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lls attribuent encore au même poète un morceau que nous reproduisons ici :

Berr s'est choisi une demeure loin de notre pays; Berr a quitté sa patrie pour se rendre à une autre destination.

On reproche à Berr son idiome étranger à Berr qui parlait si purement quand il habitait le Nedjd et le Hidjaz.

[C'est à présent] comme si nous et Berr n'avions jamais lancé nos coursiers en avant pour faire des incursions dans le comme si nous n'avions jamais partagé la proie et le

Nedjd; butin.

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Les savants d'entre les Berbères citent aussi les vers suivants d'Obeida-Ibn-Caïs-el-Ocaili :

O toi qui cherches à mettre la désunion entre nous; arrête! et que Dieu te dirige dans la voie des hommes de bien!

Je le jure! nous et les Berbères sommes frères; comme nous, ils remontent jusqu'au même noble aïeul.

Notre père, Caïs [fils de] Ghailan, est aussi le leur, c'est lui qui atteignit le faite de la gloire, pendant qu'au milieu des combats il abreuvait ses guerriers altérés [de sang].

Avec ses enfants nous formons une forte colonne, et nous restons frères, malgré les efforts de nos ennemis, gens que leurs qualités rendent méprisables.

Tant qu'il y aura des hommes, nous défendrons Berr, et Berr sera pour nous un fort appui.

Pour recevoir nos adversaires nous tenons prêts des coursiers sveltes et légers, des épées qui tranchent les têtes au jour du combat.

de

[Les enfants de] Berr, fils de Caïs, sont une noble troupe la race de Moder; ils se tiennent sur la cime de la gloire que s'est acquise cette illustre famille.

[La tribu de] Caïs est partout le soutien de la foi; elle est la plus noble branche de la famille de Mádd, si l'on examine sa généalogie.

Caïs a conquis une renommée qui sert de modèle aux autres tribus; à Caïs appartient l'épée dont les tranchants sont bien effilés.

par

Ils citent encore les vers suivants, tirés d'un poème composé Yezîd-Ibn-Khaled à la louange des Berbères :

O toi qui désires connaitre nos aïeux ! [descendants de] CaïsGhailan, nous sommes les enfants de la noblesse la plus an

cienne.

Tant que nous vivrons, nous serons fils de Berr le généreux ; rejetons d'une souche enracinée dans le sol de la gloire.

Berr s'est élevé un édifice de gloire dont l'éclat rejaillit au loin, et il nous a garantis contre les malheurs les plus graves. Berr réclame Caïs pour aïeul; et certes Caïs peut réclamer parenté avec Berr.

La gloire de Caïs est la nôtre; il est notre grand aïeul, le méme qui sut briser les chaines des captifs.

Caïs, Caïs-Gailan, est la source du vrai honneur et notre guide vers la vertu.

En fait de bonté [Berr] que le Berr de notre peuple te suffise; ils ont subjugué la terre avec la pointe de la lance.

Et avec des épées qui, dans les mains de nos guerriers ardents, abattent les têtes de ceux qui méconnaissent le bon droit.

Portez aux Berbères, de ma part, un éloge brodé avec les perles de la poésie la plus exquise 1.

Voici un récit provenant des généalogistes berbères et reproduit par El-Bekri et d'autres auteurs : « Moder avait deux fils; » El-Yas et Ghailan. Leur mère, er-Rebab, était fille de Hîda>> Ibn-Amr-Ibn-Mådd-Ibn-Adnan. Ghailan, fils de Moder, en>> gendra Caïs et Dehman. Les enfants de Dehman sont peu >> nombreux et forment une famille caïside à laquelle on donne >> le nom de Beni-Amama. Dans cette maison naquit une fille qui porta le nom d'El-Beha, fille de Dehman. Quant à Caïs, >> fils de Ghailan, il engendra quatre fils Sâd, Amr, Berr et

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1 Les morceaux de vers cités ici sont en fort mauvais arabe. Cette circonstance, jointe au decousu des idées et aux incorrections grammaticales qui les caractérisent, indique suffisamment qu'ils ont été fabriqués par des Berbères peu instruits, qui croyaient pouvoir relever T'honneur de leur nation en lui attribuant une origine arabe,

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>> Tomader, dont les deux premiers naquirent de Mozna, fille » d'Aced-Ibn-Rebiâ-Ibn-Nizar, et les deux derniers de Tamzîgh, » fille de Medjdel - Ibn - Medjdel - Ibn-Ghomar - Ibn - Masmoud. >> A cette époque, les tribus berbères habitaient la Syrie, et >> ayant les Arabes pour voisins, ils partagaient avec eux la jouissance des eaux, des pâturages, des lieux de parcours, et » s'alliaient à eux par des mariages. Alors Berr, fils de Caïs, >> épousa sa cousine, El-Beha, fille de Dehman, et encourut >> ainsi la jalousie de ses frères. Tamzigh, sa mère, femme >> d'une grande intelligence, craignant qu'ils ne le tuassent, >> avertit secrètement ses oncles maternels et partit avec eux » et son fils et son mari, pour la terre des Berbères, peuple >> qui habitait alors la Palestine et les frontières de la Syrie. » El-Beha donna à Berr-Ibn- Caïs deux enfants, Alouan et » Madghis. Le premier mourut en bas-âge, mais Madghis » resta. Il portait le surnom d'El-Abter et était père des Berbères-Botr. Toutes les tribus zenatiennes descendent de » lui. »

Les mêmes historiens disent que Madghis, fils de Berr, et surnommé El-Abter, épousa Amlel, fille de Ouatas-Ibn-MedjdelIbn-Medjdel-Ibn-Ghomar, et qu'il eut d'elle un fils surnommé Zahhîk [ou Zeddjik] Ibn-Madghis.

Abou-Omer-Ibn-Abd-el-Berr dit, dans son ouvrage intitulé Kitab-et-Temhid (classification des généalogies): « Une grande di>>versité d'opinion existe au sujet des origines berbères; mais >> la plus probable est celle qui représente ce peuple comme >> les enfants de Cobt, fils de Ham. Quand [Cobt] se fut établi >> en Égypte, ses fils en sortirent pour aller vers l'occident (Ma» greb), et ils prirent pour habitation le territoire qui s'étend de>> puis la frontière de l'Égypte jusqu'à l'Océan-Vert [l'Atlantique] » et la mer de l'Andalousie, en passant derrière Barca, et en se >> prolongeant jusqu'à la limite du grand Désert. De ce côté ils >> se trouvèrent dans le voisinage immédiat des peuples nègres. >> Une de leurs familles, les Louata, occupa le territoire de

Le texte arabe porte son fils sortit. (Voyez ci-devant, p. 163, note 4.)

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Tripoli; et une autre peuplade, les Nefza, s'établirent auprès » de cette ville. De là, ils s'avancèrent jusqu'à Cairouan, et pas>> sèrent en avant jusqu'à ce qu'ils parvinrent à Téhert, à » Tanger, à Sidjilmessa et au Sous-el-Acsa. Ces populations >> étaient des Sanhadja, des Ketama, des Dokkala, branche des >> Ouerglaoua [ou Zeglaoua], des Fetouaka, branche des Hes>> koura, et des Meztaoua. >>

Quelques investigateurs de l'antiquité racontent que Satan ayant semé la discorde entre les enfants de Cham et ceux de Sem, plusieurs conflits eurent lieu entre les deux races, et la guerre se termina par le triomphe de Sem et de ses fils. Cham s'en alla vers l'ouest (Maghreb) et entra en Égypte. Après la dispersion de ses enfants, il continua sa route vers le Maghreb et atteignit le Sous-el-Acsa. Ses enfants allèrent à sa recherche, et chacune de leurs bandes parvint à un endroit différent. N'ayant plus entendu parler de lui, ils s'établirent dans ces endroits et s'y multiplièrent. [Chaque] troupe de gens qui arriva chez eux y fixa son séjour et s'y multiplia aussi.

El-Bekri rapporte que Cham vécut 443 ans, mais d'autres historiens lui donnent 534 ans.

« Yémen, dit Es-Soheili, est la même personne que Yarob, >> fils de Cahtan. Ce fut lui qui exila les enfants de Cham dans >> le Maghreb après qu'ils eussent été les tributaires de Cout >> fils de Japhet. »

FIN DE L'EXPOSITION DES DIVERSES OPINIONS AU SUJET

DE L'ORIGINE DES BERBÈRES.

Sachez maintenant que toutes ces hypothèses sont erronées et bien éloignées de la vérité. Prenons- en d'abord celle qui représente les Berbères comme enfants d'Abraham, et nous en reconnaîtrons l'absurdité en nous rappelant qu'il n'y avait entre David (qui tua Goliath, contemporain des Berbères), et Isaac, fils d'Abraham et frère de Yacsan, le prétendu père des Berbères, qu'à peu près dix générations, ainsi que nous l'avons dit dans la première partie de cet ouvrage. Or, on ne saurait guère suppo

ser que dans cette espace de temps, les Berbères eussent pu se multiplier au point qu'on le dit.

L'opinion qui les représente comme les enfants de Goliath ou Amalécites, et qui les fait émigrer de la Syrie, soit de bon gré soit de force, est tellement insoutenable qu'elle mérite d'être rangée au nombre des fables. Une nation comme celle des Berbères, formée d'une foule de peuples et remplissant une partie considérable de la terre, n'a pas pu y être transportée d'un autre endroit, et surtout d'une région très-bornée. Depuis une longue suite de siècles avant l'islamisme, les Berbères ont été connus comme habitans du pays et des régions qui leur appartiennent de nos jours, et ils s'y distinguent encore aux marques spécifiques qui les ont toujours fait reconnaître. Mais pourquoi nous arrêter aux sornettes que l'on a ainsi débitées au sujet des origines berbères? il nous faudrait donc subir la nécessité d'en faire autant, chaque fois que nous aurions à traiter d'une race ou d'un peuple quelconque, soit arabe, soit étranger? L'on a dit qu'Ifricos transporta les Berbères [en Afrique]; puis ils racontent qu'il les trouva déjà dans ce pays, et qu'étant étonné de leur nombre et de leur langage barbare, il s'écria : Quelle berbera est la vôtre? comment aura-t-il dono pu les y transporter? Si l'on suppose qu'ils y avaient déjà été transportés par Abraha-Dou-'l-Menar, ainsi que quelques uns l'on dit, on peut à celà répondre qu'il n'y avait pas entre ce prince et Ifrikos assez de générations pour que ce peuple eut pu se multiplier au point [d'exciter l'étonnement de celui-ci. ]

Quant à l'hypothèse de ceux qui les prennent pour des Himyerites de la famille de Noman, ou pour des Modérites de la famille de Caïs-Ibn-Ghailan, elle est insoutenable, et a déjà été réduite à néant par le chef des généalogistes et des savants, Abou-Mohammed-Ibn-Hazm, qui a consigné dans son Djemhera l'observation suivante : « Quelques peuplades berbères veulent faire >> accroire qu'elles viennent du Yémen et qu'elles descendent de Himyer; d'autres se disent descendues de Berr, fils de Caïs; >> mais la fausseté de ces prétentions est hors de doute: le fait de >> Caïs ayant eu un fils nommé Berr, est absolument inconnu à

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