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Civil, et depuis la commune est administrée par un maire et un conseil municipal.

Le dernier dénombrement quinquennal de la population civile de Bougie (en 1866), a donné les chiffres sui

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L'effectif des troupes de la garnison qui, pendant les premières années de l'occupation, s'éleva jusqu'au chiffre de 5,000 hommes, a été considérablement réduit depuis la pacification de la Kabilie. Ces troupes sont placées sous les ordres d'un commandant supérieur, qui administre tout le pays formant le cercle de Bougie.

La soumission complète des montagnes place la ville dans les conditions les plus favorables; elle ne fut longtemps qu'un poste d'occupation militaire; mais aujourd'hui, elle peut se développer rapidement au milieu d'un pays tranquille.

Son marché ne tardera pas à reprendre l'animation qu'il devait avoir au moyen âge, lorsqu'il était fréquenté par les négociants de Pise, de Florence, de Venise, de Barcelone et de Marseille. Les nombreux produits que le Kabile retire de ses travaux industriels, de la culture de ses oliviers et de ses vergers, il a besoin de les écouler au dehors; au milieu de toutes ses ressources, d'ailleurs, il manque souvent des choses nécessaires à la vie, dont il ne possède, pour ainsi dire, que le superflu. Il ne

récolte pas suffisamment de grains pour nourrir sa famille; il manque de laine pour la vêtir; il possède des fruits à profusion, du miel; mais ce n'est encore que le superflu. Pour les choses indispensables, il est tributaire des voisins, et il a besoin d'eux encore pour tirer parti des récoltes de sa terre et des produits de son industrie aussi est-il commerçant. Les relations avec ces montagnards donnent donc à Bougie un commerce très étendu également avantageux aux Européens et aux populations indigènes.

La principale richesse des tribus de la vallée de l'ouedSahel et de celle du Bou-Sellam, est l'huile d'olive; il en arrive de très grandes quantités sur le marché de Bougie; dans une seule année, cinq millions de litres d'huile y ont été apportés.

Un chroniqueur arabe raconte que la première fois que les habitants de l'Afrique, récemment conquise par les musulmans, vinrent payer le tribut à leurs vainqueurs, un des capitaines arabes voyant apporter un sac de pièces d'or, demanda à un des contribuables comment ils gagnaient cet or. Celui-ci, cherchant autour de lui, aperçut un olivier, le montra à Abd-Allah et lui dit : « Voilà d'où nous tirons notre or. »

De nos jours, les Kabiles du pays de Bougie pourraient faire la même réponse pour expliquer le bien-être dont ils jouissent, car l'olivier tient le premier rang dans l'exploitation du sol sur les deux rives de la vallée de l'oued-Sahel. Il est très productif et donne, chaque année, d'abondantes récoltes. C'est là qu'il atteint son plus haut degré de prospérité et de développement. La circonférence de son tronc paraît phénoménale,

comparée à celle des oliviers du midi de la France. Des usines perfectionnées, établies dans plusieurs tribus par de hardis industriels européens, ont encore augmenté, depuis quelques années, le produit des olives, broyées jusqu'alors à l'aide de moulins indigènes tout-àfait défectueux. Quand les propriétaires kabiles auront leurs intérêts étroitement liés à ceux des Européens, le commerce des huiles atteindra à Bougie une extension immense.

Le miel, la cire, les fruits secs (figues et raisins), les caroubes et les peaux, figurent aussi au nombre des denrées apportées en abondance sur le marché.

L'exploitation des riches forêts qui couronnent les montagnes voisines, depuis l'Akfadou jusqu'aux BeniFour'al, dans lesquelles on peut à la fois récolter beaucoup de liége, de la résine, et extraire des bois propres aux constructions navales, est également en voie de progrès.

La région qui borde le littoral du golfe de Bougie est, sans contredit, celle qui possède les plus belles forêts de l'Algérie. Une puissante végétation la couvre de verdure; autant le versant sud de ce massif de montagnes paraît fauve et aride, autant la partie qui fait face à la mer, est pleine de sève et de vie. Sur de hautes collines sillonnées par de profonds ravins où murmurent constamment des eaux, qui tombent en cascades, abondent le pin, le cèdre et toutes les variétés de chênes mélangées à une infinité d'autres essences; mais l'arbre le plus estimé à cause de ses qualités résistantes, et aussi par les dimensions majestueuses qu'il atteint dans certains cantons, c'est le chêne zan, dit afarès (quercus castanei

folia), dont la société forestière algérienne, tire aujourd'hui, un si utile parti.

Il faut espérer que l'on pourra bientôt en dire autant de l'exploitation des mines de fer, cuivre et de plomb argentifère, qui existent également dans la contrée (1).

Dans le golfe de Bougie, notamment à hauteur de Ziama, exist des bancs de corail que l'on pourrait exploiter comme autrefois. La pêche du corail était jadis le privilége des Catalans, et, en 1446, un Barcelonais chargé de diriger cette industrie résidait encore à Bougie.

Du jour où nos colonnes expéditionnaires ont pénétré dans ces montagnes, tous les efforts ont tendu à créer des communications entre Bougie et l'intérieur. Là où ne se voyaient précédemment que d'étroits sillons tracés par le pied de l'homme, souvent impraticables en hiver et qu'on ne pouvait même pas appeler des sentiers, nos troupes ont ouvert des routes muletières :

En 1849, le colonel de Lourmel inaugurait les pre

(1) Pendant mes courses dans le cercle, j'ai reconnu les gisements minéralogiques dont voici le détail :

1o Mine de fer très-riche entre les Berbacha et les Beni-Sliman, exploitée par les Kabiles, à 12 lieues de Bougie;

2. Mine de fer très-riche chez les Beni-Seliman, près Kombita, à 14 lieues du port ;

3° Mine de plomb argentifère, chez les Beni-Djelil.— J'ai reconnu cette mine en 1852.- Les Kabiles ont cessé de l'exploiter, il y a environ 60 ans, à la suite d'un éboulement qui engloutit plusieurs hommes. On m'a assuré qu'elle était très-riche. Les échantillons que j'ai fait analyser ont confirmé cette opinion. - A 14 lieues;

4o De superbes échantillons de minerai de cuivre ont été apportés de Toudja. Les Kabiles n'ont pas voulu m'indiquer le gisement..... Et bien d'autres gisements dont j'ai entendu parler, mais que je n'ai point explorés.

miers chantiers de travailleurs, sur la route stratégique, projetée entre Bougie et Setif.

En 1852, la colonne d'observation, sous les ordres du général Maissiat, élargissait et améliorait cette même route; l'année suivante, les travaux étaient continués avec ardeur, et quatre caravanserails étaient construits, de distance en distance, pour servir de gîtes d'étapes aux voyageurs.

Les travaux, suspendus pendant la guerre d'Orient, étaient repris en 1856 et continués durant trois années consécutives; le passage par les crêtes des Guifsar présentant de grands inconvénients, avait été abandonné, et un autre tracé par les Beni Seliman jugé préférable; mais ces routes manquant les unes et les autres de travaux d'art et de soins permanents, ne tardaient pas à devenir impraticables, même, aux muletiers, à cause des éboulements causés par la fonte des neiges.

Depuis, M. l'ingénieur de l'Epinay a étudié le tracé d'une nouvelle route définitive, actuellement en exécution, et qui ne tardera pas à être achevée. Le tracé de M. de l'Epinay passe par le Chabet el-Akhera, et aboutit au littoral en longeant la vallée de l'Oued Aguerioun. Il offre, sur celui des anciennes routes, le double avantage d'être d'abord plus court, puisque Setif ne sera plus qu'à 72 kilomètres de la mer, et ensuite de se maintenir beaucoup moins longtemps dans la région où les neiges peuvent interrompre la circulation. Cette voie de communication, ouverte pour relier Bougie et Setif, intéresse ces deux villes au même degré; elle rendra son ancienne importance au port, qui servira de débouché à toutes les denrées des plaines fertiles de Setif, de la

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