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obligeait les Hébreux à se rendre chez les Philistins pour y faire aiguiser haches, socs, bêches et aiguillons, « quand la pointe en était émoussée, » ajoute la traduction de notre auteur, traduction inexacte, le véritable sens étant celui-ci1:

19. Or aucun forgeron ne se trouvait dans toute la terre d'Israël; car les Philistins avaient fait en sorte 2 que les Hébreux ne pussent fabriquer ni glaive, ni lance. »

Raschi donne, de ce passage, le commentaire suivant.: «Car les Philistins, qui commandaient aux Israélites, avaient enlevé tous les forgerons de chez eux, afin qu'ils ne se fissent pas des armes de guerre. »

20. Tout Israël descendait donc. chez les Philistins pour y faire aiguiser son soc, sa houe, sa hache et son couteau de charrue. »

Le commentaire de Raschi porte: Lorsque les Israélites avaient besoin de forgerons pour polir ou aiguiser houes, haches et charrues, ils devaient descendre au pays des Philistins.

21. C'est pourquoi 4 étaient émoussés les tranchants

1 M. de Saulcy admet, dans la traduction des noms hébraïques ou cananéens, des singularités et des interprétations qu'il serait difficile do concilier avec le sens authentique ou traditionnel des livres saints. Peutêtre y a-t-il ici l'effet d'une influence volontairement subie: la traduction de M. Cahen dont il se sert révèle une âpre saveur d'outre-Rhin. A Dieu ne plaise du reste que le blâme, s'il y en a, puisse en rien retomber sur un savant dont les intentions droites et le respect des autorités éclatent à chaque page.

2 Littéralement : « avaient ordonné ».

Il s'agit de la hache à deux tranchants, vulgairement bisaiguë.
Littéralement :« et ».

des socs, des houes, des tridents1, des haches, et jusqu'à l'aiguillon qui avait besoin d'être redressé 2.

⚫ 22. Et lorsque vint le jour du combat, il ne se trouva pas d'épée ni de lance dans la main de tout le peuple qui était avec Saül et Jonathas, excepté Saül et Jonathas son fils. »

Que penser d'une nation qui se trouve dans de pareilles conditions? Que les ouvriers en fer, autrefois établis chez elle, étaient des Philistins qu'il avait suffi de rappeler pour mettre les Hébreux dans l'impossibilité de suffire aux besoins les plus impérieux d'une civilisation à peine ébauchée; car, après la déclaration de guerre et la double levée de boucliers dont il est question dans le chapitre précité, rien ne devait empêcher ce peuple de se faire des armes, sauf toutefois l'ignorance des moyens de fabrication.

C'est dans les Rois et dans les Paralipomènes que nous allons trouver sans doute les renseignements les plus importants. Sans parler de la maison que les ouvriers de Hiram, roi de Tyr, bâtirent pour David, édifice médiocre sans doute et que Salomon remplaça plus tard par un palais; sans nous arrêter à l'origine de la tour Hippims dont la Bible ne dit pas un mot, à moins que ce ne soit une construction d'Hérode, mise à la place de la tour Hananeel dont il est question dans Néhémie; passons à la construction

1 Fourches.

Ce membre de phrase est d'une construction si différente de celui qui précède, qu'on se demande s'il n'appartient pas à la phrase du verset antérieur, ce qui ferait supposer que l'écrivain a repris une pensée interrompue.

du temple, le fait capital dans l'histoire de l'art chez les Hébreux, et voyons si nous pouvons y découvrir la justification de l'opinion qu'à cette époque il existait à Jérusalem • une école d'artistes » ou même une génération d'artisans pouvant, par le seul secours de la tradition et par la connaissance personnelle de leur profession, créer des œuvres considérables.

Un petit édifice dans une grande enceinte, telle était la disposition généralement adoptée par les religions de l'antiquité pour la célébration du culte, dont les ministres n'admettaient pas le profane vulgaire à pénétrer jusqu'au pied des autels: le temple de Salomon était compris dans les mêmes idées.

L'enceinte s'étendait sur une plate-forme élevée, en partie naturelle, en partie factice, qui se composait du sommet de la colline Morian qui formait l'un des côtés, et d'un remblai retenu sur les trois autres faces par des murailles offrant un développement que Josèphe évalue à un stade de côté, tandis que M. de Saulcy a trouvé pour deux côtés réunis une étendue de plus de six cents mètres, ce qui donnerait à peu près trois cents mètres ou un stade et demi de côté. Ce travail, fort considérable sans doute, n'a rien qui doive nous surprendre, si nous le comparons à d'autres œuvres anciennes et modernes plus importantes encore et surtout d'une exécution plus difficile.

Quant au temple proprement dit, les dimensions nous en paraîtraient mesquines, si nous le jugions au point de vue contemporain; mais il faut reconnaître qu'il reproduisait les proportions adoptées à cette époque, et que la richesse de l'ornementation et de l'ameublement peut seule

expliquer les dépenses énormes dont il fut l'objet. M. de Saulcy lui-même signale ce défaut de cachet caractéristique de l'édifice : « De l'ensemble de ces mesures (qu'il vient de citer) résulte un premier fait d'une extrême importance : c'est que le temple de Salomon était construit sur le même plan que les temples des Égyptiens; qu'il avait, comme eux, un pronaos, ou pylone plaqué contre l'entrée du naos, et d'une hauteur double de celle du naos lui-même. Ainsi, que l'on compare la disposition générale du temple de Khons, à Karnak, avec celle que nous sommes déjà en mesure de déduire des chiffres établis tout à l'heure, et l'on sera frappé, je n'en doute pas, de la presque identité des deux plans (page 194). »

Il ne viendra à l'esprit de personne d'attribuer au hasard de pareilles coïncidences, et lorsqu'on se rappellera que l'Égypte était en relations constantes avec la Palestine, et que l'un de ses rois donna sa fille à Salomon, la forme égyptienne du temple n'aura plus rien de surprenant.

Par qui cet édifice fut-il construit? La Bible nous indique 'trois classes d'ouvriers, savoir :

Les maçons de Hiram, ce même roi de Tyr qui avait déjà concouru aux constructions de David;

Les maçons de Byblos; une tradition, rapportée par Gervais de Tilbury, fait connaître que c'est en cette ville qu'aurait eu lieu la taille des pierres ;

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Enfin les ouvriers de Salomon, cent cinquante-trois mille six cents étrangers, enrôlés pour couper du bois dans le Liban et pour le transporter. Probablement dans ce nombre se trouvaient des Égyptiens. Du reste, l'élément indigène dominait si peu dans tout ce qui concerne les travaux de ce

genre, qu'il fallut prendre parmi ces étrangers eux-mêmes les trois mille six cents chefs chargés de diriger les ateliers.

Les observations qui précèdent s'appliquent également au palais de Salomon et aux tombeaux qui sont décrits à la suite comme ayant appartenu à Absalon et à un personnage nommé Zacharie.

Quant à la série de sépultures désignées sous le nom de qebour el-moloukh, la description donnée par M. de Saulcy, qui les a visités, ne laisse pas de doute sur l'intervention de l'art étranger contemporain, non pas de David, mais des Asmonéens : « Au-dessus du vestibule et sur la face même du rocher, court une frise sculptée avec une délicatesse et un goût exquis. Le centre de cette frise est occupé par une grappe de raisin, emblême de la terre promise et type habituel des monnaies hébraïques frappées par les princes Asmonéens (page 234). » Les descriptions pleines de charme que l'auteur a données des objets dont il a relevé les détails et dont quelques-uns figurent par ses soins au Musée du Louvré parmi les plus précieux débris de la civilisation orientale antique, ces récits nous ont causé à la lecture le plus vif plaisir, sans avoir pu nous faire partager l'opinion que les tombeaux de David et de ses successeurs sont posés sur la route de Naplouse. La tradition constante qui place ces mêmes sépultures sur le mont Sion est une des plus enracinées que l'on connaisse, et M. de Saulcy peut être bien certain qu'il n'en aurait pas raison si facilement, son interprétation fût-elle d'ailleurs évidente; mais il n'en est rien, et le texte de Néhémie témoigne de la véritable position en des termes qui subsistent malgré une dénégation manquant de précision; quant à l'interpolation de ce

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