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mant, en berbère, le primitif du mot agamek, alphabet (nom de la 24e forme).

Le vieux mot celtique briga, ville, demeure; en kimrique brig; en allemand burg, se retrouve chez les Touareg avec ce même sens de demeure:

IX = abergen tente,

dont l'explication analytique est : la chambre à coucher de l'émigrant;

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برج

c'est le même mot que l'arabe bordj (prononcé borj en Tunisie).

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Nous entrerons plus tard dans quelques détails à propos du mot sik déjà cité, qui signifie « établissement, demeure en celtique, et qui avec ce même sens se rencontre dans les dénominations ethniques ou géographiques de la Berbérie, comme dans celles de la Gaule, de sorte que de Siga, Sigus, Segnia, etc., on peut, sans crainte, rapprocher les Sequanais, Sikambres, etc.

Une des dénominations d'Alger les plus usitées au temps de la domination berbère et conservée encore dans quelques idiomes néo-latins, est Argel. Or Argel est un mot kimrique signifiant lieu couvert ou profond; et, autour d'Alger, près des lieux couverts et encaissés formés par les flancs de la Bouzaréa, nous connaissons assez de ruines berbères préhistoriques, grottes ou pierres druidiques, pour penser que ce mot a bien pu provenir des antiques Kimri établis là avant la fondation d'Ikosium. Remarquons que Argel peut aussi se décomposer en:

= Ar origine, tête, lieu, endroit;

II = gel = du Gall.

La massue du Gall, ou plutôt l'épieu, était nommée materch, n'est-ce pas le kabyle actuel matrak?

Le nom de cette antique race des Gall est encore resté en Berbérie pour désigner une sorte de construction spéciale au pays: le guelaa (géloa, kola, kolea, etc., selon les prononciations locales); c'est avant toute chose « l'édifice communal » dans lequel se concentrent les forces vives et les richesses du kel ou clan. Souvent c'est une forteresse isolée, dans un pays difficile, en dehors des lieux de passage, et que sa situation au centre des terres de la population met à l'abri des coups de main ennemis. Cette forteresse a surtout un rôle de refuge et de magasin, aussi est-elle établie dans des endroits presque inaccessibles ou sur des positions naturellement fortifiées.

De tous temps, et encore de nos jours, la guelaa a joué en Berbérie le même rôle que, dans l'Asie mineure ancienne, ces gazophiles ou trésors dont Strabon nous parle si souvent dans sa géographie et dont l'origine, selon lui, remontałt aux Amazones ou aux Kimmeriens. Ce fut dans des guelaa de cette espèce que Jugurtha, à deux reprises différentes, cacha ses richesses; plusieurs autres sont devenus célèbres et ont donné leur nom à des villes bâties sous leur protection: la guelaa des BeniAbbès, où était le mince « trésor» des Mokrani, n'était pas autre chose, comme aussi la guelaa des Beni-Hammad, rois de Bougie (1).

Ce ne sont pas seulement les vocabulaires celtiques

(1) Les guelaa sont encore nombreux dans les villages berbères; ce sont aujourd'hui des greniers publics ou magasins communaux : soit qu'ils aient été construits sur des rocs isolés, ou entre deux villages comme réduits (souvent autour du minaret de la mosquée), ils sont tous organisés de même, en une série de petites chambres. Chaque famille a sa case particulière avec sa clef propre, et quand les Berbères s'absentent isolément ou en masse ils déposent là leurs provisions et leurs effets mobiliers. Dans l'Aorès, ces constructions sont très communes.

anglo-saxons et berbères qui prêtent à des rapprochements de radicaux primitifs, ce sont aussi les procédés grammaticaux; en voici un exemple:

En berbère, le futur se forme en faisant précéder le radical verbal d'un des préfixes:

λ = ad = id., idh. (tamachek, kabyle, zenaga, chelia, etc.);

0: = gha

= ha S

dans quelques dialectes;

Or: A ad., id., idh., c'est: aller ensemble, venir,

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venire, adire;

=ag = agere, ire, facere, agir, aller, faire;

(X = ag), c'est aussi ha, être dans,

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=

C'est-à-dire je viens conduire, « adeo ducere ego, » ce qui est analogue à l'allemand et à l'anglais Ich verde führen, je deviens conduire, je conduirai; I shall conduct, je dois conduire, je conduirai. C'est enfin identique au vieux français qui se parle dans le canton des Grisons, en Suisse, où l'on dit: je viens à conduire pour je conduirai.

=

=

(On pourrait encore citer ici la tournure latine particulière à la décadence (et qui se trouve aussi dans Cicéron), habeo dicere, je dirai.)

La ressemblance des procédés grammaticaux entre le

berbère et les langues anglo-saxonnes va plus loin que la conjugaison; elle se poursuit dans la construction des régimes intercalés entre la particule ▲ ad (ou l'auxiliaire) et le verbe.

Ainsi on dit:

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ΧΟΛ

=

adas edegegh, je lui conduirai (litt. : venir lui conduire je: adire eum duc(ere) ego);

<^+^= adaset edegegh, je le lui conduirai (adire eum id duc(ere) ego).

Comme en allemand:

Ich werde das führen = je lui conduirai = je de

viens cela, conduire ;

Ich werde das ihm führen = je le lui conduirai = je deviens cela, à lui conduire.

L'ensemble de ces remarques nous permet donc de signaler, comme possible, une parenté étroite entre ces Kebaïl, dont l'ethnologie a donné lieu à tant d'interprétations diverses et ces montagnards celtes: Gabali, Gabales établis dans ce Gévaudan si tourmenté qui offre tant de ressemblance avec la Kabylie, et aussi dans l'antique Chalon-sur-Saône, Urbs Caballinum ou Cabillonum. La petite fraction des Akbaïl, pluriel' Ikbaïlen, aujourd'hui sans importance dans le Djurdjura, a bien pu en d'autre temps faire donner son nom à tous les Berbères du pays par les Arabes ignorants qui envahissaient le pays, comme jadis la tribu des Graïkoï (Grecs), a fourni aux Romains et aux Modernes la dénomination étendue ensuite à tous les peuples de race hellénique.

(A suivre.

L. RINN.

Revue africaine, 30° année. N° 176 (MARS 1886).

9

HISTOIRE DE LA GÉOGRAPHIE LIBYENNE

LES

PREMIÈRES LÉGENDES GRECQUES

INTÉRESSANT LA LIBYE

Les fables de la Mythologie Grecque ont embarrassé la géographie pendant toute l'antiquité; la science actuelle elle-même n'en est pas encore aussi complètement délivrée qu'on le pense communément. Bien des noms, en effet, persistent encore dans le langage usuel, qui n'ont d'autre origine que de vieilles fictions poétiques antérieures à la guerre de Troie.

Cela tient à ce que les éléments de l'ancienne géographie grecque furent de deux sortes: les uns provenaient d'observations positives dues aux habitants ou aux navigateurs de l'Hellade; les autres, au contraire, avaient leur origine dans l'exégèse. Les premiers Aèdes de la Grèce avaient, dans leurs chants et dans leurs odes, exprimé leurs opinions sur la nature du monde, du ciel, de la terre et des mers, sur la forme et la division du plateau terrestre, sur les causes des phénomènes physiques et sur les effets de ces phénomènes. A leur suite, une école se forma, qui posa en principe que les poètes avaient été inspirés par les Dieux et qui en conclut que, les Dieux ne pouvant se tromper, c'était dans les vers des poètes qu'il fallait chercher toute vérité

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