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jusqu'ici 50 % en 1873-1874 dans le désert libyque', 41°/。 en février 1879 à Djofra2, 62 °, à Biskra3, 47 % en décembre-mars 1875 dans la région des chotts', 54 % à Ghardaïa, dépassent à peine la proportion fournie par nos mois les plus secs. Mourzouk même, entourée de marécages à demi liquides, ne donne pas de chiffres plus forts: 47° de novembre à mars 1866, 55 %, de novembre 1869

à février 1870 6.

Aussi la vapeur d'eau contenue dans l'air reste-t-elle invisible le plus souvent. Il n'est pas de voyageur qui n'ait remarqué l'aspect particulier du ciel saharien. Tantôt, c'est l'azur, d'une profondeur merveilleuse, cette « coloration indigo», que Duveyrier admire, ou ce « bleu de cobalt pur » dont parle Fromentin; tantôt, comme au Fezzân, c'est un léger voile blanchâtre, dù aux poussières qui flottent à une grande hauteur. Rarement on voit de véritables nuages. Quelques cirrus, semblables à un mince écheveau de soie blanche, se traînent quelquefois dans le ciel, qui conserve sa sérénité aveuglante, et, seul, l'horizon se perd dans une brume de poussière et de chaleur. Si, à l'aube, on aperçoit des nuages, ils se dissipent le plus souvent dans la chaleur grandissante du jour. Il arrive même qu'on soit témoin d'un curieux phénomène. Des voyageurs ont vu un nuage se condenser dans les hauteurs de l'atmosphère, la pluie rayer le ciel au-dessus de leur tête et, pourtant, pas une de gouttes n'arrivait jusqu'à terre: la chaleur des couches

1. Jordan, ouv. cit., I, p. 131.

2. Rohlfs, Kufra, p. 355.

3. Décembre-févr., moyenne de dix ans (1879-89).

4. Roudaire, Rapport sur les opér. de la Mission des Chotts, B. S. G., 1875, P. 584.

5. Moyenne de 2 ans (1888-1889).

6. Rohlfs, art. cit., p. 122.

Nachtigal, ouv. cit., I, p. 138.

7. Plus rares encore sont les jours entièrement couverts. Il y en a eu sur 108 pendant l'hiver de 1873-1874 dans le désert libyque (Jordan, ouv. cit., p. 151, pas un seul pendant le voyage de M. Rohlfs, de la Grande Syrte à Alexandrie (46 jours, Von Tripolis nach Alexandrien, II, Tables).

inférieures les vaporisait de nouveau, avant qu'elles eussent touché le sol1.

Les nuits sahariennes sont d'une pureté encore plus merveilleuse que les jours. Les nuages, s'il y en avait, ont disparu, les poussières sont tombées, le vent s'est assoupi; l'air est si calme, que la flamme d'une bougie monte droite; rien ne saurait rendre la transparence de cette atmosphère tranquille, de ce ciel d'un bleu sombre, ardemment étoilé.

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La rosée même, cette conséquence si fréquente des nuits claires, se dépose rarement sur le sol refroidi. M. Duveyrier n'en a compté que quatorze pendant 310 jours de voyage, et, bien que son thermomètre soit descendu 26 fois au-dessous de zéro, il n'a pas vu de gelée blanche 2. D'après Vogel et Nachtigal, la rosée manque pour ainsi dire au Fezzân; Dournaux-Dupéré en a noté une ; M. Rohlfs, six en sept mois entre Djofra et Koufra, dans le désert libyque. Le voyage de M. Foureau au Tademayt fournit une proportion plus forte ; mais cet hiver de 1890 a été exceptionnellement pluvieux. Le brouillard, cette forme visible que prend l'air saturé de vapeur, est naturellement plus rare encore. M. Duveyrier en a observé deux seulement, dont l'un était limité aux jardins humides de Ghadâmès. Les listes de la mission Flatters et de M. Foureau en indiquent un chacune; dans le désert libyque, on n'en a pas vu un seul. Tant l'humidité du Sahara reste faible d'ordinaire, par suite de la prépondérance des souffles du Nord.

1. Khanikof, Mémoire sur la partie méridionale de l'Asie centrale, Paris, 1857, p. 450 Prjewalski, Reisen in der Mongolei, p. 482.

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2. Les Touareg du Nord, p. 118.

3. Vogel, Mittheil., 1855, p. 251.

Nachtigal, ouv. cit., I, p. 438.

4. Journal de voyage, B. S. G., 1874, II, p. 138.

5. Kufra, Meteor. Beobachtungen, tables 3-19.

6. Quinze rosées ou gelées blanches de janvier à mars 1890 (Une Mission au Tademayt, Observ. météor.).

7. Ouv. cité, ibid.

La mousson du sud est pluvieuse au contraire; c'est elle qui fertilise chaque année le Soudan. Elle aussi souffle de la mer vers un continent plus chaud : mais ici la différence de température est bien moins grande. Or, on sait que dans l'air sec, la chaleur se concentre surtout dans les couches basses, en contact avec le sol, tandis qu'elle est répartie d'une façon plus uniforme dans une atmosphère humide. La température des hautes régions est donc plus basse au-dessus d'un continent échauffé qu'au-dessus de lamer, et les vapeurs de la mousson équatoriale peuvent se condenser au-dessus du continent, lorsqu'elles s'élèvent, bien qu'au niveau du sol l'air soit généralement plus chaud. Ce qui ne peut arriver lorsque la mousson souffle d'une haute latitude vers une terre de latitude plus basse, car alors la différence de température est telle, qu'elle s'étend même aux régions supérieures de l'air 1.

Ainsi, la sécheresse de l'Afrique septentrionale en été, est due, en somme, à la prédominance des moussons du nord sur les moussons équatoriales. Ces dernières nʼatteignent que le Soudan et le Sahara méridional, tandis que les autres envahissent tout le nord du continent. Si le foyer d'appel des vents suivait le soleil sur le tropique, c'est au sud de l'Ahaggar et du Fezzân que commenceraient les cultures du Soudan. Mais l'aspiration du Sahara est faible du côté du Soudan, où les pluies de la mousson contribuent encore à faire baisser la pression sur place; l'appel d'air est tout autrement fort vers l'Europe, et ce sont surtout les courants énergiques du nord qui comblent la dépression barométrique du désert.

Si donc l'on voulait résumer d'un mot les causes complexes qui condamnent le Sahara à la sécheresse, l'auteur responsable de ce méfait gigantesque serait, en définitive, la Méditerranée. C'est elle qui, en été, renforce l'alizé

1. Woeikof, Die atmosphärische Circulation, p. 4.

en créant une zone d'air frais au nord de l'Afrique, et recule ainsi vers le sud la frontière des moussons pluvieuses. Sans elle, le centre de chaleur se déplacerait sans doute comme en Asie au nord du tropique, entraînant à sa suite les vents et les pluies de l'équateur.

CHAPITRE III

LES CAUSES SECONDAIRES

10 Le relief environnant.

- Transformation des courants atmosphériques au

passage des chaines de montagnes. L'Elbourz et la sécheresse de

Contraste entre les deux Les montagnes du Soudan et leur

l'Iran. L'Atlas limite climatérique. versants. Le Djebel tripolitain. influence sur la répartition des pluies. 2o Les eaux froides de la côte ouest. et de la côte ouest de l'Afrique australe. de la côte saharienne.

Les courants antarctiques du Pérou
Fraîcheur relative des eaux

LES MONTAGNES

Les courants atmosphériques sont la cause principale, mais non unique, du Sahara. A leur action s'ajoute l'effet de causes secondaires, parmi lesquelles figure le relief des pays environnants.

Quiconque est monté souvent sur la crête d'une chaîne de montagnes, des Pyrénées ou des Cévennes, par exemple, a pu être témoin d'un curieux phénomène une mer de nuages se pressent à l'assaut de la chaîne, et disparaissent à vue d'œil à mesure qu'ils passent les cols;

l'air

pur les mange pour ainsi dire'. C'est qu'une masse d'air ne franchit pas des hauteurs pareilles sans se transformer. Forcée de s'élever sur leurs pentes, elle se dilate, se refroidit, et une grande partie des vapeurs qu'elle apporte

1. Lorsqu'on se trouve sur la ligne de faite des Cévennes, par un vent violent du nord-ouest, on voit fréquemment les nuages arriver en masses compactes et menaçantes, et du côté du sud, c'est-à-dire vers la Méditerranée, ces masses se diviser et disparaître promptement... » (Doumet-Adanson, Bull. meteor. du département de l'Hérault, 1876, p. 40.)

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