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Quand on étudie les différentes formes dans lesquelles la religion se montre, on peut remarquer que toutes, telles qu'elles ont été conçues, portent l'empreinte plus ou moins distincte du caractère de la nation qui les a produites. Ce caractère spécial nait de certaines influences locales, effets du sol ou de latitude géographique. L'ardente imagination, qu'on trouve dans certaines régions des Indes, est en parfaite harmonie avec la nature splendide et la végétation exubérante du climat des tropiques; le quiétisme du culte du Bouddha doit a coup sur, beaucoup à la fertilité prodigieuse d'un sol qui donne abondance de fruits sans demander aucune culture et à l'influence d'un climat heureux qui convie continuellement à la mollesse et au repos; l'assujettissement des Egyptiens à leurs prêtres s'explique aisément par la constitution de leur pays. Les phénomènes que présentait a leur observation le Nil, fleuve grandiose et mystérieux, dont les débordements périodiques et fertilisants, excitaient l'admiration en commandant le respect, étaient considérés comme les manifestations spontanées d'une providence identique avec l'élément bienfaisant. Les prêtres qui seuls en connaissaient les secrets, l'exploitaient habilement à leur profit. La civilisation Européenne doit sans doute une grande partie de son développement énorme, aux exigences continuelles d'un sol qui ne produit des fruits qu'à force de travaux pénibles et fatiguants et au climat propice qui permet aux laborieux de se livrer au travail sans interruption pendant toute l'année.

Il est donc évident que le caractère particulier d'un peuple ou d'une nation imprime son cachet sur la forme de sa religion. Cela énoncé plusieurs faits historiques,

s'expliqueront d'une manière saisissante. P. e. Le culte d'Isis languissait et finit par disparaître tout à fait à Rome; enfant de l'Egypte, il ne put vivre qu'aux bords du Nil. Tel fut aussi le sort du culte Phénicien de Mélech, transplanté en Grèce. Kronos qui devora ses enfants fut détroné par Zeus.

Parmi les causes principales qui mettent en rapport les différentes nations, il faut compter en premier lieu le commerce et les guerres. Le premier fait naître les relations tranquilles de la paix, les dernières mênent à leur suite les conflits sanglants et les bouleversements terribles. Toutes cependant concourent aux mêmes fins: établir des rapports de différente nature entre les nationalités étrangères, soit qu'elles s'unissent et se confondent, soit qu'elles se chassent et font place les unes aux autres. Il en résulte toujours que les formes religieuses des peuples commercants et belligérants se rencontrent ou se heurtent comme les individus, elles en subissent l'influence, reçoivent des empreintes plus ou moins profondes et se modifient en raison de la force, de ces impressions.

Étudier les influences qu'ont exercé sur l'esprit d'un peuple connu le contact avec des nationalités étrangères, c'est en même temps rechercher les lois qui régissent l'histoire de l'humanité. En suivant toutes les phases de la civilisation antique nous voyons de différents peuples, les caractères les plus dissemblables s'allier, se combiner, se confondre, et produire des conceptions neuves qui à leur tour font naître de nouveaux resultats. Constammant les causes égales sont suivies des mêmes effets et l'on n'a pour se convaincre de cette assertion qu'a jeter un regard sans prévention dans les pages de l'histoire.

Si nous désirons rendre hommage a la providence divine, il faut s'appliquer aussi à apprendre à la mieux connaître. Si Dieu agit sur le monde, il nous est permis d'attendre qu'il se manifestera dans cette activité. Scrutons donc les lois sublimes et invariables de la nature qui nous révèlent la main de l'ouvrier divin et tout-puissant; étudions les lois qui régissent les destinées de l'humanité depuis son apparition dans le monde, alors la nature et l'histoire deviendront les organes révélateurs qui nous montreront le Dieu de l'univers. Le peuple de la révélation sera donc pour nous celui dont nous connaîtrons le mieux l'histoire, dont nous pourrons suivre pas à pas les destinées à travers les siècles et dont nous saurons expliquer les influences sur les nations contemporaines.

Cette étude nous apprendra les lois par lesquelles Dieu conduit l'humanité dans les voies de la perfection, et s'il nous arrive de trouver rapporté parmi les traditions de l'antiquité qu'en vertu de la volonté divine, des infractions au droit des gens ou des violations de la conscience ont eu lieu, nous protestons contre de semblables assertions. L'histoire d'un tel peuple ne saurait nous guider dans nos recherches pour trouver la verité, ne saurait nous servir de point de comparaison pour notre moralité, nonobstant que la divinité y soit introduite comme donnant ses ordres aux mortels.

Néanmoins un tel peuple ne serait pas condamné pour cela sans retour, car en examinant à quelle époque il a vécu et sous quelles circonstances il fut placé, les choses changeront peut-être d'aspect et en nous rendant compte des influences différentes qui ont joué un role important dans son histoire, ces traditions rejetées d'abord comme

inutiles et indignes de notre attention se montreront dignes de notre respect. Chaque évènement appartient à l'histoire, dépend d'une cause et produit un effet. Apprécier la juste valeur des faits historiques, voilà la grande difficulté qu'il faut vaincre et qu'il n'appartient qu'aux esprits courageux et éclairés à surmonter.

La principale cause des dissensions continuelles sur le domaine religieux c'est que l'on s'obstine à séparer de la religion, ce que l'histoire revendique a juste titre ou ce qui appartient de droit aux sciences naturelles. Tant que l'on persistera à confondre ces éléments hétérogènes les malentendus continueront. Ce n'est qu'en plaçant chaque chose dans sa catégorie, qu'on peut rétablir l'harmonie.

Ce n'est aussi qu'après avoir vu se dérouler l'histoire dépuis le commencement jusqu'a la fin et les évènements se succéder dans un enchainement régulier et conséquent, que nous pouvons nous former une idée d'un gouvernement providentiel dont nous remarquons les traces non équivoques et devant lequel nous nous prosternons, saisis d'un respect réligieux en adorant la suprême sagesse qui régit l'univers.

Ce respect religieux, nous ne saurons l'éprouver là où nous remarquons les actes d'un dispotisme arbitraire.

Partout dans la nature nous voyons régner un ordre merveilleux, un accord parfait entre toutes les parties; si donc nous pouvons constater une semblable harmonie dans le monde moral, notre conception d'un être suprême qui dirige l'univers deviendra une conviction profonde.

Dans l'histoire de l'humanité nous pouvons remarquer un développement continuel. Ce développement se montre parfois à nous, marchant avec une régularité parfaite; les

évènements se succèdent gagnant en importance et le siècle qui s'en va est toujours suivi d'un autre, supérieur en lumières et en civilisation. Ces progrès cependant, doivent souvent leur naissance à de rudes combats moraux. Que d'efforts il en a couté au monde pour enfanter le christianisme! Mais sans combat la victoire est chose impossible.

Ce mouvement progressif se montre aussi dans le domaine religieux, bien que bon nombre de gens s'obstinent à l'admettre, et beaucoup cherchent leur salut dans un retour vers le passé. En agissant ainsi ils confondent l'essentiel avec l'accessoire. Le principe religieux mis au grand jour par le fondateur du christianisme, était un principe de vérité éternelle, mais étroitement lié à une cosmogénie, produit des temps antiques, et tandis que l'on relève de nos jours ce principe fondamental avec une vigueur nouvelle, il y en a qui prétendent que l'on ne saurait être fidèlement attaché à ce principe, si en même temps on ne déclare adhérer toujours à la cosmogénie, qui florissait il y a plus de dix huit siècles. C'est là que se trouve le différend. Conservons le grand principe intact, mais n'oublions pas que le temps a marché, que le cercle des connaissances humaines s'est élargi considérablement et que les lumières acquises dans les sciences de la nature et de l'histoire ont fait changer pour nous la face du monde. Appliquons le principe aux évènements du temps présent et ne faisons pas un retour vers une époque, naïve peut-être, mais assurément ignorante des grandes vérités, dont la génération présente est le dépositaire.

Si Copernic ou Newton avaient vécu parini les premiers

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