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Il est regrettable que le nom de cette divinité topique des anciens Berbers de la Kabilie centrale - de celte espèce de Dieu Mars n'ait pas été conservé complet sur cette tabula. Mais le monument, malgré cette lacune et ses mutilations, n'en est pas moins très curieux. Quand nous publierons l'ensemble de nos recherches archéologiques sur la grande Kabilie, nous y reviendrons avec plus de détail.

Nous ne mentionnerons que pour mémoire un fragment de mosaïque d'ornementation qui nous est parvenu avec les objets précédents et dont nous ne connaissons pas encore la provenance précise.

Zeffoun, l'ancien Rusazus (entre Dellis et Bougie, sur la côte), a fourni deux inscriptions à cet envoi. La première, gravée dans un cadre à filets, sur un grès carré haut de 0,83 c. et large de 0,53 c., est ainsi conçue :

DMS

IVLIA SECVN

DA VIXIT AN

NIS XXXXX

Il n'y a de remarquable dans l'épitaphe de la cinquantenaire Julia Secunda que la manière insolite dont son âge de 50 ans est indiqué. Ajoutons que les lettres, qui appartiennent à l'alphabet rectiligne, et qui n'offrent que les éléments strictement indispensables de chaque caractère, sont très grossièrement gravées.

M. Salvy, artiste qui a visité Zelfoun en 1858, avait lu à tort Julia Facunda. Il avait découvert ce tombeau en faisant quelques fouilles et y avait trouvé un squelette entier. V. Revue Africaine, T. 2, p. 215.

Il avait vu au même endroit, le dernier monument dont nous avons à nous occuper et qui clôt la liste de ceux que le Musée d'Alger doit à la bienveillance éclairée de M. le duc de Malakoff. M. Salvy avait même donné l'inscription qui se trouve à la page déjà citée. Mais sa copie contenait des erreurs que nous rectifions sans peine, en présence du document original, que nous étudions tout à notre aise dans une salle du Musée ; tandis que cet artiste ne l'avait pu voir que dans des circonstances très défavorables.

Ce dernier monument est une stèle funéraire haute de 1 m. 10 c. sur 0 m. 55 c. Il est en grès et se compose de trois parties: un fronton très aigu, le tableau proprement dit et le cadre, où est l'épitaphe. Celle-ci est ainsi conçue :

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• Monument aux Dieux mânes de Modisecn Dilatas. Son fils a élevé • (ce monument) à son père» bien méritant, qui a vécu.. XV... ans.»>

La présence de cœurs, employés comme signes séparatifs, à la fin de la 2. et de la 3' lignes et leur absence ainsi que celle de signes analogues ou d'intervalles, dans l'intérieur de ces deux mêmes lignes, ne nous a pas permis de lire autrement que: Diis Manibus sacrum Modisecn Dilatis, etc.; sans cela, nous aurions incliné à remplacer les deux derniers mots par Modii Secundi Latatis. La suppression des voyelles trace d'habitudes sémitiques dans l'écriture étant assez fréquente en épigraphe africaine, l'absence du V n'aurait pas été un obstacle à cette lecture. En somme, il y a doute.

Nous avons dit que cette tabula se compose de trois parties: on connait déjà celle qui contient l'épigraphe; examinons rapidement les autres.

La partie supérieure, ou fronton, offre au tympan un croissant horizontal placé les cornes en haut, surmonté d'une pomme de pin et accosté de deux accessoires frustes, qui paraissent être des espèces de fleurons.

Le compartiment qui arrive immédiatement au-dessous, contient une grande couronne, timbrée d'une rosace au centre ainsi qu'à sa partie supérieure centrale, et posée sur une ancre dont les deux dents la dépassent latéralement. On n'est pas surpris de rencontrer cet embleme naval dans les ruines de Rusazus qui fut un port de mer très acceptable pour les Anciens, si peu exigeants en matière maritime. Aujourd'hui, Zeffoun- qui succède à l'établissement antique - n'est pour nous qu'un assez médiocre mouillage, même pour les petits bâtiments.

Tels sont les cinq monuments dont notre Musée est redevable à M. le Duc de Malakoff. Si nous avons réussi à les faire valoir autant qu'ils le méritent, on aura compris que c'est une précieuse acquisition à divers égards.

A. BERBRUGGER.

CHRONIQUE.

(PARTIE OFFICIELLE)

SOCIÉTÉ HISTORIQUE ALGÉRIENNE.

ANALYSE

DU PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE GÉNÉRALE

Du 17 janvier 1862.
(PRÉSIDENCE DE M. BERBRUGGER)

Après avoir fait diverses communications archéologiques, M. le président de la Société historique Algérienne a lu, sur la situation morale et matérielle de la Société et de son organe, la Revue Africaine, le rapport suivant, que nous allons reproduire en partie :

C'est pour la septième fois, Messieurs, que nous nous trouvons réunis en assemblée générale annuelle, au moment même où notre journal, la Revue africaine, entre dans la sixième année de sa publication. Dans un pays nouveau comme le nôtre, où les créations scientifiques de ce genre ont de la peine, même à naître ; et eu égard aux difficultés particulières, et, en apparence, insurmontables qui ont accueilli nos débuts, ces chiffres ne laissent pas d'avoir une certaine éloquence. Naître était déjà quelque chose, comme je le disais tout-à-l'heure; avoir vécu semble presque un tour de force, surtout pour ceux qui ont une connaissance complète des circonstances au milieu desquelles nous nous sommes développés. Il ne restera aucun doute à cet égard, si nous jetons un coup d'œil rétrospectif sur tant d'utiles créations locales, analogues à la nôtre, et qui pourtant ne se sont pas trouvées viables. C'est que, dans un peuple en voie de formation, tout ce qui ne se rattache pas aux intérêts positifs les plus immédiats, n'attire guère l'attention ou paraît au moins susceptible d'ajournement, même à beaucoup d'esprits supérieurs.

• Félicitons-nous donc, Messieurs, d'être ainsi une exception à une règle générale, et de pouvoir dire que nous obtenons, au point de vue matériel, un succès aussi grand qu'on pouvait l'espérer, lorsque, comme nous, on ne s'adresse ni aux passions, ni aux intérêts des hommes, et que l'on reste presque toujours dans le domaine de la science pure.

« Je dis presque toujours, parce que pendant l'année qui vient de s'écouler et dont j'ai à vous entretenir, nous sommes sortis un moment de ce domaine spéculatif, en saisissant successivement le Conseil Municipal et le Conseil Général, de la question d'une habitation mauresque à choisir parmi les plus belles et à conserver comme monument historique. Je n'ai pas besoin de vous rappeler le succès qu'a eu notre intervention faite au nom de l'art, intervention qui se trouvait en même temps servir efficacement les intérêts de la ville. En suivant la voie hiérarchique, nos réclamations sont arrivées jusqu'à M. le Maréchal Randon, ministre de la Guerre, notre illustre fondateur, et il a ordonné une nouvelle étude du front de mer septentrional, qui amènera, il faut l'espérer, la conservation du charmant palais mauresque où nous sommes aujourd'hui même en séance.

Nous avons toute raison d'être satisfaits de la situation morale de la Société et de son organe, la Revue africaine, ici et en Europe. Nous avons conquis enfin cette notoriété honorable que les créations de ce genre obtiennent avec tant de peine, précisément à cause de ce qui fait leur mérite : la sphère élevée des idées dans laquelle elles se meuveut. Partout, on nous connait et on nous cite; j'ajouterai qu'on nous loue même quelquefois. Il est certain qu'aucune autre association scientifique, aucun autre recueil ne peuvent se comparer, en archéologie africaine, sous le rapport du nombre, de la valeur et de la variété des travaux inédits, aux Sociétés de Constantine et d'Alger, ni aux annuaires de l'une, ni au journal de l'autre. Nous pouvons le dire sans blesser la modestie, puisque l'honneur en revient beaucoup plus aux circonstances particulières où nous sommes placés qu'à nous-mêmes; c'est une place spéciale, conquise et bien occupée, et que nul, du reste, ne peut prendre, s'il ne réside pas, comme nous, sur le champ même des explorations.

Aux vétérans de notre Revue, dont vous êtes habitués à rencontrer les noms presque dans chaque numéro, se sont joints, dans l'année 1861, de nouvelles recrues, parmi lesquelles je citerai surtout M. le colonel Faidherbe, pourvu aujourd'hui d'un commandement

en Algérie ; MM. Poulle et Pelletier, de Sétif; M. Guin, de Draa elMizan; M. Guès d'Aumale; M. Arnaud de Djelfa Leurs œuvres ont passé depuis trop peu de temps sous vos yeux pour que j'essaie d'en faire ici l'appréciation; d'ailleurs, les éloges dont elles ont été l'objet de la part de quelques organes de la presse locale suffiraient seuls pour me dispenser de ce soin.

Ainsi donc, Messieurs, pour la partie du compte-rendu annuel qui m'est échue, en qualité de président, je ne vois que des raisons de nous féliciter des résultats de nos efforts pendant l'année 1861, que des motifs d'encouragement pour les continuer durant l'année qui commence.

Les modifications importantes faites au Gouvernement Général de l'Algérie doivent être surtout pour nous une raison de beaucoup espérer aujourd'hui, l'autorité suprême est à Alger même ; elle est exercée par des hommes qui joignent à un esprit élevé et plein de bienveillance, le sens exquis des besoins de la science et de l'art, Dans de pareilles conditions, l'avenir qui s'ouvre devant nous a d'encourageantes perspectives. Il ne s'agit plus que de continuer à mériter les sympathies publiques; et, à cet égard, vous avez fait amplement vos preuves.

Cette séance est solennelle à divers égards: c'est aujourd'hui que vous jugez en quelque sorte ceux à qui vous avez accordé ou continué votre confiance. Tous ont fait ce qu'ils ont pu pour s'en rendre dignes; et je me plais à déclarer ici que l'heureux accord qui n'a jamais cessé d'exister entre les membres de la Société, n'a pas été moins remarquable parmi les fonctionnaires du Bureau, pour qui c'était d'ailleurs un devoir plus particulier. Leur zèle et leur dévouement ont toujours été à la hauteur de leur mission; c'est une justice que je me félicite de pouvoir leur rendre ici, dans ce dernier acte de mon année présidentielle.

Je laisse, maintenant, la parole à notre honorable Trésorier-Archiviste, M. Voiturier, qui va vous entretenir de la situation financière de la Société et du Journal. »

Le Président,

A. BERBRUGGer.

M. Voiturier, trésorier de la Société, donne l'état de la comptabilité générale au 1" janvier 1862. Il résulte de ce document que l'actif de la Société est, à cette date, de 562 fr. 80 c., toutes recettes

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