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il s'adressa aux autres branches de la tribu de Soleim. S'étant ainsi assuré leur protection, il rassembla autour de lui une foule de bédouins et leur persuada d'adopter ses pratiques religieuses et de former une communauté de marabouts. Les membres de cette société reçurent le nom de Djennada 1.

Ayant alors commencé sa carrière de réformateur, il ordonna la cessation des brigandages qui désolaient les environs de Cairouan et les régions situées entre cette ville et la mer; il se mit à poursuivre tous ceux qui osaient commettre des crimes sur les grandes routes; partout où il les rencontra il les mit à mort: il fit la guerre à leurs chefs, envahit leurs camps, confisqua leurs biens, tua une partie des malfaiteurs et en dissipa le reste. Parvenu à se faire respecter par les Hisn, il rétablit la surété des routes dans toute la partie de l'Ifrîkïa qui s'étend depuis Cairouan et Tunis jusqu'au Djerîd. La haute renommée qu'il s'acquit par le succès de ses efforts excita la jalousie de sa propre tribu, les Beni-Mohelhel-Ibn-Cacem, qui lui vouèrent une haine mortelle et résolurent sa perte. Pour accomplir leur projet ils envoyèrent un exposé peu exact de sa conduite à l'émir AbouHafs, sultan de Tunis, lui représentant que les entreprises de cet homme portaient atteinte non-seulement aux droits de la communauté musulmane, mais aussi à ceux de l'état. Comme ce prince leur laissa entrevoir l'intention de fermer les yeux sur leur conduite dans cette affaire et de ne s'y méler en aucune façon, ils se retirèrent avec la ferme intention de tuer le réformateur. L'ayant donc invité à une conférence, afin de régler leurs intérêts respectifs à la manière arabe, ils s'entretinrent avec lui pendant quelque temps au centre du camp et le menèrent ensuite à part sous prétexte de lui parler en secret, Mohammed-Ibn-Mohelhel, surnommé Bou-Adebetein profita de ce moment pour lui porter

2

1 Dans les meilleurs manuscrits ce mot est écrit avec un n redoublé par le techdid. Les moyens nous manquent d'en fixer la véritable signification, mais il paraît être l'équivalent de djond (défenseurs, milices).

2 C'est-à-dire l'homme aux deux adeba. L'adeba d'un turban est le bout du chal qu'on laisse pendre sur l'épaule.

un coup de lance dans le dos. Le réformateur tomba sur les mains et la figure, et ne se releva plus.

A la nouvelle de ce forfait, la famille d'Abou-'l-Leil cria vengeance contre les meurtriers, de sorte que la division se mit parmi les Kaoub, tribu qui, jusqu'alors, était toujours restée unie. Rafê, fils du réformateur, succéda à l'autorité de son père et poursuivit avec ardeur le même but que lui; mais en l'an 706 (1306-7) il succomba au milieu de sa carrière, ayant été tué par un chef appartenant à la tribu des Hisn.

Les Beni-Abi-'l-Leil cherchaient encore à venger la mort de Cacem-Ibn-Mera, quand Hamza et Moulahem, les fils d'OmarIbn-Abi-'l - Leil, parvinrent au commandement de toutes les branches des Kaoub. Alors, un certain jour, pendant que les Mohelhel se trouvaient à une assemblée tenue par ces deux chefs, dans l'intérieur du Désert, les Beni-Abi-'l-Leil se jetèrent sur eux et les tuèrent tous. Le seul d'entre les enfants de Mohelhel qui n'avait pas assisté à cette réunion fut Taleb, et son absence lui sauva la vie.

Dès ce moment une guerre des plus acharnées a régné entre les deux familles; toutes les branches de la tribu de Soleim ont pris part à leur querelle et se sont rangées, les unes du côté des Beni-Abi-'l-Leil, et les autres, du côté des Beni-Mohelhel. Pendant ce temps les rapports des deux partis avec le gouvernement hafside n'ont produit qu'une suite de révoltes et de soumissions.

Le commandement des Beni-Mohelhel appartient aujourd'hui à Mohammed, fils de Taleb-Ibn-Mohelhel, et à son frère Yahya.

La tribu de Hisn est une branche de celle d'Allac; son aïeul, Hisn, étant frère de Yahya-Ibn-Allac. De même que les Allac, les, Hisn se partagent en deux branches, dont l'une s'appelle les Beni-Ali et l'autre les Hakim. Quelques-uns disent que Hakîm n'était pas fils de Hisn, mais, qu'ayant été élevé dans la famille de ce chef, il vint à être regardé comme tel.

Les Hakim se subdivisent en plusieurs familles : les Beni-Tarif, appelés aussi les Oulad-Djaber, les Cheraêba, les Nâîr, les Djouîn, descendants de Micdam-Ibn-Tarîf, les Zîad-Ibn-Tarîf et les Quail-Ibn-Hakim, issus de Troud fils de Hakîm. Quelques

personnes considèrent les Trîd [ou Troud] comme membres, non pas de la grande tribu de Soleim, mais de celle de Sinbès, branche des Hilal-Ibn-Amer; elles ajoutent que ce fut à une famille trîdienne qu'appartenait Zeid-el-Addjadj, capitaine hilalien très-célèbre. Mais la vérité est que les Trîd, ainsi que les Adouan, ont pour ancêtre Fehm - Ibn-Amr - Ibn - Caïs-IbnGhaïlan; du moins, on les compte parmi les descendants de Fehm.

mais

Les Troud, avaient été d'abord confédérés des Delladj, dans la suite, ils les quittèrent pour s'allier avec les Molâeb. Les Al-Hocein, les Noual, les Mâcad et les Djomeiat descendent aussi de Hakim, mais j'en ignore la filiation.

Les Beni-Nomeir, autre branche des Hakîm, fournissent deux ramifications les Moldeb et les Ahmed. Ceux-ci se composent des Beni-Mohammed et des El-Batîn. Au nombre des Molâeb on compte les Heikel-Ibn-Molâeb, appelés aussi les Aulad-Zemam, les Forïat, les Aulad-Meiyas et les Aulad-Caïd. Ces derniers forment trois familles : les Sarh, les Medafeâ et les Aulad-YacoubIbn-Abd-Allah-Ibn-Chokr-Ibn-Harcous-Ibn-Caïd.

Le droit de commander à toutes les familles hakîmiennes appartient aux Aulad-Yacoub.

Les Hakîm occupent la région située entre Souça et El-Edjem. Leurs nomades s'attachent, en qualité de confédérés, aux Kaoub, suivant tantôt les Aulad-Abi-'l-Leil et tantôt les Aulad-Mohelhel, rivaux de ceux-ci. La tribu entière reconnaissait pour chefs les descendants de Yacoub-Ibn-el-Cos, et parmi ses cheikhs elle comptait Yacoub-Ibn-Abd-es-Selam-Ibn-Yacoub. Celui-ci se révolta, sous le règne d'El-Libyani, et étant allé trouver le sultan Abou-Yahya, souverain de Bougie, de Constantine et de la frontière occidentale de l'Ifrikïa, il rentra avec lui dans le royaume de Tunis. Quand ce prince eut pris possession de la capitale, il donna à Yacoub le commandement de la tribu, et lui accorda la préséance sur les autres chefs arabes. Ces honneurs excitèrent la jalousie des Kaoub, et Hamza [chef de

Variante: Fernat.

cette famille] le fit assassiner dans un conseil de tribu par un individu nommé Mohammed-Ibn-Hamed-Ibn - Yezîd, membre d'une des familles connues sous le nom des Achach 1. Yacoub eut pour successeur son cousin Mohammed-Ibn-Meskîn-Ibn-AmerIbn-Yacoub-Ibn-el-Cos, et celui-ci eut tantôt pour lieutenant, et tantôt pour rival, l'un ou l'autre de ses nombreux parents. Soheim-Ibn-Soleiman-Ibn-Yacoub, un de ses coadjuteurs, assista à la bataille de Tarifa avec le sultan Abou l'Hacen et s'y distingua par sa bravoure. La famille d'Abd-es-Selam produisit Abou'lHaul et Abou'l-Cacem, tous deux fils de Yacoub-Ibn-Abd-es-Selam. Le premier demeura fidèle au sultan Abou'l'Hacen que les Beni Soleim venaient d'accabler à Cairouan, et il parvint, avec le concours des Mohelhel, à le faire sortir de cette ville et à le conduire à Souça. Un autre membre de la même famille était Bou-Zeid-Ibn-Omar-Ibn-Yacoub lequel eut un fils qui porta le nom de Khalifa.

Pendant le règne du sultan Abou-Yahya, Mohammed-IbnMeskîn continua à gouverner les Hakîm et à servir ce prince avec une fidélité à toute épreuve. Après sa mort, le commandement passa à son neveu, Khalifa-Ibn-Abd-Allah-Ibn-Meskin, l'un des cheikhs que le sultan Abou-'l-Hacen avait fait arrêter à Tunis, quelque temps avant l'affaire de Cairouan. Ce monarque était encore bloqué dans cette dernière ville quand il accorda la liberté à son prisonnier, dont il se concilia l'amitié par cet acte de clémence bien entendue.

A la suite du désastre de Cairouan, les Arabes étendirent leur domination partout, et comme la famille Meskin s'était mise en possession de Souça, le sultan concéda cette ville à Khalifa. A la mort de ce chef, le commandement des Hakim passa entre les mains de son cousin, Amer-Ibn-Mohammed-Ibn-Meskin. En l'an 755 (1354), Amer fut assassiné dans le Djerîd par un kaoubien nommé Mohammed-Ibn-Tebîna-Ibn-Hamed, qui croyait venger ainsi la mort [de son père], tué par Yacoub-Ibn-Abd-es-Selam. Dès lors la désunion se mit dans la tribu, et le commandement

1 Voyez ci-devant, page 143,

en est maintenant partagé entre deux chefs dont l'un s'appelle Abou-Sânouna-Ahmed-Ibn-Mohammed-Ibn-Abd-Allah-Ibn-Mes

kin, et l'autre Abd-Allah-Ibn-Mohammed-Ibn-Yacoub-Ibn-Abdes-Selam - Ibn - Yacoub. Celui-ci est neveu d'Abou-'l-Haul, de même que son rival est neveu de Khalifa.

Le sultan Abou-'l- Abbas, s'étant rendu maître de Tunis, enleva la ville de Souça à la famille de Yacoub et s'attira ainsi l'inimitié d'Ahmed [-Abou-Sânouna]. Ce chef fit aussitôt une alliance avec Soula-Ibn-Khaled-Ibn-Hamza, de la famille d'Abou-'l-Leil, et s'étant précipité avec lui dans la révolte, il commit les excès les plus graves. De nos jours ils se tiennent dans le Désert, ayant été obligés de fuir le territoire de l'empire.

Quant à l'autre chef hakîmien, Abd-Allah-Ibn-Mohammed, surnommé Er-Rouwaï, il s'attacha au parti du sultan et lui procura l'appui des Aulad-Mohelhel. Il exerce, jusqu'à ce jour, une grande influence sur les populations placées sous ses ordres.

Abou-Sânouna est rentré, depuis, au service du sultan, et il partage, maintenant, avec Abd-Allah-Ibn-Mohammed, le commandement des Hakîm.

Les Beni-Ali, tribu-sœur de celle de Hakim, se composent de plusieurs familles, savoir: les Aulad-Merâi, les Aulad-Soura, (toutes deux descendues d'Aun-Ibn-Ahmed-Ibn-Ali-Ibn-Hisn), les Aulad-Nemi, les Bedrana, les Aulad-Omm-Ahmed, les Hadra, les Redjlan, appelés aussi les Macàd, les Djomeiat, les Homr, les Meçanïa, les Al-Hocein et les Hedjri. L'on dit cependant que les Hedjri n'appartiennent pas à la tribu de Soleim mais à celle de Kinda, et qu'ayant fait alliance avec les Soleimides, ils s'attribuèrent la même origine que ce peuple.

Le droit de commander aux Beni-Ali est exercé par la famille Soura. Le chef actuel se nomme Abou-l-Leil-Ibn-Ahmed-IbnSalem-Ibn-Ocba-Ibn-Chibl-Ibn-Soura-Ibn-Merâi-Ibn-Hacen-IbnAun. Le commandement en second appartient à la famille Merâi [El-Merâïa], parente de celle de Soura. Les Merâïa sont fils de Merâi-Ibn-Hacen-Ibn-Auu. Les Beni-Ali occupent le pays situé entre El-Edjem et El-Mobarka, localité des environs de Cabes. La portion de cette tribu qui s'adonne à la vie nomade s'est con

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