Images de page
PDF
ePub

françaises. Ce rapport fit connaître l'inutilité de poursuivre la marche sur Zamora, où le maréchal avait eu le projet de se porter dans la journée du 26. Ce jour-là, le corps expéditionnaire fit tète de colonne à gauche et se rendit rapidement vers Sidi-Embarek, sur la route directe. de Setif aux Biban, dépassa cette route et alla prendre position sur l'Oued-Medjana. Des mesures furent prises immédiatement pour réparer le fortin de la Medjana, où devait être placée une garnison de cinquante tirailleurs indigènes.

Le 27, les deux divisions se rapprochèrent des montatagnes de Drâ-el-Ahmar, qui touchent aux Biban.

Des avis parvenus au maréchal lui avaient fait connaître que l'agent d'Abd-el-Kader cherchait à manœuvrer pour gagner les Portes de fer; la cavalerie de la deuxième division fut chargée de marcher contre lui, pendant que la colonne s'approchait des Biban. Amar avait pris la fuite lorsque le lieutenant-colonel Miltgen arriva sur l'emplacement où son camp avait été établi précédemment; les renseignements recueillis pendant les jours suivants firent connaître qu'il s'était enfoncé vers le sud, et que la bande qui le suivait s'était dispersée.

La colonne marcha pendant toute cette journée, à travers un pays d'un accès très-difficile: elle prit position, dans la soirée, auprès de la rivière salée qui coule dans les Portes de fer sur le territoire de la tribu kabile des Beni-bou-Kton.

Le 28, un ordre du jour fit connaitre que la division d'Orléans passerait les Portes de fer pour se porter sur Alger par les vallées de l'Oued-beni-Mansour et de son affluent, l'Oued-Hamza, et que la division Galbois rentre

[ocr errors]

rait dans la Medjana pour continuer les travaux entrepris, afin d'assurer la position de Setif dont l'occupation définitive avait été résolue.

A dix heures du matin, le duc d'Orléans, après avoir reçu les hommages des chefs kabiles, se dirigea sur les Biban, précédé par les chefs connus sous le nom de cheikhs des Portes de fer. La colonne y arriva à midi : le passage commença immédiatement; mais il ne put être terminé qu'à quatre heures du soir, par suite des difficultés que le terrain opposait à chaque pas. Après avoir franchi le passage, la colonne expéditionnaire se prolongea dans la vallée; mais, retardée dans sa marche par un violent orage, elle ne put arriver le soir à Beni-Mansour, et dut bivouaquer à une lieue et demie des Biban, sur la rive gauche de la rivière salée, dans la partie du cours de ce ruisseau qui porte le nom d'Oued-Mahalou.

Le 29, le temps, devenu meilleur, permit de se mettre en marche de bonne heure la colonne arriva à BeniMansour à dix heures du matin; elle avait hâte d'atteindre ce point; depuis deux jours, le manque d'eau potable s'était vivement fait sentir; hommes et chevaux avaient grand besoin de se désaltérer.

On se porta ensuite rapidement sur Hamza, et, au moment où on débouchait dans la vallée de ce nom, le khalifa d'Abd-el-Kader, Ahmed-ben-Salem, prit position sur la crète opposée à celle que suivait la colonne française. Le prince, après avoir fait occuper fortement par son infanterie les hauteurs qui dominent l'Oued-Hamza, lança sa cavalerie dans la vallée : les chasseurs et les spahis, conduits par le colonel Miltgen, gravirent rapidement la berge sur la crète de laquelle paraissaient les

cavaliers de Ben-Salem. Ceux-ci ne tardèrent pas à se replier sans tirer un coup de fusil, et le khalifa, dont ou apercevait les drapeaux, averti que le prince se dirigeait sur Alger, donna l'ordre à sa cavalerie de se retirer, se repliant sur Médéa et renonçant au projet qu'il avait sans doute formé de défendre la position de Hamza.

Dès que la cavalerie eut couronné les hauteurs que les Arabes abandonnaient, le prince, qui s'y était porté de sa personne, fit remonter la vallée à son infanterie et occupa Hamza, dont le fort était complétement abandonné,

Le fort de Hamza était alors un carré étoilé dont les revêtements étaient en partie détruits: les logements intérieurs, construits par les Turcs, n'existaient plus; onze pièces de canon, en partie enclouées, gisaient sur le sol; aucun n'avait d'affût, et l'armée n'y trouva aucun approvisionnement de bouche ou de guerre.

Il n'entre pas dans notre cadre de suivre davantage les opérations militaires de cette colonne. Après quelques brillants combats livrés aux Arabes qui tentaient de s'opposer à sa marche, elle arriva au Fondouk le 1er novembre. Le lendemain, le prince faisait son entrée à Alger aux acclamations de la population de cette ville.

Cependant le général Galbois, après avoir quitté le corps du prince royal, rétrograda sur Setif et fit pousser, avec la plus grande activité, les travaux de réparation des restes de fortifications romaines, qui prirent le nom de fort d'Orléans. L'expédition fut complétée par le retour de la colonne, qui rentra à Constantine en suivant la plaine des Eulma et des Oulad-Abd-en-Nour.

Une folle tentative d'une fraction de la tribu des Eulma fournit bientôt à la garnison de Setif l'occasion de se

distinguer. Dans la journée du 18 mars 1840, une centaine de cavaliers des Eulma se jetait à l'improviste sur un troupeau des Amer, qu'ils enlevaient après avoir làchement mutilé les bergers. Informé de cet acte de brigandage commis à une demi-lieue du camp, le colonel Froidefont, commandant de Setif, se lança sans tarder sur les traces de l'ennemi. Après une poursuite de près de six lieues, il fut atteint et abordé vigoureusement par la cavalerie, et tout ce qui portait les armes fut tué.

Quelques jours après, le colonel Froidefont partait de nouveau pour châtier la tribu des Aouamer, dont les hostilités continuelles inquiétaient les Amer, nos alliés. Le 21 avril, au point du jour, nos troupes se mettaient en marche, précédées par quatre cents cavaliers auxiliaires lancés à la poursuite des troupeaux des Aouamer, qui fuyaient vers les montagnes du Babor. Les Kabiles, en assez grand nombre, couronnaient déjà les hauteurs et faisaient un feu très-vif sur notre goum. L'infanterie entra bientôt en ligne, enleva toutes les positions et brûla les villages et les moulins des environs. Les Aouamer, en déroute, étaient poursuivis à outrance par les chasseurs du lieutenant Verillon.

Afin d'étendre notre autorité, et en même temps dans le but de protéger les populations qui s'étaient déclarées pour nous, on décida à cette époque la création d'un camp à Aïn-Turc, à huit licues à l'ouest de Setif. Le général commandant la province espérait s'appuyer sur ce poste permanent pour ramener l'ordre dans la Medjana, et redonner à notre khalifa Mokrani la prépondérance que son compétiteur Ben-Abd-es-Selam lui avait fait perdre. Il y avait encore un autre but c'était de faire de ce

:

camp la base des opérations sur les montagnes voisines, vers lesquelles les lieutenants d'Abd-el-Kader exerçaient plus particulièrement leur influence.

Ain-Turc est un point situé sur l'Oued-bou-Sellam, à l'entrée de cette rivière dans les montagnes kabiles, au nord de la plaine qui s'étend depuis le Guergour jusqu'aux montagnes des Rir'a, et, vers l'ouest, jusqu'aux Biban. Placé aussi sur une des routes qui vont de Setif à Bougie, ce poste semblait menacer les Kabiles d'une invasion prochaine, mais n'indiquait nullement la destination réelle, en vue de laquelle il était établi.

Le 3 mai 1840, le commandant Delpi de la Cipière recevait l'ordre de se rendre à Aïn-Turc avec cinq cents hommes du 62c de ligne. Lcs parapets du poste commençaient à peine à s'élever, lorsque les Kabiles, se voyant menacés dans leurs montagnes, où ils tenaient à vivre indépendants, firent de grands efforts pour s'opposer à la création du camp retranché. Dans les journées des 4, 6 et 7, ils se présentaient en grand nombre sur les hauteurs voisines, et tiraillaient sur la petite troupe avec acharnement. Ces diverses affaires réitérées semblaient n'être que le prélude de l'attaque générale, réservée pour la journée du 8. Ce jour-là, l'ennemi déploya des forces supérieures à celles qu'il avait précédemment engagées ; elles se composaient de sept ou huit mille Kabiles, dont une partie appartenait aux tribus des montagnes de Bougie. Un bataillon régulier, amené par un lieutenant d'Abdel-Kader, portant deux drapeaux, vint également prendre position en face d'Aïn-Turc. Le camp fut abordé avec impétuosité. Au moment où l'action était des plus sérieuses, le colonel Lafontaine arrivait de Setif amenant des trou

« PrécédentContinuer »