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LES BENI-GOMYI, TRIBU ABD-EL-OUADITE, SE REVOLTENT, DANS LE SOUS, CONTRE LE GOUVERNEMENT MERINIDE.

Les Beni-Gommi, fraction de la tribu des Aulad-Ali, laquelle appartient à la famille d'Abou-l-Cacem, forment une des branches de la tribu des Abd-el-Ouad. Ils enrent autrefois pour chef Kendouz, fils de....., fils de Gommi. Quand le commandement des Aulad-Ali échut à Zian-Ibn- Thabet Ibn-Mohammed, de la famille des Tâ-Allah, le nouveau chef eut à soutenir une lutte contre Kendouz, afin de conserver le pouvoir que Dieu lui avait départi, mais il traita avec trop d'indifférence les efforts de son rival. Ayant pris les armes pour combattre quelques pertubateurs abd-el-ouadites qui s'étaient ligués contre lui, il mourut de la main de Kendouz. Le commandement des Aulad-Ali passa alors Djaber-Ibn-Youçof-Ibn-Mohammed et, après avoir appartenu successivement à plusieurs chefs, il rentra dans la famille de Thabet-Ibn-Mohammed. Ce fut Abou-Ezza-Zegdan, fils de Zian [et petit fils de Thabet], qui obtint le pouvoir, mais il n'en jouit pas longtemps avant de mourir. A cette époque, les Aulad-Gommi et les descendants de Tâ-Allah venaient d'oublier leurs torts réciproques et de se réunir en un seul peuple.

Yaghmoracen, fils de Zian, reçut alors le commandement des Tâ-Allah et amena toutes les tribus abd-el-ouadites à reconnaître son autorité. Ayant ensuite pris des mesures afin de venger la mort de son père, il fit dans sa tente les préparatifs d'un grand festin auquel il convia tous ses frères. Kendouz, qui avait donné la mort à Zian, s'y rendit aussi, sur l'invitation qu'il avait reçue. Quand tout le monde fut assis, les fils de Zîan se jetèrent sur lui et le tuèrent à coups de sabre. La veuve de Zìan, à laquelle ils envoyèrent la tête de leur victime, assouvit alors sa haine et sa soif

'Il faut remplir ce blanc par les mots Abd-Allah.

de vengeance en mettant cette offrande sanglante à la place d'une des trois pierres qui servent à soutenir la marmite sur le feu 1.

Les fils de Kendouz [et leurs gens] prirent la fuite pour éviter le sort que Yaghmoracen leur destinait et, après un long voyage, ils arrivèrent à la cour d'Abou-Zékérïa-Ibn-Abd-el-Ouahed, le sultan hafside. Pendant quelques années, ils y restèrent sous le commandement d'Abd-Allah, fils de Kendouz; puis, entraînés par l'amour de la vie nomade et par le désir de rentrer au milieu des Zenata, ils repartirent pour le Maghreb et s'unirent aux Beni-Merin, rivaux en tout temps des Beni-Abd-el-Ouad. YacoubIbn-Abd-el-Hack accueillit Abd-Allah-Ibn-Kendouz avec une bienveillance extrême et le combla de bonheur en lui concédant, aux environs de Maroc, un territoire assez vaste pour fournir à l'entretien et aux besoins de toute la ribu. Il confia aussi ses troupeaux de chameaux aux soins des frères Hassan et Mouça, fils d'Abou-Said-es-Sobeihi, dépendants et serviteurs de la famille Kendouz. Dès-lors, Abd-Allah, chef des Beni-Gommi, jouit d'une haute faveur auprès du prince mérinide; aux audiences solennelles on lui accordait la place d'honneur et, dans presque toutes les affaires importantes, c'était à lui qu'on avait recours. Ainsi, en l'an 665 (1266-7), il fut chargé de se rendre à la cour d'ElMostancer en compagnie avec Amer-Ibn-Idris, neveu du souverain.

Les Beni-Kendouz [Beni-Gommi] continuèrent assez longtemps à jouir de leur bonne fortune et à habiter le Maghreb-el-Acsa, où ils furent mis au nombre des tribus mérinides. Après la mort d'Abd-Allah-Ibn-Kendouz, le commandement passa à son fils

Omar.

A l'époque où [Abou-Yacoub-] Youçof-Ibn-Yacoub avait emporté sur les Beni-Abd-el-Ouad et les tenait bloqués dans Tlemcen, les Beni-Merîn et leurs alliés exprimaient le plus grand dédain pour toute la race abd el-ouadite; anssi, les Beni-Kendouz, blessés dans leur amour-propre, répudièrent l'autorité du sultan

Voy. t. I, pages 329, 492.

en l'au 703 (1303-4), et passèrent dans la province de Haha. L'année suivante, Yaich-tbn-Yacoub, gouverneur de Maroc, se mit en campagne et leur livra une bataille à Tadert, puis, ayant vu qu'ils persistaient dans leur rebellion, il les attaqua encore la même année, près de Tamatrit, et leur infligea un châtiment tellement sévère que leur puissance en fut totalement brisée. Il tua aussi un grand nombre de ces Abd-cl-Ouadites à IrgharenBamka', et, après avoir porté ses armes dans toutes les parties du Sous, il détruisit la ville de Taroudant.

Cette métropole servait alors de résidence à Abd-er-RahmanIbn-el-Hacen-Ibn-Yedder, rejeton d'une famille d'émirs qui avaient gouverné le Sous au nom de la dynastie fondée par Abdel-Moumen. Après la chute des Almohades, Abd-er-Rahman essuva une alternative de succès et de revers dans une guerre qu'il eut à soutenir contre les Chebanat et les Beni-Hassan, tribus appartenant à la branche des Arabes-Makiliens. En l'an 668 (1269-70), Ali-Ibn-Yedder, oncle d'Abd-er-Rahman, perdit la vie dans un de ces combats, et, quelque temps après, celui-ci le remplaça dans le commandement. Jusqu'au moment où YaïchIbn-Yacoub soumit le Sous et détruisit Taroudant, Abd-er-Rahman résista vigoureusement aux Arabes. Plus tard, il parvint à rétablir son autorité et, en 706 (1306-7), il releva cette ville de ses ruines.

La famille Yedder prétend avoir habité le Sous depuis l'époque où l'avant-garde des [premier conquérants] arabes y pénétra, et elle déclare que le commandement lui a toujours appartenu et s'est transmis de père en fils. Sous le règne d'Abou-Einan et sous celui de son frère, Abou-Salem, je rencontrai à Fez un vieux eheikh, fils de cet Abd-er-Rahman, lequel m'assura que cela était parfaitement vrai et que les Beni-Yedder descendent d'AbouBekr-es-Siddic [le successeur immédiat de Mahomet]. Dieu sait ce qui en est!

از غارن ناكما

Variante: Argharek-Takma. Si nous lisons Izgharen'n-Egma, nous aurons un nom purement berbère qui signifie les p'aines du frère.

Pour l'histoire des Beni-Yedder voyez tome 1, page 276.

Quant aux Beni-Kendouz [Beni-Gommi], ils vécurent dispersés dans les déserts du Sous jusqu'à la mort du sultan [Abou-Yacoub]. Ayant alors fait leur soumission, ils obtinrent du gouvernement mérinide l'oubli de leurs fautes passées et la restauration de leurs priviléges. Depuis lors, ils ont toujours servi cet empire avec un zèle et un dévouement parfaits.

IBN-EL-MILIANI FAIT MOURIR PAR UNE TRAHISON LES CHEIKAS DES TRIBUS MASMOUDIENNes.

Dans notre chapitre sur les Maghraoua de la seconde race, nous avons fait connaître l'origine d'Abou - Ali - el - Milîani, et mentionné comment les troupes hafsides l'expulsèrent de Miliana1, ville dont il s'était emparé. Yacoub-Ibn-Abd-el-Hack, sultan des Beni-Merin, l'accueillit alors de la manière la plus honorable et lui concéda la ville d'Aghmat à titre d'aliments. Ibael-Miliani y fixa son séjour et, quelque temps après, il viola les tombeaux des rois almohades et insulta leurs cadavres. Le public, ainsi que le sultan, furent très-scandalisés de cette profanation et les tribus masmoudiennes en fureut tellement indignées qu'elles cherchèrent la mort de celui qui l'avait commise. Quand AbouYacoub Youçof succéda à son père, Ibn-el-Miliani fut chargé par le nouveau souverain de percevoir l'impôt chez les Masmouda et, comme il remplit son devoir très-mal, les cheikhs masmoudiens l'accusèrent auprès du sultan de s'être approprié les sommes qu'il avait reçues. Obligé de rendre ses comptes, il fut convaincu de péculat et chassé de la capitale après avoir subi un emprisonnement. Il mourut en l'an 686 (1287).

Son neveu, Ahmed-Ibn-el-Miliani, entra au service du sultan

1 Voy. tome ш, page 352 et tome ш, page 315.

2 Voy. page 83 de ce volume.

en qualité de secrétaire et dut au privilége de son office l'honneur de se tenir à la porte du palais et de faire partie de la maison royale. [Pendant le siége de Tlemcen], le sultan eut à se plaindre des cheikhs masmoudiens et transmit à son fils, Ali, émir de Maroc, l'ordre d'emprisonner Ali-Ibn-Mohammed, chef des Hintata, et Abd-el-Kerîm-Ibn-Eïça, chef des Guedmioua, ainsi que leurs fils et leurs serviteurs. Ahmed-Ibn-el-Miliani, ayant eu connaissance de cette circonstance, se hâta d'en profiter afin de venger son oncle. [Ici nous devons faire observer que] tous les écrits émanant du sultan tenaient leur validité du paraphe impérial dont ils étaient revêtus et, comme les secrétaires du gouvernement avaient la réputation d'une probité à toute épreuve, le sultan ne faisait aucune distinction entre eux; aussi, au lieu d'avoir un secrétaire particulier, chargé d'apposer le paraphe, it leur laissa à tous la faculté de tracer cette marque sur les pièces qu'ils venaient de transcrire. En l'an 697 (1297-8), Ibn-el-Milian! rédigea au nom de son maître, une lettre qui ordonnait à l'émir de Maroc de faire mourir les cheikhs masmoudiens sur le champ, sans leur accorder un instant de répit. Ayant ensuite apposé le paraphe à cet éérit, il y ajouta le cachet et l'expédia par un courrier. Aussitôt après, il s'enfuit à la Ville-Neuve [de Fez], au grand étonnement du public.

A la lecture de cette dépêche, le fils du sultan fit tirer de prison et envoya à la mort Ali-Ibn-Mohammed, Abd-el-Kerîm-bn-Eïça, Ali, Eïça et Mansour, tous les trois fils du précédent, et Abd-elAziz, son neveu. Après cette exécution, il ordonna à son vizir de partir en toute hâte et d'en rendre compte au sultan. Ce monarque éprouva une telle indignation en apprenant la nouvelle qu'il tua le vizir à l'instant même et expédia l'ordre de mettre aux arrêts l'émir son fils. Ibn-el-Miliani, sur lequel il voulut faire tomber tout le poids de sa colère, avait déjà eu la précaution de disparaître et de chercher un asile dans Tlemcen. Après le siége de cette ville, il quitta ses protecteurs, les descendants de Yaghmoracen, et alla mourir en Espagne.

Depuis cette époque, les sultans mérinides n'accordent qu'à un seul individu la faculté de parapher leurs mandats, et ils choi

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