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blables prolongent les faces latérales de la pièce (B). Ces niches latérales présentent même, dans des salles particulièrement ornées, deux défoncements successifs (D). Une autre salle dans le palais des Emirs est pourvue de ces trois niches à fond plat et précédée d'une antisalle de même largeur (E) également accrue par deux niches plus petites à droite et à gauche. Parfois l'un de ces défoncements est percé d'une porte. Enfin le palais du Manâr

a fourni un exemple de plan cruciforme (F) obtenu au moyen de niches placées sur les quatre faces d'une salle carrée.

Les coupoles. Les trompes et les autres encorbellements. Nous ne savons quelle forme affectaient les coupoles dont un texte nous a vanté le bel effet. Les seules voûtes hammâdites qui nous soient parvenues ne sont pas apparentes à l'extérieur les escaliers du minaret et les rampes du Manâr sont couvertes en berceaux appareillés, ceux du Manâr se pénétraient aux angles et y formaient voûte d'arête.

La salle basse du même donjon est couverte d'une voûte en arc de cloître; elle porte, aux angles, sur des trompes très simples formées d'une portion de berceau butant contre les murs verticaux. La coupole qui couvrait la salle cruciforme était établie sur des demi-voûtes d'arête. C'est le premier exemple qu'on rencontre en Occident de ce genre de trompe dont on verra l'emploi fréquent dans les édifices maghribins du x11° siècle. Il faut sans doute en chercher l'origine en Mésopotamie, qui pratiqua la voûte d'arête et donna de la trompe d'angle des solutions si variées.

Palais de Bougie et autres palais du même temps.

Presque

rien ne nous est parvenu des édifices de Bougie, où les Benî Hammad s'efforcèrent de faire revivre le souvenir de leurs demeures de la Qal'a désertée. Les palais du moins ont entiè rement disparu'. Nous identifions seulement avec quelque vraisemblance l'emplacement de trois d'entre eux: le palais de

1 La compilation moderne déjà citée à propos de la Mosquée de Bougie (supra p. 116) nous donne sur le palais de l'Etoile des renseignements curieux dont nous ignorons la valeur. Il avait neuf portes dont les battants de bois étaient sculptés. Il comptait un rez-de-chaussée et deux étages, Au-dessus de la porte du milieu régnait la salle du trône, ornée d'arceaux et de frises. (De Beylié, Kalaa, 99-102).

l'Etoile devait s'élever sur la hauteur que couronne actuellement le fort Barral. Les beaux jardins d'Er-Rafï'a s'étendaient en contre-bas de la porte Fouka. Le palais d'Amimoûn pouvait se trouver dans le haut de la ville moderne non loin de la porte Clauzel; enfin le palais de la Perle, que dominait un Manâr 1, occupait l'emplacement des établissements militaires de Bridja. Nous en savons moins encore sur la résidence des Benî Khorassân, qui restèrent maîtres de Tunis pendant un siècle. Leur palais devait s'élever non loin de la Qaçba, sinon à la Qaçba même. Un nom de rue (Bou Khrîssân) et les tombes trouvées dans les terrains de l'hôpital Sadiki 2 rappellent le souvenir de cette petite dynastie tunisienne et de son époque.

Si nous voulons poursuivre l'étude de l'architecture civile que les palais hammâdites nous ont fait connaître, il nous faudra en chercher les éléments hors du pays berbère, il nous faudra même sortir des pays d'Islam. C'est dans la Sicile des rois normands que nous retrouverons le prolongement de cette brillante période d'architecture musulmane.

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Les remparts de Mahdiya.

Les portes de Mahdîya. La Sqîfa elkahla. Le port et l'arsenal de Mahdîya. Fortifications des villes çanhâjiennes. Bâb el-Bahr (Porte Sarrazine) de Bougie.

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Les remparts de Mahdîya. J'ai dit que Mahdiya était surtout un refuge construit par le Mahdî pour parer aux dangers qui menaçaient la dynastie. Contemplant son œuvre achevée, il aurait dit « Aujourd'hui me voilà rassuré sur le sort des filles Fâtimides ». Les auteurs qui nous parlent de Mahdîya nous entretiennent surtout des ouvrages militaires; ils nous décrivent le site soigneusement choisi, la muraille qui fait tout le tour de la presqu'île, les portes et les ouvrages qui en protégeaient les abords; ils mentionnent avec éloge le port et l'arsenal maritime. Bien peu de chose reste de tout cela; assez cependant

1 Il aurait été démoli en 1524 par les Espagnols. Voir Féraud, ap. Revue africaine, XII, 347.

2 Sur l'emplacement du cimetière de la Selsela.

3 Ibn el-Athir, Annales du Maghreb et de l'Espagne, tr. Fagnan, p. 315..

pour nous donner l'idée du soin qu'apportèrent les fondateurs de Mahdîya à en renforcer les défenses.

Une robuste muraille suivait le rivage et barrait l'isthme. On la disait assez large pour permettre à six chevaux d'y courir de front. Quelques fragments en subsistent. Ils sont construits. en moellons sommairement taillés, et qui rappellent l'appareil d'Achîr et de la Qal'a. De place en place, au Sud de la presqu'île, des excavations peu profondes ont été creusées dans les rochers plats qui forment le rivage. Certaines de ces excavations peuvent être des tombes phéniciennes. Mais on doit supposer que bon nombre furent aménagées pour y enraciner les fondations de la ville fâtimite. Quelques pans de murs maçonnés dans ces alvéoles ne laissent guère de doute sur leur emploi. Des trous semblables se remarquaient dans la forteresse çanhâjienne de Menzeh bent es-Soltân, qui précéda la ville d'Achîr et s'élevait sur un piton voisin d'Achîr.

Cette courtine était flanquée de seize tours (bordj) 1. Un de ces ouvrages subsiste encore en partie et menace ruine. Vers l'intérieur de la ville, il montre un arc brisé appareillé surmontant une ouverture très longue et qui s'élève presque au sommet de la façade. On reconnaît là un motif analogue aux grands défoncements verticaux des monuments hammâdites.

La face de la ville tournée vers le continent était naturellement la plus vulnérable et celle où l'on avait accumulé les plus nombreux moyens de défense. La description la plus complète est celle de Marmol. Bien qu'elle date du xvi° siècle, on peut supposer qu'elle correspond assez bien à l'état primitif. Selon Ibn Hawqal, El-Bekri et Ibn el-Athîr, la ville a deux portes. Marmol spécifie qu'il n'y en a qu'une du côté de la terre. Sur cette face, une très grosse muraille allait d'un bord à l'autre ; six tours la flanquaient, dont deux tours rondes aux extrémités, que battaient les vagues, et quatre tours carrées, l'un de ces saillants abritant l'entrée de la ville. De petites portes basses munies de vantaux bardés de fer fermaient ces tours, de

1 Bekri, 30, tr. 67.

2 Reproduit par De Smet, Mahdia, p. 25.

3 Marmol Caravajal, Descripcion general de Africa, éd. Grenade 1573, liv. 3, fol. 269-270, tr. Perrot d'Ablancourt, II, pp. 502-503.

4 Ibn el-Athir (éd. VIII, p. 319, tr. 331) nomme la Porte de la Victoire et, faisant face à Zawila, la Porte de Bekr.

sorte que chacune d'elles « était comme une petite forteresse séparée ». En avant de cette muraille, s'étendait un avant-mur (une fausse braie) plus bas, moins large, flanqué de tours plus nombreuses que celles du mur principal. Cet avant-mur était bordé d'un fossé que remplissaient les eaux pluviales 1.

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portes elles-mêmes, le géographe Ibn Hawqal écrit : « On entre dans Mahdîya par deux portes qui surpassent par la forme et la façon toutes celles que j'ai vues ailleurs, à la seule exception des deux portes de Raqqa sur le modèle desquelles elles ont été faites. Ce renseignement fourni par un contemporain des

1 Edrisi, éd. Dozy de Goeje, 109, tr. 128.

2 Ibn Hawqal, éd. de Goeje (Bibliotheca geog. arab. II), p. 48, 1. 4-5, tr. de Slane, ap. J. Asiat., 1842, I, p. 172.

Fatimides (milieu du x siècle) est évidemment d'un grand poids. C'est une affirmation très nette de l'influence mésopotamienne consciemment ressentie par les architectes d'Ifrîqya. Toutefois nous ne constatons pas de ressemblance bien frappante entre la seule porte de Mahdîya encore debout, telle qu'elle nous est parvenue, et la seule porte de Raqqa qui subsiste. Celle-ci, qui s'ouvre dans un mur dépourvu de saillants, donne entrée sous une voûte de plan carré. La porte de Mahdîya est tout autre.

Si elle ne rappelle guère la porte de Raqqa, elle présente en revanche, au moins en plan, une analogie assez grande avec la porte du palais de Mchatta. La baie, qui a reçu, sans doute à une époque récente, un arc en fer à cheval, s'ouvre au bas d'une tour de près de 20 mètres de haut '. Elle est flanquée de deux saillants à pans coupés et elle donne accès sous un vestibule couvert en berceau de 44 m. de longueur. On la désigne sous le nom de « Sqîfa el-kahla », le vestibule noir. Il semble qu'il faille l'identifier avec le vestibule (dihlîz) dont parle Maqrizî. Cet auteur nous dit que « à chaque porte [de la ville] est joint un dihlîz qui peut abriter 500 cavaliers 2. » Cette grande voûte, que renforcent quelques arcs doubleaux, n'était éclairée que par de petites fenêtres percées au-dessus de l'entrée et de la sortie, et par quatre fenêtres ménagées dans une voûte d'arête surélevée qui formait lanterne vers le centre. Un escalier extérieur permet d'accéder sur les terrasses et de là au premier étage de la tour. Cet étage contenait des réduits obscurs et une chambre de tir au-dessus de la porte. De là un autre escalier monte à la terrasse de la tour. Dans les murs latéraux de la grande voûte sont creusées douze niches à fond plat se faisant face et munies de banquettes. La porte de Mchatta présentait de même des saillants à pans coupés et, dans le long vestibule qui lui faisait suite, des renfoncements latéraux.

Les pieds droits qui séparent les niches de Mahdiya renforçaient intérieurement les murs. On peut croire aussi qu'ils marquent les multiples portes qui s'opposaient à la progression de l'ennemi. Marmol a connu la Sqîfa el-kahla, la grande voûte

1 Les parties de la muraille avoisinant la Sqifa el-kahla furent démolies en 1899. On y voyait un petit bordj, sans doute d'époque turque, et, à quelque distance à gauche, une poterne en chicane dite Bab el-ghadar.

2 Maqrizî, Moqaffa, extrait, trad. Fagnan, ap. Centenario di M. Amart (tir. à p., p. 43). M. Fagnan a bien voulu me communiquer le texte.

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