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plein cintre outrepassé et arcs découpés en lobes circulaires. Toutefois nous ne rencontrons pas l'arc en fer à cheval brisé ou déformé, si fréquent chez les Aghlabides. Je ne peux que rappeler ici ce que j'ai dit de l'origine possible de l'arc en fer à cheval. Presque toutes les provinces du monde byzantin l'ont pratiqué. Il existe en Cappadoce, en Arménie et en Syrie. Mais il y a lieu surtout de noter la fréquence de son emploi en Espagne et de très bonne heure 1. On l'a signalé dans des stèles du i et du m° siècle et dans les nefs de maintes basiliques wisigothiques. Gomez Moreno considère même comme antérieure à

Fig. 140.

Medinat ez-Zahra.

Etude pour le tracé d'un arc trilobé,

dessinée sur un mur d'après Velazquez Bosco).

l'époque musulmane une porte de l'enceinte de Cordoue où il figure. Au reste le même savant remarque que l'arc wisigothique ne présente pas un tracé identique à celui de l'arc musulman. Le premier est moins largement outrepassé que le second; son centre est plus bas, plus rapproché de la retombée.

Le fer à cheval plein cintre est, et restera par excellence, l'arc d'ouverture des mihrâbs. Ce premier style andalou l'emploie également pour les portes, les fenêtres, les aqueducs et les

1 Gomez Moreno, Excursion a traves del arco de herradura, p. 795. et passim ; Bertaux, Espagne et Portugal, p. LIX; Puig y Cadafalch, L'arquitectura romanica a Catalunya, p. 361 et passim.

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arcades des nefs. Au mihrab et aux porles, il forme, avec ses claveaux décoratifs, un motif de grande allure. Les claveaux sont appareillés, non au centre de l'arc, mais au milieu d'une corde le sous-tendant un peu au-dessus de la retombée 1. Leur bord supérieur est limité par un are qui n'est pas concentrique à l'arc d'ouverture. Au mihrâb de Cordoue, aux ouvertures qui le flanquent et aux portes latérales, s'indique ce décentrement des deux arcs, qui s'accentuera par la suite.

L'arcature qui couronne le cadre du mihrab a des arcs trilobés; de même les défoncements qui ornent l'intérieur de la niche. Les arcs découpés en multiples lobes circulaires, qui n'avaient qu'un rôle réduit à Kairouan et étaient réservés aux organes décoratifs, sont partout dans la Mosquée de Cordoue. Ils prennent un développement considérable avec les grands arcs qui enjambent les nefs et forment tambour sous les coupoles. Nous les avons trouvés à la Grande Mosquée de Kairouan et j'ai émis à leur sujet l'hypothèse d'une influence mésopotamienne. Et certes, il n'est pas impossible que l'Andalousie soit redevable de cette forme à la Palestine omeiyade (mihrab de Zacharie à la Mosquée el-Aqça de Jérusalem), mais on doit se souvenir de la place qu'elle tient dans les monuments 'abbâssites de la vallée du Tigre, à Raqqa (porte du Sud-Est) comme à Samarra (palais d'El'Achiq).

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teaux empruntés aux édifices préexistants, la Grande Mosquée de Cordoue en compte un grand nombre de fabrication musulmane :

1 De même d'ailleurs qu'à la porte du minaret de Kairouan.

2 Voir fig. 140, le tracé d'appareillage d'un arc trilobé relevé à Medinat ez-Zahra (d'après Velazquez Bosco, Medina Azzahra, pl. XXIII).

chapiteaux des nefs de la Mosquée d'El-Hakam et El-Mançoûr, chapiteaux des colonnettes en encorbellements de la Mosquée d'El-Hakam; les ruines de Medînat ez-Zahrâ en ont aussi fourni un contingent important; la cathédrale de Tarragone en conserve deux datés de 349/960 (fig. 141).

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Qu'ils soient traités en épannelage, comme ceux de la Mosquée, ou criblés de défoncements et de détails intérieurs comme ceux d'Ez-Zahrâ, ces chapiteaux procèdent constamment de deux modèles antiques bien reconnaissables: le chapiteau corinthien

1 Sur les chapiteaux d'Ez-Zahrá datés d'El-Hakam, et dont l'un est au Musée du Louvre, cf. Migeon. Manuel d'art musulman, p. 74.

et le chapiteau composite, combinaison romaine du corinthien et de l'ionique. Dans le premier (fig. 143), la corbeille disparaît sous trois couronnes de feuilles, la couronne supérieure étant interrompue par de massives volutes d'angle que des tasseaux rattachent au tailloir. Dans le deuxième (fig. 142), une échine en quart de rond, épaississement du rebord de la corbeille (?), réunit les gros disques qui représentent les volutes d'angles. Dans l'un et dans l'autre, les feuilles de la couronne inférieure tendent à se souder par le bas. Aux chapiteaux du cloître de Tarragone, de type composite, il n'y a qu'une couronne de feuilles. Nous verrons par quel processus le chapiteau moresque sortira de ces chapiteaux omeiyades.

La plupart des grandes colonnes. qui soutiennent les nefs de la Mosquée reposent directement sur le sol. Celles d'Ez-Zahrâ ont des bases musulmanes très voisines encore des modèles antiques. Il en est de même des colonnettes en encorbellement de la Mosquée d'El-Hakam.

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Fig. 144.

Cordoue.

Grande

Chapiteau de type

Les corbelets. Ces colonnettes en encorbellement, ou les pilastres à pans coupés qui en tiennent lieu dans la nef centrale, reposent sur des corbelets sculptés. Ces organes offrent une curieuse disposition d'enroulements horizontaux placés de part et d'autre d'un nerf saillant, et rappellent étrangement les modillons à copeaux du roman auvergnat'. On croit pouvoir y reconnaître une déformation du modillon antique à feuille

Mosquée.

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corinthien avec sommier et corbelet.

1 M. E. Mâle a montré ces rapports avec le roman, ap. Les influences arabes dans l'art roman (Revue des Deux Mondes, 15 nov. 1923), et La Mosquée de Cordoue et les églises d'Auvergne et du Velay (Revue de l'art ancien et moderne, 1911, t. II, p. 81 et ss.) Cf. mon étude Sur trois formes décoratives de la Grande Mosquée de Cordoue, ap. Actes du congrès des Orientalistes, Alger, 1905, 7° section, p. 11 ss.

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