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avènement au trône. Ahmed, son frère et successeur, exerça l'autorité souveraine jusqu'à l'an 309 (924-2), quand Messala-IbnHabbous, général d'Obeid- Allah-el-Mehdi, et commandant de l'armée ketamo-miknacienne, soumit encore le Maghreb. S'étant emparé de Sidjilmessa, il fit prisonnier Ahmed -Ibn-Meimoun et donna le commandement de la ville à un cousin de celui-ci, nommé El-Motezz. Le nouveau gouverneur, qui était fils de Mohammed, fils de Bessader, fils de Midrar, se déclara indépendant bientôt après sa nomination. Il mourut en 324 (933), peu de temps avant la mort d'El-Mehdi. Abou'l-Montacer-Mohammed, fils et successeur d'El-Motezz, mourut au bout de dix [jours] et son fils, El-Montacer-Semgou, fut revêtu de l'autorité souveraine. Comme ce prince était très-jeune, sa grand'mère s'empara des rênes du gouvernement, mais au bout de deux mois, elle se les laissa arracher par Mohammed, fils d'El-Feth et petit-fils de Meimoun.

Pendant ces derniers temps, les Fatemides avaient eu à combattre Ibn-Abi-'l-Afia et à comprimer les mouvements qui eurent lieu à Tèhert, et comme l'insurrection d'Abou - Yezid survint ensuite et les empêcha de porter leurs armes dans les provinces éloignées, Mohammed en profita pour se rendre indépendant. Il colora cette démarche en faisant célébrer la prière publique au nom du khalife abbacide. Ayant alors renoncé à la religion des kharedjites, il embrassa la croyance orthodoxe des sonnites et prit le surnom d'Es - Chaker - Lillah (le reconnaissant envers Dieu). Il fit même battre monnaie portant son nom et son titre honorifique. Ces pièces furent appelées dirhems chakeriens, à ce que nous apprend Ibn-Hazm.

Le même auteur nous fournit, au sujet de ce prince, les renseignements suivants : « Il gouverna avec une justice admirable ; » mais, quand les Fatemides furent parvenus à comprimer les » révoltes qui avaient occupé jusqu'alors toute leur attention, il » se vit menacer par Djouher-el-Kateb, général de Moëzz-li-Dîn» Illah-Mådd, qui, en l'an 347 (958-9), marcha contre le Ma>> ghreb à la tête d'une armée composée de Ketamiens, de Sanhadjiens et de troupes auxiliaires. Sidjilmessa succomba, et

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>> Mohammed-Ibn-el-Feth se réfugia dans Tasguedat, château » situé à quelques milles de la capitale. Peu de temps après, il pénétra dans Sidjilmessa sous un déguisement, mais il fut

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reconnu et dénoncé par un homme de la tribu de Matghara. >> Djouher le fit arrêter et envoyer à Cairouan avec Ahmed-IbnBekr, seigneur de Fez; puis, il s'y rendit aussi.»>

Les émissaires des Oméïades parvinrent ensuite à soulever le Maghreb contre les Fatemides et à faire reconnaître aux Zenata la souveraineté d'El-Hakem-el-Mostancer. Alors un fils d'Es-Cha`ker s'empara de Sidjilmessa et prit le titre d'El-Montacer-Billah (soutenu par la grâce de Dieu). En l'an 352 (963), il fut détrôné par son frère, Abou-Mohammed, qui prit le titre d'El-Motezz-Billah (l'exalté par l'appui de Dieu). Sous son règne la puissance des Miknaça tomba en décadence et céda devant celle des Zenata. En l'an 366 (976-7), Khazroun-Ibn-Felfoul, prince de la tribu de Maghraoua, marcha contre Sidjilmessa, défit l'armée qu'Abou-Mohammed-el-Motezz avait menée contre lui, et s'empara de la ville et du trésor royal. Abou-Mohammed mourut sur le champ de bataille, et sa tête fut envoyée à Cordoue avec la dépêche qui annonçait cette victoire. El-Mansour-Ibn-AbiAmer, qui venait d'être chargé des fonctions de grand-chambellan à la cour des Oméïades, vit attribuer à sa haute fortune tout l'honneur du succès que son général avait rapporté. Khazroun obtint alors de lui le gouvernement de Sidjilmessa et il y fit célébrer la prière publique au nom du khalife Hicham; de sorte que, pour la première fois, l'autorité des Oméïades fut reconnue dans toutes les villes du Maghreb-el-Acsa. Dès lors la puissance des Midrarides et des Miknaça disparut tout-à-fait et fut remplacée par celle des Maghraoua et des Beni-Ifren, ainsi que l'on verra dans l'histoire de ces peuples.

HISTOIRE DES BENI-ABI-'L-AFÏÁ, DYNASTIE MIKNACIENNE QUI RÉGNA A TEÇOUL.

Cette portion de la tribu de Miknaça qui vivait en nomade et parcourait les territoires du Moulouïa, de Guercîf et de Melîla ainsi que les plateaux qui avoisinent Tèza, Teçoul et Lokaï,

reconnaissait pour chefs les descendants d'Abou-Bacel, fils d'Abou-'d-Dahhak, fils d'Abou-Izzoul. Ce furent eux qui fondèrent la ville de Guercîf et le ribat de Tèza. Depuis la première invasion des Musulmans ils continuèrent à fréquenter les mêmes localités, et dans le troisième siècle de l'hégire ils eurent pour chefs Messala, fils de Habbous, et Mouçà, fils d'Abou'-l-Afïa et petit-fils d'Abou-Bacel. Sous le gouvernement de Messala, leur puissance accrut à un tel point qu'ils soumirent toutes les peuplades berbères du territoire situé entre Tèza et Lokaï ; ils soutinrent même plusieurs guerres contre les Idrîcides, princes du Maghreb. Les victoires qu'ils remportèrent sur cette dynastie, qui était alors en pleine décadence, les rendirent maîtres d'une grande partie des plaines de ce pays.

Quand Obeid-Allah le fatemide étendit sa domination sur le Maghreb, ils le secondèrent en partisans dévoués; aussi, Messala-Ibn-Habbous étant devenu un des principaux généraux de ce monarque, obtint pour lui-même le gouvernement de Tèhert et du Maghreb central. En l'an 305 (917-8), Messala envahit le Maghreb-el-Acsa, s'empara de Fez, occupa Sidjilmessa et força Yahya-Ibn-Idris à reconnaître la souveraineté d'Obeid-Allah. Ayant alors laissé ce prince à Fez en qualité d'émir, il concéda les autres villes du Maghreb et les plaines de cette contrée à son propre cousin, Mouça-Ibn-Abi-'l-Afïa qui, en sa qualité d'émir des Miknaça, gouvernait déja, depuis quelque temps, Teçoul, Téza et Guercîf.

Après le retour de Messala à Cairouan, Yahya-Ibn-Idris commença des hostilités contre Mouça-Ibn-Abi-'l-Afïa, pour le châtier d'avoir aidé le général fatemide à renverser la puissance des Idricides. En l'an 309 (924), Messala rentra en Maghreb à la tête d'une armée, et cédant aux instances d'Ibn-Abi-l'Afïa, il marcha contre Yahya et l'expulsa de Fez après l'avoir forcé à racheter sa liberté au prix de tous ses trésors. L'émir déposé se réfugia auprès de ses cousins, les princes de Basra et du Rif.

Alors Messala installa Rîhan le ketamien dans le gouvernement de Fez, et s'en retourna à Cairouan où il mourut.

Dès ce moment, Ibn-Abi-'l-Afia devint tout puissant en Maghreb.

En l'an 313 (925-6), El-Hacen, fils de Mohammed-Ibn-elCacem-Ibn-Idrîs, prince d'une bravoure extraordinaire et surnommé El-Haddjam (le phébotomiste), parce qu'il frappait toujours ses adversaires dans la veine du bras, réussit à surprendre la ville de Fez, à en tuer le gouverneur, Rîhan, et à s'y faire reconnaître comme souverain. Ibn-Abi'l-Afïa entreprit de le comhattre, mais il perdit son fils, Minhal-Ibn-Mouça, et deux mille de ses Miknaciens dans une bataille qui eut lieu à Ouadi-'l-Matahen (rivière des moulins), dans la plaine d'Addad, entre Tèza et Fez. A la suite d'une nouvelle rencontre, El-Haddjam subit une défaite, et rentra à Fez avec les débris de son armée. Il y succomba, victime d'une trahison indigne : Hamed-Ibn-Hamdan-elHemdani, 1 l'officier auquel il avait confié le commandement du quartier des Cairouanites, le jeta dans les fers et livra ensuite [cette partie de] la ville à Ibn-Abi-l-Afia. Ce chef, qui était accouru en toute hâte sur l'invitation de Hamed, tourna aussitôt ses armes contre le quartier des Andalous et s'en empara. AbdAllah-Ibn-Thâleba-Ibn-Mohareb-Ibn-Aboud, gouverneur de cette moitié de la ville, y trouva la mort.

Le vainqueur donna à Mohammed-Ibn-Thâleba, frère d'AbdAllah, le commandement du quartier des Andalous et somma Hamed-Ibn-Hamdan de lui livrer El-Haddjam. Cet homme ressentit une telle répugnance à laisser verser le sang d'un rejeton du Prophète, qu'il fit évader son prisonnier. El-Haddjam tâcha alors de descendre du haut de la muraille au moyen d'une corde, mais ayant eu le malheur de se laisser tomber, il se cassa la jambe et mourut trois jours après, dans le quartier des Andalous où ses amis l'avaient transporté secrètement. Hamed luimême dut se retirer à El-Mehdïa pour éviter la colère d'IbnAbi-'l-Afia.

Maître de Fez et du Maghreb entier, Ibn-Abi-'l-Afïa força les

1 L'auteur du Cartas ajoute que cet homme appartenait à la tribu berbère des Auréba.

Idrîcides à se réfugier dans leur forteresse de Hadjer-en-Nesr, auprès d'El-Basra. Il alla ensuite les y attaquer à plusieurs reprises, et les ayant fait bloquer par un corps de troupes sous les ordres d'[Ibn] Abi-'l-Feth, un de ses généraux, il partit, l'an 349 (934), pour Tlemcen. Avant de se mettre en marche, il choisit son fils Medîn pour lieutenant, et l'établit dans le quartier des Cairouanites comme gouverneur du Maghreb-el-Acsa. Il remplaça en même temps Mohammed-Ibn-Thâleba, commandant du quartier des Andalous, par Toual - Ibn-Abi - Yezîd. Arrivé à Tlemcen, il en détrôna le souverain, El-Hacen, fils d'Abou'l-Aïch, fils d'Eïça, fils d'Idris, fils de Mohammed, fils de Soleiman-Ibu-Abd-Allah. Celui-ci était entré en Maghreb quelque temps après son frère Idris l'ancien. El-Hacen se retira à Melila, île [située près] du Molouïa, et Ibn-Abi-'l-Afïa reprit la route de Fez.

Le khalife [oméïade] En-Nacer s'étant déjà acquis beaucoup de partisans en Maghreb, essaya alors, par des promesses trèsséduisantes, de gagner l'appui d'Ibn-Abi-'l-Afïa, et parvint à le détacher du parti des Fatemides. Obeid-Allah-el-Mehdi apprit bientôt que son ancien serviteur venait de faire proclamer la souveraineté d'En-Nacer du haut de toutes les chaires du Maghreb, et pour punir cet acte de trahison, il y envoya une armée sous la conduite du général miknacien, Hamid-Ibn-Isliten, neveu de Messala et commandant militaire de Tèhert. Hamid se mit en campagne, l'an 321 (933), et ayant rencontré Ibn-Abi-'l-Afïa dans la plaine de Messoun, il parvint, après quelques jours d'escarmouches, à le surprendre dans une attaque de nuit.

Ibn-Abi-'l-Feth, averti que son maître, Ibn-Abi-'l – Afïa, s'était réfugié dans Teçoul, leva précipitamment le siége de Hadjer-en-Nesr et abandonna son camp aux troupes de la forteresse qui s'étaient mises à sa poursuite. Hamid continua sa marche vers Fez, et trouvant que Medîn, fils de Mouça, s'était enfui de cette ville pour rejoindre son père, il y installa comme gouverneur Hamed-Ibn-Hamdan, qui l'avait accompagné. Ayant ainsi soumis le Maghreb, il s'en retourna en Ifrîkïa.

Après la mort d'Obeid-Allah le fatemide une nouvelle révolte

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