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tient une place très réduite dans l'art du Khalifat; mais, si peu nombreuses que soient les œuvres, elles présentent cependant

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une grande variété de figures qui peuvent être groupées en trois ou quatre genres différents.

J'ai dit comment l'emploi de la brique avait déterminé les formes d'un premier genre. Les tympans des portes et des fenêtres latérales de la Grande Mosquée de Cordoue et les pavements de quelques salles de Medînat ez-Zahrâ sont garnis de motifs utilisant la pierre blanche et la brique, voire des formes découpées dans la terre émaillée. Les diagrammes de décors engendrés par les galons rigides, de largeur constante et de longueur réduite, ont généralement pour principe la rencontre des lignes à angle droit ou la disposition en damier. Le carré, la grecque,

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Fig. 162.

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Fostat. Décor géométrique en relief (époque touloûnite).

le svastika, le chevron, le zigzag et les figures qui en dérivent, constituent le répertoire de celle ornementation en deux couleurs (fig. 160 A).

Les mêmes figures et conçues dans le même esprit apparaissent à Medînat ez-Zahrâ traduites en sculpture sur pierre. Le galon de ces grecques ou les rectangles de ces damiers s'accusent en saillie au-dessus d'un champ plat (fig. 160 B, 161). On a rapproché avec raison ce genre de relief géométrique de certains décors toûloûnites exhumés à Fostât ', eux-mêmes d'origine mésopotamienne (fig. 162). Cet apport de l'Orient ne se maintiendra d'ailleurs pas dans le style musulman d'Espagne. Seules peut

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Fig. 163. A: Cuve de Merrakech, détail d'une colonnette; B: Medînat ez-Zahrâ, décor d'un pied droit.

être le rappelleront, à l'époque moresque, les fantaisies de cette écriture coufique qu'on appelle coufique quadrangulaire.

Géométriques aussi et monochromes sont les décors d'un très faible relief qui ornent les pans des pilastres en encorbellement de la mosquée d'El-Hakam et certains chambranles de portes à Medînat ez-Zahrâ. Les motifs sont des carrés posés sur un côté ou sur un angle et- s'encadrant les uns les autres. Les ancêtres de ce décor seraient sans doute à rechercher dans l'art chrétien. Ce genre, comme celui qui précède, ne devait d'ailleurs pas survivre, dans l'art musulman, à la période que nous étudions (fig. 163).

1 Ali Bahgat Bey et Albert Gabriel, Fouilles d'Al-Foustát, Paris 1921, p. 112.

Un développement plus durable est réservé au dernier genre de décor que nous ayons à signaler. C'est celui que représentent les claustra des fenêtres, dalles de marbre ajouré dont un galon plat circonscrit les vides (fig. 164).

Ces décors sont proprement de l'entrelacs géométrique, assez savant déjà et où figure l'étoile à 6 ou 8 pointes. On sait que

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le polygone en étoile peut être considéré comme l'élément par excellence de l'entrelacs musulman.

Sans doute, cette garniture des claustra n'est pas sans analogie avec la garniture de brique des tympans qui les surmontent. Une des fenêtres latérales nous montre l'une reproduisant fidèlement le dessin de l'autre, le traduisant dans une matière différente (fig. 165). Je crois cependant qu'il faut plutôt, et en dépit de contaminations un peu accidentelles, rechercher les modèles, qui en ont inspiré à la fois la technique et la composition, dans les dalles ajourées des basiliques chrétiennes. C'est notamment dans

les remplages de fenêtres des églises syriennes qu'il convient de chercher les ancêtres des claustra andalouses.

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Rapprochées des panneaux aghlabites du minbar de Kairouan, ces claustra de la Grande Mosquée de Cordoue prennent une valeur singulière. Elles permettent de préciser le fait suivant:

1 Cf. de Vogué, Syrie centrale, p. 89, pl. 43, 81.

l'entrelacs géométrique apparaît tout d'abord dans l'art musulman occidental comme un décor de grille sculptée. Ces grilles trouvent leur emploi le plus logique dans les garnitures ajourées des fenêtres, et c'est là qu'elles affectent le plus nettement les formes caractéristiques de la géométrie musulmane.

CONCLUSION

L'étude de l'art musulman d'Espagne à ses débuts soulève un grand nombre de questions, auxquelles il n'est pas toujours permis de répondre. Dès cette première période, cet art apparaît complexe et décevant. Une analyse même superficielle nous révèle, notamment dans le décor, une diversité surprenante de styles, derrière laquelle nous entrevoyons une égale diversité d'influences agissant à la fois. Nous nous étonnons de voir adopter, du premier coup, dans la construction, des solutions. qui peuvent sembler exceptionnelles, telles les superpositions et les entrecroisements d'arcs ou la voûte sur nervures. Est-il possible de déterminer les motifs qui ont fait prévaloir ces solutions et de dresser le bilan de ces influences ? J'ai indiqué chemin faisant les réponses que l'examen des monuments suggère et que la connaissance des conditions historiques fait admettre comme recevables.

L'art des Omeiyades de Cordoue nous est d'abord apparu comme un art d'exilé, créé pour une société et pour une famille syriennes transportées en Espagne. Que ces exilés aient rêvé de faire de l'Andalousie la Nouvelle Syrie, que les princes fugitifs aient voulu, en dépit des épreuves, perpétuer une tradition omeiyade, c'est là un désir trop humain et que trop de gestes trahissent pour que nous n'en cherchions le témoignage dans les fondations architecturales. On croit avoir montré que l'art des Omeiyades de Cordoue vient en partie de la Syrie.

Cependant la terre d'exil est elle-même riche de traditions. L'art romain s'y est étendu et un art wisigothique y a poussé sur ses ruines. Plusieurs artifices de construction ont paru attribuables à la tradition romaine la superposition des arcs rappelle l'anatomie des aqueducs espagnols; certains éléments décoratifs

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