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de l'Océan», qui aurait privé ces plaines de leur manteau d'humus. Des géologues et des naturalistes développèrent cette hypothèse. On connaît la théorie glaciaire d'Escher de la Linth. Selon lui, le retrait des glaces qui ont jadis couvert l'Europe était dû au foehn, ce vent sec qui fond les neiges des Alpes, et le foehn lui-même venait du Sahara. Si donc le foehn ne soufflait pas encore pendant la période glaciaire, c'est que la mer couvrait alors le désert'. Escher fit part de cette explication ingénieuse à ses amis Desor et Ch. Martins; tous trois firent une excursion dans le Sahara algérien, y constatèrent la présence de terrains de transport, recueillirent des restes de coquilles d'eau salée ou saumâtre cela leur suffit pour proclamer l'émersion récente du Sahara3. D'autre part, un conchyliologue, M. Bourgui

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La mer saharienne, d'après l'hypothèse de M. Bourguignat.

gnat, ayant trouvé au midi de l'Atlas une faune de mollusques terrestres analogue à la faune littorale de la Péninsule ibérique, affirmait que le Sahara était terre ferme

1. Ansichten, p. 8.

2. « Le foehn cesserait de souffler, si son lieu de naissance, le brûlant Sahara, redevenait une mer... Il est ainsi très probable que c'est bien l'émersion d'une partie de l'Afrique qui a changé le climat glaciaire de l'Europe en celui dont nous jouissons aujourd'hui. » (Die Gegend von Zürich in der letzten Periode der Vorwelt, Zurich, 1852, p. 24.)

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depuis trop peu de temps pour avoir sa faune spéciale, et qu'au début de l'époque actuelle les pays de l'Atlas étaient encore une presqu'île de l'Espagne'. Ces conclusions, valables tout au plus pour la région des chotts, furent étendues à tout le désert'. Bien plus, on en vint à considérer les déserts en général comme des fonds de mer desséchés. C'était l'avis de Wyley' pour le Kalahari, de Prjewalski' pour le désert de Gobi, de Blanford et de Grisebach pour ceux de la Perse, et M. Martins exprimait ainsi l'opinion commune: « Les mers ont leurs conditions d'existence comme les êtres organisés. Qu'elles viennent à être supprimées, la plante ou l'animal meurt, ou la mer s'évapore et le désert la remplace".

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Aujourd'hui, grâce aux travaux de MM. Hann, Billwiller et autres, la théorie saharienne du foehn est allée rejoindre tant d'autres hypothèses ingénieuses, mais peu d'accord avec les faits, et celle de la grande mer saharienne n'est guère plus vivante, bien qu'elle hante encore quelques bons esprits. Elle ne résiste pas, en effet, à l'examen du sol.

NATURE GÉOLOGIQUE DU SAHARA

Le Sahara est, au point de vue géologique, une des régions les plus simples du monde. Les formations des différents âges s'y montrent en couches régulières, sur d'énor

1. Malacologic de l'Algérie, Paris, 1864, 4o, p. 331.

2. Le Sahara occidental et la Tripolitaine étant également vides d'espèces qui leur appartiennent en propre, il devient évident que ces régions n'étaient point encore émergées du fond de l'Océan au commencement de l'époque actuelle. « (E. Reclus, La Terre, Paris, 1881, p. 67.)

3. Report upon the geol. structure of South-Namaqualand, Cape Town, 1837, p. 37.

4. Reisen in der Mongolei, léna, 1881. p. 197.

5. Quarterly Journ., etc., 1873, p. 493.

6. La Végétation du Globe, trad. P. de Tchihatchef, Paris, 1881, p. 675. 7. Du Spitzberg au Sahara, p. 554.

8. R

Une mer desséchée, le Sahara.» (Boissière, L'Algérie romaine, Paris, 1883, p. xxxv.)

mes distances, et les géologues ont pu, sans trop s'aventurer, combler provisoirement les lacunes laissées par les mailles trop larges des itinéraires.

Une grande zone de terrains primitifs et paléozoïques, c'est-à-dire de ces roches qui constituent les plus anciennes assises du globe, affleure à la surface du Sahara méridional et occidental. Le Tibesti ', l'Aïr', l'Ahaggar -- du moins à en juger par sa bordure 3 et, dans l'ouest, les régions granitiques d'El-Eglab', du Noun et du Tiris représentent les saillies des roches cristallines anciennes, qui ont été, à l'époque de la consolidation du globe, les ébauches du continent futur.

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Autour d'elles, les sédiments des mers paléozoïques semblent occuper une immense surface: les grès sombres du Tibesti, du Borkou, de Kaouar, du plateau de Tummo situé au sud du Fezzân appartiennent selon toute apparence à la formation dévonienne ; des grès du même âge forment le cercle des plateaux qui encadrent au nord l'Ahaggar et l'Aïr, et le dévonien et le carbonifère affleurent aussi en quelques points du Fezzân'; dans l'ouest les terrains silurien, dévonien et carbonifère prennent plus d'extension encore,

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1. Nachtigal, Sahara und Sudan, I, p. 391.

2. Barth, Reisen und Entdeckungen in Nord und Central-Afrika, Gotha, 1857, I, p. 349 et suiv. — Tagebuch des verstorbenen Dr. E. von Bary, Berl. Zeitsch. Erdk, 1880, p. 345 et suiv.

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3. Barth, I, p. 293, 298. E. de Bary, art. cité, p. 338. Roche, Études géol. Documents relatifs à la mission Flatters, ministère des Travaux publics. Paris, 1884, 4o, p. 341.

4. Lenz, Geologische Karte von West-Afrika. (Mitth. 1882, planche 1.) 5. Douls, Voyage d'exploration à travers le Sahara occid. B. S. G, 1888, p. 456.

6. Quiroga, Observaciones geologicas hechas en el Sahara occid. (Anales de la Soc. Esp. de Hist. Nat., 1889, p. 337 et suiv.)

7. Rolland, Géologie du Sahara algérien et aperçu géologique sur le Sahara, Paris, 1890, 40, p. 238.

8. Voir E. de Bary, art. cité, pour la hamada au nord de l'Aïr; Roche, ouv. cité, p. 211, pour le plateau de Tasili; d'après M. Rolland, l'Akakous, les plateaux d'Éguélé et de Mouydir sont également dévoniens (Geo!., p. 234-5). 9. Rolland, ouv. cité, p. 236.

puisqu'on les signale à la fois à l'ouest de l'Oued Guir1, au nord et au sud des dunes d'Iguidi sur la route de Lenz 2, et jusqu'à l'ouest de l'Adrar occidental3. En somme, on peut dire que les terrains primitif et primaire occupent une grande place dans le sud et l'ouest du désert.

Les premiers sédiments de l'époque secondaire, trias et jurassique, n'ont pas été observés à la surface du Sahara; mais ceux de l'âge crétacé y ont pris un développement prodigieux. Une immense formation de grès rouge-brun sans fossiles (grès nubien), déposée pendant la période crétacée moyenne ou même à une époque plus reculée', semble couvrir tout le désert libyque depuis le Kordofan jusqu'à la latitude du Koufra et de Dakhel. Au nord, les couches de la craie moyenne et de la craie supérieure forment pour ainsi dire l'ossature de tout le Sahara algérien et tripolitain. Tantôt superposées, tantôt laissant à nu l'étage inférieur1, elles composent encore aujourd'hui la surface des plateaux en fer à cheval qui entourent le bassin de l'Igharghar, du grand plateau tripolitain et sans doute du Haroudj-el-Abiod", et se prolongent en mince bande à travers le désert libyque par Dakhel et Khargueh jusqu'au Nil. Une large zone de calcaires nummulitiques 10 (angle nord-est du désert) et un plateau de molasse miocène marine (Barka et Marmarique)" complètent au nord le Sahara oriental.

1. Au Kheneg-ben-Nouna, point atteint par la colonne de Wimpffen en 1870. (Rolland, ibid., p. 241.)

2. Timbouctou, trad., Paris, 1886, II, p. 69.

3. Quiroga, ouv. cité, p. 378.

4. Zittel, Ueber den geologischen Bau der libyschen Wüste, Munich, 1880, 40, p. 11 et suiv. Rolland, ouv. cit., p. 239.

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5. Zittel, ouv. cité, Geologische Uebersichtskarte.

6. Hamada-el-Homra, Plateaux de Tinghert et du Tademayt Rolland, Sur le terrain crétacé du Sahara sept. B. S. Geol., 1880-1881, p. 538 et suiv.). 7. Ex. le Mzab, ibid.

8. Rolland, ibid., p. 545; Géol. du Sahara, p. 74.

9. Zittel, ouv. cité, carte.

10. Eocène inférieur et moyen (Zittel, ibid.).

11. Ibid.

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