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Au sixième siècle les géographes sont Isidore de Séville (570-636), qui étudie les villes africaines et Honorius, son contemporain, qui étudie les peuples africains. Un historien s'illustre : Procope, grec, né à la fin du cinquième siècle à Césarée de Palestine, secrétaire de Bélisaire, écrit une histoire des guerres de Justinien et meurt en 562. Corippus donne dans sa Johannide de nombreux noms de tribus et de guerriers.

Au siècle suivant quelques noms sont à retenir; l'anonyme de Ravenne qui écrit au huitième siècle; l'itinéraire d'Antonin donne des détails que Carette a utilisés. Etienne de Byzance qui, au douzième siècle, reproduit des passages d'Heraclée de Milet datant du sixième siècle avant Jésus-Christ et Zonare, chroniqueur byzantin contemporain d'Etienne, qui compose un manuel d'histoire universelle s'arrêtant à l'année 1118, sont cités par Stéphane Gsell.

Si l'on voulait faire preuve d'érudition on pourrait encore au hasard des âges et des lectures indiquer des philosophes, des historiens, des rhéteurs qui de près ou de loin, ont traité de sujets africains et sans parler des illustres comme Aristote, ou des connus comme Dion Chrysostome, noter les noms de Paul Diacre, d'Isocrate, de Josèphe, Festus, Calidius, Polyen, Sextus Aurélius, Saint-Optat.

B. L'œuvre d'Ibn Khaldoun.- Ibn Khaldoun est né à Tunis en mai 1332, d'une famille arabe noble qui a tenu de grandes charges. Il étudie à Tunis, puis à Fez et acquiert une instruction très étendue. Il poursuit de palais en palais et de ministère en ministère une carrière administrative et politique, qui le fait courir de Bougie à Fez, de Grenade à Biskra, de Tlemcen à Tunis, du Caire à Damas. Il passe, plusieurs fois par chacune de ces villes. Il est mêlé à toutes les luttes de son temps, il sert un grand nombre de souverains, il est emprisonné quatre fois, est constamment obligé de fuir pour éviter les dénonciations et la mort ; il perd sa famille dans un naufrage, s'entretient avec Tamerlan, accomplit le pélerinage de la Mecque, est cinq fois grand cadi d'Egypte. Très prudent, très réfléchi, il résiste à toutes les tourmentes; rigide, austère même dans les divers emplois qu'il occupe, où souvent nécessité fait loi, il garde malgré sa souplesse, figure de très honnête homme. Passionné de savoir, il a à sa disposition une multitude de sources précieuses et compose une œuvre originale. Il meurt au Caire le 16 mars 1406 (808 de l'hégire).

L'histoire des Berbères qu'à traduite M. de Slane n'est qu'une partie du vaste ouvrage d'Ib Khaldoun, intitulé « Livre des exemples instructifs et recueil d'origines et de récits concernant l'histoire

des Arabes, des peuples étrangers et des Berbères ». Ce qu'a fait en réalité Ibn Khaldoun, c'est une immense composition, c'est l'histoire universelle du monde arabe de ses origines jusqu'à la fin du huitième siècle de l'hégire. Cette œuvre, dit Slane est «une des productions les plus remarquables de l'esprit arabe ; et l'on verra jusqu'à quel point le savoir, la haute philosophie, la sagacité du génie et du bon sens même peuvent s'allier avec la crédulité et la superstition; des chapitres dignes de Montesquieu s'y trouveront accompagnés d'autres dans lesquels seront traitées comme sciences véritables la magie, la géométrie, la cabale, l'alchimie et l'oneirocritique.»>

La traduction de Slane a été publiée en quatre volumes. Le premier comprend une introduction explicative du traducteur, la liste d'après Ibn Khaldoun des princes appartenant aux treize dynasties qui ont régné en Afrique, une biographie d'Ibn Khaldoun, une table géographique et 299 pages de l'histoire d'Ibn Khaldoun, 166 consacrées aux tribus arabes de l'Afrique septentrionale, le reste aux dynasties berbères. Slane a ajouté deux appendices : le premier traite des traditions anciennes relatives à l'établissement des musulmans en Afrique Septentrionale; c'est un extrait d'Abd er Rahmane ibn Abd-el-Hakem, écrivain arabe de la première moitié du troisième siècle de l'hégire, qui a composé une histoire de la conquête de l'Egypte. L'appendice no 2 est intitulé: Conquête de l'Afrique Septentrionale par les Musulmans et histoire de ce pays sous les émirs arabes ; c'est un extrait de 134 pages, du grand ouvrage encyclopédique d'En Noweïri, auteur égyptien du XIVe siècle de notre ère, qui a donné un récit plus détaillé que celui d'Ibn Khaldoun.

Le volume II donne en 481 pages, la suite de l'histoire des tribus et dynasties berbères du Nord Africain. Slane y a joint cinq appendices, l'un sur la dynastie Ziride, tiré de Noweïri, trois extraits d'autres parties de l'ouvrage d'Ibn Khaldoun et enfin vingt pages empruntées à Ibn el Athir, auteur d'une importante étude sur les Almohades intitulée Kamel et tewarikh.

Le volume III est la suite de l'histoire des tribus et dynasties berbères dans l'Afrique septentrionale.

Le volume IV donne d'abord la fin de cette partie de l'œuvre d'Ibn Khaldoun et y ajoute un appendice de Slane sur la langue, la littérature et les origines du peuple berbère.

Marçais a fort heureusement marqué les mérites de l'œuvre d'Ibn Khaldoun. Il écrit: (1)

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<«< Nul n'a mieux connu les nomades immigrés en Berbérie que cet historien philosophe, un des esprits les plus originaux et les plus puissants qu'ait vu naître le monde musulman. Ils ont intéressé son âme de sociologue par le fait même qu'ils se livraient au nomadisme et que ce genre de vie lui semble un stade nécessaire de l'évolution des races; ils ont gagné son estime de grand seigneur par leur caractère hautain, impatient de toute charge avilissante ; ils ont excité, malgré la rudesse de leurs mœurs, sa sympathie de lettré parce qu'ils étaient arabes, parce qu'ils conservaient, dans le Maghreb, quelque souvenir de leurs traditions lointaines et quelque saveur de la belle langue classique. Lui seul, entre tous les historiens occidentaux, il s'est renseigné sur les antécédents de leurs familles ; il a complaisamment écouté leurs chanteurs et consulté leurs généalogistes. Il a vécu dans l'intimité de leurs cheikhs, à la cour des sultans qu'il servait et dans les résidences mêmes de ces nomades. Le « Kitab-el-Ibar» fut en partie écrit dans le château que l'un d'eux possédait aux environs de Frenda.

<«< Son existence aventureuse et vagabonde lui a d'ailleurs permis de mieux étudier que personne la politique générale de son temps, c'est-à-dire de la seconde moitié du XIVe siècle. Passant tour à tour de Fez à Tlemcen et de Tlemcen à Tunis, connaissant alternativement l'amitié et la défaveur des princes, remplissant les fonctions de secrétaire d'état, d'ambassadeur et de premier ministre, il a tenu dans sa main les ressorts des empires, mesuré leur puissance et leur infirmité. Dans les loisirs que lui laissait la vie publique, il a beaucoup lu : il cite généralement ses sources et les emploie avec une critique peu commune chez ses contemporains. On ne saurait lui reprocher peutêtre que de dispenser, lui aussi, trop généreusement la louange aux sultans dont il est le favori; de travailler un peu vite et de présenter parfois du même fait des versions insuffisamment concordantes, enfin et surtout d'accorder une confiance trop aveugle aux principes généraux qu'il a posés et de rejeter de parti pris les informations qui les démentent. >>

C.-Les auteurs musulmans de la grande époque. Les principaux auteurs qui au dix-neuvième siècle ont écrit sur les Berbères et les Arabes se refèrent à de nombreuses sources musulmanes, qui sont en grande majorité anciennes (du neuvième au seizième siècle), mais dont quelques-unes cependant sont récentes. Ces auteurs arabes de la grande époque la langue arabe est alors la seule qu'emploient les lettrés doivent être cités.

Carette, Fournel, Masqueray, Piquet, etc., leur ont fait de larges emprunts. On trouvera un catalogue soigneusement établi de ces sources dans Gustave le Bon (1), dans Doutté (2), dans Marçais (3). Nous renvoyons à ces savants auteurs et nous bornerons ici à donner quelques renseignements très succincts sur les principaux historiens, géographes, jurisconsultes, exégètes, etc. qui ont marqué à cet âge d'or des lettres et de la science arabes.

Historiens. La « Rihla » d'Et Tijani fournit de précieux détails sur l'histoire des régions littorales de Tunis à Tripoli. Et Tidjani a été utilisé par Fournel. Sur la Berbérie en général et sur son histoire, on consultera avec fruit, comme l'ont fait Fournel, de Slane, Marçais, etc., Ibn El Athir, mort en 630 (1223 de Jésus-Christ), dont Fagnan a traduit les pages essentielles sous le titre « Annales du Maghreb et de l'Espagne » et dont des passages ont été ajoutés, nous l'avons dit, par le baron de Slane à sa traduction d'Ibn Khaldoun. Sur l'Afrique et l'Espagne on lira également avec intérêt Ibn Adari, auteur de la fin du treizième siècle, que Fagnan a traduit et que Fournel a étudié. Citons El-Merrakechi et Ez Zerkechi, traduits par Fagnan; Kairouani, qui écrivait vers 1675, et dont l'histoire de l'Afrique, traduite par Pelissier et Rémusat en 1845, a été largement utilisée de nos jours; Yahya Ibn Khaldoun, frère du grand historien, dont l'œuvre a été traduite par Bel; Et Tenesi, qui nous est connu par la traduction Bargès; Kamel ed Din et Abou I Mahacin qu'a lus Fournel; Abd er Rahman Ibn Abd el Hakem et Noweïri, historien du quatorzième siècle, tous deux connus par les fragments qu'a publiés de Slane. Houdas traduit: 1o le Nozhet el Hadi, chronique de la dynastie Saadienne, dûe à El Oufrani; 2o le Maroc de 1631 à 1812, d'AboulKacem ben Ahmed Ezziani; 3o la vie de Djelal Eddin, d'El Nesanti ; 4o les traditions islamiques d'El Bokari.

Cherbonneau traduit Ibn Hammad. Amar traduit Ibn et Tiqtaqa, auteur d'une histoire des dynasties musulmanes. Masqueray traduit la chronique d'Abou Zekkaria. Rat traduit Al Mostrataf (Recueil philosophique anecdotique). Amand traduit les récits historiques de l'Afrique Septentrionale de Mohammed ben en Nasri.

Des auteurs de nos jours se servent du Roudh el Qirtas, écrit en 726 (1335 de J.-C.) traduit par Beaumier; et du Kitab el Istiqca,

(1) GUSTAVE LE BON : la Civilisation des Arabes, en fin de volume.

(2) DOUTTÉ : l'Islam algérien en 1900. p. 139 à 149.

(3) MARÇAIS : Les Arabes en Berbérie (1913). La bibliographie est dans l'introduction p. 5 à 16.

étude récente, mais qu'il paraît utile de rappeler ici, car spécimen moderne de l'érudition musulmane, œuvre d'un fqih fort instruit du dix-neuvième siècle, Es Slawi, elle ne diffère pas sensiblement d'ouvrages vieux de plusieurs siècles, (traduction Fumey). Enfin notons que Ez Zaïani dont l'œuvre commence a être connue est par certains considéré comme de premier ordre.

Géographes. -Les plus anciens auteurs sont El Yacoubi (fin du neuvième siècle), Ibn Hawqal de Bagdad (dixième siècle), Ibn Batoutah dont les « Voyages » ont été traduits en 1874-79 par Dufremery et Sanguinetti. El Abderi, Yaqout, el Dimichqi sont du treizième siècle, Et Tidjani et Aboulfeda du quatorzième, el Aiyachi et Moulay Ahmed du dix-septième. Des géographes du treizième siècle se réfèrent souvent à Ibn er Rakik.

cain.

Trois grands noms sont à retenir : El Bekri, Edrisi et Léon l'Afri

El Bekri est le meilleur vraisemblablement des géographes arabes. Ses voyages en Afrique ont été effectués dans la première moitié du onzième siècle et sa «description de l'Afrique septentrionale » a été terminée en 1067. Slane en a donné une traduction en 1859. On admet qu'Edrisi a écrit vers 1153. Dans sa géographie il fournit des données précieuses sur les mœurs et l'histoire des tribus africaines. Il a été traduit par Amédée Jaubert en 1840.

Léon l'Africain, né à Grenade, converti au catholicisme par le pape Léon X, donne une remarquable description de l'Afrique, telle qu'on pouvait la dépeindre au début du seizième siècle. Il composa son œuvre en arabe puis en italien. La version italienne fut traduite en français par Jehan Temporal en 1556. Une nouvelle traduction a été faite en 1898 par Schefer. Il existe également une traduction allemande (Lorsbach 1805).

Jurisconsultes et auteurs religieux. Pendant les quatre premers siècles de l'hégire très nombreux furent les auteurs qui interprétèrent le Coran. Les docteurs musulmans ont déclaré que depuis cette époque « la porte de l'effort est fermée. » Mais s'il n'est plus possible de créer de nouveaux rites, l'explication de la loi est toujours permise. Il est impossible de citer dans ce rapide aperçu tous les traités de jurisprudence ou d'exégèse. Nous nous bornerons à indiquer, d'après M. Morand, les sources les plus connues.

Ibrahim Halibi a donné sur le rite hanéfite le « Confluent des Mers », traduction de Mouragdea d'Ohsson au dix-huitième siècle.

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