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En l'an 472 (1079-80), Youçof expédia vers le Maghreb central un corps de Lemtouniens commandé par son parent, le général Mezdeli, fils de Tîlenkan 1-Ibn-Mohammed-Ibn-Oureggout2, auquel il avait donné l'ordre d'attaquer les princes de race maghraouienne qui commandaient à Tlemcen. Cette ville avait alors dans ses murs l'émir El-Abbas-Ibn-Yahya, rejeton de

Yala-Ibn-Mohammed-Ibn-el-Kheir-Ibn-Mohammed-Ibn-Khazer. Mezdeli soumit le Maghreb central et, en traversant le pays des Zenata, il fit prisonnier Yala, fils de l'émir El-Abbas, et lui ôta la vie.

L'année suivante, lorsque ces troupes furent de retour, Youçof pénétra dans le Rif et occupa Guercîf, Melîla et les autres villes de cette province. La ville de Nokour, qu'il détruisit pendant cette expédition, ne se releva plus de ses ruines.

A la suite de ces conquêtes, Youçof mena ses Almoravides dans le Maghreb central et soumit la ville d'Oudjda ainsi que le pays des Beni-Iznacen. Il prit ensuite la ville de Tlemcen dont il tua le gouverneur, El-Abbas-Ibn-Yahya, et toute la garnison maghraouienne. Voulant faire de cette place un des boulevards de son empire et un lieu de station pour ses troupes, il y installa un corps almoravide sous les ordres de Mohammed-Ibn-Tinamer le messoufien. A l'endroit où il avait dressé son camp, il fonda la ville de Tagraret. Ce mot signifie station eu langue berbère. Ayant ensuite effectué la conquête de Ténès 3, d'Oran, du Ouancherich et de tout le pays jusqu'à Alger, il reprit le chemin de l'occident et rentra à Maroc en 475 (1082-3). Mohammed-IbnTinamer conserva le gouvernement de Tlemcen jusqu'à sa mort et eut pour successeur son frère Tachefin.

Le roi chrétien [Alphonse VI, roi de Léon et de Castille] s'étant

1 Variantes: Melenkan, Temlenkan.

Comme Oureggout signifie fils de Reggout, le mot arabe Ibn (fils) qui précède ce nom doit être supprimé. On remarquera que, dans les noms berbères, Ibn Khaldoun commet très-sonvent la faute que nous indiquons ici.

3 Les copistes du Cartas ont écrit Tounis, c'est-à-dire Tunis. Cette bévue leur est échappée plus d'une fois.

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des Almoravides. Il trouva ce prince à Fez où il s'occupait à lever des troupes pour la guerre sainte, et, voulant lui fournir un point d'appui pour les opérations militaires qui devaient avoir lieu en Espagne, il ôta à son propre fils, Er-Radi, le commandement d'Algeciras et remit cette forteresse au chef africain. En l'an 479 (1086) Youçof y débarqua avec ses troupes almoravides et les contingents fournis par les tribus du Maghreb. ElMotamed-Ibn-Abbad, accompagné d'Ibn-el-Aftas, souverain de Badajos, allèrent le recevoir, pendant que le fils d'Alphonse, roi des Galiciens, rassemblait en Castille les populations de la chrétienté.

En l'an 479 (1086), les musulmans rencontrèrent l'armée d'Alphonse à Ez-Zellaca, près de Badajos, et remportèrent sur elle une victoire à jamais célèbre. Youçof s'en retourna à Maroc après avoir laissé une garnison dans Séville sous les ordres de Mohammed-Ou-Meddjoun, fils de Semouïn-Ibn-Mohammed-IbnOureggout. Cet officier, appelé aussi Ibn-el-Haddj, parce que son père avait porté le titre d'El-Haddj (le pèlerin), était parent de Youçof-Ibn-Tachefîn et un de ses généraux les plus distingués.

Le roi chrétien se jeta alors sur l'Espagne orientale sans éprou

1 Ibn-Khaldoun avait assez de renseignements sur l'Espagne chrétienne pour savoir que ce prince s'appelait Alphonse; qu'il était fils, non pas d'Alphonse mais de Ferdinand et roi, non-seulement de Galice, mais de Léon et de Castille. Ici il a suivi l'usage des historiens arabes qui désignent presque toujours les rois de Castille par le titre de fils d'Alphonse. Nous prendrons cette occasion pour faire observer qu'en arabe le nom d'Alphonse s'écrit Adefouns ou Adfounch, avec un d ponctué, lettre qui représente le th doux des Anglais. Cette orthographe peut se justifier: dans le trésor de l'église de Saint-Jacques, à Compostelle, se voit encore un crucifix portant l'inscription suivante: Hoc opus perfectum est in era 1x00 et duodecima. Hoc signo vincitur inimicus, hoc signo tuetur pius, hoc offerunt famuli Dei Adefonzus, princeps et coniux. L'an 912 de l'ère d'Espagne répond à l'an 874 de J.-C. et à l'an 261-2 de l'hégire. Alphonse III, le grand, était alors roi des Asturies et de Léon.

Le texte imprimé et les manuscrits portent la date de 481. Plus loin, ils offrent 486 à la place de 484.

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