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s'en retourna en Égypte sans y laisser de gouverneur; et il n'y avait alors ni Cairewan1, ni ville à mosquée. »

Ces deux dernières traditions contredisent indirectement la déclaration d'Ibn-ez-Zobeir, que ce fut lui qui tua le patrice. Nous sommes alors dans la nécessité de n'ajouter aucune foi aux paroles d'Ibn-ezZobeir, ou de regarder ces deux traditions comme fausses, ou bien de supposer qu'à la mort du patrice un autre chef lui succéda. J'avoue que la parole d'Ibnez-Zobeir m'est suspecte; c'était un homme ambitieux et remuant, qui, si nous en exceptons le courage, n'avait pas une seule bonne qualité pour le faire respecter. Ainsi je regarde son récit comme méritant peu de confiance, et vous verrez, dans l'extrait suivant, qu'Ibn-Abd el-Hakem ne regarde nullement comme certain le fait de la mort de Djirdjîr par la main d'Ibn-ez-Zobeir.

Voici maintenant les renseignements qu'Ibn-Abd el-Hakem nous fournit sur les mêmes événements.

BARCA 2.

«Et il (c'est-à-dire Abd er-Rahman Ibn Abd Allah Ibn Abd el-Hakem) a dit : Quand les Berbères étaient dans la Palestine, ils avaient pour roi Djalout (Goliath), lequel fut tué par Dawoud (David); ils émigrèrent alors vers l'Occident (El-Maghrib) et vinrent

1

Voyez ci-après, page 35.

2 Man. de la Bibl. du roi, ancien fonds, no 785, fol. 107 verso; n° 655, f. 231.

jusqu'à Loubiya (la Libye) et Mérakiya 1, deux provinces de l'Égypte occidentale, situées dans la région à laquelle l'eau du Nil n'atteint pas, et qui n'est arrosée que par les pluies. Arrivés là, les Berbères se dispersèrent; les Zenata et les Maghîla s'avancèrent vers le Maghrib et se fixèrent dans les montagnes (de ce pays); les Léwata allèrent habiter le territoire d'Antabolis (la Pentapole Cyrénaïque), qui est le même endroit que Barca. Ils se répandirent dans cette partie du Maghrib jusqu'à ce qu'ils parvinssent à Sous. Les Héwara s'établirent à Lebida (Leptis Magna) et les Nofouça se fixèrent auprès de la ville de Sabra (Sabrata). A cause de cela, les Grecs (Roum) qui s'y trouvaient évacuèrent le pays, mais les Afaric (Africains) y restèrent. Ceux-ci s'étaient faits serviteurs des Grecs par un traité de paix; telle étant leur manière d'agir avec quiconque subjuguait leur pays.

«Amr Ibn-el-Asi s'avança avec sa cavalerie jusqu'à Barka, et accorda la paix aux habitants de cet endroit moyennant une somme de treize mille dinars à titre de capitation, et, pour acquitter cet impôt, il les autorisa à vendre tels de leurs enfants qu'ils voudraient. Abd er- Rahman (Ibn Abd el-Hakem) nous a raconté la tradition suivante qu'il avait reçue

1 Les deux manuscrits portent (Merakiya). L'auteur a sans doute voulu écrire (Marmerakiya), c'est-à-dire dans

la Marmarique. El-Masoudi, dans son Tambîh, écrit ce nom ElMarica (a). (Voyez Notices et Extraits des manuscrits, t. VIII, p. 145, 146.)

d'Abd el-Melik Ibn-Moslema qui dit la tenir de El-Leith Ibn-Saad1:

<< Dans le traité fait avec les Berbères de la tribu de Lewata, Amr Ibn-el-Asi inséra cette clause : « Pour « acquitter la capitation qui vous est imposée, vous << devez (en cas de nécessité) vendre vos fils et vos << filles. >>

<< Abd er-Rahman nous a rapporté ce qui suit d'après Abd el-Melik Ibn-Moslima, qui le lui rapporta d'après Ibn-Lahîa2, qui le donna d'après Yezîd IbnAbd Allah el-Hadremi:

« Ibn-Dias, lorsqu'il fut chargé du gouvernement « d'Antabolis, y apporta l'écrit de leur traité 3. »

«

<< Abd er-Rahman nous a rapporté ce qui suit, d'après Abd el-Melik Ibn-Moslima, qui le lui rapporta d'après Ibn-Lahîa, qui le donna sur l'autorité de Yezîd Ibn-Abd Allah el-Hadremi, qui l'avait entendu raconter à Abou Fétan Aiyoub Ibn-Abi 'l-Aliya elHadremi, qui le tenait de son père, lequel disait : «J'ai entendu Amr Ibn-el-Asi adresser ces pa<< roles, du haut de la chaire, au peuple d'Antabolis: «Ceci est un traité dont on remplira toutes les condi«tions à votre égard. »

«Il (Abd er-Rahman) reprend maintenant le récit. qu'il tenait d'Othman Ibn-Salih et d'autres: Aucun collecteur d'impôts n'entrait à Barca, dans ce temps

1 Célèbre traditionniste, mort en 175 (791 de J. C.)

2 Mort en 174 (790 de J. C.).

3 C'est-à-dire qu'il apporta aux habitants de cette localité une copie écrite et authentique du traité qu'ils avaient fait de vive voix.

là, les habitants étant dans l'usage d'envoyer le montant de leur capitation (en Égypte) au moment de l'échéance. Amr Ibn-el-Asi expédia Ocba Ibn-Nafé qui pénétra jusqu'à Zawîla1, et le pays situé entre cette ville et Barca devint la limite (du territoire) des musulmans.

TRIPOLI.

«(Ibn-Abd el-Hakem) dit : Alors Amr Ibn-el-Asi s'avança jusqu'à Tripoli, et il y fit halte en l'an 22 (642-3 de J. C.); selon El-Leith Ibn-Saad 2, Amr Ibnel-Asi attaqua Tripoli en l'an 23. (Ibn-Abd el-Hakem dit :) Il s'arrêta auprès de la coupole qui couronne la hauteur située à l'orient de la ville. Le siége dura un mois sans avoir aucun résultat, lorsqu'un homme de la tribu (arabe) de Medlidj sortit un jour du camp d'Amr, avec sept autres individus, pour aller à la chasse. Ils s'avancèrent à l'occident de la

ville et s'éloignèrent du camp. Étant ensuite retournés sur leurs pas, ils eurent tant à souffrir de la chaleur, qu'ils suivirent le bord de la mer. Or la mer touchait immédiatement à (l'extrémité) de la muraille de la ville, et entre la ville et la mer il n'y avait point de muraille. Aussi les navires grecs entraient dans le port jusqu'à (toucher) leurs maisons.

1 Il s'agit ici de la ville de ce nom qui est située dans le Fezzan. Dans une autre lettre, je donnerai les détails des différentes expéditions d'Ocba.

2 Ici j'ai supprimé l'isnad, et dorénavant j'en ferai de même chaque fois qu'il s'en présentera un.

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Le Medlidjide et ses compagnons remarquèrent que la mer avait baissé du côté de la ville, en laissant à découvert un espace de terrain par lequel on pouvait passer dans la ville. Ils y pénétrèrent par cet endroit, et, arrivés près de l'église, ils poussèrent le cri d'Allah akber! (Dieu est très-grand!) Les Grecs n'eurent alors plus d'asile excepté leurs navires, et Amr s'étant aperçu, avec ses compagnons, qu'il y avait des épées tirées au milieu de la ville, fit avancer son armée et y pénétra. Les Grecs ne purent s'échapper que dans leurs embarcations les plus légères, et Amr mit la ville au pillage.

<< Le peuple de Sabra (Sabrata) avait mis cette ville en état de défense; mais, en apprenant qu'Amr ne faisait aucun progrès dans sa tentative contre Tripoli et que tous ses efforts étaint vains, ils se laissèrent aller à une sécurité entière. Le nom de Tripoli était Benara 1; Sabra était l'ancien lieu de marché (es-souc el-cadîm), et ce fut Abd er-Rahman Ibn-Habib qui, en l'an 31, transporta ce (marché) à Tripoli. Quand Amr Ibn-el-Asi se fut emparé de Tripoli, il fit partir un fort détachement de cava

وكانت طرابلس تسمى باوه : vantes

Benara (). Le man. n° 656 porte Yenara (os). Je ne puis rien offrir de positif à l'égard de ce nom. Peut-être que, dans quelque pièce écrite, Ibn-abd el-Hakem aura vu les paroles sui«<et Tripoli portait le nom d'Oea (bi-Oewah), » et qu'il aura pris le (w) pour un (r). Quant à l'introduction du n, je ne saurais l'expliquer. L'auteur du dictionnaire géographique intitulé Merasid el-Ittila écrit ce nom Nebawa (o), puis il ajoute : «C'est un nom (qu'on donna) à la ville de Tripoli, car Tripoli est le nom du district. »

و

ر

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