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1.

ÉGLISE D'AUDRESSEIN

(CANTON DE CASTILLON, ARR. DE SAINT-GIRONS).

Le clocher de l'église d'Audressein élève au-dessus d'épais ombrages son triangle ajouré, comme pour signaler au voyageur l'entrée de la Bellongue (Vallis longa).

L'église a été construite au commencement du xiv siècle, lorsque fut fondée ou reconstituée, le 8 septembre 1315, une confrérie de Notre-Dame en l'honneur de la Vierge. Elle remplaçait probablement une église plus ancienne. Elle se compose d'une nef unique voûtée en berceau brisé avec deux arcs-doubleaux à un seul rang de claveaux, d'une abside pentagonale et d'un transept. La travée de la croisée est voûtée d'ogives. La porte est encadrée de trois voussures sans tympan. Les chapiteaux des colonnettes se continuent, comme un bandeau, sur les angles saillants des piédroits.

Un porche précède la nef; il est couvert d'une voûte sur croisée d'ogives, avec une clef montrant l'agneau qui porte la croix. Le campanile à deux rangs d'arcades géminées, surmonté d'un pinacle crénelé, est une imitation un peu lourde de l'élégant campanile voisin de Castillon. Une cour, avec porte gothique, précède l'église.

Au xvi° siècle, l'empressement des pèlerins vers le sanctuaire de Notre-Dame de Trémesaygues s'accroissait. Quelques-uns venaient d'Espagne. L'église fut augmentée par deux bas côtés arrêtés carrément au transept, sans absidioles. Le porche lui-même fut complété par deux porches latéraux couverts seulement en charpente, et deux nouvelles portes s'ouvrirent aux côtés de la porte du XIV siècle : l'une, celle du nord, sans ornements; celle du midi, avec une arcade cintrée sur deux colonnettes ioniques, surmontée d'un écusson sur lequel on lit: Jesus Maria Ard de Peyron 1564. Deux anges élèvent un calice que surmonte une petite croix entre les noms de Jésus et de Marie.

Les fresques qui décorent le porche central, uniques dans le diocèse, présentent le plus vif intérêt. Ce sont des peintures à la détrempe exécutées sur un enduit sec.

Sous les voussures des arcades d'entrée, on voit quatre anges

jouant de la guiterne, de la douçaine, de la viole et de la harpe, avec saint Jean-Baptiste et saint Jacques.

Les scènes représentées sur la voûte et sur les piliers intérieurs montrent les dangers auxquels ont été exposés les protégés de la Vierge et les actions de grâces qu'ils lui ont rendues. Quelques-unes sont absolument dégradées; d'autres étaient couvertes par un badigeon qui, il convient de le reconnaître, les a plutôt conservées que détériorées.

Un jeune enfant malade est étendu dans son lit; sa mère, en costume de dame de condition du xvr siècle, veille à ses côtés. Audessous, la mère et l'enfant, en habits de fête, remercient la Madone figurée en Notre-Dame de Pitié, au-devant du campanile de l'église. Un jeune homme est atteint d'une violente hémorragie et remercie de même. Une femme tombe d'un arbre, la tête en bas, et rend son action de grâces un cierge à la main. Un homme est assis dans un cachot, les fers aux pieds. Il s'échappe du château les mains jointes et plus bas offre ses fers à la Vierge figurée sous le campanile. Deux gentilshommes se battent en duel; l'un est blessé par la lame de son adversaire et présente ensuite un cierge à la Madone, portant encore le fer enfoncé dans son sein. Un homme d'armes, portant cuirasse, pourpoint et genouillères, plonge son épée dans la poitrine d'un paysan. Il entre dans un château à tourelles et machicoulis, puis, saisi sans doute de remords, se jette à genoux devant la Vierge, tenant un cierge des deux mains (1).

Ces peintures, à la fois originales et faciles, empreintes de la réalité des mœurs et de la vie commune, paraissent dater, par les costumes des personnages, du commencement du xvr° siècle. Les anges musiciens rappellent l'art des quatrocentistes italiens.

La statuette en bois de Notre-Dame de Pitié que l'on voit figurée dans les scènes d'actions de grâces est encore conservée dans l'église. Elle était sans doute portée en procession.

Le campanile d'Audressein conserve deux cloches anciennes; l'une, du xvr siècle, de o m. 65 de diamètre et d'autant de hauteur, décorée de filets, entre lesquels on voit quatre petits bas-reliefs montrant, dans des niches avec colonnettes à torsades, Jésus-Christ, la Vierge, deux fois saint Michel tuant le dragon, et le commencement de la Salutation angélique en caractères gothiques anguleux.

(1) Bulletin monumental, 1884, p. 669.

La panse est entourée à son milieu d'une cordelière ornée de fleurons; l'extrémité dépassant la boucle tombe obliquement et porte la formule habituelle à cette place : Ave Maria.

L'autre cloche, de 1 m. o5 de diamètre, est datée de 1733 et porte le nom du parrain et de la marraine Antoine et Marie de Solan Saboulies, nom honorablement porté encore par une famille de la vallée.

L'église paroissiale ancienne d'Audressein fut démolie à la Révolution et la chapelle de pèlerinage fut érigée en église paroissiale, lors du rétablissement du culte, sous le vocable de saint Martin, patron de la paroisse depuis les temps les plus reculés.

2.

ÉGLISE DE CAMON

(CANTON DE MIREPOIX, ARR. DE PAMIERS).

L'abbaye bénédictine de Camon, fondée au x11° siècle par le prêtre Sulpice, dans un repli de la rivière de l'Hers, au point où elle sortait du pays de Chercorb, devint, au xir° siècle, un prieuré simple de l'abbaye de la Grasse, au diocèse de Narbonne. Jean XXII, peu après avoir érigé l'évêché de Mirepoix, décréta, par une bulle du 17 août 1318, que douze moines de la Grasse viendraient tenir la vie régulière au prieuré désormais conventuel de Camon et il leur donna, pour leur entretien, le prieuré voisin de Pierrefitte (1).

Les bâtiments du prieuré, situés sur un escarpement et protégés par la rivière, furent entourés par une enceinte continue de murailles flanquées de tours. Dans les premières années d'un siècle qui devait être très batailleur, mais à une époque cependant où rien ne faisait prévoir encore les luttes religieuses qui devaient bientôt ensanglanter le pays, Philippe de Lévis, évêque de Mirepoix et abbé de Camon, reconstruisit son église et releva les fortifications. On ne peut voir aujourd'hui, dans leur état à peu près complet, que la muraille septentrionale, munie de trois tours, de cette enceinte irrégulière. La belle tour carrée à machicoulis de l'angle Nord-Est fut entièrement construite par Philippe de Lévis, qui plaça les trois chevrons de sable de ses armes surmontés de la crosse épiscopale sur la porte d'entrée et sur le manteau de la cheminée du premier

(1) Bulletin monumental, 1883, p. 305.

étage. La tour ronde, crénelée, est percée de meurtrières à mousquet et ses murs furent surélevés d'un mètre à l'époque des guerres de religion. La porte de la petite tour carrée du Nord-Ouest montre aussi les armes de l'évêque. Les autres fronts des murailles ont été remplacés par des maisons.

Les murailles du prieuré s'étaient continuées par celles de la petite ville qui se groupa sous son abri tutélaire.

L'église étroite et longue (36 mètres sur 8 mètres) resserrée entre les bâtiments claustraux au midi et le chemin de ronde au nord, fut terminée en 1535. Le chœur seul fut voûté par Philippe de Lévis, dont la clef de voûte porte les armes. Cinq fenêtres gothiques à meneaux flamboyants occupent chacun des pans coupés. La nef est complétée par deux chapelles construites en 1661 et en 1664. Une vaste sacristie au midi et un sacraire au rez-de-chaussée du clocher (1) l'accompagnent. Entre la chapelle méridionale et la grande sacristie s'ouvre le passage par lequel les moines se rendaient à l'église. Les fidèles entrent par une petite porte ouverte au nord, communiquant avec le village par un étroit passage.

Le clocher, carré, à trois étages en retrait, sans caractère et sans style, n'a que des planchers.

Le monument a conservé plusieurs pièces de son mobilier; les stalles du chœur à deux rangs, dont les panneaux sont décorés par des imitations fort dégénérées de ces étoffes plissées qui avaient fourni à tout le moyen âge un motif d'ornementation rappelant d'ailleurs un ancien usage; l'autel du xvir siècle, orné d'un retable couvert de figurines de moines; un bénitier de 1667 avec le nom de saint Cosme et de saint Damien, patrons d'une confrérie qui le donna à l'église, placée sous le patronage de la Vierge; enfin les emblèmes des évangélistes ainsi que les bustes d'Adam et d'Ève, du Christ et de la Vierge, d'un travail très primitif, trouvés dans les bâtiments claustraux et placés au-dessus des stalles.

On voit aussi dans le sacraire, au-dessous du clocher, un cierge pascal en fer très élégant, fabriqué à Chalabre, au xvi° siècle; dans la sacristie, une petite croix en argent aux extrémités fleurdelysées, ornée de cabochons de cristal; une pyxide carrée à couvercle pointu du même métal; au clocher quatre cloches anciennes; la plus grande,

(2) Les églises romanes de Saint-Sernin de Bensa et de Pierre-Pertuse, aujourd'hui Dreuilhe, sont munies de sacraires également sous le clocher.

donnée en 1515 par Philippe de Lévis portant son blason et l'inscription en gothique: Ab omni malo nos defende. Sancta Maria ora

pro nobis; une autre donnée par Jacques de Villemur, abbé de Boul

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