraisemblablement de provenance guatemaltèque, ces recueils ont tous été rédigés au Mexique.

Ce ne sont pour la plupart que des tables chronologiques et historiques, comme l'indiquent les hiéroglyphes de mois

1 Ces deux volumes, d'un interêt, du reste, assez secondaire pour l'ouvrage de lord Kingsborough, se vendent séparement chez l'éditeur Bohne, à Londres.

2 Voyez ce qui est dit de ce manuscrit, dans cette Revue, tome 1, 1858, p. 36.

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