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pas être à moi reste chez lui. Le jour de la justice paraîtra » bientôt. Les notabilitès qui ont joué le principal rôle dans cette insurrection ne quittaient jamais Bou-Kheniach, répondaient pour lui et développaient adroitement et avec verve tous les moyens que Dieu, disaient-ils, avait mis entre les mains du chérif Bou-Khentach pour anéantir les Chrétiens. Un souffle de de ce chérif, répétaient-ils, suffira pour les disperser; à son geste les soldats chrétiens s'enfuiront, la poudre de leurs fusils sc changera en eau; s'ils avancent, la terre s'entr'ouvrira sous leurs pieds pour les engloutir; les buissons de dis el d'alfa lanceront des projectiles et porteront la mort dans leurs rangs; enfin, un goum armé de toutes pièces devait apparaître au moment où on y pensait le moins et donner le coup de grâce à l'infidèle! Certainement chaque fois que les chérifs qui avaient précédé Bou-Khentach prêchaient la guerre sainte, ils employaient les mêmes moyens et leurs contes fantastiques ressemblaient beaucoup à ceux dont Bou-Khentach et ses acolytes berçaient les populations. Mais il faut avouer que leur apparition n'avait pas toujours été accompagnée de circonstances aussi extraordinaires. Il n'est donc pas étonnant que cette insurrection ait fait de si rapides progrès et que les esprits aient été si vivement agités. Il est permis de croire que Bou-Khentach n'était qu'un automate dont Si Ahmed-Bey et Si El-Arbi faisaient adroitement jouer les ressorts. Il est probable aussi que ces deux hommes avaient depuis longtemps réuni les matériaux d'une comédie dans laquelle le physique de leur jeune parent leur avait paru propre à remplir le rôle qu'ils lui réservaient. Une année à peu près avant l'apparition de Bou-Khentach, Si El-Arbi avait tenu un langage qui prouve qu'il se préparait de longue main à cette manifestation. Il avait dit, en parlaut de Si Sadok, l'agitateur de l'Aurès Cet homme est un imposteur. L'an prochain on aura peut-être des nouvelles du vrai chérif! »

Tout prouva que celle insurrection avait été bien ourdie. Huit cents tentes environ étaient réunies dans la Zemala de BouKhentach. C'étaient celles des gens les plus hardis que la crédulité et la haine du Chrétien avaient tout à fait subjugués, et qui n'avaient été arrêtés par aucune considération. Un nombre égal

de gens moins hardis, se réservant une porte de sortie pour le cas où tout ne tournerait pas comme l'annonçait le chérif, étaient venus en armes prendre part au combat. Beaucoup d'entre eux pouvaient espérer que leurs noms ne seraient pas connus et que, dans le cas d'un revers, ils pourraient rentrer chez eux et faire croire qu'ils n'en étaient jamais sortis. Nous ne reparlerons pas des visites nombreuses que recevait le chérif de la part de gens craintifs qui, ne sachant comment allier le respect qu'ils portaient au saint homme avec la peur de se compromettre visà-vis de nous, se contentaient de venir lui baiser la main et lui apportaient en larges aumônes un secours qu'ils n'osaient lui donner avec leurs armes.

Tous les renseignements recueillis après le combat du 25 mars, que nous allons raconter, s'accordèrent à prouver que partout, dans la plaine comme dans la montagne, tout le monde se préoccupait de l'issue de la lutte. On avait vu des groupes en armes se poster sur les crêtes des collines pour saisir un indice de la défaite et s'élancer en avant. Si nos troupes avaient éprouvé un revers, de tous côtés des contingents seraient accourus comme des nuées de sauterelles se joindre aux combattants de la foi.

Voici maintenant la relation du combat acharné qui eut lieu le 25 entre nos troupes et les partisans de Bou-Khentach:

Le chérif avait deux Zemala, composées d'environ huit cents tentes, dressées l'une sur la rive droite de l'oued Dra-el-Beïda et l'autre, la plus considérable, où il se trouvait lui-même sur la rive gauche. Pour communiquer entre les deux campements, il fallait traverser un ravin très escarpé et, par conséquent, d'un accès très difficile. Au Sud, cette Zemala avait une retraite d'un accès très facile par la plaine, et était dominée au Nord par une série de mamelons aux versants très boisés, très abruptes et aboutissant à une série de ravins inextricables.

Pendant que les troupes, sous les ordres du colonel Pein, s'avançaient du côté de Barika, le général Desvaux, commandant de la province, avait fait sortir de Sétif le général Nesmes

Demarest avec une colonne légère (1). Partie de son camp de Chedjerat-Ouada, la colonne Demarest était à 7 heures du matin à portée des mamelons couvrant la première Zemala, et qui étaient déjà couronnés par les insurgés, le fusil au poing. Elle resta en position jusqu'à 7 heures et demie, heure à laquelle il avait été convenu avec le colonel Pein, venant de Barika, que l'attaque simultanée commencerait.

Le général Demarest débuta alors par pousser l'ennemi lentement devant lui en faisant tourner sa position par les deux escadrons de chasseurs, auxquels ce mouvement donnait accès dans la Zemala principale. Au moment où la première Zemala était enlevée, un escadron, soutenu par le bataillon de zouaves, commençait à charger à travers la Zemala principale; mais, en raison de la difficulté du terrain, on ne pouvait arriver que lentement. Le 8e chasseurs, qui faisait ses premières armes en Afrique, se piqua d'honneur et poussa tout devant lui jusqu'à la crête des mamelons nord; mais nos chasseurs payaient chèrement et vaillamment leur courage. Les insurgés, fanatisés au dernier point, se battaient avec un acharnement que l'on n'avait jamais vu. S'étant défilés en arrière de la crête, ils accueillaient l'escadron par un feu roulant à bout portant, qui tua deux officiers, treize sous-officiers ou chasseurs et dix-neuf chevaux. Un officier était blessé, ainsi que dix-huit sous-officiers et soldats. Dans son mouvement de retraite, cet escadron vint se jeter sur le bataillon de zouaves, serré de près par les insurgés qui avaient fait un mouvement offensif. Il fallait combattre corps à corps. Beaucoup de nos blessés l'étaient à coups de crosse, de yatagan etmême de baïonnette. Craignant le résultat d'un engagement au milieu des tentes où étaient cachés des ennemis qui tiraient à bout portant, le général fit sonner la retraite. En même temps

(1) Composée de :

6 compagnies du 3o zouaves;

2 compagnies du 1er étranger;

2 escadrons du 8e chasseurs de France;

1 peloton du 3 spahis;

Une section d'artillerie.

Revue africaine, 30° année. No 176 (MARS 1886).

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l'artillerie couvrait la Zemala d'obus, de manière à empêcher les insurgés de la réoccuper. A ce moment on se ballait depuis une heure et demie. La colonne Pein, retardée par une marche de nuit et les mille mécomptes sur les distances réelles à travers champs, commençait à déboucher. Le général Demarest en profitait pour réoccuper toutes les positions de la Zemala principale. Nos pertes totales étaient de trois officiers tués et quatre blessés; vingt-trois sous-fficiers et soldats tués et quarante blessés. L'ennemi avait été frappé d'une manière bien autrement sensible. Le camp était couvert de morts et on y prit cinq drapeaux. A peine nos troupes étaient-elles maîtresses des Zemala que des nuées de goums et de gens venus de la montagne, jusque-là spectateurs attentifs de la lutte avant de se prononcer pour les uns ou pour les autres, s'abattaient comme des essaims d'abeilles sur les Zemala: tentes, troupeaux, tout était pillé, enlevé et disparaissait en quelques heures.

Le choc avait été terrible et la mêlée affreuse. La ruine des Oulad-Amer et de tous ceux qui s'étaient laissé entraîner par le chérif était consommée. Dans la journée Bou-Khentach et son principal lieutenant, El-Mansouri, étaient livrés au général par les Oulad-Amer eux-mêmes. L'autre lieutenant avait été tué dans la mêlée.

Le souvenir de cet épisode est conservé également par les bardes du pays dans une sorte de complainte, dont voici le texte et la traduction.

La phrase rimée, assez jolie en arabe, se termine alternativement en ER et IA, que j'imiterai quand je le pourrai.

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و عودك من الا بعد جاء عرفہ يفطر

تعلمنى ما صارع الحصنية

فيما بين الناصرة وأولاد عمر

خبر جاني مع النجوع الحق لي و حرمة الابطال عامت على البر

بتنة خنف أم حمام فعدت محكية يا محاه نهار و جرأم عمر

ضاعوا لي سادات طلباء سنية

دریة رحاب شريب من النبي الطاهر

هم راحوا وي بوادي جات كية

و فرسان المحمول ستين بعد ماية فادر

باعوا الحياة من دار الدنية

قصدوا للجنة للمقام الاخضر لهم الطلبا الكل تعطيهم الجزية

واهل العلم كبير اغمف من البحر

اهل الخازن والكتب الكليا

و چې شيخ البخاري تسرد و تنظر

بيت البركة والسر والعناية

جميعة من كسروه عمره ما يجبر

یا ركايز عرشي وستار الشرفية

و من بعد ما صدوا الوطن را وكفر

بيوت المجبور أهلهم غوثية

و نلفى السوف عليهم دايما عامر

يا من فليل ماله سندية

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