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mân ben 'Affân. Or, comme les paroles citées plus haut ont été dites devant une réunion de gens du Maghreb par la bouche même d'Omar ben el Khottâb répétant les propres paroles de l'Envoyé d'Allah, nous espérons qu'elles désignent particulièrement les Compagnons de l'OEuvre, et que ce sont eux qui en méritent la faveur. (4)

Nous tenons d'un homme de la postérité d'Abou Beker que 'Ali ben Abi Tâlib a dit : « O gens de La Mecque, ô gens de Médine, je vous recommande par-dessus tout Allah et les Berbers; car ils vous apporteront la religion d'Allah du Maghreb, quand on l'aura corrompue ici; C'est d'eux qu'Allah parle dans son livre, quand il dit : « O vous qui croyez, il s'en trouve parmi vous qui renient leur religion Certes, Allah suscitera d'autres hommes qu'il aimera et qui l'aimeront. Humbles envers les croyants, et fiers envers les infidèles, ils combattront pour la foi et ne craindront pas le blâme. Allah accorde sa faveur à qui lui plait, » et ils ne tiendront compte de personne ni de rien, sinon du respect dû à Allah. El Bekri a dit aussi : « Quand une bataille a lieu, certes nous combattons, nous autres Arabes, pour les dinars et les dirhems; mais les Berbers combattent pour fortifier la religion d'Allah. » Et il fait remonter la tradition suivante jusqu'à Ibn Messa'oud: A la fin de son pèlerinage, le Prophète dit je vous recommande la crainte d'Allah et les Berbers, car ce sont eux qui viendront vers vous avec la religion d'Allah, du fond de Maghreb, et Allah les pren

(1) Cette naïveté sortie de la plume du chroniqueur ibâdite nous rappelle ce passage du Kitab el Ouad'a d'Abou Zakaria: « Il y a soixante-douze sectes musulmanes, dont soixante et onze mauvaises et une seule bonne, et chacune prétend être la bonne, »

dra en échange de vous; il a dit : « Si vous n'observez pas l'ordre, vous serez échangés contre un peuple meilleur que vous, et qui ne vous ressemblera pas; » (1) et j'en jure par celui qui tient l'âme de Messa'oud entre ses mains, si je les atteins, je serai plus humble que leurs serviteurs et plus près d'eux que leurs vêtements. >>

On rapporte qu'Aïcha (qu'Allah l'accueille dans sa miséricorde), vit un jeune garçon dont les cheveux étaient tressés, plein de grâce et vivacité. Elle dit : « De quelle tribu parmi les nations est ce garçon? » On lui répondit: « C'est un Berber. » Elle reprit : « Les Berbers accueillent bien les hôtes, et frappent bien du sabre, et mettent une bride aux rois, comme on bride les chevaux. »>

Nous revenons maintenant aux cinq mortels porteurs de la science qui furent Abou et Khottâb 'Abd el Ala ben el Smah el Ma'afri (Les Ma'afra sont une tribu arabe); Abd er Rahman ben Roustem le Persan; 'Acim es Sedrati; Isma'ïl ben Derrâr el Khadamsi; Abou Daoud el Quebîli.

TRADITION CONCERNANT ABD ER RAHMAN BEN ROUSTEM, BEN BOURHAM, BEN KESRA, ROI DE PERSE, (qu'Allah l'agrée).

Abd er Rahman était né dans l'Iraq (2), Son père Roustem avait connaissance du futur gouvernement du

(1) Koran. Ch. XLVII, 40.

(2) Ibd Khaldoun dit textuellement; « Abd er Rahman ben Rostem, un des musulmans qui assistèrent à la conquête de l'Ifrikia, était fils de ce Rostem qui commandait l'armée persane à la bataille de Cadicia. » M. de Slane fait remarquer avec justesse que le fondateur de Tahèrt, étant mort en 168, ne saurait être le fils du général persan tué à Cadicia, 153 ans auparavant. L'auteur de la chronique ibâdite ne tombe pas dans l'erreur d'Ibn Khaldoun.

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Maghreb par sa postérité: il se mit donc en voyage et quitta l'Iraq, emmenant avec lui son fils et sa femme. Il allait vers l'Ouest. Quand il fut à La Mecque ou près de cette ville, son heure sonna, et ses jours furent terminés ; il mourut. Sa femme et son fils Abd er Rahman se joignirent à des pèlerins du Maghreb venus à La Mecque et firent le voyage avec eux. La mère d'Abd er Rhaman épousa alors un homme de Kirouân, et ils voyagèrent ensemble jusqu'à ce qu'ils atteignissent cette ville. 'Abd er Rahman ben Roustem les accompagnait. Quand il eut atteint l'âge de puberté, qu'il eut lu et fut devenu éloquent, un homme de la Doctrine jeta les yeux sur lui et lui dit : « Jeune homme, si tu demandes ce que tu demandes, va interroger Abou 'Obeïda Mouslim ben Abi Krima el Tamîmi (qu'Allah l'agrée); tu trouveras près de lui ce que tu espères. » 'Abd er Rahman alla donc chez Abou 'Obeïda (1) et se rencontra avec les hommes que nous avons nommés. Abou 'Obeïda les accueillit, leur demanda quelle était leur condition et d'où ils venaient. Ils lui dirent qu'ils étaient du Maghreb et qu'ils désiraient apprendre la science. Le maître accéda à leur désir. Ils demeurèrent chez lui plusieurs années. Or le Cheikh Abou 'Obeïda cherchait à se cacher par crainte d'un certain Emir de Boçra. Il fit entrer ses disciples dans une cave à la porte de laquelle il plaça une chaîne et un gardien. Si le gardien voyait passer quelqu'un, il remuait la chaîne, et le maître et les

(1) Suivant le dire des Ibâdites, Abou 'Obeïda était élève de Djâbir ben Zeid, auteur d'un divan fameux dont il sera parlé plus loin. Or, Djâbir ben Zeid, né dans une des dernières années du gouvernement d'Omar, était mort en l'an 96 de l'hégire. Les Ibadites (Mozabites) se prévalent à juste titre de leur antiquité.

disciples se taisaient. La leçon reprenait quand le passant s'était éloigné. 'Abd er Rahman ben Roustem était jeune et d'une grande beauté. Abou 'Obeïda dut étendre un voile entre lui et ses compagnons pour que ces derniers ne fussent pas distraits de leur travail. Quand, ayant fait dans la science tous les progrès qu'Allah leur accorda, ils voulurent retourner dans leur pays, les vieilles femmes parlèrent à Abou 'Obeïda et lui demandèrent de voir 'Abd er Rahman, pour lui faire leurs souhaits. Abou 'Obeïda y consentit et les introduisit.

Elles étaient trois. La première invoqua Allah et dit : « Qu'Allah fasse de toi une créature bénie comme est béni l'œil du soleil. » La seconde dit : « Qu'Allah fasse de toi un être béni comme l'est la vue. » La troisième dit : « Qu'Allah te bénisse comme le sel est béni dans les mets. >> Ensuite, quand ils furent prêts à partir ils s'adressèrent à Abou 'Obeïda et lui demandèrent conseil. Ils lui dirent: « O Cheikh, si nous devenons puissants dans le Maghreb, et si nous trouvons de la force dans nos âmes, choisirons-nous pour nous commander un homme parmi nous ? Est-ce là votre avis? » Abou 'Obeïda répondit : « Allez dans votre pays, et s'il y a parmi les Compagnons de l'OEuvre un homme qui soit digne de vous commander, supérieur aux autres par le nombre de ses admirateurs et par sa préparation morale, donnez lui le commandement. S'il refuse, tuez-le. » Il désigna Abou el Khottâb. Comme ils sortaient, et comme le Cheikh, se préparant à leur faire ses adieux, mettait le pied à l'étrier, Isma'ïl lui adressa trois cents questions sur le chapitre des jugements avant qu'il fût assis sur le dos de son ânesse. Abou 'Obeïda lui dit alors: Tu veux ètre Qâdi, ben Derrâr. » Isma'il ben Derrar répondit:

« Si j'étais nommé Qâdi, qu'Allah te pardonne, j'accepterais. » Allah sait si c'est à ce moment ou auparavant qu'il interrogea Abou 'Obeïda. Ils se dirigèrent ensuite vers le Maghreb. Quand ils y furent arrivés, ils offrirent l'imamat à 'Abd er Rahman ben Roustem; mais ce dernier s'excusa, disant : « J'ai dans les mains des dépôts et la fortune de bien des gens. » Ils le quittèrent en agréant son excuse, et désirèrent investir de l'Imamat Abou el Khottâb (qu'Allah l'agrée.)

IMAMAT D'ABOU EL KHOTTAB ABD EL ALA BEN ES SMAH (qu'Allah l'agrée.)

Un de nos compagnons a rapporté qu'Abou el Khottâb lorsqu'il s'avança avec ses amis de l'Orient vers Trablės, s'occupa beaucoup des affaires des Musulmans, dans le but de décider qui parmi les Vénérables serait chargé de la surveillance. Or, les Musulmans se réunirent en assemblée après le meurtre réciproque d'El Hârits et de 'Abd el Djebar. Cette réunion fut secrète. Ils y décidèrent l'élection d'un Imâm, considérant avec soin et pesant attentivement les mérites de l'homme à qui ils confieraient le gouvernement, si leur puissance prévalait contre leurs ennemis. Le lieu dans lequel ils se réunirent se nommait Çiâd, à l'Ouest de la ville de Trablès, ils feignirent de s'être rassemblés au sujet d'un partage de terres, et publièrent qu'ils avaient simplement à régler une contestation entre un homme et sa femme; mais leur désir était de s'occuper de l'lmâmat. Ils revinrent se présenter au gouverneur de la ville, et le saluèrent avec tous les signes de la soumission, jusqu'à ce que leur résolution commune fût bien prise, touchant l'élection de l'Imâm. Or ils décidérent d'obéir à Abou el Khottâb (qu'Allah l'agrée).

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