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La ville de Setif, métropole de la Mauritanie sitifienne, devait, à l'époque de sa splendeur, jouir d'une certaine importance. Les restes de son enceinte, tels qu'ils existaient encore au seizième siècle, permettaient, au rapport des historiens, d'évaluer son circuit à quatre mille mètres. Mais nous ne saurions affirmer si cette enceinte était antérieure ou postérieure au terrible tremblement de terre qui renversa Setif en l'an 419.

«Les secousses furent épouvantables, dit Saint Augustin. De sorte que tous les habitants furent obligés de rester cinq jours dans les champs, et que près de deux mille païens, terrifiés par le phénomène, demandèrent le baptême à grands cris. Voilà comment Dieu punit ceux qui ne veulent pas le servir (1). »

La ville, ravagée de nouveau par les Vandales, fut réédifiée par Salomon, ainsi que le constate l'inscription que nous avons rapportée ci-dessus; seulement le développement de la nouvelle enceinte n'avait plus que cent cinquante mètres de côté sur cent vingt.

Setif était le siége d'un évêché. L'Africa christiana de Morcelli nous a conservé le nom de :

Severus, évêque de Setif vers l'an 400;

Novatus, qui assista, à Carthage, à la conférence de 411 et au concile de 419;

Donatus, qui alla au concile convoqué, en 484, par Huneric, roi des Vandales;

Optatus, qui alla au concile convoqué, en 525, par Boniface, évêque de Carthage.

De nombreux et curieux monuments épigraphiques

(1) Saint Augustin, Sermon xix, no 6.

ont été découverts à Setif même, ou parmi les ruines qui couvrent la campagne environnante. Nous reproduisons l'inscription suivante, dédiée à Saint Laurent, martyr, et conservée avec soin dans l'église de Setif:

IN HOC LOCO SANCTO DEPOS
ITAE SVNT RELIQVIAE SANCTI
LAVRENTI MARTIRIS DIE III M N
AVG CONS HERCVLANI VC

DIE DOMINI DEDICANTE LAVRENTIO

USP MOR DOMANP CCCCXIII. AMEN

Les reliques de Saint Laurent, martyr, ont été déposées dans ce saint lieu, le 3 du mois d'août, jour de dimanche, de l'année provinciale 413, sous le consulat d'Herculanus. (Correspondant au 3 août 552 de l'ère chrétienne.)

Une autre pierre sculptée, également découverte à Setif, démontre que le culte de Mithra ou du dieu soleil, originaire de la Perse, ent aussi des disciples dans cette région de la Mauritanie. Cette pierre représente en ronde bosse, fortement accentuée, un jeune homme assis sur la croupe d'un taureau; sa main gauche saisit le museau de l'animal; de la main droite il lui enfonce un glaive dans le cou. Sa coiffure consiste en un bonnet phrygien; il porte un manteau jeté sur l'épaule gauche et flottant; la poitrine est cuirassée, et la jambe qui s'appuie à terre est revêtue d'un pantalon couvrant le pied. A la base du tableau, on voit un chien, un scorpion, un serpent, et, sur un des côtés, un oiseau. Deux banderoles en haut et en bas portent cette inscription:

DEO INVICTO MYTRE LEG I HERCULEA FEC.
COHS.X.ET.VII VOTVM. SOLVERVNT

L. A.

La deuxième légion surnommée l'Herculéenne a élevé ce monument au dieù invincible Mithra; la dixième et la septième cohorte en ont volontairement accompli le vœu.

Puisque nous avons parlé de monuments rappelant les croyances religieuses des temps antiques, il nous reste à mentionner d'autres vestiges d'un culte qui semble avoir eu en Afrique de nombreux adeptes. Ce sont les tombeaux circulaires, cromlechs ou autres, dits celtiques ou druidiques, dont l'existence a été signalée dans la Medjana et chez les Mahdid. La nécropole que l'on appelle Bel-Kerim, aux cent mille tours, située près de l'OuedZïatin, constate le passage d'une nombreuse génération dans ces contrées solitaires, où de rares bergers promè nent aujourd'hui leurs troupeaux (1).

Tout le pays de Setif est riche en ruines romaines. Les restes de villes, villages, châteaux-forts, fermes, tombeaux, couvrent le sol. Dans les vallées, ces grands débris vous arrêtent de lieue en lieue. Partout, ce sont de grandes pierres debout, formant les angles des maisons, les chambranles des portes, et reliées entre elles par des murs en pierres de taille de grand appareil. Les villes ont souvent une étendue de plus de cinquante hectares; les unes étaient entourées de remparts, les autres ouvertes. Il serait difficile de rechercher, avec le seul aide des Itinéraires, les noms des villes qui formaient les étapes de Setif à Lambèse, l'épigraphie les révélera quelque jour sur les lieux mêmes, quand des explorations sérieuses seront entreprises dans ces fouillis de décombres.

(1) Voir le travail de M. Payen, Annuaire de la Société archéologique de Constantine, année 1863.

M. Pelissier, dans l'Exploration scientifique de l'Algérie, indique, d'après les Itinéraires anciens, plusieurs voies romaines reliant Setif aux autres villes de la Numidie et de la Mauritanie. Celle allant à Cirta passait, d'après l'Itinéraire d'Antonin, par Cuiculi (Djemila),

Mileum (Mila).

Idicra,

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La Table de Peutinger indique, entre Cirta et Sitifi, une route qui doit être la même que celle d'Antonin, car elle a exactement le même développement de cent milles; mais sur laquelle un plus grand nombre de stations sont désignées. Ces stations sont :

Monte (Mons), - Cuicul Colonia (Djemilu),

Budelli,

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Caput

Berzeo, Fons Camerata (Ma

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halla des Beni-Guecha?), Nobas Fusciani, Mileum

Colonia (Mila),

-Numituriada, - - Aquartille.

La Table de Peutinger donne aussi une route de Sitifi à Theveste sans passer par Cirta. Cette route, jusqu'à Gasaupala, était la même que celle de Theveste à Cirta. Là, elle s'en séparait, et, laissant Cirta sur la droite, elle passait par les localités suivantes :

Ad Bubras, -Ad Centenarium,

Thenebreste,

Buduxi (Fedj Sila ?),

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Lucullianis, Salmana, Thadute (ruines de Tatoubt, chez les Zemoul?), Ad Saturnos, - Baccarus. On pourra retrouver plusieurs de ces stations dans les plaines des Sebakh, des Oulad-Abd-en-Nour et des Eulma. Je signale, entre autres, les ruines considérables que j'ai vues aux lieux dits Bou-Tekhematen, Gabel-Tarf, Biar-etTaïa, Bir-er-Raïan, Enchir-el-Atech, sur les bords du lac dit Chott-Saïda, Biar-Oulad-Atman. La plupart de ces emplacements de villes antiques se trouvent sur le par

cours de la route arabe allant de Setif à Batna (1). De Sitifi, la grande voie qui conduisait de Carthage å Césarée se dirigeait sur Auzia (Aumale), en passant par les stations suivantes :

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Messila) et enfin Ad-Aras et Tatilti.

Cette portion de la route passait au midi des Biban. L'Itinéraire d'Antonin indique deux routes qui, de Setif, conduisaient à Saldæ (Bougie).

La première passait par Horrea (Aïn-Rouâ), — Lesbi, — Tubusuctus (Tiklat).

La seconde avait, comme la première, soixante-dixneuf milles de développement. Elle passait par Ad Sava municipium, Ad Olivam, Ruha municipium.

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Enfin, la route de Sitifì à Igilgili, dont le développement était de quatre-vingts milles, passait par Satafi, Ad Basilicam,

Ad Ficum.

Peutinger fait passer un embranchement de cette route par Choba (Ziama).

(1) Voir, sur ces ruines, ma Monographie des Oulad-Abd-en-Nour.

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