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hampe du thyrse et, entre autres, la pomme de pin du sommet, une feuille de vigne a été collée sur les parties sexuelles pour les cacher. Mais la restitution la plus fâcheuse, est assurément d'avoir mis une tête de levrette à la place de celle du petit léopard, qui a disparu.

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Il y a une dizaine d'années, un archéologue anglais, M. Christy, commençait avec moi, en Algérie, les premières fouilles de dolmen et autres monuments de forme dite celtique, dont j'ai signalé, à cette époque, le résultat satisfaisant. M. Christy attachait surtout une grande importance à la découverte des silex taillés, ayant servi à un usage quelconque aux populations des âges primitifs. Depuis cette époque, dans toutes mes courses dans la province, j'ai cherché des silex taillés; il s'en trouve en tous lieux, dans les montagnes comme dans les plaines; mais il eût fallu beaucoup de complaisance et d'efforts d'imagination, pour reconstituer une forme exacte ou attribuer une destination spéciale aux fragments que j'avais vus jusqu'ici. C'est aux environs d'Ouargla, à deux cents lieues environ du littoral et au milieu de dunes de sable, qu'il m'était réservé d'obtenir un succès complet et convaincant.

Entre la ville saharienne de Negouça et celle d'Ouargla, à quatre kilomètres environ avant d'arriver à cette der

nière, on traverse de grandes dunes de sable, sur lesquelles brillent au soleil une infinité d'éclats de silex blanc; naturellement, j'explorai ce quartier pendant la marche de la colonne, et on doit juger de ma satisfaction, lorsque je pus constater l'existence, au pied de la dune de sable, de l'emplacement d'une sorte d'ancien atelier, où les silex taillés couvraient littéralement le sol sur un espace de dix mètres carrés. La récolte fut abondante; plus d'une centaine d'échantillons assez bien conservés étaient en ma possession. Je fis immédiatement part de ma trouvaille au général Lacroix et à mes amis, entre autres au docteur Reboud et à M. le vétérinaire Souvigny, qui glanèrent aussi et en ramassèrent de nombreux échantillons. Ceux-là même qui, souvent, avaient souri et m'avaient plaisanté sur mes recherches de petits couteaux perdus, étaient obligés de se rendre à l'évidence; les plus incrédules étaient convaincus, en examinant cette quantité d'objets, œuvre palpable de l'industrie humaine, et non point produits par le fait d'un hasard capricieux.

Les silex sont généralement taillés en pointes de flèches; presque tous sont à trois facettes, c'est-à-dire à peu près triangulaires. Un côté est entièrement plat et les deux autres forment une aréte plus ou moins vive et saillante, dont les bords sont tranchants. Le no 1 est la pointe de flèche du type le mieux réussi. La matière est un silex blanc, souvent transparent et quelquefois teinté de rose ou de brun; les éclats en sont très-nets. Des échantillons aigus, plus gros que les pointes de flèches, devaient avoir pour destination d'être montés au bout de lances ou de bâtons servant d'armes défensives, tandis

que les autres s'adaptaient aux armes de jet. Nous n'avons pas besoin de rappeler que la flêche, mais montée en fer, est encore aujourd'hui en usage chez les Touareg du Sahara central.

Sur les traces de pareilles curiosités, j'ai continué mes recherches autour d'Ouargla, entre autres au DjebelKrima, où se trouvent également des silex taillés.

A quel peuple faut-il maintenant attribuer ces vestiges de l'âge primitif? Faut-il les faire remonter aux Ethiopiens d'Hérodote, aux Gétules de l'époque romaine? Les ouvrages des auteurs anciens me manquent ici pour me livrer à des recherches sérieuses et pour tenter de résoudre cette question. Nous allons nous borner à rappeler ce que la tradition locale, qui ne remonte pas très-haut, dit au sujet des anciens habitants du pays.

Sept grands centres de population existaient jadis auprès du Djebel-Krima. La contrée, aujourd'hui aride et envahie par les sables qui l'entourent, était arrosée par deux grands cours d'eau, l'Oued-Mzab et l'Oued-Nça, qui ne coulent plus aujourd'hui, mais dont le lit est encore reconnaissable. Toute la contrée était relativement verdoyante; des troupeaux de gazelles, des bandes d'autruches couvraient la plaine, qui leur offrait alors des herbages abondants, qu'arrosaient les cours d'eau et des pluies périodiques; et, en effet, les indigènes nous prouvent la vraisemblance de cette tradition, en nous inontrant à chaque pas une infinité de débris d'œufs d'autruche provenant des couvées de ces grands échasşiers. Aujourd'hui, c'est désert; rien n'y vit. La tempėrature s'y serait considérablement modifiée et aurait

amené un bouleversement complet dans la nature du pays.

La population la plus ancienue que signale la tradi- · tion locale s'appelait les Sedrata. Quelle est l'origine de ces Sedrata? Faut-il voir en eux la fraction des Zenata, race berbère, à laquelle Ibn-Khaldoun attribue la fondation d'Ouargla? Je le répète, je n'ai ici aucun ouvrage å consulter. En tout cas, les vestiges laissés par cette population sont nombreux; j'ai parcouru les ruines qui jonchent le terrain sur des espaces considérables, entre le Djebel-Krima et Ouargla. On voit, par des tronçons, que de grandes plantations de palmiers y existaient tout alentour. Le Djebel-Krima, qui s'élève au milieu de la plaine sablonneuse, à une douzaine de kilomètres au sud d'Ouargla, est une vaste table gypseuse, d'une centaine de mètres de hauteur et d'une vingtaine d'hectares de superficie. C'est le plus bel observatoire que l'on puisse imaginer pour étudier l'horizon et la direction que le vent imprime aux dunes de sable, qui, à l'œil, produisent l'effet d'autant de lames ou de vagues de la mer allant se briser contre une plage. Sauf la couleur du sable, l'effet d'optique est exactement le même et d'un aspect saisissant. La table de Krima est couverte de ruines d'habitations; les rues et les compartiments intérieurs des maisons, construites en mortier de plâtre, sont parfaitement reconnaissables; les éclats de silex y sont nombreux, ainsi que les tessons d'une poterie rougeâtre, d'une ténacité extrême. Au milieu du plateau est un large puits, qui n'a pas moins de cent-douze mètres de profondeur. Comme les abords de la table sont partout taillés à pic, sauf un ou deux passages, où existent

des rampes fort raides, les premiers habitants,

Sedrata de la tradition, peut-être,

refuge assuré contre leurs ennemis.

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y trouvaient un

L. FÉRAUD.

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