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sur sa demande, En-Nacer, l'oméïade, lui avait expédié d'Espagne. Abou-'l-Aïch s'empressa d'abandonner cette ville pour aller s'enfermer dans Archgoul; puis, en l'an 325, il s'enfuit au château qu'il s'était fait construire près de Nokour et laissa Archgoul au pouvoir de son adversaire. Celui-ci se dirigea ensuite contre la ville de Nokour et l'ayant emportée à la suite d'un siége, il la détruisit de fond en comble après en avoir tué le gouverneur Abd-el-Bediâ-Ibn-Saleh. Son fils Medîn, auquel il avait donné l'ordre d'assiéger Abou-'l-Aïch ', obligea ce prince à livrer le château pour obtenir la paix.

Ibn-Abi-'l-Afïa, dont la fortune venait de prendre ainsi un grand ascendant, étendit promptement son autorité jusqu'à la frontière du pays de Mohammed-Ibn-Khazer, prince des Maghraoua et seigneur du Maghreb central. En l'an 327 (938-9), pendant qu'il travaillait de concert avec ce puissant voisin à fortifier la cause des Oméïades, la mort vint le surprendre *.

Son fils Medîn, qu'il avait envoyé faire le siége de Fez, luisuccéda dans le commandement du Maghreb, et s'y étant fait confirmer par En-Nacer, il contracta avec El-Kheir, fils de Mohammed-Ibn-Khazer, une alliance semblable à celle qui avait existé entre leurs pères. A la fin, cependant, cette bonne intelligence se troubla, et les deux chefs avaient déjà commencé à se faire la guerre, quand En-Nacer chargea son cadi, Monder-Ibn-Saîd, d'aller examiner la cause de la querelle et de travailler à un raccommodement. Monder remplit cette commission de manière à satisfaire les souhaits de son souverain.

En l'an 335 (946-7), Medîn vit arriver chez lui son frère ElBouri qui s'était échappé du camp d'El-Mansour [le fatemide], pour aller se joindre à Abou-Yezid. Ahmed-Ibn-Bekr-el-Djodami, qui avait accompagné El-Bouri, se rendit à Fez sous un déguisement et trouva bientôt l'occasion d'arracher le pouvoir au gouverneur, Hacen-Ibn-Cacem-el-Louati. Medin et ses frères El-Bouri et Abou-'1- Monked, se partagèrent alors les états

1 Les manuscrits et le texte imprimé portent ici Abou-'l-Abbas. 2 Selon l'auteur du Cartas, il fut tué.

de leur père, de sorte qu'ils soutinrent, à eux trois, tout le poids des affaires. El-Bouri passa en Espagne, l'an 335, et fut reçu avec de grands honneurs par En-Nacer. S'étant alors fait confirmer dans l'exercice de son autorité, il repartit comblé de faveurs, et mourut en 345 (956-7), pendant qu'il assiégeait son frère Medîn dans la ville de Fez. Il eut pour successeur son fils, Mansour, lequel tint sa nomination d'En-Nacer. Le nouveau chef se rendit en Espagne, accompagné de son frère Abou-'lAïch, et reçut du khalife les mêmes témoignages de faveur que ce prince avait déjà accordés à leur père. Lors de la mort de Medîn, En-Nacer le remplaça par Abou-Monked. A la suite de cette nomination, les Maghraoua s'emparèrent de la province de Fez ainsi que de la ville, et établirent leur domination dans le Maghreb, d'où ils expulsèrent les Miknaça. Les vaincus rentrèrent dans les limites de leur ancien territoire, et Ismail, fils d'El-Bouri, passa en Espagne avec Mohammed, fils d'Abd-Allah et petitfils de Medîn. En l'an 386 (996), pendant que le vizir El-MansourIbn-Abi-Amer gouvernait l'empire espagnol, ils rentrèrent en Maghreb avec Ouadeh [ général envoyé par le gouvernement oméïade], pour comprimer la révolte de Zîri-Ibn-Atïa. Ouadel soumit tout le pays et rétablit ces chefs dans leurs états.

Quand Bologguîn-Ibn-Ziri [le sanhadjite] eut enlevé le Maghreb central aux Beni-Khazer, princes de la tribu des Maghraoua, les Miknaça formèrent une alliance avec lui, et s'attachèrent désormais à la dynastie zìride en qualité de sujets et d'auxiliaires. En l'an 405 (1044-5), Ismail, fils d'El-Bouri, mourut à Chelif, dans une des batailles que Hammad [prince de la famille zirîde] livra à [son neveu] Badîs.

Les descendants de Mouça-Ibn-Abi-'l-Afïa continuèrent à régner jusqu'à l'apparition des Almoravides et la conquête du Maghreb par Youçof --Ibn-Tachefin. El - Cacem, fils de Mohammed, fils d'Abd-er-Rahman, fils d'Ibrahim, fils de MouçaIbn-Abi-'l-Afïa, marcha contre les envahisseurs, et s'étant assuré le concours du peuple de Fez et l'appui des Zenata, lesquels venaient de perdre [leur chef] Moannecer le maghraouien, il rencontra l'armée almoravide auprès du Ouadi-Safîr et la mit en

pleine déroute. Youçof-Ibn-Tachefin leva aussitôt le siége du château de Fazaz, et alla emporter d'assaut la ville de Fez après avoir dispersé les troupes zenato-miknaciennes qu'El-CacemIbn-Mohammed avait voulu lui opposer. Passant ensuite dans le pays des Miknaça, il s'empara de la forteresse de Teçoul et tua El-Cacem.

Parmi les ouvrages que nous possédons sur l'histoire du Maghreb, il y en a qui placent la mort d'Ibrahim, fils de Mouça-IbnAbi-l'Afia, en l'an 405 (4044-5). Ibrahîm eut pour successeur un fils nommé Abd-Allah ou Abd-er-Rahman. Celui-ci mourut en 430 (4038-9), laissant l'autorité à son fils Mohammed. ElCacem, fils de Mohammed, succéda au pouvoir après la mort de son père et perdit la vie à Teçoul en l'an 463 (1070-4), quand cette forteresse succomba aux assauts des Almoravides. La chute de la dynastie maghraouienne entraîna celle des Miknaça.

Encore de nos jours on trouve dans les montagnes de Tèza quelques fractions de la grande tribu des Miknaça. Elles ont continué à rester dans leur ancien territoire, bien que les différentes dynasties qui se sont succédées en Maghreb leur aient fait une guerre acharnée, et que plusieurs autres peuples soient venus se fixer dans leur voisinage. Ils sont renommés pour l'importance des impôts [dont ils ont reçu la concession] et pour la fierté de leur caractère. Les grands services qu'ils ont rendus au gouvernement dans ses expéditions militaires leur ont même acquis la faveur toute particulière de la dynastie régnante. Leurs cavaliers se comptent par centaines. Quelques débris de la tribu de Miknaça se trouvent dispersés dans l'Ifrîkïa et le Maghreb central, mais ils se sont mêlés avec les diverses peuplades qui habitent ces provinces.

Ayant terminé la notice des tribus issues d'Ourstif, nous passerons aux Berbères-Beranès 1, peuples dont nous avons à traiter l'histoire.

HISTOIRE DES BERBÈRES-BERANÈS [DESCENDUS DE BERNÈS].

Nous commencerons cette section de notre ouvrage par un 4 Pour Beranès l'auteur a mis, par mégarde, Zenata.

chapitre sur les Hoouara et par l'indication des branches dans lesquelles ce peuple se partagea. Nous y ajouterons une esquisse de leur histoire jusqu'à l'époque de leur dispersion dans les provinces de l'Ifrîkïa et du Maghreb.

Les généalogistes arabes et berbères s'accordent à regarder la tribu de Hoouara comme issue de Hoouar, fils d'Aurîgh, fils de Bernès. Nous devons toutefois faire observer que parmi eux il y en a qui prétendent rattacher les Hoouara aux Arabes du Yémen, en les faisant descendre tantôt d'Amela, rejeton de Codâa, et tantôt d'El-Misouer, fils d'Es-Sekacek, fils de Ouathel, fils de Himyer. Veulent-ils exposer cette filiation avec plus de précision, ils disent qu'El-Misouer était fils d'Es-Sekacek, fils d'Achrès, fils de Kinda, et que Hoouar était fils d'Aurîgh, fils de Khabbouz, fils d'El-Mothanna, fils d'El-Misouer. Ils donnent aussi le nom d'Enfants de Tiski aux Hoouara, aux Sanhadja, aux Lamta, aux Guezoula et aux Heskoura, et ils regardent El-Misouer comme l'aïeul de toutes ces tribus.

Selon eux, El-Misouer arriva, par hasard, au milieu des Berbères, et s'étant arrêté chez les fils de Zeddjîk [ou Zahhîk-] IbnMadghis-el-Abter; savoir, Loua, Darîs, Addas et Nefous, il obtint d'eux, en mariage, leur sœur Tîski-el-Ardja (la boiteuse). De cette union, disent-ils, naquit El-Mothenna, père de Hoouar. Après [la mort d'] El-Misouer, Tîski épousa Acîl, fils de Zéazâ et père des Sanhadja, des Lamta, des Guezoula et des Heskoura, renseignement que nous aurons plus tard l'occasion de rappeler. Ainsi ces quatre individus étaient frères utérins d'El-Mothanna, et ils formaient avec lui la famille appelée les Enfants de Tiski.

Les mêmes généalogistes disent : « D'El-Mothenna, fils d'El» Misouer, naquit Khabbouz, lequel engendra Rîgh, le même que >> l'on nomme Aurigh - Ibn - Bernès, et de lui se propagèrent >> toutes les branches des Hoouara. » Ils rapportent ensuite que cette tribu fut appelée Hoouara parce qu'El-Misouer, s'étant trouvé en Maghreb après avoir parcouru plusieurs pays, avait prononcé ces paroles : « nous voici hoouarisés » [c'est-à-dire, arrrivés où nous ne pensions pas nous rendre.]

Voilà ce que racontent certains généalogistes berbères, mais

je dois déclarer, tout en avouant que Dieu seul en sait la vérité, que leur récit porte toutes les marques d'une histoire forgée à plaisir et que cela saute même aux yeux. Je trouve la confirmation de mon opinion dans les paroles des généalogistes berbères les plus exacts, tels que Sabec et ceux de son école : ils disent que les tribus issues d'Addas, fils de Zahhîk, rentrent toutes dans la catégorie de celles descendues de Hoouar; et cela pour la raison que celui-ci avait épousé la mère d'Addas après qu'elle eut perdu son mari Zahhîk, et qu'il avait élevé Addas. Or, dans la première manière de tracer la filiation de Hoouar nous voyons que Zahhîk devait être son ancêtre, car El-Mothenna, bisaïeul de Hoouar, était fils de Tîski, laquelle était fille de Zahhîk. Hoouar serait donc le cinquième descendant de Zahhîk; comment aura-t-il pu épouser la femme de ce même Zahhîk ? l'absurdité y est évidente. Quant à la seconde filiation de Hoouara, elle a paru à leurs généalogistes plus conforme à la vérité que la première.

Les tribus sorties de la souche de Hoouara sont très-nombreuses; et la plupart de celles qui tirent leur origine d'Aurîgh, père de Hoouar, portent aussi le nom de Hoouarides parce que Hoouar était le fils aîné et parce que sa renommée surpassait celle de ses frères. Aurîgh avait quatre fils : Hoouar, Maggher, Calden et Meld. Chacun d'eux fut l'aïeul de plusieurs tribus que l'on désignait collectivement comme les enfants de Hocuar.

Selon Ibn-Hazm, la tribu de Maggher se partagea en quatre branches : les Maouès, les Zemmor, les Keba et les Mesraï. A celles-ci Sabec-el-Matmati et ses disciples ajoutent les Ourîdjen, les Mendaça et les Kerkouda.

Les Calden formèrent quatre branches les Comsana, les Ourstîf, les Biata 1 et les Bel. Sur ce point, Sabec et Ibn-Hazm sont d'accord.

Les Meld se composèrent des Melîla, des Satat, des Ourfel, des Ouacîl et des Mesrata. Ibn-Hazm et Sabec, qui nous ont fourni les noms de ces ramifications, ajoutent qu'elles provien

4 Variante: Biana.

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