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nageoires), qu'on peut comparer à la grande voile d'un navire; par intervalles, il dresse la tête et lance par ses ouïes une colonne d'eau qui s'élève au-dessus d'une portée de flèche. Les marins, qui nuit et jour redoutent son approche, heurtent des morceaux de bois ou battent le tambour pour le tenir à distance. C'est à l'aide de sa queue et de ses nageoires qu'il saisit et porte à sa gueule les poissons dont il se nourrit; il la dilate de façon à ce que sa proie tombe au fond de son ventre.

THÈME 157e.

La Baleine (suite)

Dieu, pour réprimer les excès de ce monstre, dirige contre lui un poisson qui n'a qu'une coudée de long, et qu'on nomme lechk (K) (peut-être la leiche, famille des squales). Celui-ci s'attache à la racine de l'oreille (évent) de la baleine, qui, ne pouvant se débarrasser de son ennemi, plonge à une grande profondeur, se heurte contre le fond et finit par expirer; on voit alors son cadavre flotter à la surface de l'eau, semblable à une haute montagne. Lorsque le poisson nommé lechk s'attache à un bâtiment, la baleine malgré sa haute stature, n'ose s'approcher du navire, et prend la fuite à la vue de ce faible ennemi, dont l'attaque est toujours la cause de sa mort.

THÈME 158e.

La mule qui a peur des chameaux.

Un secrétaire du divan, homme que l'on recherchait pour ses connaissances littéraires et historiques, me racontait un jour, à Bagdad, qu'il avait acheté une mule d'une beauté et d'une agilité peu communes. C'était sa monture habituelle quand il vaquait à ses affaires et aux devoirs de sa place. Mais dès qu'elle rencontrait dans la rue des chameaux de charge bokhty (J), arabes, ou d'autre espèce, cette bête s'effarouchait, ruait et donnait un rude labeur à son cavalier. Cependant il fermait les yeux sur ce défaut, tant elle était agile et élégante (z), et d'ailleurs, comme il était lui-même d'une taille et d'un embonpoint extraordinaires, il n'aurait pu trou

ver une autre monture.

THÈME 159e.

La mule qui a peur des chameaux (suite.)

«Je passais un jour », ajoutait ce personnage, «près de Bab et-Tak (l) (porte de l'arcade), sous le règne de Moktadir-billah (UJ), au moment où l'on dressait et sellait les éléphants destinés à transporter Leit () ben Ali es-Saffar (l) et ses compagnons. Ce chef, qui s'était révolté contre le Sultan, venait d'être fait prisonnier dans le Fari

مونس الخادم) par l'eunuque Mounes ( بلاد فارس) stan

Tout à coup je vis une file entière de chameaux bokhty se disperser à la vue des éléphants et fuir rapidement sans écouter la voix de leur conducteur, tant leur épouvante était grande. Ma mule, voyant cette déroute, se met à ruer, elle se cabre et me jette à terre,

كجلد ثور منفوخ comme une outre gone de vent

Les chameaux venaient de se réfugier dans une ruelle sans issue(); la mule, après s'être débarrassée de moi, dans l'effroi que lui inspiraient les chameaux, pénètre dans la même ruelle».

THÈME 160e.

La mule qui a peur des chameaux (suite.)

«Les éléphants y arrivent sur ses traces. Dès qu'elle aperçoit ces énormes animaux, elle s'attache aux chameaux, se blottit au milieu d'eux, comme si elle avait passé sa vie avec eux, et s'accroupit avec la troupe tout entière. Au même moment, je fus aperçu et reconnu par quelques passants. Un valet pénétra dans la ruelle pour ramener la mule; mais il ne put l'en faire sortir qu'après que les éléphants se furent éloignés, et encore ne voulut-elle sortir qu'entourée de plusieurs chameaux. Je vous jure que, depuis ce jour, loin de les craindre, elle s'est familiarisée avec les chameaux comme si elle était de leur espèce, et

il semble qu'elle trouve leur taille bien exiguë, depuis qu'elle a vu la stature colossale des éléphants».

(Extrait des Prairies d'or de Maçoudi, 1o et 3e vol., traduction de M.M. Barbier de Meynard et Pavet de Courteille.)

THÈME 161e.

Assassinat du prince des Croyants Ali, fils d'Abou

Talib.

(ذكر مقتل امير المؤمنين على بن ابی طالب رضی

الله عنه)

En l'année 40 de l'hégire, une troupe de Kharidjites réunis à La Mecque s'entretenaient des guerres et des désastres qui les accablaient, lorsque trois d'entre eux convinrent de tuer Ali, Moawiah (e) et Amr, fils d'el-Asi (hell). Ils jurèrent d'un commun accord de ne pas abandonner la victime que chacun d'eux avait choisie, avant de l'avoir immolée, ou de périr dans cette entreprise. Le premier de ces conjurés était Abd er-Rahman, fils de Moldjem, de la famille de Toudjib (

-teamille étant com ابن ملجم وكان من تجيب

prise dans la tribu de Murad (), Abd er-Rahman portait le surnom de Muradi. Le second se nommait Haddjadj, fils d'Abd-Allah es-Sarimi (

),

,le troisième (البرك) surnommé Borek الله الصريمي

Zadaweih (l), affranchi des Benou'l-Anbar (

العنبر

THÈME 162e.

Assassinat du prince des Croyants Ali, fils d'Abou Talib (suite.)

Ibn Moldjem ayant déclaré qu'il voulait frapper Ali, Borek se chargea de Moawiah, et Zadaweïh d'Amr, fils d'el-Asi. La nuit du 17, ou, selon d'autres, du 21 du mois de ramadan, fut choisie pour l'exécution du crime. Abd er-Rahman, fils de Moldjem, se rendit aussitôt à Koufah (l), où rẻsidait Ali; et, à peine arrivé, il se présenta chez sa propre cousine nommée Kotam (), dont Ali avait tué le père et le frère à la bataille de Nehrewan

Ibn Moldjem ayant sollicité la main de cette النهروان

femme, une des plus belles de son temps, elle lui dit: «Je ne t'épouserai que si tu me prouves ta gé<< Tout ce que tu me demanderas, répondit-il, je te l'accorderai».

nérosité».

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THÈME 163e.

Assassinat du prince des Croyants Ali, fils d Abou

Talib (suite.)

« Je veux, continua Kotam, trois mille dirhems,

un esclave, une servante et la mort d'Ali».

« Tu

auras ce que tu désires; mais, quant à Ali, je ne crois pas que tu puisses t'en défaire».

<< Il me faut

son sang, répliqua cette femme; si tu le répands, tu assouviras ma vengeance, tes vœux seront en même

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