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gnard que lui porta un des nègres attachés à son écurie et dont l'esprit s'était dérangé. Cet homme que l'on prétend avoir été poussé au crime par d'autres personnes, fut sabré sur place.

Ridouan, affranchi d'origine chrétienne, qui avait servi le père et l'oncle du sultan en qualité de chambellan, fit aussitôt inaugurer le prince Mohammed, fils d'Abou-l-Haddjadj. Ayant alors relégué le nouveau sultan dans le palais, il s'assura l'exercice du pouvoir en le partageant avec Yahya-Ibn-Omar dont l'appui lui était devenu indispensable. Il jouit de sa haute puissance jusqu'à l'époque où le raïs Mohammed, fils d'Ismail, fils de Mohammed, fils du raïs Abou-Saîd, s'empara de l'Alhamra et proclama souverain Ismail, fils d'Abou-'l-Haddjadj et frère du sultan régnant. Pour exécuter ce coup de main, les conjurés avaient profité de l'absence du sultan Mohammed qui se trouvait alors à la campagne, dans sa maison de plaisance. Ayant surpris l'Alhamra, ils tuèrent le tout puissant vizir, Ridouan, et placèrent Ismail sur le trône. On convoqua ensuite toutes les classes de la population afin de leur faire prêter le serment de fidélité au nouveau sultan. Yahya-Ibn-Omar s'y présenta le lendemain, au moment où l'on croyait qu'il ne viendrait pas et qu'on allait l'avoir pour ennemi. Il prit alors l'engagement de servir le sultan Ismail en sujet fidèle et rentra ensuite chez lui.

Quelques jours après, les meneurs de cette révolution donnèrent le commandement des volontaires à Idris-Ibn-Othman-IbnAbi-'l-Olâ, qui venait d'arriver de la province de Barcelone, région qui fait partie du territoire de l'ennemi. Yahya-IbnOmar, ayant été averti qu'on voulait l'arrêter, rassembla tous ses gens, monta à cheval et partit avec eux pour la Galice (Castille), pays appartenant aux chrétiens. Idris se mit à leur poursuite, les atteignit et leur livra une bataille qui dura toute une matinée et qui se termina par la déroute de ses troupes. Arrivé chez les chrétiens, Yahya leur confia son fils, AbouSaîd-Othman, et partit pour le Maghreb afin de rejoindre l'ex

Pour il faut lire

sultan, Mohammed, fils d'Abou-'l-Haddjadj. Ce fut en l'an 761 (1359-60) qu'il se présenta à la cour d'Abou-Salem et entra au service de ce prince, duquel il devint bientôt le conseiller intime. Son fils, Abou-Saîd, persuada alors au roi de Castille d'envoyer chercher le monarque détrôné, afin de le mettre à la tête d'une armée et de le faire passer en Andalousie, dont le gouvernement venait de rompre la paix qu'il avait conclue avec les chrétiens. En l'an 762 (1361)', Abou-Salem donna à Yahya-Ibn-Omar l'autorisation d'accompagner en Espagne l'ex- roi de Grenade. Abou-Saîd vint au-devant des voyageurs et aida son père, Yahya, à rétablir en Andalousie l'autorité de leur sultan. Pendant cette campagne, Yahya et son fils déployèrent une bravoure extraordinaire.

Redevenu maître de Grenade, en l'an 763, Mohammed, fils d'Abou-'l-Haddjadj, rendit à l'émir Yahya-Ibn-Omar le commandement des volontaires, et lui accorda des pouvoirs plus étendus qu'auparavant; il en prit [Othman, le fils d'Abou-Saîd], pour conseiller et ami. Ces hautes faveurs excitèrent à un tel degré la jalousie du vizir, Ibn-el-Khatib, qu'il essaya de perdre le père et le fils dans l'esprit du sultan. En l'an 764 (1362-3), ce monarque les fit enfermer dans la prison d'état, mais, deux ans après, il permit à Yahya de se rendre à Almeria et de s'y embarquer pour Alexandrie. Le proscrit revint en Maghreb, où il fut accueilli avec le plus grand empressement par le régent, Mohammed-Ibn-Abd-Allah, et il y passa le reste de sa vie, entouré d'honneurs. Il mourut en 782 (1380-1).

Abou-Saîd-Othman, ayant enfin reçu du sultan de Grenade la permission de se rendre en Ifrîkïa, débarqua à Bougie, l'an 767 (1365-6) et alla se mettre au service d'Abou-'l-Abbas, petitfils du sultan hafside, Abou-Yahya-Abou-Bekr. Il assista à la prise de Tunis et, dans cette campagne, il déploya une telle bravoure que le sultan lui accorda une pension et plusieurs fiefs;

'Le texte arabe porte 763. Cette date est fausse, car le sultan merinide Abou-Salem mourut vers la fin de l'année précédente.

il le prit même pour conseiller et ami intime. Aujourd'hui encore, ce chef se montre au premier rang à la cour et au champ de bataille. Ses frères sont restés en Andalousie où, grâce à leurs nombreux domestiques et clients, ils jouissent d'une haute considération. Le sultan de ce pays est tout-à-fait revenu de la méfiance qu'il leur avait montrée et les traite maintenant en amis.

HISTOIRE D'IDRIS, FILS D'OTHMAN-IBN-ABI-'L-OLA ET

COMMANDANT DES VOLONTAIRES DE LA FOI.

Abou-Thabet, fils d'Othman-Ibn-Abi-'l-Olâ, mourut en l'an 750 (1349-50), et ses frères restèrent au service d'AbouEinan, sultan du Maghreb. Ils continuèrent à jouir des fiefs et des pensions que ce monarque leur avait accordés, mais, de tous ces princes, Idris fut le seul qui exerça sur la foule cette influence qui distingue les hommes habitués au commandement. En 758 (1557), Abou-Einan entreprit une expédition contre Constantine et pénétra dans l'Ifrîkïa; mais les chefs de son armée, effrayés par la perspective d'une longue série de combats, ourdirent un complot pour détourner leur maitre de ses projets de conquête et donnèrent à leurs subordonnés la permission de partir pour le Maghreb. Le sultan, voyant son camp presque dégarni, et averti, dit-on, que, dans un conseil tenu par ses officiers, il avait été question de le déposer et de placer Idrîs-Ibn-Omar sur le trône, prit le parti de rebrousser chemin et de rentrer dans son pays. Idris fut averti par le public de ce qui venait de se passer et jugea prudent de s'évader du camp, pendant la nuit, et de chercher un refuge à Tunis. Accueilli dans cette capitale avec la plus haute distinction, il obtint d'Abou-Mohammed-IbnTafraguîn, chambellan et régent de l'empire, qu'un navire fût

1 Ou en 749. Voy. ci-devant, p. 476.

T. IV.

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apprêté pour le transporter en Espagne. S'y étant embarqué avec toute sa suite, il alla trouver le fils du Comte, seigneur de Barcelone. Pendant quelque temps, il resta auprès de ce prince, puis, en l'an 760 (1359), après la mort du chambellan, Ridouan, premier ministre du gouvernement andalousien, il se rendit à Grenade, ville où il avait passé sa jeunesse et où il trouva une honorable réception.

Ismaîl, fils d'Abou-'l-Haddjadj, et son cousin, le raïs Mohammed, fils d'Ismail-Ibn Mohammed-Ibn-er-Raïs-Abi-Saîd, apprirent avec un plaisir extrême l'arrivée d'un homme capable d'exercer le commandement des volontaires et d'y remplacer Yahya-Ibn-Omar, chef dont ils soupçonnaient la fidélité et qui leur paraissait disposé à favoriser le sultan déchu. En l'an 764 (1359-60), Yahya se réfugia sur le territoire chrétien et Idrîs fut mis à la tête des volontaires. Dans cette position élevée, il fit preuve d'une grande habileté et obtint, à la cour, le même rang que son père et son frère avaient déjà occupé.

Le raïs Mohammed tua ensuite son cousin, le sultan Ismail, et s'empara du trône, mais, deux années plus tard, il fut chassé de Grenade par l'ex-sultan Abou-Abd-Allah-Mohammed. Ce prince avait quitté le pays des chrétiens, fort mécontent des procédés de leur roi à son égard, et était allé s'établir dans Ronda, ville qu'Omar-Ibn-Abd-Allah, régent du Maghreb, venait de lui faire remettre. Ce fut de là qu'il marcha contre l'usurpateur, qui se retira en Castille, avec ses partisans, et chercha la protection du roi chrétien. Ce prince les fit mourir tous pour les punir de la mort de Ridouan et du sultan Ismail. Idris et la troupe de volontaires qui avaient accompagné le raïs dans sa fuite furent enfermés dans la prison de Séville.

En l'an 766 (1364-5), un musulman attaché au service du roi chretien entreprit de faciliter l'évasion d'Idrîs et tint un cheval toujours prêt vis-à-vis de la prison. Idrîs brisa ses fers, perça le mur de sa cellule, mit le pied à l'étrier et, bien qu'il fût poursuivi de près, atteignit le territoire musulman. Accueilli de la manière la plus grâcieuse par le sultan Mohammed, fils d'Abou-'l-Haddjadj, il obtint l'autorisation de se rendre à Ceuta.

Le vizir Omar-Ibn-Abd-Allah, régent du Maghreb, craignit à un tel point l'influence de ce chef qu'il le fit aussitôt arrêter par le gouverneur de Ceuta et conduire à la prison de Mequinez. Transféré ensuite dans le Ghour (cachot) de Fez, par l'ordre du sultan Abd-el-Aziz, Idris y mourut étranglé l'an 770 (4368-9).

Histoire d'Ali-IBN-BEDR-ED-DÎN, commandant des volontaires

DE LA FOI.

Nous avons dit que Mouça, fils de Rahhou, passa en Espagne, avec les autres descendants de Sot-en-Niça. Parmi eux se trouvèrent Mohammed-Ibn-Idrîs-Ibn-Abd-el-Hack et son frère Amer. Ceci eut lieu en l'an 669 (1270-1). Mouça rentra en Maghreb, se réfugia dans Tlemcen et passa encore en Espagne. Nommé au commandement des volontaires de la foi, il conserva cet emploi jusqu'à sa mort. En l'an 679 (1280-4), il maria sa fille au sultan mérinide, Youçof-Ibn-Yacoub, et la fit escorter en grande pompe à la cour de ce souverain. Il eut plusieurs fils dont les deux aînés se nommaient Mohammed et on les distinguait par les surnoms de Djemal-ed-Dîn (beauté de la religion) et de Bedr-ed-Din (pleine lune de la religion). Ils recurent ces titres d'un chérif de la Mecque qui était venu en Occident et qui les désigna ainsi, selon l'usage des orientaux. Les princes de la famille royale deз Merîn avaient toujours un profond respect pour les descendants du Prophète et, dans toutes les occasions, ils recherchaient les prières et les bénédictions de ces saints personnages. Les deux enfants de Mouça venaient seulement de naître quand leur père le pria de les bénir et de leur frotter les gencives avec des dates mâchées, selon la coutume du Prophète. Le chérif y donna son consentement et, en rendant les enfants, il dit au père : « Reçois » la beauté de la religion; reçois la pleine lune de la religion. >> Mouça accepta ces surnoms; étant parfaitement convaincu

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